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ronde acquitte le sieur Chateauneuf de l'ac

cusation.

En conséquence, le sieur Fournier reprend son action civile devant le tribunal de première instance de Blaye.

La cause appelée à l'audience du 18 mars 1809, jugement qui, après avoir entendu les deux parties, la fixe au 25 du même mois.

Le 25, l'avoué du sieur Fournier plaide. Sa plaidoirie achevée, l'avoué du sicur Chateauneuf requiert que la cause soit continuée.

Jugement du même jour qui, du consentement de l'avoué du sieur Fournier, la continue en effet au 29.

A l'audience du 29, l'avoué du sieur Fournier répète ses conclusions, et insiste pour qu'elles lui soient adjugées. L'avoué du sieur Chateauneuf, au lieu de plaider à son tour, demande le renvoi de la cause à quinzaine. L'avoué du sieur Fournier s'y oppose.

Par jugement du même jour,

<< Considérant qu'à l'audience du 18 de ce mois, il fut rendu jugement qui, du consentement des parties, fixa la cause au 25 suivant; qu'à l'audience du 25, la çause ayant été appelée, Duranteau, pour Fournier, fit valoir ses moyens et demanda l'obtention des conclusions par lui prises; que Renard, pour Chateauneuf, demanda que la cause fut continuée, ce que le tribunal lui accorda par son jugement dudit jour, qui la continua à l'audience du 29 du même mois; que ledit jour 29, la cause ayant été appelée, Duranteau reproduisit ses mêmes moyens et demanda l'obtention de ses conclusions; que Renard, sans vouloir défendre au fond, réclama que, de nouveau, la cause fût continuée à quin

zaine;

» Que de pareils moyens dilatoires, employés par le défenseur de Chateauneuf, ne peuvent qu'annoncer combien lui et sa partie sont persuadés qu'il n'a nuls' moyens solides au fond à faire valoir, qui puissent lui faire éviter la condamnation sollicitée contre lui; et qu'il ne se comporte ainsi que pour éloigner ladite condamnation, ce qui ne fait qu'augmenter les pertes que souffre Fournier, soit par la privation des profits qu'il pourrait retirer de ses capitaux, s'il les avait en mains, soit par son déplacement prolongé; que par conséquent il est de justice de mettre fin à ces dilations, attendu que la cause se trouve contradictoirement engagée entre les parties, par leurs comparutions respectives relatées dans les jugemens précités ;

» Considérant au fond.... »;

Le tribunal condamne le sieur Chateauneuf à payer au sieur Fournier une somme de

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3,000 livres, pour lui tenir lieu de marchandises volées, à la charge par celui-ci d'affirmer certains faits, et 500 francs pour dommagesintérêts.

Le 14 avril, signification de ce jugement au sieur Chateauneuf, avec assignation au lendemain, pour voir prêter le serment dé féré au sieur Fournier.

Le 15, jugement qui donne défaut contre le sieur Chateauneuf; et, pour le profit, reçoit le serment.

Le 20 du même mois, Opposition du sieur Chateauneuf au jugement du 29 mars, motivée « sur le principe qu'il ne saurait y avoir » de jugement contradictoire, quand il n'a » été produit aucunes défenses ni verbales » ni écrites ».

Le 26, « Considérant que le jugement du » 29 mars est un jugement contradictoire » contre lequel on ne peut se pourvoir par la » voie de l'Opposition, et qui ne peut être » attaqué que par celle de l'appel », le tribunal civil de Blaye déclare le sieur Chateauneuf non-recevable dans son Opposition.

Le 24 juillet suivant, le sieur Chateauneuf appelle de ce jugement et de celui du 29 mars. Le 1er août, arrêt par défaut de la cour d'appel de Bordeaux qui, faisant droit sur l'appel du jugement du 29 mars, le déclare non-recevable, attendu qu'il a été interjeté plus de trois mois après la signification qui en avait été faite au sieur Chateauneuf;

Et faisant droit sur celui du jugement du 26 avril, le déclare non fondé,

« Attendu qu'il conste du jugement du 29 mars, que la cause avait été plaidée à l'audience du 25 du même mois et continuée à l'audience du 29, par un jugement contradictoire; ce qui a suffi pour rendre également contradictoire celui du 29; que d'ailleurs il appartenait au tribunal de première instance de fixer la qualité de ce jugement; et que, dès qu'il l'a déclaré contradictoire, il doit être tenu pour tel;

>> Que la voie de l'Opposition étant interdite pour demander la réformation d'un jugement contradictoire, c'est avec raison que le tribunal de première instance a rejeté celle fournie par Chateauneuf, contre le jugement du 29 mars ».

