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Traités de la Grande-Bretagne reconnaissant le principe des vaisseaux libres et des marchandises libres.

chargé de marchandises ennemies, fut déclaré de bonne prise avec son chargement, et que cette règle fut constamment exécutée depuis par la France et par l'Espagne contre les autres nations '.

Les traités les plus importants par lesquels le principe de vaisseaux libres, marchandises libres, fut reconnu par l'Angleterre, avant la paix d'Utrecht, furent les suivants : le traité entre la république anglaise et le Portugal, de 1654, art. 23; celui entre la France et l'Angleterre, de 1677, art. 8; et les traités entre l'Angleterre et la Hollande, de 1674 et de 1688. Le traité de 1667, entre l'Angleterre et l'Espagne, qu'on a supposé quelquefois renfermer la même concession, concerne seulement le droit général des neutres de trafiquer avec l'ennemi, droit qui est maintenant considéré comme incontestable, quoique souvent mis en question pendant les guerres maritimes du dix-septième siècle 2.

Les secours accordés par Charles Ier à la maison de Bragance, lors de la première révolte du Portugal contre Philippe II en 1640, furent continués par Cromwell sous la république anglaise, jusqu'à ce que fut consolidée graduellement cette alliance intime entre l'Angleterre et le Portugal qui a subsisté jusqu'à ce jour. En 1654, fut conclu entre les deux pays un traité de navigation et de commerce, par lequel les plus grands priviléges furent concédés aux négociants anglais résidant et trafiquant en Portugal. Par ce même traité, le principe de vaisseaux libres, marchandises libres, fut adopté entre les parties contractantes, et associé avec la maxime corrélative vaisseaux ennemis, marchandises ennemies. Cette stipulation continua à former le droit conventionnel entre les deux nations, jusqu'à la révision du traité de 1810, qui l'a omis pour la première fois, et les rela

1 VALIN, Traité des prises, chap. 5, § 5, No 4.

2 JENKINSON (Lord Liverpool), Discourse on the conduct of Great Britain in respect to neutral nations, p. 48, Ed. 1801.

tions sous ce rapport entre les deux nations, reposent actuellement sur la base du droit primitif 1.

En 1667, Charles II d'Angleterre étant secrètement allié avec Louis XIV, pendant que ce dernier monarque était ouvertement en guerre avec la Hollande, un traité de navigation et de commerce fut conclu à Saint-Germain entre la France et l'Angleterre, par lequel les deux maximes de vaisseaux libres, marchandises libres, et de vaisseaux ennemis, marchandises ennemies, furent adoptées par les deux parties contractantes. Le motif de cette stipulation de la part de l'Angleterre était de garantir son commerce avec la Hollande et d'autres pays des déprédations de la part des armateurs français, et l'assentiment de la France à cette déviation des principes ordinaires de son code des prises fut assuré par l'admission des fabriques françaises en Angleterre ".

Traités

de la Hollande

puissances.

Pendant la période qui s'est écoulée entre la paix de Westphalie, par laquelle l'indépendance des Provinces-Unies des avec d'autres Pays-Bas fut définitivement reconnue par l'Espagne, et celle d'Utrecht, par laquelle cette indépendance fut garantie contre la France, la politique extérieure de cette république flottait entre deux grands objets, le maintien de l'équilibre de l'Europe, comme la seule sécurité de son existence nationale, et celui de protéger les intérêts de son commerce, de ses colonies, de sa navigation, et de ses pêcheries, comme les principales bases de ses richesses, de sa force et de sa prospérité. Les intérêts de la Hollande, comme puissance belligérante ou comme puissance neutre, l'engageaient à désirer le ferme établissement du principe de libres vaisseaux, libres marchandises comme la loi générale par laquelle elle gagnerait, tant que les autres puissances maritimes seraient en guerre et que la république resterait neutre, plus qu'elle ne perdrait quand cet état de choses serait changé. L'Angleterre concéda pour la

p. 45.

1 SCHOELL, Histoire abrégée des traités de paix, vol. X,
2 FLASSAN, Histoire de la diplomatie française, vol. III, p. 423.

première fois ce principe par le traité de commerce conclu à La Haye en 1668, comme prix d'une alliance entre les deux pays contre la France 1. Cette concession fut renouvelée dans le traité de commerce conclu en 1674, et continua à former la règle à observer entre les deux pays jusqu'en 1756, quand la guerre éclata entre la France et l'Angleterre; mais la Hollande ayant refusé de remplir les stipulations des traités d'alliance défensive et de garantie, entre la république et la couronne britannique, l'Angleterre refusa de reconnaître plus longtemps le principe de libre navigation envers la Hollande ?.

L'acte de navigation adopté par le parlement d'Angleterre, sous la république en 1651, et renouvelé pendant le règne de Charles II, était rédigé dans le but d'assurer à la navigation anglaise une portion du commerce de fret, qui avait été auparavant monopolisé par les Hollandais. Le grand ministre, Jean de Witt, cherchait à défendre le commerce et la navigation de son pays, contre le coup qui lui fut porté par cette mesure, en conseillant à la France de se relâcher des règles sévères de son code des prises, et d'adopter sa maxime favorite de vaisseaux libres, marchandises libres. Les États-Généraux avaient déjà obtenu en 1646 une suspension temporaire des anciennes ordonnances françaises (d'après lesquelles les vaisseaux neutres chargés de marchandises ennemies, étaient assujettis à la confiscation), avec une reconnaissance du principe de vaisseaux libres, marchandises libres. Cette dernière stipulation n'ayant pas été dûment observée par la France, donna lieu à des remontrances de la part des Hollandais 3. Le

Le ministre hollandais de Witt a absolument refusé de signer le traité d'alliance défensive, à moins qu'il ne fût précédé, de la part du chevalier Guillaume Temple, le négociateur anglais, d'une promesse formelle de conclure un traité de commerce avec cette concession. (Lettres du chevalier Temple à lord Arlington, du 24 janvier et du 12 février 1668, TEMPLE'S Works, vol. I, p. 347.) 2 JENKINSON, Discourse, etc., pp. 67, 73, éd. 1804.

