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exactement d'après sa longueur et sa direction le chemin qu'ils ont-fait, à déterminer la distance où ils sont des divers points des côtes, et la direction qu'ils doivent tenir pour y arriver ou pour les éviter. Il faut bien observer que, par la direction qu'il faut suivre pour aller d'un point à un autre sur la terre, les marins n'entendent point celle qui donne le plus court chemin, et qui, sur une sphère, est un cercle; car l'instrument dont ils se servent pour connaître leur direction ou la boussole, ne peut leur indiquer ce plus court chemin qui coupe les divers méri¬ diens sous des angles inégaux.

Mercator et Edward Wright ont imaginé la projection des cartes réduites, qui satisfait parfaitement aux conditions ci-dessus, Les méridiens y sont des lignes droites parallèles, équidistantes et coupées à angles droits par les parallèles à l'équateur; mais les intervalles qui séparent ceux-ci, croissent à mesure qu'on s'avance vers les pôles, dans un rapport précisément inverse de celui qui suit sur le globe la diminution des degrés de longitude. Il résulte de là que les distances en longitude, mesurées sur chaque parallèle, ont avec les distances en latitude correspondantes, la même relation que sur le globe.

Le tracé de ces cartes n'a d'autre difficulté que la construction de l'échelle des latitudes pour laquelle on a depuis long-temps des tables calculées avec beaucoup de soin, et même en ayant égard à l'aplatissement de la terre.

Il est évident qu'on ne doit point chercher sur les cartes réduites les rapports d'étendue des pays, ni l'exactitude de leur configuration; car cette projection augmente considérablement les régions qui sont placées vers les pôles, quoique d'ailleurs elle partage avec la projection stéréographique, la propriété de conserver aux portions infiniment petites du globe leur similitude: mais ces défauts n'ont aucun inconvénient pour les cartes réduites, qu'on ne doit regarder que comme des instrumens destinés à résoudre graphiquement les principales questions du pilotage; ce qu'elles font avec la plus grande exactitude et la plus grande facilité.

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19. Je viens de parcourir les différentes espèces de cartes d'en montrer les propriétés et les défauts: mais il faut bien prendre garde que le mot défaut n'est relatif qu'à la manière or~ dinaire d'envisager les cartes; car en les considérant, avec Euler et Lagrange (1), comme une transformation des coordonnées, il est toujours mathématiquement possible de déterminer sur une carte toutes les relations géographiques qu'on peut désirer de connaître ; seulement comme nous l'avons déjà vu, certaines relations s'obtiennent plus facilement que les autres.

En effet la position des différens points de la sphère étant déterminée par la latitude et la longitude, comme le sont par deux coordonnées les différens points d'un plan, si l'on prend, ́sur la carte, des lignes assujetties à une loi mathématique pour représenter ces coordonnées, on établira entre les points de la carte et ceux de la sphère une relation telle, qu'on pourra assigner sur la carte l'équation des lignes qui correspondent aux cercles, ou même aux courbes quelconques tracées sur la sphère, et comparer les espaces relatifs aux unes et aux autres. Réciproquement on peut demander quelle doit être la nature des coordonnées de la carte, c'est-à-dire, des lignes qui représentent les méridiens et les parallèles, pour que les parties de cette carte aient telle ou telle relation avec celle de la sphère. En appliquant à cette dernière question l'analyse la plus délicate, Euler et la Grange ont déterminé à priori la construction des diverses espèces de carte d'après les propriétés dont elles jouissent.

Voilà tout ce qu'on peut dire ici de cette maniere d'envisager les cartes. Dans cette circonstance comme dans presque toutes les autres, le besoin a conduit par des voies particulières et indirectes aux résultats immédiatement utiles, long-temps avant la découverte de la théorie générale.

Après avoir esquissé les moyens généraux de représenter les régions du globe, il ne resterait plus pour construire une carte, qu'à placer dans leurs situations respectives les divers points de

(1) Mémoire d'Euler, t. I, partie des Acta Academiæ Petropolitanæ. Mémoire de la Grange, Académie de Berlin, année 1779.

ces régions; ce qui n'aurait aucune difficulté si on avait leurs longitudes et leurs latitudes : mais il n'en est pas ainsi, et pour suppléer aux observations astronomiques qui manquent le plus souvent, les géographes ont cherché dans les descriptions faites par les historiens et les voyageurs, des matériaux pour remplir leur canevas. La discussion et la combinaison de ces matériaux forment la géographie critique : c'est dans les mémoires des De Lisle, des D'Anville et des Buache, qu'elle doit s'étudier.

