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résultera du jugement même d'éviction. Elle ne veut point ouvrir la porte à cette foule de difficultés qui ne manqueraient pas de naître, si la bonne foi pouvait être établie par toute espèce de moyens.

42. Suivant la definition donnée par le projet, on entend par alluvion les accroissements qui se forment successivement et imperceptiblement aux fonds riverains d'un fleuve ou d'une rivière. Cette définition est celle de la loi romaine. Pour que l'alluvion existe, il faut que l'accroissement ait été successif et imperceptible; ces deux conditions sont absolument indispensables: la nature, par une opération si lente, semble s'être complue à gratifier les fonds riverains de ce supplément de richesse: c'est en effet le fonds riverain qui profite de l'alluvion. Le projet ne distingue point si l'alluvion provient d'un fleuve ou si elle provient d'une rivière, si cette rivière est navigable, ou si elle ne l'est pas. Autrefois il n'en était pas ainsi : quand il s'agissait d'un fleuve ou d'une rivière navigable, les atterrissements et accroissements n'appartenaient point aux particuliers, ils appartenaient au principe. Dans le cours du dix-septième siècle, plusieurs édits et déclarations confirmerent les possesseurs de ces atterrissements dont la possession remontait à une époque antérieure a l'année 1566, à la charge de payer une redevance foncière. C'était donc par grâce spéciale qu'on laissait en paix les antiques possesseurs; c'était aussi déclarer implicitement que ceux qui n'avaient point une si longue possession devaient être dépossédes. C'était répéter enfin que, pour les fleuves et rivières navigables, l'alluvion n'avait lieu qu'au profit du prince; et si, dans quelques provinces, la résistance des cours souveraines vint à bout d'arrêter l'effet des arrêts du conseil, ils ne furent que trop efficaces dans tout le reste de la France.

A l'égard des rivières non navigables, les terres d'alluvion n'accroissaient les héritages contigus qu'en accroissant la mouvance et les droits des seigneurs. C'était le droit commun de la France coutumière. Les coutumes de Normandie, d'Auxerre, de Sens et de Metz en contiennent des dispositions formelles. Il paraît bien extraordinaire, disait à ce sujet un savant commentateur de la commune de Normandie, que le seigneur étende sa tenure sur une terre qui n'a jamais fait partie de son fief, et que celui qui profite de l'alluvion soit obligé de payer les droits seigneuriaux comme des autres héritages adjacents.» (Basnage.) — Ainsi les propriétaires riverains ne pouvaient prétendre qu'à une alluvion formée par les rivières non navigables, et encore ces accroissements étaient-ils dans le pays coutumier sujets à la maxime nulle terre sans seigneur.

Aucune de ces entraves ne subsiste plus.

Depuis l'abolition de la féodalité, toutes les terres sont également libres. - Le cvde déclare expressément que le propriétaire riverain profitera de l'alluvion formée par le plus grand fleuve, comme de celle formée par la plus petite rivière. Seulement si c'est un fleuve ou une rivière navigable, le riverain sera tenu de se conformer aux règlements, qui exigent qu'on laisse le marchepied ou le chemin de halage. Ces règlements sont fondés sur des motifs évidents d'utilité publique. 43. Quand le fleuve, en s'éloignant d'un côté de la rive, aurait inonde dans la même proportion les terres de la rive opposée et s'y serait établi, le propriétaire des terres couvertes par le fleuve ne pourrait reclamer le profit de l'alluvion.-Independamment des embarras et difficultés qui seraient la suite inévitable de pareilles réclamations, la préférence doit être accordée au propriétaire le plus voisin de l'alluvion, puisque la partie découverte s'y trouve réunie naturellement : ni l'alluvion ni l'inondation ne viennent de son fait. Sa propriété, au lieu de s'être accrue, pouvait être diminuée; c'est une chance qu'il a courue personne ne l'aurait dédommagé du mal, personne ne doit le priver du bien. Tout ce qui vient d'être dit est applicable aux eaux courantes.

44. La loi n'etend point le droit d'alluvion aux relais de la mer. Les rivages de la mer font partie des limites de l'Etat. L'intérêt politique exige pour tout ce qui concerne la mer et ses rivages une législation spéciale.

45. Ce qu'on appelle alluvion étant un accroissement successif et imperceptible, il en résulte que les terres enlevées tout à coup par un fleuve ou une riviere navigable ou non, et portées vers un champ inférieur, ou sur la rive opposée, ne peuvent être considérées comme terres d'alluvion. Le propriétaire a le droit de réclamer sa propriété partout où il la trouve. L'enlèvement de ses terres est l'effet d'une crise violente opposée à la marche ordinaire de la nature. L'on ne peut pas dire que la nature a uni; on doit dire au contraire que la violence a desuni. Tant que le propriétaire du champ auquel la partie enlevée se trouve jointe n'a pas encore pris possession de cette partie, l'ancien propriétaire est recevable à réclamer. Il ne l'est plus, s'il a laissé passer un an depuis la prise de possession. - Un plus long terme prolongerait l'incertitude des nouveaux possesseurs, et retarderait la culture de leurs nouvelles terres. Le silence que l'ancien proprietaire a gardé pendant une année suffit pour faire présumer qu'il n'a pas voulu faire usage de son droit de réclamation.

46. Les lacs et etangs ne sont pas non plus sujets aux droits d'alluvion. Ce ne sont point des eaux courantes susceptibles de s'étendre d'un côté et de s'éloigner de l'autre; le volume de l'eau vient-il à diminuer? c'est l'effet de la sécheresse, ou d'une déperdition d'eau causée par quelque circonstance locale: augmente-t il considérablement? c'est l'effet des pluies abondantes. Si donc l'étang est à sec en quelque partie, le proprietaire de l'elang ne perd rien de ce qui est découvert; de même, en cas de crue extraordinaire, il ne gagne rien de ce que l'eau vient à couvrir au delà de son lit.

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47. Les fles qui se forment dans le lit des fleuves appartiennent à la nation; il est de même de celles qui se forment dans les rivières navigables ou flottables. La lai maintient les droits résultant du titre ou de la prescription. Quant aux autres rivières, l'une des rives est plus près que l'autre de la totalité de l'île, ou chacune des rives en avoisine une partie : Dans le premier cas, l'ile appartient au propriétaire riverain du côté ou elle existe; - Dans le second, elle appartient aux riverains des deux côtés: chacun a droit à une part plus ou moins grande, suivant que l'île s'étend plus ou moins de son côté. Les îlots et atterrissements sont soumis aux mêmes dispositions que les îles. La distinction entre les fles des rivières navigables ou flottables et celles des autres rivières est fondee sur ce que les rivières de la première classe sont d'une bien plus haute importance pour l'Etat, à cause de l'intérêt du commerce, et que rien de ce qui se forme au milieu de leur cours ne doit être étranger au domaine public. Si l'île est formée non dans le lit de la rivière, mais sur le champ riverain qu'entoure un bras nouveau, le proprietaire de ce champ en conserve la propriété, lors même que la rivière serait navigable ou flot

vota l'adoption du titre le 4 pluv., à la majorité de cinquantedeux voix contre une. Ce vote fut porté au corps législatif le

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table. Le propriétaire est assez malheureux de voir une partie de sa propriété inondée, et le surplus converti en île. La loi ne veut point aggraver son infortune: d'ailleurs ce n'est point une fle qu'il acquiert, c'est un debris qui lui reste de sa propriété continentale.

