Page images
PDF
EPUB

174. Toutefois, il a été jugé : 1o que lorsqu'un tribunal de police renvoie à fins civiles, pour la décision d'une question préjudicielle de propriété, il n'est pas tenu, sous peine de nullité, de fixer en même temps un délai pour le jugement de l'action civile, si le ministère public n'a pas requis cette fixation, et que le ministère public est toujours recevable à la requérir (Crim. rej. 17 juill. 1829) (1); — 2o Qu'ainsi lorsqu'un individu, poursuivi pour une contravention de police, et, par exemple, pour n'avoir pas éclairé des matériaux déposés près d'un terrain où il faisait élever des bâtisses, se prétend propriétaire du lieu où ces matériaux sont déposés, le tribunal qui se déclare incompétent, jusqu'à ce que la question préjudicielle de propriété ait été décidée, be viole aucune loi, bien qu'il n'ait point fixé un délai dans lequel de prévenu serait tenu de rapporter un jugement, cette omission pouvant être réparée par une réquisition du ministère public, adressée au tribunal de police (Crim. rej. 15 déc. 1827 (2). Conf. crim. cass. 15 juin 1849, aff. Dommanget, D. P. 49. 5. 332).-V. aussi no 161.

175. D'autres décisions ont résolu la question dans le même sens d'une manière beaucoup plus absolue en jugeant que, hors des matières régies par le code forestier, et sauf le cas où la poursuite est intentée par le ministère public, le tribunal, en prononçant le renvoi en fins civiles, ne peut astreindre le prévenu à saisir le juge compétent dans un délai déterminé (Orléans, 10 mars 1829, M. Delaplace, pr., aff. Blondeau C. Beauregard; Crim. rej. 12 août 1837, aff. Rivals, V. no 164-3o).

176. Il ne suffit pas que le prévenu renvoyé à fins civiles, pour faire juger une question préjudicielle de propriété, saisisse par une citation le juge compétent, dans le délai fixé; il faut en outre qu'il justifie des diligences qu'il a faites pour donner suite

Attendu que le jugement dénoncé aurait dû, aux termes de cet article, imposer à la dame Gautier, veuve Gancel, l'obligation de faire juger la question préjudicielle de propriété par elle proposée devant le tribunal de simple police qui l'a rendu, et fixer le bref délai dans lequel elle serait tenue de justifier de ses diligences à cet égard; - Qu'en se bornant à surseoir sur la prévention jusqu'à ce que les juges compétents aient décidé cette question, à la réquisition de la partie la plus diligente, ce jugement a donc commis une violation expresse de la règle d'ordre public consacrée par ladite disposition; Casse.

[ocr errors]

Du 23 mai 1840.-C. G., ch. crim.-MM. Bastard, pr.-Rives, rap. (1) (Min. pub. C. Malric.) LA COUR; - Attendu que, dans l'état des faits, tels qu'ils sont reconnus et constatés par le jugement, le renvoi à fins civiles n'a violé aucune loi, et que si le jugement n'a fixé aucun délai pour le jugement de l'action civile, le ministère public ne l'avait pas requis, ce qu'il est toujours recevable à faire; motifs, rejette.

[ocr errors]
[ocr errors]

-

Par ces

Du 17 juill. 1829.-C. C., ch. crim.-MM. Ollivier, pr.-Ricard, rap. (2) (Min. pub. C. Grandjean.) LA COUR; - Attendu que le tribunal de simple police de Lyon, en renvoyant, devant les juges qui doivent en connaître, l'examen de la question préjudicielle de propriété élevée par le prévenu, s'est conformé aux lois; Attendu que, quoique, par le dispositif du jugement attaqué, le tribunal se soit déclaré incompétent, on voit clairement, par la réserve des dépens contenue dans ce dispositif, et surtout par les motifs de ce jugement, portant qu'il ne peut connaitre de la contravention avant que la question prejudicielle soit décidée, question que le tribunal ne doit pas apprécier, que le tribunal n'a déclaré son incompétence que pour le moment présent, c'est-à-dire tant que la question préjudicielle n'est pas décidee; qu'il eût été toutefois juste et convenable, 1o de charger le prévenu du soin de provoquer et poursuivre devant les juges compétents la solution de la question; 2o de lui fixer un délai dans lequel il serait tenu de sapporter le jugement; qu'au surplus, cette dernière omission peat être réparée par une nouvelle demande, légalement adressée au tribunal de police par le ministère public près ce tribunal, de fixer le délai dans lequel le prévenu sera tenu de faire juger la question préjudicielle; Attendu, toutefois, que le jugement attaqué ne contient aucune violation de la loi; Rejette.

