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(19.). Les villes de Plaisance, Marmelade et SaintMiguel sont prises. Les noirs, commandés par Dessalines, évacuent la Croix-des-Bouquets, à l'approche de la division Boudet, et traversent rapidement les montagnes pour incendier la ville de Léogane.

(27.)- Le même général se rend maître de Saint-Marc, et bientôt le chef noir Maurepas, qui commandait le district, se soumet aux Français avec 2,000 hommes de troupes réglées et 7 pièces de canon. Le général Laplume avait aussi abandonné le parti de Toussaint, depuis quelques jours.

Les propositions, les promesses du capitaine-général, les succès qu'il venait d'obtenir, et la soumission de plusieurs lieutenans de Toussaint, produisent, dans les troupes de celui-ci, un découragement qui amène des désertions nombreuses; en peu de temps il se trouve avec quelques centaines d'hommes seulement. Poursuivi sans cesse, environné d'obstacles inouïs, fe courage de Toussaint n'est pourtant point abattu.

(Mars.) — L'armée française arrive devant Port-au-Prince, et en prend possession sans obstacle; la place se trouvant en bon état, elle y établit son quartier-général.

La forteresse de la Crête-à-Pierrot, à 8 lieues de Saint-Marc, était un poste important; Dessalines, l'un des généraux noirs les plus courageux et les plus entreprenans, s'y était retiré; le capitaine-général veut s'en rendre maître, et empêcher la retraite de la garnison. Presque toute l'armée française est occupée à ce siège; Dessalines fait une résistance héroïque, et finit, en trompant les assiégeans, par se retirer la nuit avec une de ses divisions; les autres troupes de la garnison n'échappent qu'en partie. Enfin la forteresse est au pouvoir des Français; mais ils l'achètent par la perte de quelques-uns de leurs meilleurs généraux, et d'un grand nombre d'excellens soldats.

Le général Leclerc 'croyant la conquête de Saint-Domingue assurée, rétablit alors l'esclavage au mépris de ses promesses an

térieures.

Les colons trouvent cette conduite imprudente et les noirs en sont indignés.

Toussaint toujours infatigable, cherche à profiter de cette faute; il effectue une jonction avec Christophe qui avait 300 soldats; et quittant les montagnes où il s'était réfugié, il gagne la côte septentrionale de l'île où il y avait un grand nombre de cultivateurs; il les appelle sous ses drapeaux, et bientôt le courage qui les anime supplée à l'insuffisance de leurs armes et de leur discipline; il se précipitent dans la plaine du Nord, et s'emparent de tous les postes des Français qui sont obligés de se retrancher au Cap.Toussaint en fait le siège et aurait pris la place, si la flotte et la division Hardy n'eussent secouru le général Leclerc.

Les Français entassés dans cette place, se trouvent dans une situation critique; ils ont à souffrir les maux d'un siège rigoureux et d'une épidémie extrêmement meurtrière; Le général Leclerc reconnaît son imprudence et sent le besoin de regagner les noirs irrités de sa perfidie; dans cette vue il compose et publie une proclamation par laquelle, en palliant autant que possible ses précédentes mesures, par l'aveu qu'il ne connaissait d'abord ni le pays ni le caractère de ses habitans, il propose une constitution fondée sur la liberté et l'égalité de tous les habitans de la colonie, sans aucune distinction de couleur.

Les noirs n'aperçoivent pas que, grâces à une contexture ar tificieuse de cette déclaration, les garanties promises sont purement illusoires, et las de la guerre ils déposent en grande partie les armes.-Christophe entre en négociation avec le capitaine général et obtient la conservation de son grade et une amnistie entière pour ses troupes.-(mai.) Toussaint et Dessalines traitent aux mêmes conditions et tous les habitans de Saint-Domingue recon-naissent la souveraineté de la France.

Toussaint se retire à une petite plantation appelée Louverture, située aux Gonaïves près la ville de Saint-Marc; il y goûtait le

repos depuis peu de jours, lorsque le général Leclerc le fait sa isir nuitamment, et transporter avec toute sa famille à bord de la frégate la Créole préparée à cet effet; il est conduit à Brest où on le sépare de sa famille, pour l'enfermer au château de Joux, sur les confins de la Franche-Comté et de la Suisse. Après quelques mois, on le transfère à Besançon dans un donjon froid et obscur; Ꭹ meurt au printemps de l'année 1803.

il

( 1802 juin.) — Le capitaine général délivré d'un ennemi dont la puissance et le génie l'ombrageaient, se croit assez fort pour gouverner arbitrairement le pays qui s'était soumis à lui; mais les nègres, éclairés sur les véritables desseins du gouvernement français, par l'attentat commis sur Toussaint et sa famille, se soulèvent de nouveau, résolus à vaincre ou à périr avec Dessalines, Christophe, Glerveaux et Domage, leurs chefs.