Le sieur Chateauneuf forme Opposition à cet arrêt.

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Recours en cassation de la part du sieur contre les jugemens rendus par défaut faute Chateauneuf.

« Cette affaire, peu importante par son objet pécuniaire (ai-je dit à l'audience de la section des requêtes, le 6 décembre 1810), vous présente une question d'un grand intérêt: il s'agit de déterminer, d'après le Code de procédure civile, les caractères distinctifs des jugemens contradictoires et des jugemens par defaut.

» Le jugement du tribunal civil de Blaye, du 29 mars 1809, que la cour d'appel de Bordeaux a regardé comme contradictoire, le serait en effet incontestablement s'il avait été précédé, de la part de l'avoué du sieur Chateauneuf, soit d'une plaidoirie, soit même de simples conclusions prises à l'audience.

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Mais, d'une part, il est constant que l'avoué du sieur Chateauneuf n'a plaidé, ni à l'audience du 29 mars, ni à celle du 25, ni à celle du 18 du même mois.

» D'un autre coté, on ne voit par aucun des jugemens rendus à ces trois époques, que l'avoue du sieur Chateauneuf eût pris des conclusions sur le fond de son affaire. On y voit, au contraire, qu'à chacune de ces trois époques, il s'est borné à demander la remise

de la cause.

» Cela posé, la question se réduit à savoir si un jugement doit être réputé contradictoire, par cela seul que la partie contre la quelle il a été rendu, s'était présentée à l'audience et avait simplement conclu à une remise.

» Voyons d'abord comment cette quéstion aurait dû être jugée sous l'ordonnance de 1667.

» Cette ordonnance reconnaissait trois sortes de défauts: le défaut faute de comparoir, qui s'accordait contre le défendeur, lorsqu'il ne se présentait pas, ou, ce qui était la même chose, lorsqu'il ne constituait pas procureur dans le délai de l'assignation; le défaut faute de défendre, qui s'accordait également contre le défendeur, lorsqu'après s'être présenté, il ne signifiait pas ses moyens de défense contre la demande; et le défaut faute de plaider, qui s'obtenait, soit par le demandeur, soit par le defendeur, contre celui des deux qui, le jour où la cause était appelée à l'audience, se trouvait en demeure de la plaider.

» Inutile d'examiner si les jugemens rendus par défaut faute de défendre, étaient passibles d'opposition.

» Il suffit de remarquer que l'opposition était ouverte contre les jugemens rendus par défaut faute de plaider, comme elle l'était

de comparoir. L'art. 3 du tit. 35 de l'ordonnance de 1667 était là-dessus trés-formel.

» Mais y avait-il véritablement défaut de plaider, de la part de celui qui paraissait à l'audience, sans y prendre de conclusions et seulement pour y demander une remise; et en conséquence, cette partie pouvait-elle former opposition au jugement qui, sans avoir égard à sa demande en remise, avait statué au fond?

» Le parlement de Paris, qui d'abord avait jugé que non, par un arrêt du 27 août 1668, rapporté par Brillon, au mot Avocat, no 46, avait fini par reconnaître qu'il avait alors mal saisi l'esprit de l'ordonnance de 1667, qui, ne faisant, à cette époque, que de paraitre, n'était pas encore bien connue; et il ne faisait aucune difficulté d'admettre, dans ce cas, l'Opposition de la partie qui avait été condamnée sans plaider. C'est ce que nous ont plusieurs fois astesté les praticiens les plus expérimentés du ressort de cette cour. Et en effet, il y avait certainement faute de plaider, lorsque le défenseur d'une partie, après avoir inutilement conclu à une remise, déclarait qu'il ne plaiderait pas, et se retirait.