Du 15 déc. 1827.-C. C., ch. crim.-MM. Portalis, pr.-Gary, rap. (3) (Forêts C. Marmontel.)- LA COUR; Attendu qu'il résulte des termes de l'art. 182 que le législateur, en donnant au propriétaire mal à propos poursuivi en réparation de délit, le moyen d'établir son droit de propriété, n'a pas voulu que ce moyen pût devenir une arme pour échapper aux conséquences d'une poursuite régulière et bien fondée; -Que c'est pour remplir ce double but, qu'en statuant que la question préjudicielle de propriété ferait surseoir aux poursuites correctionnelles jusqu'après la décision à rendre par la justice ordinere il a voulu que,

à cette citation, en faisant dans un délai moralement nécessaire, dont le tribunal correctionnel est juge, les actes indiqués par le code de procédure et le décret du 30 mars 1808 pour arriver à l'obtention du jugement (Crim. cass. 18 sept. 1840 (3); 26 nov. 1840, MM. Bastard, pr., Ricard, rap., aff. Forêts C. Couget; Conf. M. Le Sellyer, n° 1545).

177. Néanmoins, comme il ne peut dépendre des parties que dans une certaine mesure de hâter l'expédition des affaires civiles, il suffit que le prévenu puisse justifier qu'il a fait toutes les diligences en son pouvoir. — C'est dans cet esprit qu'il a été jugé 1° que celle des parties qui était tenue de saisir le juge civil ne doit pas être déclarée forclose, et, par suite, privée du béněfice de ce jugement, en ce qu'elle n'aurait pas saisi le juge civil dans le délai, si dans ce même délai elle a présenté au préfet un mémoire à l'effet de faire autoriser son adversaire, qui est une commune, à ester en jugement (Crim. cass. 3 nov. 1842 (4);

2o Que le prévenu renvoyé devant les tribunaux civils par le juge de répression, à l'effet d'établir une exception préjudicielle de propriété, est réputé avoir fait toutes les diligences nécessaires pour parvenir à cette preuve, lorsque, dans le délai prescrit, il a formé, relativement au terrain litigieux, une action possessoire dont ce terrain (un chemin non classé comme chemin vicinal), était d'ailleurs susceptible (Crim. rej. 7 juill. 1853, aff. Girard, D. P. 53. 5. 388).

178. Toutefois, il a été jugé que l'individu prévenu d'un délit forestier qui a été renvoyé à fins civiles pour faire statuer sur une question préjudicielle de propriété, ne peut être considéré comme ayant fait toutes les diligences nécessaires pour utiliser le sursis qui lui a été accordé, lorsque, pendant le délai fixé pour ce sursis, il s'est borné à obtenir un jugement de

dans un bref délai, la partie poursuivie fût tenue de saisir le juge compétent et de faire les diligences nécessaires pour obtenir jugement; et qu'à défaut de ces conditions, l'administration obtint la levée du sursis, et pût reprendre ses poursuites;