48. Lorsqu'un fleuve ou une rivière abandonne son ancien lit et se forme un nouveau cours, la loi assigne aux propriétaires des fonds nouvellement occupés l'ancien lit abandonné cette concession leur est faite pour les indemniser de ce qu'ils ont perdu; ils doivent donc avoir chacun une part proportionnée du terrain qui leur a éte enlevé Les motifs de la disposition sont dans le texte même, puisqu'il y est dit que c'est à titre d'indemnité.

49. Enfin, les animaux qui passent d'un colombier, d'une garenne, ou d'un étang où ils habitaient, dans un autre lieu semblable appartenant à un autre proprietaire, deviennent la propriété de celui-ci. Le motif est que ces animaux suivent toujours le sort du lieu où ils se trouvent; ils appartenaient au premier maître tant qu'il ont été dans son domaine, ils ont changé de domaine, ils ont changé de maître. Si cependant on les avait attirés par fraude ou artifice, l'ancien propriétaire n'aurait pas perdu ses droits sur eux. L'improbité ne peut être un moyen d'acquérir.

50. La dernière partie du projet de loi concerne le droit d'accession relativement aux choses mobilières. Il annonce d'abord qu'en pareille matière c'est toujours d'après l'équité naturelle qu'il convient de se déterminer. Les cas elant extrêmement varies, il serait impossible de les prévoir tous. Le projet établit des principes généraux auxquels les espèces particulières pourront être facilement appliquées. Deux choses appartenant à differents maîtres sont-elles unies de manière à former un tout? on doit examiner quelle est la partie principale et quel est l'accessoire. Le projet donne un developpement à cet egard: il explique, on ne peut mieux, ce que c'est que l'accessoire, en disant que la partie principale est celle à laquelle l'autre n'a été unie que pour l'usage, l'ornement, ou le complément de la première. A qui le tout appartient-il? Le projet décide que c'est au maître du principal; mais il ne peut le retenir qu'en payant à l'autre la valeur de ce qui lui appartient.-Quoique les deux choses ne soient point inseparables, quoique l'une puisse subsister sans l'autre, il suffit, dans la règle générale, que toutes les deux forment un tout, pour que le mattre de l'accessoire ne puisse en exiger la separation. S'il en était autrement, la séparation ne s'effectuant jamais sans des dégradations sur l'une ou l'autre de ces deux choses, et quelquefois sur toutes deux, il en résulterait une source de difficultés que la loi veut prévenir.

51. Il est une exception à cette règle; c'est lorsque l'accessoire est beaucoup plus précieux que le principal, et que l'union a été faite sans que le maître de l'accessoire en fût instruit. Ce propriétaire souffrirait trop de l'application rigoureuse du principe général pour que la loi ne vienne pas à son secours. Elle l'autorise à demander la restitution de la chose unie. Quand cet accessoire ne pourrait être séparé sans quelque dégradation de la partie principale, il ne serait pas moins recevable. La loi ne veut pas que le proprietaire d'un objet important puisse en être privé par l'effet d'une union opérée à son insu: il ne doit pas être victime de ce qu'il n'etait pas à portée d'empêcher. Cette exception est nécessaire. En telles circonstances, l'asservissement aveugle au principe général, loin d'être un hommage rendu à l'équité, serait plutôt une atteinte à ses premieres règles. - On demandera peut-être laquelle des deux choses unies pour former un tout doit être réputée principale, lorsqu'aucune d'elles n'est, strictement parlant, l'accessoire de l'autre. Le projet répond à cette question: il declare que c'est la plus considėrable en valeur. Les valeurs sont-elles à peu près égales? Alors c'est la plus considerable en volume. On voit les précautions que la loi prend afin d'éviter les démembrements que souvent l'humeur provoquerait, et qui d'un tout, peut-être fort utile, ferait deux parties réduites à peu de choses par 'effet de dégradations presque toujours inevitables On ne doit pas perdre de vue que dans ce cas, comme dans tous les autres, celui à qui le tout appartient doit payer la valeur de la chose unie à l'individu qui en est privée.

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52. Parcourons d'autres hypotheses, en suivant toujours la marche tracee par le projet. Une matière est employée par celui à qui elle n'appartient pas, et de cet emploi il résulte une chose d'une nouvelle espèce. A qui cette chose doit-elle appartenir? est-ce au proprietaire de la matière? est-ce à l'individu qui lui a donné une autre forme?

Le projet de loi répond que le propriétaire de la matière a le droit de réclamer la chose qui en a été formée, en remboursant le prix de la main-d'œuvre. Il avertit expressément qu'il ne faut point distinguer si la matière peut on non reprendre sa première forme: il veut que la decision soit applicable au second cas comme au premier. Il fait une seule exception, qui est conforme à celle déjà faite pour une autre hypothèse, et que le même esprit a dictée; c'est lorsque la main-d'œuvre est précieuse, et que la matière l'est fort peu en comparaison de la main-d'œuvre. Justinien, dans ses Institutes, avait prononcé la même exception: Il serait absurde, dit-il, que l'ouvrage d'un Apelles ou d'un Parrhasius pût être réclame à droit d'ac cession par le propriétaire d'une toile sur laquelle ce chef-d'œuvre serait peint. Il décide que la chose peut être retenue par celui qui l'a travaillee, en remboursant le prix de la matière au propriétaire. C'est aussi ce que décide le projet de loi. Justinien observe que sa disposition ne s'applique qu'au cas ou, par exemple, l'artiste qui voudrait retenir la chose aurait possède de bonne foi la matière qu'il aurait employee; car s'il l'avait enlevée, non-seulement il ne pourrait se prevaloir de la chose mais encore il serait sujet à des poursuites extraordinaires. Comme cette disposition est applicable à tous les cas où l'on aurait voulu s'approprier une chose dont on n'était pas proprietaire, elle se trouve placée à la fin du projet de loi, afin de ne pas être oblige de la rappeler à chaque article.

Le passage qui vient d'être cité des Institutes de Justinien sert à expliquer un autre article aussi des Institutes, qui a fixé l'attention particuliere des plus habiles commentateurs (lib. 2, tit. 1, §§ 33 et 34). Il est dit que si quelqu'un a écrit sur une feuille ou parchemin qui ne lui appartient pas, un poëme, une histoire ou un discours, ce qui est écrit doit appartenir au proprietaire de la feuille ou parchemin. — - Il est évident que la loi, dans cette decision, n'a entendu parler que de l'opération mécanique de l'écriture. D'une part, le texte dit que la disposition est applicable, quand même l'écriture serait en lettres d'or; de l'autre, la disposition ou Justinien cite pour exemple un tableau d'Apelles ou de Parrhasius fait bien voir que dans les ouvrages de génie ou d'invention le travail de l'auteur ou de l'artiste

6 pluv., par MM. Faure, Grenier et Leroy : ce fut M. Grenier qui porta la parole (1).—Le projet fut décrété le même jour à la ma

doit, à raison de son prix supérieur, lui en attribuer la propriété préférablement an maître de la chose employée pour peindre ou pour écrire.

53. Je ne m'arrête pas longtemps,sur l'exception rel tive aux ouvrages précieux. — Dans la derniere hypothèse présentée par le projet, il existait une seule malière et la nouvelle forme qu'elle avait reçue lui avait été donnée par un autre que le propriétaire. Dans l'hypothese actuelle, deux matières ont été employees pour former une chose d'une nouvelle espèce celui qui les a employées n'avait la propriété que de l'une d'elles. On suppose en même temps qu'aucune des deux matières n'est entièrement détruite, mais que la séparation ne pourrait avoir lieu sans inconvénient. Le projet voulant prévenir les difficultés qui naîtraient d'une telle séparation, porte que la chose sera commune aux deux propriétaires; l'un y prendra part pour sa matière et pour sa main-d'œuvre, l'autre pour sa matière seulement Par ce moyen, les intérêts de chacun se trouvent conservés : l'exécution est simple et facile, et la chose n'est point détériorée.