L'armée française diminue chaque jour par les désertions et lá contagion née de la chaleur excessive;— Le général en chef irrité de ne pouvoir soumettre les noirs, se promet de les exterminer; tous ceux qui tombent entre ses mains, armés ou non, trouvent la mort dans des supplices affreux. On fait venir des auxiliaires de l'île de Cuba; ce sont des chiens avides du sang des noirs; on excite leur fureur par la faim, on les laisse alors parcourir l'île pour dévorer les negres.

Le capitaine-général Leclerc meurt et le commandement échoit au général Rochambeau; la position des Français était toujours critique; à la fin de l'année ils avaient perdu 40,000 hommes.; les renforts qu'on envoyait de France étaient peu considérables et composés de recrues des provinces conquises par les armées républicaines.

(1803 mai.) Les hostilités recommencent entre la Grande-Bretagne et la France, et en juillet une escadre anglaise paraît sur les côtes de Saint-Domingue; - Les Français se trouvent alors renfermés dans la ville du Cap et dans les districts environnans; T'escadre leur ôte tout espoir de secours du côté de la mer, et ils

sont vivement pressés par terre par Dessalines alors général en chef des noirs.

(19 novembre.) -Le commandant français, craignant de voir la ville prise d'assaut, propose une capitulation, au moyen de laquelle ses troupes et lui évacueront la ville dans dix jours, avec leurs munitions et artillerie, pour se retirer sur leurs vaisseaux; les malades et blessés seront soignés dans les hôpitaux jusqu'à leur guérison, et conduits ensuite en France sur des vaisseaux neutres. Ces conditions sont acceptées.

(30.) - Les noirs arborent leur étendard sur les murs du Gap, et semblent se disposer à couler bas la flotte française avec l'artillerie de la place; dans cette extrémité, elle se met sous la protection des Anglais. Trois vaisseaux et dix-sept bâtimens plus petits, sortis du port, en vertu de la convention, et 8,000 hommes qui les montaient, se rendent aux Anglais.

(2 décembre.) Le général Noailles, resté en possession du Mole avec un petit corps de troupes françaises, refuse de capituler avec le commandant anglais, et profite de la nuit pour embarquer ses troupes sur six bâtimens; le brick qu'il montait échappe seul; les cinq autres bâtimens sont pris, et conduits à la Jamaïque avec le reste de la flotte livrée par Rochambeau. Les Français expulsés, Saint-Domingue se trouve sous la domination de trois généraux noirs, Dessalines, Christophe et ClerLes noirs rendent à l'île son nom primitif d'Haïti.

vaux.

(1804, 1er janvier.) - Les généraux et les chefs de l'armée, .représentant le peuple d'Haïti, signent une déclaration d'indépendance de l'île; ils nomment Jean-Jacques Dessalines gouverneur à perpétuité, avec pouvoir de rendre des décrets, de faire la paix et la guerre, et de choisir son successeur.

Le chef du gouvernement, pour accroître la population mâle, qui était considérablement diminuée, et recruter son armée, engage les nègres et mulâtres qui, au commencement des troubles avaient été conduits par leurs maîtres, ou s'étaient retirés

volontairement aux Etats-Unis d'Amérique, à revenir à SaintDomingue, et promet, à cet effet, une prime aux capitaines de vaisseaux américains, pour chaque noir ramené à Haïti. D'un autre côté, il propose à un agent anglais d'accorder aux habitans ́de la Jamaïque, le monopole exclusif de la traite des nègres à Haïti, pour en faire non des esclaves, mais des soldats.

Un assez grand nombre d'habitans français, auxquels on avait permis de quitter l'île avec l'armée, avaient été retenus par la difficulté de transporter leurs effets, et la crainte de les voir tomber au pouvoir des Anglais; cette considération, et l'humanité des nègres qui leur semblait garantie par la sécurité qu'ils avaient trouvée pendant que Toussaint gouvernait l'île, les avaient déterminés à y rester: mais le sanguinaire Dessalines, après avoir aussi promis de les protéger, excite les nègres à la vengeance par de perfides proclamations.

(Février.) — La douceur naturelle aux noirs, les trouvant insensibles à ces provocations, Dessalines prend le parti de comprendre les malheureux blancs dans une exécution militaire; ses mesures sont si bien ordonnées, qu'aucune des victimes par lui désignées, ne peut échapper. Un massacre général a lieu dans la ville où sont les Français; les prêtres, les chirurgiens et quelques autres personnes, sont seuls épargnés. Christophe, sans s'opposer ouvertement à ces actes de brigandage, les désapprouve secrè tement.

Un petit détachement de troupes françaises était demeuré en possession de Santo-Domingo; Dessalines forme le projet de le détruire, et pour y parvenir, il cherche à détacher des Français, les habitans espagnols qui faisaient cause commune avec eux. N'ayant point réussi dans cette tentative, il se met à la tête de son armée, et vient assiéger Santo-Domingo. Les Français et les Espagnols réunis, se défendent vaillamment; soutenus à temps. par de nouvelles troupes débarquées par plusieurs bâtimens fran

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