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Le Gouvernement pourrait aussi encourager des compagnies de hollandais à faire l'entreprise des divers canaux, moyennant qu'il leur permettrait de faire pendant un certain laps de tems le commerce exclusif dans les différens endroits où ils auraient employé leur industrie, en fixant toute fois le prix de leurs marchandises et celui des denrées de Saint-Domingue, exempt d'une partie des droits.

Saint-Domingue n'ayant aucune place d'armes sur la côte du sud, il est donc essentiel pour surveiller l'ennemi d'y avoir un point fortifié, où les vaisseaux croiseurs trouvent, en cas de nécessité, un asile qui serve de ralliement à la milice chargée de la défense des côtes.

Un ennemi actif, malgré les difficultés qu'offre le pays, en effectuant une descente sur cette côte, se sera rendu maître des défilés et de la crète des montagnes; il aura pris de revers Léogane et le Port-au Prince avant qu'on ait pu rassembler assez de forces pour s'opposer à ses progrès. Que cette attaque soit secondée par une escadre qui bloquerait et menacerait le Port-au-Prince par mer, cette place se trouvera sans communication avec le reste des quartiers et sans espoir de secours.

Jacmel a tout ce qu'il faut pour remplir cet objet, le prolongement des terres qui forment la baye, offre à l'est et à l'ouest des positions très-propres à y construire des batteries, mêmes des forts dont le feu se croiserait.

Au centre du fond de la baye, est un mamelon parallèlograme et isolé, sur lequel sont bâtis l'église et quelques maisons. Ce point serait d'autant plus propre à recevoir une fortification régulière, qu'il peut être casematé, et que n'étant ni trop élevé, ni trop bas, il laisse peu de prise au feu de l'ennemi, tandis que le sien se combinerait sans obstacle avec celui des forts de la rade. Si à ces moyens de défense on voulait joindre un camp retranché, pour lequel le local ne manque point, cette partie de l'île serait à peu près à l'abri de toute invasion.

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Moyens de population.

Au lieu de donner des concessions de 200 carreaux de terre, qu'un homme seul ne saurait défricher, ni planter, ni entretenir, je suppose que l'on réduisit la mesure des nouvelles concessions à 20 carreaux, pour la culture desquels les bras d'une pauvre famille européenne suffirait; il en résulterait la même étendue de terre, sur laque quelle on voit aujourd'hui végéter quelques nègres, porterait et nourrirait quarante individus; et qu'il n'y a aucun doute que cette terre ne fut beaucoup mieux cultivée par dix propriétaires résidants sur les lieux, que par celui qui, à 1400 lieues de ses possessions, les abandonnent à l'intelligence d'un économe ignorant, ou à la probité d'un gérant fripon.

'Mais, diront des gens mal instruits ou de mauvaise foi, l'insalubrité du climat s'oppose à ce mode de population.

Je réponds d'abord que cette insalubrité consiste beaucoup plus dans le défaut de régime, dans les excès auxquels les Européens s'abandonnent en arrivant dans cette île, que dans le vice du climat. Je soutiens que c'est leur intempérance qui rend la température si fatale; en second lieu, que les engagés ou 36 mois qui étaient des blancs, fesaient, dans l'origine de l'établissement de SaintDomingue, ce que font aujourd'hui les nègres ; que même de nos jours, presque tous les habitans de la dépendance de la Grande-Ance, qui sont en général des soldats, des ouvriers ou de pauvres basques, cultivent de leurs propres mains leurs habitations.

Les Allemands au Môle, à Bombarde, et les Ĉanadiens à Bènet, en font de même.

Les sous-divisions cultivées par des blancs, les quels vivent dans une honnête aisance, ces preuvés de faits sont des argumens, je crois sans réplique. Les gérans d'ailleurs, les économes surtout, qui sont toute la journée au soleil derrière les nègres, les charpentiers,etc., les mâçons, les doleurs, les chaufourniers, etc., ceux enfin qui font par entreprise des abattis à la journée, ne sont-ils pás tous des blancs?

Oui, je le soutiens et j'en ai l'expérience, les blancs peuvent sans crainte cultiver la terre à St.

Domingue, ils peuvent labourer dans les plaines, depuis six heures du matin jusqu'à neuf, et depuis quatre heures de l'après-midi, jusqu'au soleil couché. Un blanc avec sa charrue fera plus d'ouvrage dans sa journée que cinquante nègres à la houe, et la terre sera mieux labourée. Les blancs, en outre, seront plus propres à cultiver les jardins, à former et à entretenir les prairies dont on manque dans ce pays pour l'amélioration des bestiaux, des chevaux et autres animaux.

Le gouvernement pacifique de Louis XVIII n'ayant besoin de conserver que le nombre de troupes nécessaires pour garder ses places fortes et couvrir ses frontières, Sa Majesté aura à sa disposition, non pas 30, mais s'il le faut 100 mille hommes forts, actifs, accoutumés aux fatigues, aux privations, qui, au premier signal, s'embarqueront pour Saint-Domingue, quand ils sauront surtout que c'est pour y devenir (de pauvres soldats qu'ils étaient) de riches propriétaires. Les terres ne leur manqueront pas, les habitations des mulâtres et des nègres libres rebelles, les concessions immenses qui existent encore dans la partie française, seront plus que suffisantes pour former ces

nouveaux établissemens.

Que la France, au lieu d'envoyer des prostituées, fasse des filles pauvres, passer laborieuses et modestes, lesquelles seront reçues dans des hospices publiques, où elles demeureront jusqu'à leur mariage.

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Que les villes du Fort Dauphin, duCap, du Môle, de Saint-Marc, du Port-au-Prince, du petit Goâve, de Jérémie, des Cayes et de Jacmel, ayent le droit chaque année de marier une ou plusieurs de ces filles pauvres, auxquelles ces villes affecteront une petite habitation de 20 carreaux de terre, qu'elles auront fait défricher, et où se trouvera un commencement d'établissement avec les instrumens aratoires nécessaires, et six mois de vivres pour les mettre à même de travailler.

Que chaque propriétaire soit tenu de se marier, et de n'avoir pour compagnes que des femmes blanches, que le Gouvernement punise par la dégradation et la confiscation des biens, tout colon qui, au lieu d'épouser ou au moins d'avoir pour compagne une femme de sa couleur, préfère vivre dans un libertinage crapuleux avec ces concubines noires, plombées, jaunes, livides, qui les abrutissent et les dupent, d'où résulte,aux îles, une caste particulière, mélange impur du blanc et du noir, et connue sous le nom de mulâtres.

La nature, dit l'écrivain anglais Smith, épouvantée d'horreur à la vue de ce monstre, empreignit sur cet être en caractères inéfaçables, les traits de la férocité, joints à ceux de la perfidie la plus insigne. Jaloux du blanc qu'il ne saurait égaler, le mulâtre s'irrite à la vue du noir qui lui a donné le jour; vil rebut de la nature, il ne voit dans ces deux couleurs que la preuve incontestable de sa dégradation, et le reproche éternel de

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