-

54. Lorsque plusieurs matières appartenant à différents propriétaires ont servi par leur mélange à former une chose, le tout appartient au propriétaire de la matière principale. Le principe général reçoit ici son application. Si aucune des deux ne peut être regardée comme la matière principale, ou l'on peut les séparer sans inconvénient, ou des inconvénients réels naîtraient de la séparation qui en serait faite.Si elles peuvent être séparées, celui à l'insu duquel les matières ont été mélangées a le droit d'en demander la division. Dans le cas où le mélange s'est fait à la connaissance de tous, la chose leur appartient en commun dans la proportion de la quantité, de la qualité et de la valeur des matières appartenant à chacun d'eux. Elle leur appartient aussi en commun dans cette même proportion, lorsque les matières ne peuvent être séparées. Il est impossible que cela soit autrement peu importe que le melange ait été fait à l'insu de l'un des proprietaires, ou qu'il ait eté fait à la connaissance de tous. En vain, celui qui pretendrait l'avoir ignoré demanderait la division des matières, puisqu'elles sont devenues inséparables. La loi lui offre une ressource dans les dommages-intérêts qui lui seraient accordés à raison du préjudice qu'il aurait souffert. — Enfin, la même exception qu'on a eu occasion de remarquer plusieurs fois dans le projet, est établie en faveur du propriétaire dont la matière est de beaucoup supérieure à celle de l'autre par le prix et la quantité; s'il veut avoir la chose provenant du melange, elle ne peut lui être contestée, pourvu qu'il rembourse à l'autre la valeur de sa matière. — C'est à la sagesse des juges qu'il appartient de déterminer les cas où l'une des matières est d'un prix tellement supérieur à l'autre qu'il convient d'appliquer l'exception plutôt que le principe général. Il etaii impossible que la loi s'expliquât davantage à cet egard.

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timent. On doit encore espérer d'être écouté de vous, citoyens législateurs, ne fûtce que sous le simple rapport d'une réunion de suffrages emis au nom des premières autorités de l'Etat, à l'appui des principes importants qu'il s'agit de confirmer.

Le respect dû au droit individuel de propriété, tel qu'il est actuellement établi, et qu'il a existé chez tous les peuples policés qui se sont cachés dans la nnit des temps et qui ne vivent que dans l'histoire, est un de ces dogmes politiques que l'homme, dans quelque position qu'il soit, ne peut méconnaftre lorsqu'il fait usage de sa raison. -Les funestes expériences qui nous ont été transmises par les monuments historiques de toutes les nations établiraient seules la necessité de le maintenir plus que ne pourraient le faire tous les raisonnements. Les dissensions civiles qui ont agité les peuples, les malheurs qui ont pesé sur eux, ont presque toujours dù leur existence au renversement ou à l'oubli du principe conservateur de la propriéte; et l'ordre et le bonheur dont ils ont joui peuvent être regardės comme le signe du respect qu'ils lui ont porté. · Şi l'on n'a jamais attaque co principe sans que les fondements des sociétés n'aient été ébranlés, si elles n'ont repris leur antique splendeur que lorsqu'il y a été reconnu comme sacré, il faut en conclure qu'il est le point de ralliement de toute reunion politique, que le bonheur public dépend de son maintien; et si la propriété individuelle produit de pareils effets, ce ne peut être que parce qu'elle est parfaitement appropriée à la nature de l'homme. Sous quelque rapport en effet qu'il se considère, il sent la nécessité de posseder des biens, quels qu'ils soient. Ces biens sont un accessoire de sa vie; ils ont éte destinées, dans les vues de la providence divine, à sa subsistance et à celle des personnes à qui il est obligé de la procurer; et lorsqu'il a légitimement acquis ces biens, on ne peut pas plus y attenter, sous aucun rapport, qu'à son existence même.

Il est vrai que pour combattre, ou au moins pour jeter des doutes sur ce résultat, plusieurs écrivains ont indiscrètement accumulé beaucoup d'abstractions et de so phismes on a cru pouvoir soulever au moins un coin du voile qui couvre I origine de la propriété individuelle; on l'a attribuée à de simples conventions qui pouvaient être révoquées par d'autres; et en faisant entrevoir les prétendus avantages d'un egalite parfaite, qu'on a imaginé avoir dù exister, on a supposé que cette égalité, detruite seulement par une loi civile qu'on mettait en opposition avec la loi natu relle, pouvait être rétablie par une autre loi civile. C'est ainsi qu'on s'est joué quelquefois de ce qu'il y a de plus sacré au monde. D'abord, l'antiquité même de la propriete individuelle, c'est-à-dire (car, pour être entendu, il faut venir à la définition de cette propriété dans son essence) de cette qualité morale inhérente aux choses qui désigne le droit qui appartient à un individu d'en disposer exclusivement à tous autres; cette antiquité, dis-je, qui est à une hauteur que nos regards no peuvent atteindre, prouvent que les peuples n'ont pu longtemps exister en nation sans s'y soumettre, qu'elle est venue par la force même des choses, et que, dès lors, elle est la meilleure manière d'être, sous les rapports politiques et moraux.- Mais on peut aller plus loin, et on peut soutenir avec confiance que, quelque part et dans quelque état qu'on prenne l'homme, il a toujours existe une propriété individuelle, même dans le sens que je viens de l'entendre Si on fixe l'homme sauvage, la proie qu'il a fait tomber à ses pieds, fruit de ses sueurs et de son industrie, devient sa propriété; il peut légitimement la défendre contre celui qui veut la lui ravir. Il n'a pour lui que la loi naturelle, il est privé des secours de la loi civile, il est obligé d'y suppléer par la force: mais enfin, il est impossible de ne pas voir dans cette position même une propriété individuelle fondée sur le droit naturel, et qu'il n'appartient qu'à la loi civile de sanctionner.

