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donataire de la succession des deux époux dans le cas où ils décéderaient sans postérité de leur mariage, et à la condition que, s'il mourait lui-même sans enfans, les biens retourneraient aux héritiers respectifs des conjoints, par moitié.

Le notaire néglige de faire mention de la signature des parties et des témoins; faute dont on ne s'est aperçu que lorsqu'elle était irréparable.

Poot eut bientôt sujet de se repentir d'avoir légitimé ses liaisons avec Jeanne-Marie Welvis: devenue épouse, elle fit son malheur et celui de son mari qui fut forcé de recourir à la voie du divorce.

Par arrêt du 12 frimaire an XIV (V. n.o 5 du 7. vol., pag. 222), rendu sur l'appel d'un jugement, annullé pour vices de forme, et à la vue des preuves que Jeanne-Marie Welvis s'était rendue coupable de sévices, injures graves et d'adultère, la Cour déclara le divorce admis.

Sur les réquisitions du ministère public, Jeanne Marie Welvis fut condamnée à six mois de reclusion.

Au moment de l'arrêt, Poot était dans les angoisses de la mort : il expira trois jours après, laissant un testament par lequel il révoque toutes les donations faites à sa femme et à l'enfant du premier lit de cette dernière ; il institue ses deux sœurs pour héritières.

Les deux sœurs font apposer le scellé.

Jeanne-Marie Welvis en demande la main-levée,

tant en son nom, qu'en qualité de tutrice de CharlesAlexandre-Joseph-Antoine Depaep, son fils mineur et en bas âge.

En effet, si le contrat de mariage du 17 prairial an XI devait avoir son entière exécution, tout ce que laissait le sieur Poot, appartenait à sa femme ou à l'enfant du premier lit de sa femme; mais les héritières du mari prétendirent trouver dans l'arrêt qui avait admis le divorce, le moyen de faire prononcer la perte des avantages que Poot avait faits à Jeanne-Marie Welvis, et à l'égard de son fils mineur, elles soutinrent que la donation était nulle, soit qu'on la considérât comme faite entre-vifs, soit qu'elle fût envisagée comme donation à cause de

mort.

Comme donation entre-vifs, elle comprenait des biens à venir; à ce titre elle est annullée par l'article 943 du code civil.

Comme disposition de dernière volonté, elle est contenue dans un acte fait par deux personnes, contrairement à l'art. 968 du même code.

Cet acte n'appartient d'ailleurs, quant aux formes, à aucune espèce des testamens autorisés par la loi.

Ces motifs firent impression sur l'esprit du premier juge. Les libéralités faites au profit de CharlesAlexandre-Joseph-Antoine Depaep, furent annullées par jugement du 27 fructidor an XIII, mais à l'égard de Jeanne-Marie Welvis, le tribunal pensa que le divorce, n'ayant pas été prononcé par l'officier de l'état civil, le mariage s'était dissous par mort,

et qu'il n'y avait pas lieu à lui appliquer l'article 299 du code civil.

On remarque que jusque-là, les héritières du sieur Poot, n'avaient pas excipé du défaut de mention de la signature des parties et des témoins dans le contrat de mariage, et qu'elles n'avaient pas précisé les objets dans lesquels elles faisaient consister les avantages dont elles soutenaient que Jeanne-Marie Welvis était déchue.

Elles offraient cependant de procéder à l'inventaire et de consentir qu'elle reprit ce qui pouvait lui appartenir, ce qui ne constituerait pas un avantage fait par son mari.

Les parties interjetèrent respectivement appel. Jeanne-Marie Welvis croyait sur-tout avoir à se plaindre comme tutrice du jeune Depaep, dont le tuteur subrogé intervint.

Nous ne ferons qu'indiquer les griefs et les principaux moyens.

Pour les sœurs du sieur Poot, on disait la que perte des avantages faits par le mari, était la peine des faits reconus juridiquement; que l'acte de l'officier de l'état civil n'était que l'exécution du jugement dans l'ordre des lois qui réunissent dans un même dépôt public, tout ce qui concerne l'état civil des personnes ;

Qu'il est bien' vrai que le lien ne se dissout que par la prononciation du divorce, mais que la peine due à l'inconduite de l'époux coupable, est indépendante

du

du lien, puisque, dans le temps où le divorce n'était pas admis dans nos mœurs, l'adultère n'entraînait pas moins la privation de la dot, du douaire et des autres avantages faits à la femme;

Que la remise de cette peine ne pouvait s'opérer sans un fait qui fasse présumer le pardon ou la réconciliation;

Que dans l'espèce, il n'existait aucun fait, si ce n'est celui qui constate la persévérance du sieur Poot dans sa volonté d'exécuter le jugement; c'est ce qu'atteste son testament reçu très-peu de temps avant

sa mort.

Ses héritiers peuvent exciper de la chose jugée en sa faveur.

On disait contre le mineur Depaep, que le défaut de mention de la signature des parties et des témoins dans le contrat de mariage de sa mère, l'avait réduit aux termes d'un acte sous signature privée, et que, manquant des formes prescrites pour la validité des donations, soit entre-vifs, soit à cause de mort, il ne pouvait avoir aucun effet en sa faveur.

Que les dispositions qui le concernaient étaient d'ailleurs prohibées, et frappées de nullité par l'article 896 du code civil, parce qu'elles présentaient le caractère d'une substitution, étant appelé sous la condition de rendre en cas de mort sans postérité, ce qui emporte l'obligation de conserver.

Jeanne-Marie Welvis se retranchait dans l'article 227, et dans le sens grammatical de l'article 299 du code civil.

Tome II,

N.° 4.

20

Le mariage, disait-elle, se dissout par la mort de l'un des époux, ou par le divorce légalement prononcé.

La mort du sieur Poot a prévenu la prononciation légale du divorce admis, donc le mariage s'est dissous par mort, et non par divorce.

Or, la privation des avantages dont parle l'article 299 ne s'exécute qu'en cas de divorce prononcé.

« Pour quelque cause que le divorce ait lieu, l'époux contre lequel le divorce aura été admis << perdra tous les avantages, etc. »

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Le législateur distingue.

Pour quelque cause que le divorce ait lieu, c'està-dire qu'il soit prononcé; car, en parlant de l'admission, il se reporte à ce qui a précédé, aura été admis.

Voila donc les deux opérations distinctes, le divorce et l'admission, qui n'est que la faculté de le faire prononcer.

Or, ce n'est que quand cette faculté est exercée, que le divorce a lieu; donc, tant que l'époux demandeur n'a pas fait usage du pouvoir de l'arrêt d'admission, le divorce n'a pas lieu; donc, l'article 299 est sans application sous le rapport de la perte des avantages matrimoniaux.

Les peines ne s'établissent pas par des inductions, c'est à la loi seule à les établir. Supposé que le · cas qui se présente n'ait pas été prévu, serait-ce une

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