Qu'il ne suffit donc pas que le prévenu renvoyé à fins civiles ait saisi, dans le délai fixé, le juge compétent, obligation qui est suffisamment remplie par la citation donnée à sa requête, mais qu'il faut encore qu'il justifie des diligences qu'il a faites pour donner suite à cette citation, en faisant, dans les délais moralement nécessaires, dont le tribunal correctionnel restera juge, si l'administration forestière prétend qu'il y a eu négligence de sa part, les actes indiqués par le code de procédure civile et le décret du 30 mars 1808 pour arriver à l'obtention du jugement; Que ces conditions sont aussi indispensables l'une que l'autre pour l'exécution de l'article, et que le défaut de l'une des deux suffit pour que la justice correctionnelle reprenne son cours, et qu'il soit passé outre aux poursuites; Qu'ainsi, en décidant, comme il l'a fait, que la simple assignation donnée par la partie poursuivie suffisait pour remplir le veu de l'art. 182, et que malgré le défaut de justification des diligences qui auraient dû suivre cette assignation, il n'y avait pas lieu à accorder à l'administration la levée du sursis, le jugement attaqué a faussement interprété et par suite violé ce même article; Casse. Du 18 sept. 1840.-C. C., ch. crim.-MM. Bastard, pr.-Fréteau, rap. (4) (Bondes C. forêts.) LA COUR; Vu l'art. 182 c. for. et les art. 51, 52, 53 et 54 de la loi du 18 juill. 1837, sur l'administration municipale; Attendu que, d'après l'art. 182 c. for., lorsqu'un prévenu excipe d'un droit de propriété, le tribunal saisi de la plainte, doit surseoir sur l'incident et fixer un bref délai, dans lequel celui qui a élevé la question préjudicielle, devra saisir les juges compétents; Que, d'après les articles précités de la loi du 18 juill. 1837, celui qui veut intenter une action contre une commune est tenu de présenter au préfet un mémoire tendant à autoriser la commune à ester en jugement, que ce memoire interrompt la prescription et toutes déchéances; Qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que lorsque le mé moire exigé par la loi de 1837 a été présenté au préfet par celui qui veut intentor action, pendant le délai fixé par le jugement, on ne peut lui opposer aucune déchéance; - Et attendu, dans l'espèce, que le demandeur, après avoir élevé la question préjudicielle de propriété, avait, avant l'expiration des trois mois à lui accordés, présenté au préfet un mémoire, à l'effet d'obtenir pour la commune de Sanclières l'autorisation d'ester en jugement; qu'en cet état aucune déchéance ne pouvait lui êtra opposée; que, néanmoins, le jugement attaqué a jugé que le memoir déposé à la préfecture par le prévenu ne constituait pas l'introduction de l'instance que le jugement du 8 décembre lui imposait, et l'a par suite condamné à l'amende et aux dommages-intérêts envers la commune; en quoi ledit jugement a fait une fausse application de l'art. 182 c. for., et violé les articles précités de la loi du 18 juill. 1837;· Casse. Du 3 nov 1842. ., ch. crim.-MM. Bastard, pr.-Ricard, rap.

QUESTION PREJUDICIELLE

--

SURSIS. maintenue au possessoire; qu'en conséquence, le tribunal correctionnel doit passer outre à la décision sur le délit (Nimes, Mais cette 6 juill. 1854, aff. Anglegeau, D. P. 55. 2. 233). dernière solution nous semble difficilement conciliable avec la disposition de l'art. 182 c. for., aux termes de laquelle il suffit, pour que la question préjudicielle de propriété doive être admise, qu'elle soit fondée sur des faits de possession équivalents à un titre (V. nos 89 et suiv.). V. nos observat. D. P. 55 2. 255. 179. Si le tribunal reconnaît l'insuffisanée du délai qu'il a précédemment fixé, il peut évidemment en accorder un nouveau Il a été jugé en ce sens (Conf. M. Le Sellyer, t. 4, no 1555). que le tribunal peut, sur la demande du prévenu, accorder une nouveau délai pour faire statuer sur la question de propriété alors d'ailleurs qu'il justifie avoir fait toutes les diligences qui ont pu dépendre de lui (Crim. rej. 7 juill. 1853, aff. Girard, D. P. 53. 5. 588).

