La paix dont nous jouissons par le retour de l'auguste famille des Bourbons fesant espérer que le Gouvernement pourra s'occuper sous peu du sort des Colonies, je m'emd'offrir au Public un ouvrage presse où passant du tableau succinct et historique des causes qui ont amené les révolutions et la perte de l'île de St.-Domingue, aux considérations des moyens les plus propres reprendre possession, j'ai essayé de mettre à profit les connaissances personnelles qu'un long séjour, des possessions et l'exercice de quelques emplois dans cette colonie m'ont données, pour en montrer les ressources, et proposer les améliorations dont elle est susceptible.

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à en

Mon style, comme ma conversation, porte malgré moi l'empreinte de mon caractère actuel il paraîtra sans doute sombre, et peutêtre parfois interrompu; c'est qu'à mon âge, les fortes impressions ne s'effacent plus, et que depuis plus de vingt ans, mon imagiņation n'a été frappée que par celles qui nais

sent du concours réuni de toutes les sensations pénibles et douloureuses. L'homme courageux ne tremble pas même sur le bord de sa tombe; mais le sourire de la gaîté effleure envain ses lèvres, la fibre délicate est blessée, et le cri de la vérité, en s'échappant de son cœur, décèle malgré lui le sentiment douloureux qu'il éprouve.

Si je me suis trompé dans quelques-unes de mes spéculations, je prie mes compatriotes de me juger moins sur l'insuffisance de quelques-unes de mes données, que sur mes intentions, qui n'ont eu d'autre but que celui d'être utile à mon pays et au Gouvernement paternel sous lequel il se trouve.

D. D. B.

DE SAINT-DOMINGUE,

DE SES GUERRES,

DE SES RÉVOLUTIONS, DE SES RESSOURSES,

ET

DES MOYENS A PRENDRE POUR Y RÉTABLIR LA PAIX ET L'INDUSTRIE.

ABRÉGÉ HISTORIQUE

DE LA RÉVOLUTION DE SAINT-DOMINGUE.

LES événemens récens de cette partie du nouveau monde doivent nécessairement attirer l'attention non-seulement des philosophes, mais encore celle de tous les observateurs politiques du globe entier; une colonie nombreuse de noirs et de mulâtres révoltés et armés contre la métropole d'un empire formidable, et profitant d'une guerre longue et désastreuse pour s'organiser en république aristo-monarchique, est un phénomène du dix-neuvième siècle, que l'esprit le plus accoutumé à pénétrer dans les secrets les plus occultes de la nature, aurait eu peine à prédire.

Saint-Domingue, dès ce moment, devint la

proie de toutes les factions. Les Anglais avaient à cœur de se venger sur cette île de la perte de leurs colonies d'Amérique; les royalistes, les républicains, les propriétaires blancs, les mulâtres et les esclaves noirs, avaient tous des opinions et des intérêts trop opposés pour aviser de sang froid aux moyens de concilier les esprits et de ramener la paix : les mulâtres oublièrent qu'ils tenaient des blancs l'existence et leur fortune, que leurs pères augmentaient sans cesse, tout en cherchant paisiblement à améliorer leur sort. Ces moyens parurent trop lents à ces bâtards ambitieux; le décret du mois de mars 1790, ne put les satisfaire: ils voulurent commander les blancs eux-mêmes: le mulâtre Ogé excita une révolte, et la discorde sema la rage et la vengeance dans le cœur des nègres, des mulâtres, et dans toutes les parties de cette île malheureuse.

La révolution de Saint Domingue, toute étonnante qu'elle paraisse, avait cependant été prédite par les députés de cette île, l'orsqu'ils se présentèrent à la barre de la Convention. Comme ils connaissaient mieux les mœurs, les usages et les préjugés de leur pays, ils n'hésitèrent pas à annoncer à cette assemblée, que la France perdrait in failliblement ses colonies, si elle accordait trop brusquement, sur la demande inconsidérée de la ville de Bordeaux, les privilèges de citoyens français aux gens de couleur, nés de parens libres. Malheureusement l'esprit de vertige et d'enthousiasme