55. Le surplus du projet de la loi contient des dispositions qui se réfèrent à tous les articles antérieurs. Lorsqu'il est dit que la chose commune doit être licitée, on suppose que les parties intéressées ne s'accordent point sur un partage amiable, et il est clair que c'est dans ce seul cas que la vente doit être faite en justice. Toutes les fois qu'un propriétaire peut réclamer la propriété d'une chose formée avec sa matière, et sans qu'il en ait eu connaissance, il est autorisé à demander que pareille matière lui soit délivrée en même nature, quantité, poids, mesure et bonté: s'il aime mieux demander sa valeur, il y est également autorisé. Rien de plus juste que cette disposition. Dès que le proprietaire n'a point consenti à l'emploi qu'on a fait de sa matière, il ne peut être forcé de la prendre telle qu'elle est devenue par l'effet de l'emploi. Le remplacement de cette matière est une dette que l'autre propriétaire a contractée envers lui dès le moment où il s'est permis d'en faire usage; et si le proprietaire de la matière trouve que le juste remplacement soit plutôt dans la valeur de la matière employée que dans un autre de même nature qui ne réunirait peut-être pas toutes les qualites nécessaires pour équivaloir à celle qu'il avait; il est bien naturel qu'il ait le droif d'en exiger le prix. -Le dernier article du projet reserve aux parties lésées les dommages-intérêts, et à la sociéte, la vindicte publique, s'il y a fraude ou vol. J'ai terminé l'analyse motivée des dispositions du projet. Votre section a pensé que partout il portait l'empreinte du plus grand respect pour la propriété. L'esprit qui l'a dicté s'est attaché constamment à suivre le plus sûr des guides, l'équité naturelle. Ainsi, disparaîtront ces divers systèmes de législation qui rappelaient sans cesse au milieu d'une nation éclairée les resulta's effrayants des invasions des peuples du Nord; résultats d'autant plus faciles à sentir qu'on pouvait les comparer avec ce qui existait là où les Romains avaient conservé plus longtemps leur influence. N'hésitons point à le dire; c'est aux Romains que nous aurons le plus d'obligations pour le perfectionnement de notre legislation Nous sommes devenus rienes de leur science, forts de leurs maximes: ils ont recouvré par là une partie de leur empire. Quant aux lois qui remontent aux siecles d'ignorance, leur ancienneté n'a pu couvrir leurs vices; elles ont éprouvé le sort que la raison leur destinait elles seront désormais reléguées dans les archives de l'histoire; le souvenir de leur existence ne servira qu'à faire apprécier d'autant mieux la supériorité des lois nouvelles. Une bonne legislation sur les propriétés est le plus beau titre de gloire pour l'état qui la possède: elle vaut pour lui les plus brillantes conquêtes, puisqu'elle attire et réunit sous son egide tous ceux qui sont jaloux de partager ses précieux avantages. — La section de legislation me charge de vous proposer l'adop-négligée, et que cette négligence aurait fait éprouver le fléau des disettes. Enfin, cet tion du projet de loi sur la propriété.

(1) Discours prononcé au corps législatif par le tribun Grenier, l'un des orateurs chargés de présenter le vœu du tribunat sur la loi relative à la propriété (séance du 6 pluviose an 12).

56. Législateurs, si l'on peut se flatter d'obtenir l'attention d'une assemblée aussi respectable par les lumières des hommes qui la composent que par leur dignité, en lui parlant sur le droit de propriété, ce ne peut être que parce qu'il arrive des époques, où la proclamation de certaines vérités, quelque incontestables qu'elles soient, se fait entendre avec le plus vif intérêt. On est dans celle position lorsque des doutes repandus sur ces vérités reconnues pour être la base de tout ordre social ont causé des maux encore présents aux esprits, quoique réparés, et lorsqu'elles sont solennellement consacrees par les législateurs d'un grand peuple dans un code dont les dispositions doivent à jamais garantir la prospérité publique en stabilisant les fortunes particulières. C'était d'abord une tâche pénible d'avoir à vous entretenir sur une matière qui a été si souvent traitée, où l'on n'a tout au plus qu'à choisir les preuves; mais l'embarras augmente après ce qui vous a été dit aussi éloquemment à ce sujet et à cette même tribune par l'orateur du gouvernement. Cependant je sens que je remplis un devoir, et je fais taire tout autre sen

Il y a eu, dit-on, des peuples qui ont vécu en communauté de biens, et ce sont précisément ceux qu'on veut nous faire remarquer. - Nous devons convenir qu'il y a encore des traditions historiques qui nous apprennent que cet état de communauté a existe chez quelques peuples (a).. Mais suit-il de là qu'il n'y eût pas de propriété individuelle? Les Germains, qui sont mis au nombre de ces peuples, sont les seules dont les mœurs nous soient connues. Or, en même temps que l'historien célèbre qui les a tracées nous parle de l'espèce de communauté dans laquelle ils vivaient, on voit que les terres étaient distribuées non-seulement en proportion des besoins et du nombre de personnes qui composaient chaque famille, mais encore à raison de la dignite des emplois (b, c). - Ce n'est pas tout, il ajoute que le droit de succession y était établi, et il en explique le mode: or, concevra-t-on l'établissement d'un droit et d'un mode de succéder, sans supposer l'existence d'une propriété individuelle, qui devait au moins porter sur des objets possedés particulièrement, tels que les habitations, les meubles et les animaux.- Ainsi, dans l'état même où étaient ces peuples, on est force de reconnaître l'etablissement du droit de proprieté, non-seulement pour la totalité du territoire en faveur de la reunion contre les peuples voisins, mais encore pour la portion de chaque membre de la réunion dans le territoire indivis, indépendamment des choses qui servaient à l'usage de chaque père de famille.-D'ailleurs cet état de communauté, quel qu'il ait pu être, ne pouvait durer, parce qu'il était naturellement une source de dissensions, que l'agriculture, qui pour prospérer doit être confiée à l'intérêt personnel, aurait été

état ne pouvait subsister, parce qu'il était lui-même un état de barbarie, et que l'homme était destiné à jouir des avantages précieux de la civilisation qui ont laissé à une distance immense l'être physique de l'être moral. La nécessité du partage ne dut pas tarder à se faire sentir (d). Le partage une fois fait, le droit de propriété fut à son dernier degré de détermination. Ce ne fut pas par l'effet d'une convention, mais par l'exécution d'un droit préexistant. La propriété individuelle se forma donc irrévocablement; elle est devenue la source de tout ordre public: c'est à son existence que l'homme est redevable de toutes ses jouissances, qui consistent principalement dans le développement de son industrie et de ses facultés naturelles. C'est pour la garantir que toutes les puissances de la terre ont été établies.

57. Je n'ai dit qu'un mot, et j'en ai dit assez sur cette égalité absolue à laquelle des hommes, dont la bonne foi serait plus que suspecte, voudraient nous ramener.

(a) Heineccius, dans une note sur le § 237 du chap. 9 de son ouvrage intitulé Elem. juris. nat. et gent., en fait la nomenclature.

(b, c) Tacite, de Morib. Germ. (Voir les citations à la fin du vol.).

(d) Sur les causes qui ont dû amener cette division, voyez Puffendorf, Traité de la nature et des gens, liv. 4, chap. 4; avec les notes de Barbeyrac et le Traite philosophique des lois, par Richard Cumberland, chap. 4, § 23.

jorité de deux cent quarante-neuf voix contre cinq, et promulgué | chacun des articles du code, l'indication des passages de l'Exposé dix jours après, le 15 pluviose suivant: on ajoute, à la suite de

Qui ne sait que cette égalité absolue est la chimère de l'âge d'or, qui n'a existé que dans l'imagination des poëtes? L'inégalité des fortunes s'allie parfaitement avec l'ordre public. Cette vérité est si constante, qu'il serait très-inutile de la développer. Toute égalité, autre que celle des droits, est évidemment contredite par la nature, qui a établi, sous les rapports physiques et moraux, une bien plus grande distance d'individus à individus, qu'il ne pourrait en résulter de la difference des fortunes Rien de ce qui existe n'est exempt d'inconvénients et de maux : la sagesse veut qu'on prenne les moyens d'y remédier ou de les amoindrir; mais il n'y a que la folie qui pût en espérer l'extirpation en rentrant dans un chaos où le mal serait partout et le bien nulle part. Tels sont en peu de mots les dogmes fondamentaux des réunions sociales, confirmés par l'expérience des siècles et par l'assentiment de tous les peuples. Malheur au temps où un pronisme présomptueux el aveugle voudrait les obscurcir! Mais si jamais la posterite en était menacée, elle aurait à se féliciter qu'ils eussent été si solennellement proclamės par des hommes qu'on saurait avoir été témoins de troubles et de discordes, et avoir acquis, aux dépens de leur repos, quelque expérience sur ce qui constitue le bonheur public.

