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LE pacte successoire était celui qui avait l'hérédité pour objet, c'est-à-dire, la succession dans l'universalité des droits d'un citoyen romain, soit en totalité, soit en partie aliquote.

Les lois romaines réprouvaient cette sorte de convention elles la regardaient comme le résultat du désir de la mort d'autrui, et, sous ce point de vue, comme contraire aux mœurs, et ne pouvant produire aucun effet. Elles avaient d'ailleurs sanctionné la maxime, qu'on ne devenait et qu'on ne pouvait devenir héritier que par le vœu de la loi ou par la voie du testament; il résultait déjà de là qu'on ne pouvait le devenir par convention, et ce d'autant moins que la volonté dernière est ambulatoire jusqu'à la mort, et que personne, sans contrarier l'essence des choses ellesmêmes, ne pouvait s'imposer la loi de ne pas faire ou de ne pas changer ses dispositions testamentaires.

Mais tout ceci était relatif, comme on a commencé par l'observer, à l'hérédité, au droit universel de succession, à ce droit, en un mot, qui identifiait l'héritier au défunt dans la représentation, soit totale, soit partiaire, de toute sa fortune, tant active que passive.

La loi 15 cod. de pact. ne laisse pas de doute sur ce point; la convention qu'elle proscrit n'avait d'autre objet, en effet que l'hérédité du père, ut ex æquá portione heres patris sui esset.

La loi 19 eod. t. est encore dans le même sens, puisqu'il est évident que les mots : res, res familiaris, dont elle se sert, désignent la succession 'hérédité qui avait fait l'objet de la convention.

La loi 30 eod. traite taxativement d'un pacte concernant l'hérédité.

Même objet dans le pacte réprouvé par la loi 5; cod. de pact. conventis.

Même chose enfin dans la loi 4 cod. de inutil. stipulat., comme on le voit de ces mots : de futurđ successione interposita stipulatio.

Les questions qui pouvaient se présenter sur l'application de cette jurisprudence, vues juridiquement, ne pouvaient donc offrir beaucoup de difficulté; et, en effet, la convention représentée concernait la succession soit totale soit partiaire des parties, ou elle ne concernait que certains biens que l'une d'elles assurait à l'autre, ou qu'elles s'assuraient réciproquement, en cas de prédécès. Dans le premier cas, le pacte était successoire, conséquemment proscrit dans les pays où cette partie du droit romain était restée en vigueur; dans le second cas, le pacte n'était pas successoire, et sa validité dépendait des règles particulières aux conventions en général.

Mais, sur ce point, rien ne restait douteux dans le dernier état de la législation romaine. Tout le monde sait que Justinien, qui déjà avait corrigé l'ancien droit par la loi 11 cod. de contrah. et committ. stipul., en a formellement renouvelé l'abrogation par la loi unic. cod. ut act. ab heredib. et contra hered. incip., et que, par suite encore, il a ordonné, 13, lib. 3, tit. 20 de ses institutes, qu'une stipulation conçue pour le temps d'après ou d'avant la mort du stipulant ou de celui qui promet, fût valable et exécutée; post mortem suam dari sibi

nemo stipulari poterat, non magis quam post ėjus mortem a quo stipulatur..... sed cum ex consensu contrahentium stipulationes valeant, placuit nobis etiam in hunc juris articulum necessàriam inducere emendationem, ut sive post mortem, sive pridie quam moriatur stipulator sive promissor, stipulatio concepta sit, stipulatio valeat.

Ainsi, dans le droit romain même, il était permiş de promettre ou de donner certains biens à quelqu un, pour le cas où celui-ci survivrait au donateur ce cas arrivant, les héritiers devaient exécuter la promesse de leur auteur, parce que celui-ci avait pu la contracter valablement, et que l'héritier doit remplir les obligations de celui auquel il suc

cède.

