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les suites sont préjudiciables, soit à l'une soit à l'autre des parties.

Il semble qu'un pareil abus ne puisse jamais avoir lieu, et cependant il s'est déjà manifesté plusieurs fois. Les avoués doivent sans doute, dès qu'ils s'en apperçoivent, en instruire leurs parties, et faire en sorte qu'il existe un jugement en forme dans les pièces de la procédure.

Ce soin regarde particulièrement les avoués de première instance. Ce sont eux qui dirigent leurs parties dans les premiers actes de l'appel. Comment ne pas appercevoir que la sentence dont on demande la réformation, étant la pièce sur laquelle les griefs doivent être appréciés, il est indispensable de la produire dans la forme prescrite par la loi, afin que le juge supérieur puisse y reconnaître les qualités, les faits, les moyens et les motifs du jugement.

Cette faute ne peut jamais être considérée comme celle des parties, qui, pour la plupart, n'ont aucune connaissance des formes de la procédure, et qui se reposent, des soins de mettre leurs pièces en règle, sur le ministère des hommes publics, auxquels elles ont donné leur confiance.

DÉCISIONS NOTABLES

DE

LA COUR D'APPEL

DE BRUXELLES,

Avec les Arrêts les plus remarquables des Cours de Liége et de Trèves.

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Le défaut de notification du protét emporte-t-il la déchéance de la garantie, lorsque le porteur a d'ailleurs formé sa demande récursoire en temps utile?

Le tireur est-il tenu de prouver que celui sur qui la lettre de change est tirée, lui était redevable ou avait provision lorsqu'il y a eu acceptation?

La négative de la deuxième proposition paraît sans difficulté; mais à l'égard de la première question, elle n'est pas aussi simple, sur-tout dans les départemens où la publication de l'ordonnance de 1673 n'a été précédée d'aucuns réglemens qui servent à expliquer le sens des dispositions relatives à la ma

tière.

Tome I, N.° 7.

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Cependant elle vient d'être résolue contre le porteur qui avait négligé la notification du protêt dans les délais. Voici l'espèce :

LES sieurs Peemans, de Louvain, avaient tiré deux lettres de change sur le sieur Mols, d'Anvers, qui les accepta payables à Paris, chez MM. Pioc-Dutrey.

Ces deux effets, échéans au même terme, furent protestés à la requête du porteur. Il y eat retraite sur les tireurs pour en obtenir le remboursement. Le sieur Goffin, qui en était porteur, s'adressa aux frères Peemans son action fut intentée dans les délais; mais il négligea de notifier le protêt: il n'offrit pas même de le remettre, ainsi que les deux lettres de change, en retour du paiement qu'il exigeait.

Les sieurs Peemans le soutinrent non-recevable, mais il paraît résulter du jugement, rendu en première instance, que la question relative au défaut de dénonciation du protét, n'y fut pas très-sérieusement traitée. Les défendeurs s'attachèrent principalement à démontrer que l'action récursoire était tardivement formée; et ce qui donnait lieu à ce point de difficulté, c'était la circonstance des jours complémentaires, circonstance qui n'a plus aucun objet dans la présente analyse.

La défense des sieurs Peemans ne fut point accueillie au tribunal de commerce de Louvain. Ils furent condamnés à payer le montant de la retraite, ou lettre de retour, par sentence du 7 frimaire an XIV, motivée sur ce que la demande en garantie avait été intentée dans les délais.

Appel de la part des sieurs Peemans.

Là, ils fondaient principalement le mal-jugé sur le défaut de notification du protêt; et remarquons que ce défaut n'était pas encore réparé au moment de la plaidoirie en cause d'appel, et que l'intimé n'avait pas même jusqu'alors représenté l'acte de protêt, non plus que les deux lettres protestées.

La difficulté portait sur le sens des articles 13, 14 et 15, titre 5, de l'ordonnance de 1673.

Les sieurs Peemans convenaient que les dispositions de ces articles n'imposent pas textuellement l'obligation de dénoncer le protêt; mais cette obligation est dans l'esprit de la loi, et la seule raison suffirait pour s'en convaincre, si cette opinion, d'ailleurs fortifiée par l'article 32, concernant les billets de change, n'était pas soutenue par la jurisprudence des arrêts.

Il est vrai que Pothier, en son Traité du contrat de change, nombre 149, manifeste un sentiment contraire. D'après l'avis de cet auteur, il suffit, ou que le protêt soit signifié, ou que l'assignation en garantie soit donnée dans le temps utile. Le concours de ces deux actes de diligence n'est pas nécessaire.

Savary, tome 2, parère 8, embrasse la même opinion, en ce sens que la seule notification du protêt dans les délais conserve l'action en garantie pendant cinq ans.

Une erreur soutenue par de grands noms, dit M. Merlin, Répertoire universel de jurisprudence,

au mot endossement, n'est pas moins une erreur. Il réfute Pothier et Savary par la force du raisonnement et l'autorité des arrêts.

Il les combat par l'ordonnance même de 1673, qui, art. 32, titre 5, établit textuellement la nécessité de faire signifier les diligences et de faire les poursuites dans les délais prescrits par l'article 15, au sujet des lettres de change.

La notification des diligences ne peut s'entendre que de la notification du protêt. Or, il y a parité de raison tant pour les lettres de change que pour les billets de change, et si l'article 13 ne l'exprime pas en termes formels, c'est que cette formalité était déjà ordonnée par une déclaration de 1664. Antiquiores leges ad posteriores trahi usitatum est, et semper quasi hoc legibus inesse credi oportet. L. 27 ff., de legibus.

N'est-il pas évident que c'est dans l'intérêt du donneur d'ordre que la nécessité de dénoncer le protêt est prescrite, et qu'en la négligeant, on le met hors d'état d'agir en garantie; car, quel titre aurait-il pour fonder sa demande? par quel moyen justifierait-il que l'effet n'est pas acquitté?

Cependant les facultés du débiteur qui, dans l'espèce, a accepté les lettres de change, et qui par là s'est engagé envers le tireur (L. 1 ff. mandati), pourraient dépérir et rendre illusoire le recours des frères Peemans, par l'événement de l'insolvabilité.

I

En poursuivant les tireurs en garantie, l'intimé a tout fait pour lui; mais il devait ainsi mettre les

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