58. Tous les titres du code civil ne sont que le développement des règles relatives à l'exercice du droit de propriété; ce qui prouve déjà que la propriété est la base de toute législation, la source de toutes les affections morales et de toutes les jouissances auxquelles il est permis à l'homme d'aspirer. Mais le projet de loi soumis à votre sanction definit particulièrement la propriété; il en limite l'exercice selon les cas où l'intérêt général de la societé le commande; il donne des règles pour les circonstances ou les modifications de la propriété peuvent faire naître des doutes sur le point de savoir à qui elle appartient: il y a même des circonstances où on peut dire qu'il naft un droit de propriété; et le projet de loi l'assigne à celui qui doit l'avoir, d'après les principes de l'équité que l'on a tâche de saisir. La propriété est d'abord ainsi définie Le droit de jouir et disposer des choses de la maniere la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois et par les règlements. On sent au premier abord la justesse de cette définition; elle rappelle celle qu'on trouve dans le droit romain, qui paraît aussi avoir ele faite avec soin, Jus utendi et abutendi re sud, quatenus juris ratio patitur: mais, osons le dire, la définition contenue dans le projet de loi est plus exacte l'esprit se refuse à voir eriger l'abus de la propriete en droit: il est bien tolere par la loi civile tant qu'il ne nuit point à autrui; mais, dans les règles de la loi naturelle et de la morale, on ne doit pas se le permettre. Ainsi on était porté à penser que par ces expressions, Jus abutendi, les Romains n'avaient voulu entendre que le droit de disposer de la manière la plus absolue, et qu'ils s'en étaient seulement servis par opposition à ces mots, Jus utendi et fruendi, sous lesquels ils avaient défini l'usufruit. La condition de ne point faire de sa propriété un usage prohibé par les lois et par les règlements, est d'une justice évidente.

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59. L'intérêt général, qui est superieur à tous les intérêts privés, peut exiger qu'un particulier cede sa propriété. Ce droit pourrait-il ne pas exister, puisque, dans certains cas de nécessite, un simple citoyen peut être autorise à affecter la propriété d'un autre, comme, par exemple, si un chemin etait indispensable? Mais en même temps qu'on était occupé du droit du corps social, on s'est empressé de manifester le plus grand intérêt pour la propriété individuelle, en disant que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilite publique; et en ajoutant, et moyennant une juste et préalable indemnité. Il faut done qu'il soit constate qu'il y ait une cause d'utilité publique, ce qui, dans la nature des choses, peut être assimilé à une nécessité; et l'on ne peut être dessaisi de Ja propriete qu'antant qu'on aura prealablement reçu ce qui fera la juste indemnité. Ces precautions doivent faire disparaître toute crainte d'abus.

60. Je vous ai déjà parlé de certaines propriétés qu'on peut regarder comme naissantes, et de certaines autres qui se modifient par la reunion ou l'incorporation. Avant de donner des règles sur les divers cas particuliers, il a fallu d'abord poser ce principe général qui est incontestable, la propriéte d'une chose soit mobilière, soit immobilière, donne droit sur tout ce qu'elle produit et sur ce qui s'y unit accessoirement, soit naturellement, soit artificiellement. »Il s'agissait de definir ce nouveau droit de propriété émanant d'une proprieté déjà existante, et à ce sujet, le projet de loi a été amélioré respectivement aux lois romaines. Elles contenaient une Joule de distinctions qui ne pouvaient que jeter de l'embarras. On a remarqué la possibilité d'exprimer tous les differents modes, soit de production, soit de réunion, soit d'incorporation, sous une seule expression generique qui les rend également, et qui est celle d'accession. Cette expression se trouvant très-propre, le plan du projet de loi en est devenu plus simple Il a pu être composé de deux sections:

Dans la première, il y est traité du droit d'accession sur ce qui est produit par la chose. La seconde a pour objet le droit d'accession qui s'unit et s'incorpore à la chose:- - Mais, pour proceder avec plus de methode, on a divise cette seconde section en deux paragraphes: - Le premier a trait au droit d'accession relativement aux choses immobilières; · Le second concerne le même droit relativement aur choses mobilières. Il serait inutile d'examiner en détail les dispositions des articles qui composent ces deux sections; suffira de vous rappeler en masse les differentes espèces d'accessions qui y sont énoncées, et de fixer votre attention sur les règles qui y sont appliquées.

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61. Dans la premiere section relative à l'accession sur ce qui est produit par la chose après avoir consigné ce principe complémentaire de la propriété, que les fruitsaturels ou industriels de la terre, les fruits civils, le croft des animaux, appartiennent au propriétaire par droit d'accession, il a fallu en tirer la consequence que tout possesseur qui les perçoit sans être proprietaire en doit la restitution. Cependant on a maintenu la distinction si juste et qui a existe de tous les temps entre le possesseur de bonne foi et celui de mauvaise foi.-Cette distinction a amene naturellement la définition du possesseur de bonne foi; elle est ainsi conque: Le possesseur est de bonne foi quand il possède comme propriétaire en vertu d'un litre translatif de proprieté dont il ignore les vices. - Il cesse d'être de bonne foi du moment où les vices sont connus.»- Cette definition est plus positive qu'aucune de celles qui se trouvent dans le droit romain et dans quelques coutumies, et elle evitera beaucoup de contestations, car il s'en élève souvent, et en differents sens, qui sont subordonnées à la qualité de la possession.

62. Tout ce qui peut concerner l'accession relativement aux choses immobilières, qui fait l'objet du § 1 de la première section, peut se réduire à quelques points principaux que je vais rappeler succinclemcut.

des motifs, du Rapport et du Discours qui les ont expliqués (1).

1o On a fixé, dans l'art. 552, le principe élémentaire que la propriété du sol emporte la proprieté du dessous et du dessus; et les dispositions des articles suivants jusqu'au 556 ne sont que des conséquences sagement déduites de ce principe. -On n'y a pas oublié la limitation nécessaire relativement aux lois des servitudes, aux règlements de police et à ceux qui concernent les mines. Mais il arrive souvent que des constructions, plantations et ouvrages sont faits sur le sol avec des materiaux qui n'appartiennent pas au propriétaire. Il se présente alors des difficultés considerables. Vous sentez qu'il a fallu distinguer le cas où les ouvrages et plantations avaient été faits par le propriétaire lui-même avec des matériaux appartenant à d'autres, du cas où les ouvrages avaient été faits par des tiers avec leurs propres matériaux ; et à l'égard de ceux-ci il a fallu encore distinguer le possesseur de bonne foi de celui qui ne l'était pas.

Selon ces differentes circonstances, le projet de loi renferme des dispositions infiniment justes; mais le dernier paragraphe de l'art. 555 porte surtout un caractère de sagesse qui ne vous aura pas échappé. Lorsque des constructions, plantations ou autres ouvrages ont été faits par un possesseur de bonne foi, il paralssait trop dur qu'il fût réduit à la nécessité de les enlever sans indemnité; et un propriétaire qui aurait obtenu le désistement du fonds aurait pu abuser de cette nécessité pour s'enrichir aux dépens du possesseur celui-ci aurait éte contraint ou de supprimer les ouvrages en pure perte ou de les céder à un prix trop modique.-Il a paru juste que dans ce cas le propriétaire ne pût pas demander la suppression des ouvrages et qu'il fût tenu de rembourser une somme égale à celle dont le fonds a augmenté de valeur. Cependant cette obligation indéfinie de la part du propriétaire aurait quelquefois cessé d'être juste. Par exemple, le possesseur avec une avance de 300 fr. aurait pu augmenter la valeur du fonds de 2,000 fr. ou plus; cette augmentation aurait dû appartenir au propriétaire, comme inherente au fonds, jusqu'à concurrence de ce dont elle aurait excédé le montant de l'avance. Cette consideration a fait donner au propriétaire l'option, ou de rembourser une somme égale à celle dont le fonds a augmenté de valeur, ou de rembourser la valeur des matériaux et du prix de la main-d'œuvre. Au moyen de cette option, dans quelque cas que l'on se trouve, le possesseur de bonne foi reçoit toujours une indemnite relative à ses dépenses, s'il n'en a fait que d'utiles; et le proprietaire ne peut jamais être greve en remboursant une valeur qui serait le produit même de sa propriété.- - C'est aux jurisconsultes à apprécier cette disposition legislative : ils savent que ces différents cas n'étaient décidés par aucune loi positive, et qu'après avoir donné lieu à beaucoup de contestations, ils étaient entièrement soumis à l'arbitraire des tribunaux.