>> Il est vrai qu'un arrêt de la section civile, du 17 vendémiaire an 13, a rejeté, au rapport de M. Boyer, le recours en cassation contre un jugement en dernier ressort par lequel le tribunal civil de Bayeux avait déclare non-recevable l'Opposition à un jugement rendu par défaut faute de plaider contre une partie qui avait comparu à l'audience pour demander une remise qu'on lui avait refusée. Mais quel a été le motif de cet arrêt? Considérant (y est-il dit) que des faits constatés par le jugement dénoncé, il résulte qu'à la pénultième audience tenue par le tribunal de Bayeux, avant les vacations de l'an 10, la cause d'entre les parties avait été appelée, ET QUE TOUTES Y AVAIENT PRIS DES

CONCLUSIONS FORMELLES SUR LE FOND DE LA

le ju

CONTESTATION; qu'il suit de là que la cause avait été contradictoirement engagée entr'elles; et que, nonobstant le refus que firent les demandeurs en cassation de plaider sur le fond, lorsque la cause fut de nouveau appelée à l'audience du 17 brumaire an 11, gement rendu contre eux ce même jour, n'en était pas moins un jugement contradictoire, contre lequel la voie de l'Opposition n'était pas admissible; qu'ainsi, le jugement dénoncé qui a déclaré cette Opposition non-recevable, n'a fait que se conformer, à cet égard, aux règles de la procédure. Comme vous le voyez,

Messieurs, si, dans cette espèce, la section civile a jugé que le jugement attaqué devait être réputé contradictoire, ce n'est point parceque la partie contre laquelle avait été pris le defaut faute de plaider, s'était trouvée à l'audience où ce défaut avait été prononcé; c'est uniquement parcequ'avant cette audience, les deux parties avaient respective ment conclu au fond; et l'arrêt lui-même s'en explique très-clairement. Il suit de là, portet-il, c'est-à-dire, il suit du fait qu'à l'une des audiences antérieures aux vacations de l'an 10, les deux parties avaient pris des conclusions formelles sur le fond de la contestation, que la cause avait été contradictoirement engagée entr'elles. Aussi fait-il entendre, d'une manière non équivoque, que, sans cette circonstance, le refus que firent les demandeurs en cassation, de plaider sur le fond, lorsque la cause fut de nouveau appelée à l'audience du 17 þrumaire an 11, le jugement rendu contre eux ce même jour, n'aurait pas été contradictoire.'

» Et c'est ce qu'avait expressément décidé, sous l'empire de l'ordonnance de 1667, l'arrêté du gouvernement du 29 thermidor an 11, portant réglement pour la cour d'appel de Paris. Après avoir déterminé, art. 24, la forme dans laquelle l'avoué de l'intimé devait prendre ses conclusions, dans l'absence de l'avoué de l'appelant, il ajoutait, art. 25: Si l'avoué de la partie adverse comparait, mais SANS POSER DES QUALITÉS (c'est-à-dire, sans prendre de conclusions au fond), il sera accordé défaut contre lui, comme s'il n'avait point comparu.

» Comme s'iln'avait point comparu! Donc, la seule comparution d'une partie à l'audience où il intervenait un jugement, ne suffisait pas, sous l'ordonnance de 1667, pour que ce jugement fût réputé contradictoire. Donc il fallait de plus qu'à cette audience, la partie qui comparaissait, prit au moins des conclusions au fond. Donc, faute de conclusions prises au fond de sa part, le jugement était, nonobstant sa comparution, réputé par défaut. Donc ce jugement était alors susceptible d'Opposition.

» Le Code de procédure civile a-t-il changé quelque chose à cette manière de distinguer les jugemens par défaut d'avec les jugemens contradictoires?

» Au premier abord, l'affirmative paraîtrait incontestable. « Si le défendeur (porte l'art. 149 de ce Code) ne constitue pas avoué, ou si l'avoué constitué ne se présente pas au jour indiqué pour l'audience, il sera donné défaut. Il semble, en effet,

que, pour qu'il ne puisse pas être donné défaut, il suffit que l'avoué constitué se présente à l'audience. Il semble par conséquent que, par cela seul que l'avoué constitué se présente à l'audience, le jugement qui intervient d'après sa comparution, doit être regardé comme contradictoire, quoique d'ailleurs il n'y ait eu de sa part ni conclusions ni plaidoirie au fond.