180. Cependant les tribunaux de répression, qui ont ordonné un premier sursis sur une exception préjudicielle de propriété, ne peuvent pas, dans le cas où le prévenu ne s'est pourvu devant les juges civils qu'après que le ministère public a repris l'instance faute par le prévenu d'avoir fait des diligences dans le délai qui lui avait été prescrit, ordonner un second sursis (Crim. cass. 11 fév. 1827) (1).

--

(1) (Min. pub. C. Massoutier.)-LA COUR;-Vu l'art. 182 c. forest.; -Attendu, en droit, qu'aux termes des dispositions combinées de cet article, l'exception préjudicielle de propriété ne peut empêcher les tribunaux qui l'ont admise de prononcer sur le délit ou la contravention qu'elle tend à faire disparaître, après l'échéance du délai par eux accordé au prévenu, afin d'en saisir la juridiction civile, que dans le seut - Qu'il cas où celle-ci en a été réellement saisie avant cette époque; résulte de là: 1° que le ministère public, dès que ce délai se trouve expiré, rentre dans le libre exercice de son action; 2° que le tribunal devant lequel elle est pendante doit passer outre, c'est-à-dire procéder immédiatement au jugement de la prévention, si le défendeur ne justifie nullement avoir rempli l'obligation qui lui avait été imposée, puisque, par cela seul qu'il ne rapporte pas la preuve de ses diligences utiles dans cet objet, il est légalement présumé avoir renoncé à ladite exception, ou reconnu qu'elle n'était point fondée; 3o que la condamnation qui intervient alors, le prive d'autant moins du droit de poursuivre, pour s'y soustraire, la décision de cette exception, que l'article précité prescrit de subordonner à celle-ci l'effet de celle-là;-Et attendu, en fait, que le tribunal de simple police du canton de Lavaur n'avait accordé à Massoutier, par son jugement du 18 juin dernier, qu'un délai de deux mois, à compter de ce jour, pour faire juger son exception de propriété, en déclarant que, faute de ce faire dans ce délai, il serait passé outre et statué sur la contravention;

Que, néanmoins, ledit Massoutier n'avait pas encore obéi à ce jugement, lorsqu'il fut justement condamné, le 10 septembre suivant, Que le triaux peines prononcées par l'art. 479, n° 11, c. pén.; bunal correctionnel, devant lequel il s'est rendu appelant de cette condamnation, était donc tenu, en la confirmant, de se borner à en suspendre l'exécution, et de décider que le montant en serait versé à la caisse des dépôts et consignations, pour être remis à qui il sera ordonné par le tribunal de première instance qui, depuis, a été saisi de la question préjudicielle,-D'où il suit qu'en différant de statuer sur l'appel jusqu'à ce que cette question ait été décidée, le jugement dénoncé a commis une En conséviolation expresse de la disposition ci-dessus visée; quence, casse.

Du 11 fév. 1837.-C.C., ch. crim.-MM. de Crouseilhes, f. f. pr., Rives,r. (2) (Min. pub. C. Roque.) LA COUR;-Vu les art. 408 et 413 c. inst. crim.;-Et attendu que le fait dont il s'agit dans l'espèce constitue la contravention prévue et punie par les art. 471, no 5, et 479, n° 11, c. pén., et que, dès lors, le tribunal de simple police qui en a été saisi Que le défendeur, était exclusivement compétent pour en connaître; ayant soutenu pour sa défense que la plantation à lui reprochée a eu lieu, non point sur un chemin public, mais sur un terrain qui est șa propriété privée, et demandé subsidiairement, qu'il fût sursis à statuer sur l'action exercée contre lui à cet égard, jusqu'à ce que les juges comledit pétents eussent décidé du mérite de cette question préjudicielle, tribunal aurait dû faire droit à ces conclusions et lui fixer le délai dans lequel il serait tenu de rapporter le jugement de l'exception, ainsi que le ministère public l'avait formellement requis;-D'où il suit qu'en se déclarant incompetent, et en renvoyant les parties devant les juges qui doivent connaître de cette exception, sauf à l'autorité municipale à traduire de nouveau devant lui le prévenu, dans le cas où ils la décideraient contre ce dernier, ce tribunal a manifestement violé les règles de la etc. compétence et les principes de la matière ;-Casse,

Du 17 mai 1833.-C. C ch. crim.-M. Rives, rap.

|

CHAP. 3, SECT. 2, § 4

§4. Effets du jugement de renvoi. Jugement définitif.