65. 2o Dans le cas de l'alluvion, le projet de loi rétablit la pureté des principes du droit romain. Il est dans la nature des choses que l'accroissement imperceptible désigné sous cette expression appartienne au propriétaire du fonds auquel il se forme. Le seul esprit de feodalite avait pu introduire quelques exceptions à cette règle. Le projet de loi contient une limitation relativement aux relais de la mer, qui est fondée sur le droit public, et une juste decision par rapport aux debordements des lacs et des étangs.

64. 3o Enfin toutes les modifications qui peuvent être la suite des inondations, des changements du cours des fleuves et des rivières, sont prévues dans le projet de loi; et, dans tous ces cas, la propriété est assignée au proprietaire du fonds auquel la nature et l'équite commandent de la laisser. C'est toujours en faveur de la propriété individuelle que la loi decide; toutes les idées fiscales ont disparu. La nation doit seulement avoir les îles, flots et atterrissements qui se forment dans le lit des fleuves ou des rivières navigables ou flottables. L'intérêt du commerce exige que ces fleuves ou rivières soient libres : la nation a déjà l'avantage de ne dessaisir personne de ces objets, puisqu'ils n'appartiennent à aucun particulier. Elle se dispense seulement d'exercer une espèce de liberalité, parce que l'ordre public en souffrirait. -Encore ne devons-nous pas oublier une limitation à cette règle; c'est que si une île etait formée du champ d'un particulier, qui aurait été coupé et embrassé par un fleuve ou une rivière même navigable ou flottable qui se serait fait un bras nouveau, ce particulier conservera l'île, qui est toujours son champ. C'est par un mème esprit de justice que le lit qu'un fleuve ou une rivière ont abandonne est laissé, à titre d'indemnité, aux propriétaires des fonds nouvellement occupes par le fleuve ou par la rivière.

65. A l'égard du droit d'accession relativement aux choses mobilières, qui fait la matière du § 2 de la même section 2, je crois pouvoir m'abstenir d'entrerdans des details ses dispositions sont encore presentes à vos esprits. Vous avez remarque qu'on y a suivi avec soin tous les genres de modifications que pouvaient éprouver des objets mobiliers par l'addition, le mélange ou la confusion; et soit que la propriété du nouveau corps qui en est résulte soit adjugée au propriétaire d'une des matières qui y ont été employees, à la charge d'une indemnite envers ceux à qui les autres matieres appartenaient, soit qu'on ait permis la désunion des matières employees, soit enfin que la citation devienne necessaire entre tous les copropriétaires; dans tous les cas, le projet de loi est conçu dans un esprit de sagesse auquel il est impossible de ne pas se rendre. Dans ce titre du code civil, plus peut-etro que dans aucun autre, on remarque des traces de la legislation romaine, parce que cette matière a dû être moins soumise que les autres objets de législation aux prejugés et aux habitudes. On a dù en puiser les décisions dans l'équite naturelle; et le peuple romain est celui de tous qui a su le mieux en déduire les principes. Mais on trouve dans le projet de loi un ordre et une netteté d'idées qui manquent dans les lois romaines, parce qu'elles étaient plutôt un recueil de decisions qu'un code de lois, et que ces decisions même out rarement éte recueillies dans l'ordre convenable. Tels sont, législateurs, les motifs qui ont determine le tribunat à donner son assentiment au projet de loi en question, et qu'il nous a charges de vous exposer. Il y a tout lieu d'esperer que ce projet obtiendra votre sanction.

(1) Extrait du code Napoléon, liv. 2, tit. 2, de la Propriété.

544. La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. V. Exposé des mot fs, Rapport et Discours qui précèdent, nos 1, 7, 55, 56 et s.

545. Nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable inden, - V. nos 8 s., 34 s., 59.

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CHAP. 1.-DU DROIT D'ACCESSION SUR CE QUI EST PRODUIT
PAR LA CHOSE.

547. Les fruits naturels ou industriels de la terre, les fruits civils, le croît des animaux, appartiennent au propriétaire par droit d'accession.-V. nos 12, 35, 61.

548. Les fruits produits par la chose n'appartiennent au propriétaire qu'à la charge de rembourser les frais des labours, travaux et semences faits par des tiers.-V. nos 13, 36.

549. Le simple possesseur ne fait les fruits siens que dans le cas où il est tenu de rendre les produits avec la chose au propriétaire qui la revendique.-V. nos 14, 37, 61.

550. Le possesseur est de bonne foi quand il possède comme propriétaire en vertu d'un titre translatif de propriété dont il ignore les vices. - Il cesse d'être de bonne foi du moment où ces vices lui sont connus. – V. nos 14, 37, 61.

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551. Tout ce qui s'unit et s'incorpore à la chose appartient au propriétaire, suivant les règles qui seront ci-après établies.-V. nos 15, 38. SECT. 1.- Du droit d'accession, relativement aux choses immobilières.

552. La propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous.- -Le propriétaire peut faire au-dessus toutes les plantations et constructions qu'il juge à propos, sauf les exceptions établies au titre des Servitudes ou services fonciers. Il peut faire au-dessous toutes les constructions et fouilles qu'il jugera à propos, et tirer de ces fouilles tous les produits qu'elles peuvent fournir, sauf les modifications resultant des lois et règlements relatifs aux mines, et des lois et règlements de police. V, nos 16, 38, 62.

555. Toutes constructions, plantations et ouvrages sur un terrain ou dans l'intérieur, sont présumés faits par le propriétaire à ses frais et lui appartenir, si le contraire n'est prouve; sans préjudice de la propriété qu'un tiers pourrait avoir acquise ou pourrait acquérir par prescription, soit d'un souterrain sous le bâtiment d'autrui, soit de toute autre partie du bâtiment. V. nos 17, 39, 62.

554. Le propriétaire du sol qui a fait des constructions, plantations et ouvrages avec des matériaux qui ne lui appartenaient pas, doit en paver la valeur; il peut aussi être condamné à des dommages-intérêts, s'il y a lieu; mais le propriétaire des matériaux n'a pas le droit de les enlever. V. nos 19, 40.

