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qui le délégue. Ne serait-il pas quelquefois dangereux d'adhérer à l'indication particulière d'un tuteur, et même d'un conseil de famille.

De telles propositions ne sont pas toujours exemptes de vues étrangères à l'intérêt des mineurs. Leur cause n'est jamais plus puissamment protégée que dans les tribunaux, où la publicité des actes et l'impartialité du magistrat ne permettent aucun accès à ces sourdes menées dont les mineurs sont souvent victimes.

C'est donc inutilement que l'on s'est pourvu contre le jugement d'homologation. L'article 459 du code civil le met à couvert de toute attaque.

Arrêt conforme aux conclusions de M.r Mercx, en date du 5 juin 1806.

Troisième section.

M. Pins, pour le tuteur.

JURISPRUDENCE COMMERCIALE.

Question Les créanciers d'une masse insolvable sont-ils obligés, avant de faire un acte d'attermoiement avec leur débiteur, d'affirmer leurs créances sincères et véritables devant le tribunal de commerce? Sont-ils, de plein droit, déchus de leurs prétentions, en cas d'omission de cette formalité? En cas d'affirmative, le débiteur qui, au prescrit de l'article 3 du titre 11 de l'ordonnance du mois de mars de 1673, aura déposé ses bilan, livres et registres au greffe de la juridiction consulaire, peut-il tirer

quelque avantage de cette omission ou violation de forme? Peut-il, en cas de négative, être, de ce chef, poursuivi comme banqueroutier frauduleux, conformément à la déclaration de 1739, publiée ici en vertu de l'arrêté du directoire exécutif, en date du 7 pluviôse an V?

Solution: Le soussigné estime que les créanciers, pour conserver leurs droits et prétentions intacts et à l'abri de toute contestation sont, dans l'espèce proposée, obligés, avant d'entrer en composition avec leur débiteur, d'affirmer, en personne ou par fondé de procuration spéciale, leurs créances sincères et véritables devant les juges-consuls, de soumettre à leur examen les titres, bilans et autres pièces propres à justifier leurs créances et de faire dresser par eux procès-verbal de leur comparution, dires et réponses (1). Ces formalités, loin d'être le fruit d'un esprit chicanier ou malfaisant, sont basés sur la saine raison, sur la jurisprudence française ancienne et moderne; elles sont le boulevard de l'innocence et la garantie la plus sûre de la bonne foi contre les attaques multipliées de la calomnie de la perfidie, de la fraude, de la déraison. Aussi sont-elles de rigueur; la loi les a introduites comme étant d'une nécessité indispensable; d'abord pour suivre à la piste le créancier et le débiteur, dans leurs opérations les plus secrètes, et pour éclairer leurs démarches; ensuite pour découvrir si les créances sont réellement dues ou si les créanciers n'ont pas déclaré de plus grandes sommes que celles qui leur étaient dues (2), et plus encore pour se convaincre si le débiteur ne s'est point servi de noms interpo

(1) Déclaration de 1739.

(2) Ordonnance de 1673, art. 13, titre 11.

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sés (1); si son bilan a rapport aux livres des créanciers et s'il n'a pas fait vente de ses meubles et immeubles, ni passé des ordres au profit de quelques créanciers au préjudice des autres (2). Tel est le but de la loi; et pour y parvenir, voici ce qu'elle ordonne elle ordonne que la minute du procès-verbal restera déposé au greffe de la juridiction consulaire, avec le bilan du failli, à qui il en sera donné copie pour la joindre ensuite à la requête qui sera présentée pour l'homologation du contrat et autres actes (3). Le législateur a trouvé, dans sa sagesse, que cette formalité était d'un si grand poids, qu'il a défendu aux tribunaux civils de première instance, de procéder à cette homologation sans qu'elle fut remplie au préalable; il a même voulu que ceux d'entre les créanciers qui l'auraient omise ou violée fussent déchus de leurs droits et prétentions, quoiqu'il soit vrai de dire que cette déchéance n'a lieu qu'elle ne soit décrétée par le juge sur la demande de la partie intéressée, qui, dans ce cas-là, doit être nécessairement un des co- créanciers, et nullement le débiteur, qui, étant mort aux yeux de la loi (4), ne saurait, de ce chef, ni pâtir ni tirer le moindre avantage; je dis qu'il n'en saurait point patir, parce qu'ayant satisfait à l'article 3 du titre 11 de l'ordonnance, la faute des créanciers négligens ou mal instruits leur est personnelle, et

(1) Ordonnance de 1673, art. 10, titre II.

