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FEMME en puissance de mari. Actions immobiliaires. Code civil.

LE mari qui, sans le concours de sa femme, provoque le partage des immeubles à elle échus, est-il recevable dans sa demande, lorsqu'il ne s'explique point sur la nature du partage qu'il poursuit?

Le premier soin d'une personne qui se propose d'exercer une action, est d'étudier les dispositions de la loi sous l'empire de laquelle elle est formée. On suit trop facilement l'ancienne routine, et ce n'est que lorsqu'il n'est plus temps de prévenir les frais d'une procédure vicieuse, que l'on se reproche le peu d'attention que l'on a mise à régulariser la demande.

NICOLAS-GRÉGOIRE MALINGREAU, cultivateur à Horme, prétendait rester exclusivement propriétaire de certains héritages délaissés par ses père et mère : il invoquait une disposition faite en sa faveur.

Ses beaux-frères, Cristhian et Maximilien Guchez, contestaient ses prétentions: ils demandèrent, en l'an XII, le partage des immeubles dont s'agit, et, par jugement rendu la même année au tribunal civil de l'arrondissement de Mons, leur demande fut accueillie.

Nicolas-Grégoire Malingreau interjeta appel de cette

décision.

II

Il soutint que ses beaux-frères étaient sans qualité pour provoquer, sans le concours de leurs femmes, le partage des immeubles à elles échus, méme en les supposant fondés dans leur demande, lorsqu'elle serait régulièrement intentée.

Les intimés opposaient le silence de leur adversaire par-devant le premier juge, sur le défaut de qualité : ils en inféraient un quasi-contrat judiciairement formé entre les parties, et concluaient de là que Malingreau n'était pas recevable dans son objection en cause d'appel.

Ils observaient que l'article 818 du code civil autorisait le mari à demander le partage provisionnel des biens échus, à sa femme, lorsqu'il a le droit d'en jouir ;

Que, dans l'espèce, ce droit de jouissance était incontestable, et qu'ainsi leur action était valablement formée, du moins quant à un partage provisionnel.

M. Tarte, substitut du procureur général a été d'avis que les Guchez étaient non-recevables.

Il ne s'agit pas, a-t-il dit, d'un partage provisionnel. D'abord l'action n'est pas ainsi qualifiée, et ce serait se jouer de l'article 818 du code civil, que de venir après coup se retrancher dans le cas de l'exception.

Lorsque le mari ne veut qu'un partage provisionnel, il doit l'exprimer son silence laisserait l'effet de sa demande dans un état d'incertitude qui rendrait à la femme le droit d'attaquer l'opération, si,

Tome 1, N.° 3.

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on voulait l'opposer comme définitive. Le but de la loi, qui est de tranquilliser les co-partageans, sérait visiblement manqué.

En.second lieu, la demande des Guchez a un objet préalable au partage: elle tend à faire décider une questión de propriété d'immeubles. C'est donc une action immobiliaire que les intimés exercent, et pour des biens qui n'entrent point en commu

nauté.

Or, d'après l'esprit du code civil, manifesté dans l'article 1428, le mari n'exerce seul que les actions mobiliaires et possessoires.

Ge principe tient à l'inaliénabilité des immeubles de la femme sans son consentement. Le mari ne peut pas plus compromettre les intérêts de son épouse en jugement, que par d'autres actes, quand il est question de ses droits immobiliers; d'où il suit que les parties appelées en justice à la requête des maris seuls, pour biens appartenans à leurs femmes, non compris dans la communauté, sont fondées à leur opposer le défaut de qualité et la nullité des poursuites en tout état de cause, puisque les jugemens qui interviendraient ne produiraient point d'obligation envers les femmes, et exposeraient à des recherches continuelles, les parties entre lesquelles ils auraient

été rendus.

ARRÊT TEXTUE L.

« Vu l'article 818 du code civil, ainsi conçut :

« Le mari peut, sans le concours de sa femme, « provoquer le partage des meubles et immeubles à

elle échus qui tombent dans la communauté à « l'égard des objets qui ne tombent pas en communauté, le mari ne peut en provoquer le partage sans le concours de sa femme; il peut seu« lement, s'il a le droit de jouir de ces biens, de«mander un partage provisionnel.

« Les cohéritiers de la femme ne peuvent provo、 quer le partage définitif, qu'en mettant en cause « le mari et la femme.

« Vu aussi l'article 1428 du code civil, portant :

« Le mari a l'administration de tous les biens per«sonnels de la femme.

<< Il peut exercer seul toutes les actions mobiliaires « et possessoires qui appartiennent à la femme.

« Il ne peut aliéner les immeubles personnels de « sa femme sans son consentement.

« Attendu qu'il en résulte qu'en toute cause où « il s'agit de biens immeubles appartenans aux fem«< mes mariées, et, ne faisant partie de la commu« nauté, lẹ mari ne peut citer en cause, sans le concours de sa femme.

« Considérant en fait que, dans l'espèce, il s'agit de biens non faisant partie de la communauté, et d'une action au pétitoire exercée pétitoire exercée par des époux « sans le concours de leurs femmes.

<< Par ces motifs, et conformément à l'avis du sub«stitut du procureur général,

« La Cour met l'appellation, et ce dont est appel,

« au néant; émendant, déclare les intimés non re« cevables et sans qualité; en conséquence annulle «les poursuites par eux faites, et les condamne « aux dépens, tant de cause principale que d'appel.

Du 13 messidor an XIII. Première section.

MM. Truffart et Faider.

Nota. Même difficulté s'étant présentée à la troisième section, la Cour, par arrêt du 23 brumaire an XIV, adopta le même principe.

Cependant elle pensa que, si le défaut de qualité ne pouvait pas se réparer en cause d'appel, du moins la partie qui ne l'avait pas proposé en première instance, et qui avait ainsi contesté volontairement au fond, devait supporter une partie des frais.

MINISTÈRE DE LA JUSTICE.

LETTRE de son excellence le grand - juge, ministre de la justice, à MM. les procureurs impériaux, sur l'emploi des deniers qui se trouvent entre les mains des curateurs aux successions vacantes.

12 messidor an XIII.

«L'ART. 813 du code civil, messieurs, impose <«< aux curateurs aux successions vacantes, l'obliga

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