» Mais est-ce bien là le sens de l'art. 149 du Code de procédure civile? Peut-on croire qu'il regarde, comme se présentant avec effet à l'audience, l'avoue qui ne s'y présente que pour déclarer qu'il ne veut ou ne peut ni plaider ni conclure au fond?

» Ce n'est sûrement pas ainsi qu'on doit entendre sa disposition, si, pour en bien saisir le sens, on doit s'en rapporter à la signification que les lois romaines, ces sources éternelles de toute bonne législation, attachaient aux mots se présenter. La loi 52, D. de Regulis juris, déclare qu'on doit regarder comme défaillant, non seulement celui qui ne comparaît pas à l'audience, mais encore celui qui y comparaissant, refuse de plaider: non defendere videtur, non tantùm qui latitat, sed et is qui præsens negat se defendere aut non vult suscipere actionem.

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Or, qu'on doive entendre de même la disposition de l'art. 149 du Code de procédure civile, c'est ce qui résulte, tout à la fois, et des art. 342, 343 et 344 du même Code, et du décret du 30 mars 1808, contenant réglement pour la police et la discipline des cours et tribunaux.

» L'art. 342 du Code de procédure civile porte, en renouvelant une disposition de l'or donnance de 1667, que le jugement de l'affaire qui sera en état, ne sera différé, ni par le changement d'état des parties, ni par la cessation des fonctions dans lesquelles elles procédaient, ni par leur mort, ni par les décès, démissions, interdictions ou destitutions de leurs avoués. L'art. 343 ajoute : l'affaire sera en état, lorsque la plaidoirie sera commencée; LA PLAIDOIRIE SERA RÉPUTÉE COMMENCÉE, QUAND LES CONCLUSions auront ÉTÉ CONTRADICTOIREMENT PRISES A L'AUDIENCE...

Dans les affaires qui ne seront pas en état (continue l'art. 344), toutes procédures faites postérieurement à la notification de la mort de l'une des parties, seront nulles...

» Il résulte de ces articles deux conséquences: l'une, qu'après la mort d'une des parties arrivée avant le jugement de l'affaire, il ne peut plus être rendu de jugement par défaut au profit de la partie survivante, et que celleci ne peut plus obtenir qu'un jugement con

tradictoire, dans le cas où l'affaire y est disposée; l'autre, que pour qu'il puisse intervenir un jugement contradictoire, après la mort de l'une des parties, il ne suffit pas qu'auparavant, l'avoué de cette partie se soit présenté à l'audience, mais qu'il faut de plus qu'en se présentant à l'audience, son avoué ait pris des conclusions contradictoirement avec l'avoué de la partie adverse.

» Donc se présenter à l'audience, dans le sens de l'art. 149, ce n'est pas simplement faire l'acte d'une comparution matérielle, c'est prendre des conclusions au fond, et comme on le dit vulgairement, poser les qualités. Donc il n'y a de jugement contradictoire, qu'autant que les conclusions ont été prises au fond de part et d'autre. Donc tout jugement qui intervient sans conclusions préalablement prises au fond de part et d'autre, est par défaut.

» Le décret du 30 mars 1808 contient deux dispositions qui prouvent avec la même évidence que c'est ainsi qu'on doit entendre l'art. 149 du Code de procédure.

» Par l'art. 28, qui est placé sous le titre des cours d'appel, il est dit que le premier jour d'audience de chaque semaine, le président de la chambre fera appeler un certain nombre de causes, dans lesquelles il fera POSER LES QUALITÉS ET PRENDRE LES CONCLUSIONS, en indiquant un jour pour plaider.

» L'art. 69, qui fait partie du titre des tribunaux de première instance, porte également qu'après l'appel qui doit se faire, le premier jour d'audience de chaque semaine, d'un certain nombre de causes affichées, si un seul des avoués se présente, il sera tenu de requérir jugement; (que) si les deux avoués sont présens, ils seront tenus de POSER LES QUALItés et de prendre DES CONCLUSIONS; (et qu') il leur sera indiqué un jour pour plaider.