[ocr errors]

181. Le juge de répression, nonobstant le jugement de ren-, voi à fins civiles, n'en demeure pas moins le juge du délit. Ce juge est sans caractère, il est vrai, pour statuer sur la question préjudicielle, mais il a seul qualité pour apprécier le mérite de Aussi a-t-il été jugé: la prévention. Il ne lui est donc pas permis de se dessaisir de la plainte sous prétexte d'incompétence. 1°que, lorsque l'existence d'une contravention dépend d'une question de propriété, le tribunal doit, non se déclarer incompétent, mais seulement, surseoir à prononcer sur la prévention jusqu'à ce que les tribunaux civils aient statué sur la question de propriété (Crim. cass. 17 mai 1833 (2), 2 déc. 1826, aff. Ancillon, V. Appel. crim., no 78; 15 fév. 1828, aff. d'Aoust, V. Voirie; 31 janv. 1833, aff. Balloy, V. Compét. crim., no 375; 21. nov. 1833, M. Ricard, rap., aff. Bobous);—2o Que même l'illégalité de cette décision d'in-> compétence ne serait pas corrigée par l'addition de ces mots : quant à présent (Crim. cass., 26 avr. 1828) (3) ; —3o Que lorsqu'un individu, poursuivi pour avoir fait passer des animaux sur le terrain d'autrui chargé d'une récolte, a excipé de la possession de ce terrain, le tribunal de police n'a pu « se déclarer incompétent, maintenir, le prévenu dans la possession par lui alléguée, renvoyer les parties à se pourvoir au fond devant le tribunal qui devait en con

(3) (Min. pub. C. Vedel.)-LA COUR;-Vu l'art. 471, no 5, c. pén., qui punit des peines de police les infractions des règlements ou arrêtés concernant la petite voirie ;-Vu l'art. 605, no 2, c. 3 brum. an 4, qui puait des peines de même nature ceux qui embarrassent ou dégradent les voies publiques ;-Vu les art. 408 et 413 c. inst. crim., aux termes desquels il y a lieu à l'annulation des actes et jugements en dernier res➡ sort qui contiennent violation des règles de compétence;-Attendu qu'il appartient aux tribunaux de police de connaître des contraventions aux articles précités du code du 3 brum. an 4 et du code pénal de 1810; que leurs attributions, à cet égard, ne sont ni altérées, ni dénaturées par les questions préjudicielles de propriété ou de possession qui sont élevées devant eux, ou qui déjà sont engagées devant les juges qui doivent en connaître ; qu'il est alors de leur devoir de suspendre leur dé cision sur la contravention qui leur est déférée, jusqu'à ce que les juges qui doivent être, ou qui sont déjà saisis, de la connaissance de la question préjudicielle aient prononce; qu'ils sont seulement autorisés, en pareil cas, et afin de retarder le moins possible le jugement de la con-> travention, à fixer le délai dans lequel les parties intéressées seront tenues de rapporter la décision de la partie civile sur la question préjudicielle; mais que, tant que cette décision est en suspens, ils ne peuvent se déclarer incompétents; qu'en définitive, eux seuls peuvent absoudre ou condamner; qu'ils conservent enfin la plénitude de leur juridiction dont l'exercice n'est que suspendu ;