3 JEAN DE WITT, Lettres et négociations, vol. I, p. 108.

ministre de Hollande à Paris, dans sa correspondance avec de Witt, concernant cette affaire, dit qu'il avait obtenu en 1658 «<le rappel de la prétendue loi française, que la robe d'ennemi confisque celle d'ami; de manière que si dans la suite on trouve dans un vaisseau libre hollandais des effets appartenant à un ennemi de la France, ces effets seuls seront relâchés; parce qu'il est impossible d'obtenir le 24 me article de mes instructions, où il est dit qu'un vaisseau libre doit rendre la cargaison libre, même si elle appartient à un ennemi '.» Cette concession fut enfin obtenue par le traité de commerce entre la France et la Hollande, signé en même temps que la paix de Nimègue en 1678, qui établit définitivement, entre les deux puissances la règle de vaisseaux libres, marchandises libres, et de vaisseaux nnemis, marchandises ennemies 2.

et

En 1655, un traité de navigation et de commerce a été conclu entre la France et les villes anséatiques, d'après lequel les anciens priviléges accordés à la Hanse Teutonique furent renouvelés et confirmés. Le troisième article de ce traité déclarait que la robe de l'ennemi ne confisquait pas la robe de l'ami; que les effets appartenant aux habitants des villes anséatiques, trouvés à bord des vaisseaux d'un ennemi, seront libres, aussi bien que les effets ennemis trouvés à bord d'un vaisseau anséatique, la contrebande de guerre exceptée, ou bien dans le cas du jet des papiers à la mer, ou de la résistance à la visite. Cette concession fut révoquée, peu de temps après la paix d'Utrecht, par le traité de 1716, entre la France et les villes anséatiques, qui permit de nouveau la saisie des effets ennemis dans des vaisseaux neutres, en exemptant de la confiscation les vaisseaux seuls 4.

1

DUMONT, Corps diplomatique, vol. VI, p. I, p. 342. ROBINSON, Collectanea maritima, p. 121, note.

2

3

FLASSAN, Histoire de la diplomatie françuise, vol. 3, p. 451.

IBID., Ibid., vol. 3, p. 194.

Traités

de la France.

4

DUMONT, Corps diplomatique, Vol. VIII, P. I, p. 478.

Traités

des puissances du Nord

entre elles.

Traités

de commerce

Les deux maximes de vaisseaux libres, marchandises libres. et de vaisseaux ennemis, marchandises ennemies, furent reconnues par le traité de commerce entre la France et le Danemark de 1663, art. 27, et par le traité d'alliance entre la Suède de 1672, art. 19 1.

Par le traité de 1670, art. 20, entre la Suède et le Danemark, on adopta l'ancienne règle du Consulat de la mer, d'après laquelle les effets neutres, chargés sur un vaisseau ennemi, sont déclarés libres, et les effets ennemis chargés sur un vaisseau ennemi sont assujettis à la saisie et à la confiscation 2. Les mêmes maximes furent adoptées par les traités entre l'Angleterre et la Suède, de 1664, 1666 et 1670; et entre l'Angleterre et le Danemark, de 1670, art. 20 3.

Tel fut l'état du droit conventionnel entre les quatre grand'Utrecht. 1713. des puissances maritimes, la France, l'Espagne, l'Angleterre et la Hollande, et entre ces puissances et les états de la Baltique, quand les traités d'Utrecht furent conclus entre les premières, et les puissances continentales de l'Europe. Le principal objet

1 FLASSAN, Histoire de la diplomatie française, vol. III, p. 395. 2 DUMONT, Corps diplomatique, vol. VII, p. I, p. 132.

3 MARTENS, Manuel diplomatique sur le dernier état de la controverse des droits des neutres sur mer, pp. 43, 60, 62.

Les puissances de la Baltique ont adopté entre elles pour la première fois la règle de vaisseaux libres, marchandises libres, par le traité de la neutralité armée de 1780. L'ordonnance danoise de 1659 prescrit une forme de certificats pour les marchandises chargées sur les vaisseaux appartenant aux sujets danois, portant que les effets appartiennent aussi à des sujets danois, précaution qui serait tout-à-fait inutile si le vaisseau devait rendre la cargaison libre. Cette ordonnance adopte aussi la règle du code des prises français de vaisseaux ennemis, marchandises ennemies, et en même temps déclare confiscables les vaisseaux neutres chargés de marchandises ennemies. (HEINECCIUS, De navib. ob vect. merc. vetit. comm., cap. II, § VIII.) Par l'ordonnance suédoise de 1746, les effets de l'ennemi sont confisqués, n'importe sur quelque vaisseau qu'on les trouve, aussi bien que des effets neutres sur des vaisseaux ennemis. (Robinson, Collectanea maritima, p. 474.)

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