» Pourquoi, lorsque les deux avoués se présentent à l'appel d'une cause, doivent-ils poser les qualités et prendre des conclusions, quoique d'ailleurs ils ne soient ni l'un ni l'au tre prêts à plaider, ou, ce qui revient au même, quoique les juges ne soient pas en mesure pour entendre leurs plaidoiries respectives? C'est évidemment afin que, dès ce moment, les plaidoiries soient réputées commencées; c'est afin que, dès ce moment, l'affaire soit censée en état d'être jugée; c'est afin que le jugement qui interviendra par la suite, soit réputé contradictoire, n'importe que l'un des deux avoués se représente ou ne se représente pas au jour indiqué, n'importe qu'au jour indiqué, l'un des deux avoués

plaide en se représentant, ou ne se représente que pour demander une nouvelle remise. » Donc encore une fois, la présentation de l'avoue à l'audience ne suffit pas seule pour imprimer au jugement qui intervient après, le caractère de jugement contradictoire; donc le jugement ne devient contradictoire que par l'effet des conclusions prises au fond par l'avoué comparant; donc point de conclusions prises au fond par l'avoué comparant, point de jugement contradictoire.

» Comment, d'après cela, l'arrêt attaqué a-t-il pu déclarer contradictoire et par conséquent non susceptible d'Opposition, le jugement qui avait été rendu, le 29 mars 1809, au tribunal civil de Blaye?

» C'est, a-t-il dit, parceque la cause avait été plaidée à l'audience du 25 du même mois, et continuée à l'audience du 29 par un jugement contradictoire; ce qui a suffi pour rendre également contradictoire celui du 29; que d'ailleurs il appartenait au tribunal de première instance de fixer la qualité de ce jugement; et que dès qu'il l'a déclaré contradictoire, il doit être réputé tel.

été plaidée à l'audience du 25 mars ? Elle ne » Mais d'abord, par qui la cause avait-elle l'avait été, et le jugement du 25 mars même en fait foi, elle ne l'avait été que par l'avoué du sieur Fournier, demandeur; elle ne l'avait pas été par l'avoué du sieur Chateauneuf, qui s'était borné à en requérir la continuation. Et, remarquons-le bien, l'arrêt ne dit pas le contraire: il ne dit pas que la cause avait été plaidée par les deux avoués; il dit seulement qu'elle avait été plaidée; et en ne disant pas par qui elle l'avait été, il se refère évidemment au jugement lui-même, dans lequel il est énoncé en toutes lettres qu'il n'y a eu de plaidoiries, le 25 mars, que de la part de l'avoué du demandeur. Ainsi, ce n'est point par une erreur de fait que l'arrêt qualifie de contradictoire le jugement du 25 mars; il ne le qualifie de contradictoire que par une erreur de droit, que parcequ'aux yeux de la cour d'appel, il suffit, pour établir la contradiction, qu'il y ait eu plaidoirie d'une part, et, de l'autre, simple présentation avec demande en remise de la cause.

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» Ensuite, est-ce bien sérieusement que la cour d'appel dit qu'il appartenait au tribunal jugement du 29 mars, et que, de première instance de fixer la qualité du dès bunal de première instance l'a déclaré contradictoire, il doit être tenu pour tel? Où la cour d'appel a-t-elle pris que les tribunaux de première instance ont un pouvoir discrétionnaire pour déterminer la qualité des jugc

mens qu'ils rendent, pour décider si ces jugemens sont contradictoires ou par défaut? Eu cette matière, comme en toute autre, les tribunaux de première instance n'ont et ne doivent avoir d'autre boussole que la loi; s'ils qualifient de contradictoires des jugemens qui n'ont été rendus que par défaut, le devoir des cours d'appel est de les réformer; et les cours d'appel qui manquent à ce devoir, s'approprient, par cela seul, les infractions à la loi qu'ils se sont permises.

» Ici, sur quel fondement le tribunal civil de Blaye avait-il déclaré contradictoire le jugement du 29 mars? Sur le seul fondement que la cause se trouvait contradictoirement engagée entre les parties par leurs comparutions respectives relatées dans les jugemens des 18 et 25 du même mois. Le tribunal civil de Blaye avait donc décidé que, pour qu'un jugement soit contradictoire, il suffit que les deux parties aient comparu, sans prendre des conclusions. Il avait donc violé l'art. 431 du Code de procédure civile, et les art. 28 et 29 du décret du 30 mars 1808.

