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l'emporta; Robespierre, l'assassin de la France et des Antilles, dans l'aveuglement de sa popularité prétendue, je me trompe, corrompu ainsi que ses collègues par l'or des blancs, que les mulâtres et les nègres avaient teint du sang de leurs pères et de leurs maîtres, pour rendre cette offrande plus méritoire aux yeux de ces incendiaires, Robespierre, dis-je, sans examiner quelles pourraient être les suites d'une mesure trop précipitée, s'écria en vrai forcené: « Périsse à jamais les colonies, plutôt que de changer un de nos principes!»

Fatale précipitation, qui causa la ruine de cette brillante colonie, l'objet de la jalousie éternelle' de l'Angleterre; qui fit couler en torrens, à la lueur des flammes dévorantes, le sang de milliers de blancs d'Europe et de St.-Domingue. Celui des mulâtres et des nègres qui engendra et perpétua jusqu'à ce jour, dans cette île, la rage insatiable de la destruction, sans laisser entrevoir un terme aux souffrances mêmes de ceux en faveur desquels cette folle détermination avait eu lieu. Cette paix sans laquelle les colonies ne sauraient exister, aurait cependant pu être préservée, s'il avait été permis à l'assemblée générale de St.-Marc, de corriger les abus du gouvernement militaire, judiciaire et fiscal, et de mettre à exécution la constitution qu'elle avait décrétée, sur la base d'une monarchie limitée. Le républicanisme de la mère patrie l'emporta sur toute autre considération.

Le mulâtre Rigaud, qui correspondait alors

avec l'énergumène Robespierre et les amis irréfléchis des noirs, s'était mis à la tête des mulâtres et des nègres de la partie du sud, et après le départ des membres de l'assemblée coloniale, il avait déclaré ouvertement: » Que la tranquillité >> qui avait succédé à leur départ, n'était qu'un » calme trompeur qui devait bientôt s'évanouir, >> et qu'il n'y aurait jamais de paix à St.-Domingue, >> tant qu'il y existerait un blanc. >>

Chaque chef mulâtre ou nègre, adopta, dès ce moment, cette opinion avec avidité : les blancs tombèrent de toutes parts sous le poison, le glaive et le poignard; ceux qui échappèrent à cette proscription barbare, furent, ou faits esclaves, ou employés à assouvir la brutalité de ces tigres. A la Petite Ance, les habitans du Cap délivrèrent plus de cent femmes et demoiselles blanches qui étaient toutes nues, les pieds aux fers et dans une posture à ne pouvoir opposer aucune résistance à la lascivité lubrique de ces monstres qui se jetaient dessus par milliers. Dessalines, par la suite, publia un décret qui défendit à tout homme de couleur d'avoir une femme blanche pour maîtresse. Christophe a poussé la haine plus loin, il les a rendues esclaves.

La métropole, à diverses reprises, envoya des troupes dans cette île malheureuse; elles n'y étaient pas plutôt débarquées, qu'elles se divisaient d'opinion; un régiment accusait l'autre d'être ennemi de la colonie et traître à la patrie.

Pour comble de malheur, Polverel et Santhonax arrivèrent à St.-Domingue, avec le projet de tenir ce pays sous leur autorité arbitraire. Polverel et Santhonax!!! à ces noms, le sang du malheureux Colon bouillonne, et malgré lui frémit d'horreur.

Les premiers actes de ces sans-culottes turbulens, furent de renvoyer M. Ailhaud, leur collègue, de s'opposer ensuite au gouverneur Galbaud, officier d'artillerie, que la France avait envoyé pour mettre St.-Domingue sur le meilleur pied possible de défense, parce que la guerre venait d'être déclarée contre l'Angleterre.

Pour s'opposer plus sûrement aux ordres de la métropole, que le gouverneur Galbaud voulait faire exécutér, Polverel et Santhonax appelèrent à leur secours ces mêmes nègres révoltés qu'ils venaient de réduire. Ils leur offrirent un pardon général, une liberté parfaite à l'avenir, et le pillage de la ville du Cap.

Jean François et Biassou rejettèrent leurs offres; mais le 21 juin 1793, un chef noir, nommé Macayet, accompagné de 4000 esclaves révoltés, entra dans la ville du Cap, pilla et massacra tous les habitans blancs qui eurent le malheur de tomber sous ses mains. Ce affreux ne finit que carnage dans la soirée du 23. Les nègres ensuite mirent le feu aux maisons, et plus de la moitié de cette superbe ville fut dévorée par les flammes.

Après la destruction de cette ville opulente, une partie de ses habitans et de ceux des environs qui

s'étaient réfugiés à bord des bâtimens, à la faveur de l'obscurité de la nuit, s'émigrèrent pour les Etat-Unis, avec le gouverneur Galbaud. Je ne dirai rien du traitement peu généreux qu'ils éprouvèrent dans ce pays; il fut tel qu'on pouvait l'espérer des descendans des Anglais, en un mot, de gens qui avait fourni en contrebande, de la poudre et des armes aux nègres.

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La présence des troupes de ligne qui gardaient les commissaires, rétablit enfin la tranquillité; elle empêcha les noirs d'assouvir toute leur rage sur les maisons, comme les Anglais sous les ordres de Sir François Drake, l'avaient fait le 1er janvier 1586, sur Santo Domingo. Drake après avoir eu en sa possession, pendant un mois, la capitale de la partie espagnole de Saint-Domingue, ordonna à 200 matelots, soutenus par 200 soldats, d'aller tous les matins, dès la pointe du jour, jusqu'à neuf heures, mettre le feu aux maisons qui étaient aux extrémités de cette ville; les Anglais eurent une peine infinie à les brûler, parce qu'elles étaient toutes en pierres de taille et à plusieurs étages. Après avoir brûlé à peu près le tiers de la ville, ils se trouvèrent si fatigués par la chaleur du feu, et ensuite par celle du climat, qu'ils acceptèrent 25,000 ducats (162,600 livres), pour la rançon du reste de la ville.

Cette mesure les a rendus dès ce moment odieux aux Espagnols, et l'on peut avancer hardiment que la conflagration de la jolie petite ville Esopus,

ouvrage de la haine méprisable d'un de leurs généraux, leur a fait plus de tort dans leur contestation avec les Etats-Unis, qu'aucun des actes du parlement d'Angleterre qui traitait ce peuple de rebelle.

Après le massacre inhumain des habitans de la ville du Cap, Polverel et Santhonax publièrent inconsidéremment la liberté des nègres, avant d'avoir disposé les esprits à un changement qui devait être dicté que par la prudence. Ils persuadèrent aux Africains, leurs dignes frères adoptifs, que le seul moyen de faire prospérer l'arbre de leur existence politique future, était de l'arroser tous les jours du sang des blancs; tandis qu'un. changement semblable aurait pu s'opérer avec le tems et sans effusion de -sang. Hélas! ces mesures sages et lentes n'entraient point dans les principes de ces démagogues furieux, qui n'avaient de l'homme que la figure!...

Dès ce moment, les injustices, les violences les insurections, l'incendie, l'assassinat, furent à l'ordre du jour, et Saint-Domingue fut séparée de la mère patrie.

Le ciel lassé des forfaits de Polverel, purgea la terre de ce monstre.

Le mulâtre Montbrun, général de brigade, commandait alors au Port au Prince; fidèle aux principes de sa couleur, il arma les nègres pour assassiner les blancs de toute description, mais surtout les propriétaires de l'île. Craignant, ainsi

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