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555. Lorsque les plantations, constructions et ouvrages ont été faits par un tiers et avec ses matériaux, le propriétaire du fonds a droit ou de les retenir, ou d'obliger ce tiers à les enlever. Si le propriétaire du fonds demande la suppression des plantations et constructions, elle est aux frais de celui qui les a faites, sans aucune indemnité pour lui; il peut même être condamné à des dommages-intérêts, s'il y a lieu, pour le préjudice que peut avoir éprouvé le propriétaire du fonds. Si le propriétaire préfère conserver ces plantations et constructions, il doit le remboursement de la valeur des matériaux et du prix de la main-d'œuvre, sans égard à la plus ou moins grande augmentation de valeur que le fonds a pu recevoir. Néanmoins, si les plantations, constructions et ouvrages ont été faits par un tiers évincé, qui n'aurait pas été condamné à la restitution des fruits, attendu sa bonne foi, le propriétaire ne pourra demander la suppression desdits ouvrages, plantations et constructions; mais il aura le choix, ou de rembourser la valeur des matériaux et du prix de la main-d'œuvre, ou de rembourser une somme égale à celle dont le fonds a augmenté de valeur.-V. nos 18, 41, 62. 556. Les atterrissements et accroissements qui se forment successivement et imperceptiblement aux fonds riverains d'un fleuve ou d'une rivière, s'appellent alluvion. - L'alluvion profite au propriétaire r verain, soit qu'il s'agisse d'un fleuve ou d'une rivière navig ble, flottable ou non; à la charge, dans le premier cas, de laisser le marchepied ou chemin de halage, conformément aux règlements. V. ños 20, 42, 63. 557. Il en est de même des relais que forme l'eau courante qui se retire insensiblement de l'une de ses rives en se portant sur l'autre le propriétaire de la rive découverte profite de l'alluvion, sans que le riverain du côté opposé y puisse venir réclamer le terrain qu'il a perdu. Ce droit n'a pas lieu à l'egard des relais de la mer. V. nos 21, 43. 558. L'alluvion n'a pas lieu à l'égard des lacs et étangs, dont le propriétaire conserve toujours le terrain que l'eau couvre quand elle est à

ment se trouve au mot Expropriation pour utilité publique ; puis il formule cette autre règle générale que la propriété d'une chose donne droit sur tout ce qu'elle produit et sur tout ce qui s'y unit accessoirement. Tout le reste du titre est con

la hauteur de la décharge de l'étang, encore que le volume de l'eau vienne à diminuer. - Réciproquement, le propriétaire de l'étang n'acquiert aucun droit sur les terres riveraines que son eau vient à couvrir dans des crues extraordinaires. - V. no 46.

559. Si un fleuve ou une rivière, navigable ou non, enlève par une force subite une partie considérable et reconnaissable d'un champ riverain, et la porte vers un champ inférieur ou sur la rive opposée, le propriétaire de la partie enlevée peut réclamer sa propriété; mais il est tenu de former sa demande dans l'année après ce délai, il n'y sera plus recevable, à moins que le propriétaire du champ auquel la partie enlevée a été unie, n'eût pas encore pris possession de celle-ci. V. nus 22, 45.

560. Les iles, ilots, atterrissements, qui se forment dans le lit des fleuves ou des rivières navigables ou flottables, appartiennent à l'Etat, s'il n'y a titre ou prescription contraire.-V. nos 24, 47, 64.

561. Les iles et atterrissements qai se forment dans les rivières non navigables et non flottables, appartiennent aux propriétaires riverains du côté où l'île s'est formée : si l'ile n'est pas formée d'un seul côté, elle appartient aux propriétaires riverains des deux côtés, à partir de la ligne qu'on suppose tracée au milieu de la rivière. - V. nos 24, 47.

562. Si une rivière ou un fleuve, en se formant un bras nouveau, coupe et embrasse le champ d'un propriétaire riverain et en fait une île, ce propriétaire conserve la propriéte de son champ, encore que l'île se soit formée dans un fleuve ou dans une rivière navigable ou flottable. V. nos 24, 47, 64.

563 Si un fleuve ou une rivière navigable, flottable ou non, se forme un nouveau cours en abondonnant son ancien lit, les propriétaires des fonds nouvellement occupés prennent, à titre d'indemnité, l'ancien lit abandonné, chacun dans la proportion du terrain qui lui a été enlevé. — V. nos 25, 48, 64.

56. Les pigeons, lapins, poissons, qui passent dans un autre colombier, garenne ou étang, appartiennent au propriétaire de ces objets, pourvu qu'ils n'y aient point été attirés par fraude et artifice. →V. nos 26, 49. SECT. 2. Du droit d'accession relativement aux choses mobilières. 565. Le droit d'accession, quand il a pour objet deux choses mobilières appartenant à deux maîtres différents, est entièrement subordonné aux principes de l'équité naturelle. Les règles suivantes serviront d'exemple au juge pour se déterminer, dans les cas non prévus, suivant les circonstances particulières.-V. nos 27, 30. 50, 65.

566. Lorsque deux choses appartenant à différents maîtres, qui ont été unies de manière à former un tout, sont néanmoins séparables, en sorte que l'une puisse subsister sans l'autre, le tout appartient au maître de la chose qui forme la partie principale, à la charge de payer à l'autre la valeur de la chose qui a été unie. V. 27, 50, 54.

567. Est réputée partie principale celle à laquelle l'autre n'a été unie que pour l'usage, l'ornement ou le complément de la première. — V. nos 27, 50.

568. Néanmoins, quand la chose unie est beaucoup plus précieuse que la chose principale, et quand elle a été employée à l'insu du propriétaire, celui-ci peut demander que la chose unie soit séparée pour lui être rendue, même quand il pourrait en résulter quelque dégradation dé la chose à laquelle elle a été jointe. V. nos 27, 51.

569. Si de deux choses unies pour former un seul tout, l'une ne peut point être regardée comme l'accessoire de l'autre, celle-la est réputée principale qui est la plus considérable en valeur, ou en volume si les valeurs sont à peu près égales. - V. nos 27, 51.

570. Si un artisan ou une personne quelconque a employé une matière qui ne lui appartenait pas, à former une chose d'une nouvelle espèce, soit que la matière puisse ou non reprendre sa première forme, celui qui en était le propriétaire a le droit de réclamer la chose qui en a été formée, en remboursant le prix de la main-d'œuvre.-V. nos 28, 52. 571. Si cependant la main-d'œuvre était tellement importante qu'elle surpassât de beaucoup la valeur de la matière employée, l'industrie serait alors reputée la partie principale, et l'ouvrier aurait le droit de retenir la chose travaillée, en remboursant le prix de la matière au propriétaire. V. nos 28, 52.

572. Lorsqu'une personne a employé en partie la matière qui lui appartenait, et en partie celle qui ne lui appartenait pas, à former une chose d'une espèce nouvelle, sans que ni l'une ni l'autre des deux matières soit entièrement détruite, mais de manière qu'elles ne puissent pas se séparer sans inconvénient, la chose est commune aux deux propriétaires, en raison, quant à l'un, de la matière qui lui appartenait; quant à l'autre, en raison à la fois et de la matière qui lui appartenait, et du prix de sa main-d'œuvre. V. no 29, 53.

573. Lorsqu'une chose a été formée par le mélange de plusieurs matières appartenant à différents propriétaires, mais dont aucune ne pout

mis à l'acquéreur. Quant aux biens qui n'ont pas de maître, peut-on les acquérir par occupation? Non la loi pose, en principe général, que les biens vacants et sans maître appartiennent à l'État (V. infrà, nos 229 et s., le développement de ce principe). Ces choses contribuent à former la propriété privée de l'Etat. -V. Domaine de l'Etat.

sacré à l'explication et au développement de cette dernière règle. | tenaient antérieurement à une autre personne, qui les a transDans un premier chapitre, le législateur s'occupe du droit d'accession sur ce qui est produit par la chose. Il établit en principe que les fruits naturels, industriels et civils, et le croit des animaux appartiennent au propriétaire, sauf l'obligation de rembourser les frais des labours, travaux et semences faits par des tiers. Puis il fait exception au principe général qu'il vient de poser en faveur du possesseur de bonne foi, lequel fait siens les fruits qu'il perçoit sur la chose d'autrui. Le second chapitre

a pour objet le droit d'accession sur ce qui s'unit et s'incorpore á la chose. Il est divisé en deux sections, relatives: la première au droit d'accession en matière immobilière; la seconde, au droit d'accession en matière mobilière.