» Et inutilement prétendrait-on que le sieur Chateauneuf doit être présumé avoir pris des conclusions au fond dès la première audience, c'est-à-dire, dès l'audience du 18 mars. Inutilement prétendrail-on faire résulter cette présomption de ce que l'art. 69 du décret du 30 mars 1808 obligeait les deux avoués présens à cette audience, de poser les qualités et de prendre des conclusions.

» Oui, les deux avoués étaient tenus de prendre leurs conclusions à cette audience. Mais de ce qu'ils y étaient tenus, s'ensuit-il qu'ils doivent être présumés l'avoir fait tous deux? Non assurément.

» Dans le fait, le jugement ne relate que les conclusions de l'avoué du sieur Fournier; et c'est déjà une preuve morale qu'il n'a point été pris de conclusions par l'avoué du sieur Chateauneuf.

» Dans le droit, la preuve qu'il a été pris des conclusions dans telle affaire par telle partie, ne peut s'établir par des présomptions; elle ne peut résulter que du jugement même. Tout jugement doit, aux termes de l'art. 141 du Code de procédure, contenir dans sa rédaction, une copie entière des conclusions des parties; et comme il fait foi jus. qu'à inscription de faux, de l'exactitude de sa rédaction, il est clair que, s'il ne rapporte que les conclusions d'une seule des parties, il forme une preuve légale que l'autre partie n'a point pris de conclusions.

pu

» C'est ainsi que, bien que le ministère blic doive être entendu dans toutes les affai

res qui intéressent l'État, les mineurs et les communes, le défaut de mention expresse de l'audition du ministère public dans les jugemens rendus sur ces sortes d'affaires, forme une preuve irrefragable que le ministère public n'y a pas été entendu, lors même qu'il est énoncé avoir été présent à l'audience. La cour l'a ainsi jugé par un grand nombre d'arrêts, notamment le 16 juillet 1806, en cassant un jugement rendu en dernier ressort au désavantage de la dame Desson.

doi

>> C'est ainsi que, bien que les jugemens rendus sur des affaires d'enregistrement, vent être précédés d'un rapport fait par l'un des juges, le défaut de mention expresse qu'un rapport a été fait par l'un des juges présens à l'audience, forme une preuve irréfragable qu'il n'y a point eu de rapport avant le jugement. La cour l'a ainsi jugé par deux arrêts, l'un du 4 fructidor an 11, au rapport de M. Coffinhal et sur notre réquisitoire, l'autre du 19 décembre 1809, au rapport de M. Audier-Massillon.

» Et si, dans ces cas, ni le ministère public ni les juges ne peuvent être présumés, à défaut de mention expresse dans le jugement, avoir fait ce que la loi exigeait d'eux, comment, dans notre espèce, l'avoue du sieur Chateauneuf pourrait-il, à défaut de mention expresse de conclusions prises de sa part, dans le jugement du 18 mars 1809, être présumé avoir, à l'audience où ce jugement a été rendu, satisfait à la loi qui voulait qu'il y prit des conclusions ?

» Il y donc ici tout à la fois et preuve morale et preuve légale que l'avoué du sieur Chateauneuf n'a pris des conclusions ni à la première audience de la cause, ni aux au

diences suivantes.

» Dès-lors, nulle raison, nul prétexte, pour qualifier de contradictoire le jugement définitif du 29 mars 1809. Dès-lors, par conséquent, nécessité de casser l'arrêt qui l'a jugé tel.

"Par ces considérations, nous estimons qu'il y a lieu d'admettre la requête du demandeur ».

Ces conclusions ont été adoptées par arrêt du 6 décembre 1810, au rapport de M. Bailly. L'affaire n'a pas eu d'autre suite, j'ignore pourquoi; mais V. le no suivant.

II. La seconde question s'est présentée avec une autre qui est indiquée sous le mot Preuve, §. 5, no 2, dans l'espèce suivante :

Antoine Bonnet tenait à bail verbal, pour le prix de 150 francs par an, une maison appartenant au sieur Froidevaux et à la dame

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