Tous les auteurs qui ont donné des commentaires sur les lois romaines, et qui attestent la manière dont elles ont été observées par les nations qui les ont adoptées, soit comme droit commun soit com me raison écrite, font constamment cette observa tion, qu'il est essentiel de distinguer ces conventions autorisées par le droit, de celles qui ont la succesŝion pour objet, et qui sont les seules que la loi proscrive. Pour la France on peut voir Mornat et Godefroid, ad L. 15, cod. de pact.; Automne, ibid. et ad L. ult. eod.; d'Argentré, aux coutume & de Bretagne, art. 266, cap. 4, n.o 22; Papon, notaire, lib. 3 de stipul., part. 4, versic, cette règle; et a lib., 9 divis., 2 versic. Julianus; Ann. Robert, rer. judicat., lib. 1, cap. 15; Faber, cod. de pact. convent. defin. 7. — Pour la Belgique, Chrystin, vol. 1, dec. 133, n.o 3, 4. consultat.; J. G. Batavor, part. 3, concil. 27, 153; Zypæus, not

jur. belgici de jur. dot. vers. alioquin; Rodelantius, decis.curiæ Ultraj. 93; A. Sande ad consuetudines fendal Gelriæ. tract. 1, cap. 3; Vinnius, tract. de pact., cap. 19, n.o 5, Grotius, introduct., lib. 2, pact. 29. Pour l'Allemagne, Gaill., lib. 2, obs. 126, n.o 2; Carpzovius, part 2, constit 45, defin. 14, n.o 5; Grassus, & successio., quest. 9. Pour I'Espagne, Vasquius, de succes., tom. 1, lib. 2,

18, no. 209; Gomez., ad leg. taur. 22; Covarruvias, ad cap. quamvis. part. 3, n.o 2; Gregorius Lopez, ad part. 5, tit. 11, leg. 33, gloss. 1.

le

La jurisprudence des arrêts est conforme rien n'est plus décisif sur ce point, que ceux des cours souveraines, rapportés par le président Everard, conseiller Stockmans, décis. 44, et par A. Sande, lib. 4, tit. 5, def. 19; on peut y joindre l'arrêt du parlement de Paris du..... 1626, rapporté au Journal des audiences, chap. 80, pag. 47, édit. de Paris, de 1757.

Enfin, toute cette théorie de la législation des Romains, justifiée par l'usage est encore parfaitement établie et raisonnée par le grand Dumoulin, en son conseil 15, n.o 15 et subs.

On pourrait se demander si les pactes, même successoires proprement dits, n'étaient pas autorisés dans la Belgique.

En effet, il est notoire pour tout le monde, que les lois romaines, dans les pays mêmes où elles ont été reçues le plus généralement, avaient subi des mo difications en cette partie; puisque, dans tous ces

pays, les pactes successoires étaient autorisés par des contrats de mariage.

Cæterum (dit l'annotateur de Bugnon) majores nostri nihil prius, antiquius nihil existimarunt, quam fidem semel datam perpetuo servari; ideoque explosd juris romani scrupulosá subtilitate, moribus nostris et Gallorum, hujusmodi pacta obligationem pariunt, nec pœnitentiá mutari aut revocari possunt. Ad L. 15 cod. de pact.

D'Argentré va plus loin, et il regarde en général comme incompatibles avec nos mœurs, les raisons qui ont fait proscrire chez les Romains, les pactes successoires: viventis heredem non esse, liberam testandi facultatem impediri, induci votum captando mortis, contra bonos mores esse de futurá succes-' sione transigi et alia similia, meræ sunt jure nostro nugæ, cum nihil sit prestantius fide, à quá si recedatur, tumultus, bella et intestinæ discordiæ gignuntur. Art. 266, tit. des appropriances.

Et en effet il n'y a rien de contraire au droit de la nature et des gens dans un pacte successoire; etenim, sepositá juris civilis auctoritate, si ex ratione juris naturæ aut gentium rem æstimare velimus, non sunt talia pacta naturá turpia, sed more civitatis romanæ, sive ut Cujacius in L. 26 ff. de v. o. sunt contra bonos mores populi romani. Vinnius, tract. de pact., chap. 19.

Si l'on ajoute à cette observation, que dans la Belgique la dévolution qui, par la rupture du lit, affectait les biens du survivant à ses enfans, et les en rendait même nu - propriétaires dans quelques

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