(2) Déclaration du 18 novembre 1702, publiée avec l'ordonnance ci-dessus.

(3) Déclaration de 1739, ut suprà.

(4) Non habet velle nec nolle, comme dit Straccha, dans son Traité de decoctoribus, et Baldus dit tamquam mortui habendi sunt, arrêt du parlement de Flandre, rendu en décembre 1706, entre le sieur Vanderheyde et M. Antoine Deltombe.

il serait

qu'il est de principe que nul ne doit souffrir pour le fait d'autrui (1), que chacun doit connaître la loi (2), et que celui qui souffre préjudice par sa propre faute, est censé ne pas en souffrir du tout (3); je dis qu'il n'en saurait tirer aucun avantage, parce que la loi ne lui donne aucune action de ce chef, et quand même elle lui en donnerait une indécent de sa part de l'intenter, par la raison que tout ce qui est permis n'est pas toujours honnéte (4); il y a plus; ne doit-il pas être envisagé lui-même comme la cause de cette malheureuse déchéance, supposé qu'elle ait lieu? N'est-il pas accidentellement la cause occasionnelle de la perte que fait son créancier de ce chef, pour avoir négligé, à son tour, de l'apppeler à assister à la présentation et à l'affirmation de ses bilan, livres et registres, conformément à l'esprit de l'ordonnance, quoiqu'elle ne le prescrive pas disertement et en toutes lettres? Sans doute. Or, il est de principe que celui qui est la cause de la cause est également la cause de ce qui a été causé, donc (5), à son tour il a manqué à la loi; s'il a manqué à la loi, il est ici indirectement coupable, s'il est indirectement coupable; il ne peut pas invoquer la loi en sa faveur, parce que celui qui pèche contre la loi est indigne des bénéfices qu'elle accorde (6). D'ailleurs, ne serait-ce pas ouvrir la porte au mauvais dol, aux spéculations les plus frauduleuses, ne serait-ce pas donner un coup mortel au commerce que d'accorder de pareilles actions aux

(1) Nemo debet pati ex facto alterius. L. ff. de R. I. (2) L. I cod. de juris et facti ignorantia.

(3) Qui damnum suá culpá sentit non sentire intelligitur, (4) Non omne quod licet, honestum est, 1. 186 et 157 ff. de R. I (5) Qui est causa causæ est causa causati. Voet, ad L. A: (6) Indignus est beneficio legis qui in legem peccat.

débiteurs contre les créanciers? Ne serait-ce pas un moyen assuré d'enrichir, sous peu de temps, des fripons aux dépens de gens de bonne foi, et donner entre les mains des faillis un tranchant dont tôt ou tard ils abuseraient cruellement? La loi n'assure donc d'action de ce chef qu'aux co-créanciers qui ne doivent en faire usage que pour tâcher d'avoir ce qui leur est dû ils ne peuvent ni ne doivent avoir d'autre but; et le débiteur, de sa part, est en pareille occasion obligé d'éviter soigneusement de semer la zizanie; il doit s'étudier à prévenir les mauvais procès; justifier sa conduite et rendre exactement compte de ses pertes et malheurs, voilà le premier devoir qui lui incombe. Heureux, mille fois heureux, s'il sait le remplir au vœu de la loi! C'est de cette réussite que dépendent sa conservation et son honneur, c'est cette reddition de compte qui, jointe au dépôt de ses bilan, livres et registres, doit faire stater toutes les poursuites et rendre, à son égard, nulles et de nul effet les dispositions pénales de la déclaration du 13 septembre 1739 (1), ce qui est toujours consolant pour les créanciers et honorable pour le débiteur qui, comme je l'ai observé plus haut, n'a, dans l'espèce proposée, rien à craindre ni rien à espérer de la négligence de ses créanciers.

Par M. VANWAMEL, défenseur et homme de loi, à Anvers.

(1) Plusieurs praticiens prétendent que cette déclaration n'a pas force de loi aux Pays-Bas, parce qu'elle n'y a été publiée qu'en note, précisément comme si une note, faite par le législateur pour l'intelligence de la loi, ne contenait pas aussi expressément sa volonté que la loi même, et comme si une telle note ne devenait pas loi alors. L'interprétation authentique a toujours eu force de loi, par la raison qu'ejus solius est interpretari leges cujus est condere. L. 1, 9 et ult. Cod. de leg. et const. princip.

Tome II, N.° 8.

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