LACROIX,

Membre de l'Institut.

HISTOIRE.

MÉMOIRE

SUR L'INSURRECTION ET LA GUERRE DES BATAVES CONTRE LES ROMAINS SOUS LES RÈGNES DE VITELLIUS ET DE VESPASIEN.

Long-temps avant la fondation de Rome, les Gaulois, déjà formés en corps de nation, s'étaient rendus redoutables à leurs voisins. Des colonies nombreuses sorties de leur sein, par des causes qui nous sont inconnues, s'étaient établies en Espagne, sous le nom de Celtiberiens, de Galleciens et de Celtes; dans la grande Bretagne sous le nom de Dumnons, d'Atrebates et de Cantiens; dans l'Irlande sous celui de Belges. En Germanie les Gaulois Helvétiens occupaient les contrées qui forment aujourd'hui le royaume de Wurtemberg et le grand duché de Baden. En Italie, l'empire des Ombriens, détruit plus tard par les Etrusques, fut fondé par les Gaulois. Les dernier terme de la grandeur et des conquêtes de l'antique empire des Gaules, fut la grande émigration qui eut lieu sous le règne d'Ambigat, et sous la conduite de ses neveux Sigovese et Bellovese, environ 600 ans avant l'ère chrétienne.

Le premier se porta vers la Germanie, d'où ses lieutenans ou ses successeurs s'étendirent en Illyrie, en Thrace, et jusques dans l'Asie mineure, et y formèrent des établissemens, qui durèrent long-temps après eux. Tels furent ceux des Boiens en Bohème, et des Scordisques aux bords de la Save et du

Danube; le royaume de Tyle près de Byzance et celui des Galates ou Gallogrecs en Phrygie.

Bellovese passa en Italie, et y détruisit la domination des Etrusques, qu'il réduisit à la seule province qui conserva le nom d'Etruric, Les peuplades qu'il conduisait s'établirent dans ce pays, et y occupèrent les contrées appelées depuis Gaule Cisalpine.

Depuis lors, soit que cette émigration trop forte eut affaibli l'empire des Gaules, soit que les dissentions intestines qui pa raissent avoir suivi le règne d'Ambigat, eussent énervé ses for ces en les divisant, il est certain que les Gaulois, loin de faire de nouvelles conquêtes, furent eux-mêmes exposés aux invasions de leurs voisins. Du côté des Pyrénées, les Vascons de l'Ibérie, occupèrent une partie de l'Aquitaine. Les Marcomans, les Sé→ dusiens et les Harudes, chassèrent les Boiens de la Bohème et refoulerent les Helvétiens à la gauche du Rhin. Sept autres peuples germaniques, les Triboces, les Nemetes, les Vangions; les Caracates, les Treviriens, les Eburons, et les Bataves, passèrent ce fleuve, et s'établirent à une plus ou moins grande profondeur, sur la rive gauloise. A-peu-près vers le même temps la domination des Gaulois cessait dans le nord de l'Italie. Peu après les Romains passèrent eux-mêmes les Alpes et envahirent la partie méridionale de la Celtique. Enfin César, autant par ses intrigues que favorisaient les jalousies intestines, nées du système fédératif qui régissait les Gaules, que par la force des armes, fit la conquête de ce beau pays et le soumit à l'empire romain.

Dans cette lutte qui dura huit ans, et où les Belges en général montrèrent tant de courage et de constance, les Bataves, parmi eux, furent les seuls qui s'attachèrent au parti de César et lui fournirent des troupes. Leur cavalerie figura dans toutes les campagnes, au nombre de ces redoutables escadrons Ger mains, qui firent tant de mal aux Gaulois. Ces services signalés resserrèrent l'alliance qu'ils avaient formée avec les Romains, et leur méritèrent les immunités dont ils jouirent par la suite.

Les Bataves, ainsi que nous l'avons vu plus haut, étaient

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