36. L'un des principes qui dominent la première de ces deux sections, c'est que la propriété du sol emporte la propriété du dessus et celle du dessous; principe fécond en conséquences, d'où résulte, pour le propriétaire du sol, d'une part, le droit aux constructions et plantations, sauf, dans certains cas, l'obligation d'indemniser le propriétaire des matériaux ou plantes, conformément aux distinctions établies sur ce point par le code Napoléon (V. infrà, nos 376 et suiv.); d'autre part, le droit aux carrières, mines et minières, sauf les modifications résultant des lois et règlements de police (V. Mines). — Un autre principe également important en cette matière, c'est que le propriétaire riverain d'un fleuve a droit à l'alluvion, c'est-à-dire aux atterrissements et accroissements qui se forment successivement et imperceptiblement à son fonds, ainsi qu'aux relais que forme l'eau courante qui se retire insensiblement de l'une de ses rives en se portant sur l'autre. Quant aux iles, la loi distingue suivant qu'elles se forment dans les rivières navigables ou dans les rivières non navigables; elle les attribue dans le premier cas à l'Etat, et, dans le second cas, aux riverains. — En matière mobilière, lorsque deux choses appartenant à des maîtres différents se trouvent unies de manière à n'en former qu'une seule, la loi veut que le droit d'accession soit subordonné aux principes de l'équité naturelle; et toutefois elle pose quelques règles qui doivent servir d'exemples au juge pour se déterminer dans les cas analogues. Ces règles seront exposées en leur lieu. V. infrà, no 622 et suiv.

37. Maintenant, comment s'acquiert le droit de propriété? C'est ce que ne dit point le tit. 2, liv. 2. du code Napoléon. La réponse à cette question se trouve dans les Dispositions générales (1) qui ont été placées en tête du livre 3, intitulé: Des différentes manières dont on acquiert la propriété. D'après ces dispositions, qui se composent de sept articles seulement, la propriété des biens s'acquiert et se transmet par succession (V. ce mot); Par donation entre-vifs ou testamentaire (V. Dispos. entre-vifs et test.) ;— Par l'effet des obligations (V. Obligations, Vente, Échange); Par accession ou incorporation (V. infrà, nos 250, 375) ; — Par prescription (V. ce mot). — Mais toutes ces manières d'acquérir, à l'exception peut-être de l'accession et de l'incorporation, supposent nécessairement que les biens appar

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être regardée comme la matière principale; si les matières peuvent être séparées, celui à l'insu duquel les matières ont été mélangées, peut en demander la division. - Si les matières ne peuvent plus être séparées sans inconvénient, ils en acquièrent en commun la propriété dans la proportion de la quantité, de la qualité et de la valeur des matières appartenant à chacun d'eux. . V. n° 54. 574. Si la matière appartenant à l'un des propriétaires était de beaucoup supérieure à l'autre par la quantité et le prix, en ce cas le propriétaire de la matière supérieure en valeur pourrait réclamer la chose provenue du mélange, en remboursant à l'autre la valeur de sa matière. V. nos 29, 54.

575. Lorsque la chose reste en commun entre les propriétaires des matières dont elle a été formée, elle doit être licitée au profit commun. - V. n® 29, 55.

576. Dans tous les cas où le propriétaire dont la matière a été employée à son insu, à former une chose d'une autre espèce, peut réclamer la propriété de cette chose, il a le choix de demander la restitution de sa matière en même nature, quantité, poids, mesure et bonté, ou sa valeur. V. nos 30, 55.

577. Ceux qui auront employé des matières appartenant à d'autres, et à leur insu, pourront aussi être condamnés à des dommages-intérêts, s'il y a lieu, sans préjudice des poursuites par voie extraordinaire, si le cas y échet. - V. Les 30, 55,

38. Il est des choses qui n'appartiennent à personne en particulier, mais dont l'usage est commun à tous. Des lois de police règlent la manière d'en jouir. Tels sont notamment les chemins publics, les rues et places des villes, les fleuves et rivières navigables, etc., en un mot tout ce qui compose le domaine public.

-V. ce mot.

39. A côté du principe général qui proscrit l'occupation comme moyen pour les particuliers d'acquérir la propriété des choses qui n'ont pas de maître, la loi a placé quelques dispositions qui peuvent être considérées comme des dérogations à la rigueur de ce principe: ce sont les dispositions relatives au droit de chasser ou de pécher (V. Chasse, Pèche); celles qui attribuent la propriété totale ou partielle d'un trésor à celui qui le trouve (V infrà, nos 186 et suiv.); enfin celles qui se réfèrent au droit sur les effets jetés à la mer, sur les objets que la mer rejette, sur les plantes et herbages qui croissent sur les rivages de la mer, sur les choses perdues et dont le maître ne se représente pas. — V. infrà nos 208 et suiv.

40. Nous avons vu que l'une des dispositions du titre de la propriété portait que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité. Des doutes s'étant élevés sur la question de savoir si, pour l'exécution de cette disposition, le concours de l'autorité législative est nécessâire, l'examen de cette question fut déféré au conseil d'Etat, qui, par un avis du 18 août 1807, la résolut négativement.-V. Exprop. pub., no 9.

41. Toutes les constitutions qui se sont succédé depuis la promulgation du code Napoléon ont proclamé le principe de l'inviolabilité de la propriété (charte de 1814, art. 9; charte de 1830, art. 8; constit. 4-10 nov. 1848, art. 11). La constitution du 14-22 janv. 1852, qui nous régit actuellement, semble seule faire exception; mais l'art 1 de cette constitution porte qu'elle reconnait, confirme et garantit les grands principes proclamés en 1789, et qui sont la base du droit public des Français. Or, l'inviolabilité de la propriété est incontestablement l'un de ces principes.

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(1) Liv. 3 du code. - Des différentes manières dont on acquiert la propriété. Dispositions générales (V. l'exposé des motifs et les discours au tribunat et au corpe législatif, vo Succession, p. 166, 169, 175).

711. La propriété des biens s'acquiert et se transmet par succession, par donation entre-vils ou testamentaire, et par l'effet des obligations. 712. La propriété s'acquiert aussi par accession ou incorporation, et par prescription.

713. Les biens qui n'ont pas de maître appartiennent à l'Etat. 714. Il est des choses qui n'appartiennent à personne et dont l'usage est commun à tous. Des lois de police reglent la manière d'en jouir. 715. La faculté de chasser ou de pêcber est également réglée par des lois particulières.

716. La proprieté d'un trésor appartient à celui qui le trouve dans son propre fonds: si le trésor est trouvé dans le fonds d'autrui, il appartient pour moitié à celui qui l'a découvert, et pour l'autre moitié, au propriétaire du fonds. Le trésor est toute chose cachée ou en ouie sur laquelle personne ne peut justifier sa propriété, et qui est découverte par le pur effet du hasard.

717. Les droits sur les effets jetés à la mer, sur les objets que la mer rejette, de quelque nature qu'ils puissent être, sur les plantes et berbages qui croissent sur les rivages de la mer, sont aussi réglés par des lois particulières. Il en est de même des choses perdues dont le maître ne se représente pas.

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