Attendu, en fait, que Vedel était prévenu par la citation à lui donnée par le maire de Joyeuse, devant le tribunal de police, d'avoir, par une extension répréhensible de l'autorisation qui lui avait été donnée do construire une voûte sur un cloaque qui lui appartenait, avancé cette con→ struction d'environ 2 mètres dans la rue, et de n'avoir pas fait la déclara tion requise, ni demandé l'alignement à 'autorité municipale; qu'à ce double reproche, Vedel répondait que le terrain sur lequel il avait faitd'ailleurs, ces des constractions était sa propriété particulière, et que, constructions ne bordaient aucune rue publique; qu'il avait, en consé→ quence, avant la citation à lui donnée par le maire, engagé, contre ce fonctionnaire, une instance devant le tribunat civil de l'Argentière, à l'effet de statuer sur les questions par lui proposées comme préjudicielles devant le tribunal de police ;-Attendu qu'il résulte du jugement atta qué que le tribunal de police de Joyeuse connaissait l'existence de l'instance civile portée devant le tribunal de l'Argentière; d'où il concluait, avec raison, dans les motifs de ce jugement, qu'on ne saurait, en l'état, statuer sur la demande du maire, puisque, s'il était reconnu en définitive que Vedel avait bâti dans son fonds propre, il n'aurait encours aucune amende;

[ocr errors]

Attendu cependant que le tribunal de police de Joyeuse s'est déclaré incompétent; que les mots, quant à présent, qu'il a ajoutés, n'effacent Attendu, d'ailleurs, qu'il a excédé pas le vice de cette prononciation; les bornes de sa juridiction et est tombé dans une contradiction évident e avec lui-même, en relaxant dès à présent Vedel de la demande ; qu'il a prononcé sur cette demande, après avoir lui-même reconnu avec raison et conformément aux lois, qu'on ne saurait, en l'état, statuer sur la de-. mande du maire, puisque, s'il était reconnu en définitive, etc.;—D'où il suit qu'il était lui-même convaincu de la nécessité, avant de prononcer sur la prévention, d'attendre et de connaître, ce qui serait jugé sur la Casse le jugement du question civile par le tribunal de l'Argentière; tribunal de police de Joyeuse, du 28 mars dernier. Du 26 avril 1828.-C. C., ch. crim.-MM. Bailly, f. f. de pr.-Gary, rap,

4

naltre, eondamner la partie civile aux dépens: >> il devait simplement, à supposer que l'exception du prévenu fût de nature à Taire disparaître le délit, en renvoyer l'appréciation devant les tribunaux compétents, et surseoir au jugement du procès, en fixant un délai dans lequel le prévenu ferait juger la question préjudicielle, dépens réservés (Crim. cass., 29 août 1828, aff. Martin, V. Compét, crim., no 375); -4° Qu'il ne peut, par conséquent, se dessaisir entièrement de l'affaire (Crim. cass. 18 déc. 1840) (1); —5° Que dans le cas où, sur la prévention pour infraction à un règlement de police qui, en exécution du code rural de 1791, a fixé le nombre des bestiaux que chacun peut envoyer au parcours, les prévenus se prévalent d'un droit illimité de parcours, le tribunal doit, non pas se dessaisir, mais surseoir à statuer jusqu'après la décision du tribunal civil (Crim. cass. 28 nov. 1828, MM. Bailly, pr., Gary, rap., aff. min. pub. C. Gouvry). - V. aussi vis Compét. adm., no 173-4°; Compét. crim., nos 375, 447; Forêts, no 671.

189. Le juge qui ordonne le renvoi doit d'autant moins se dessaisir que le jugement de l'exception préjudicielle, bien que favorable au prévenu, pourrait ne pas exclure nécessairement la possibilité d'un délit, ce qui arriverait dans certain cas, dans celui, par exemple, où le prévenu, quoiqu'ayant justifié de sa propriété, aurait néanmoins encouru une peine pour avoir méconnu les droits qui résulteraient de la possession d'un tiers. Aussi a-t-il été jugé qu'un tribunal correctionnel, tout en faisant droit à la question préjudicielle élevée devant lui, peut et doit même se réserver le droit de prononcer ultérieurement, s'il pense que la décision des tribunaux civils n'exclura pas la possibilité d'un délit (Crim rej., 14 oct. 1824) (2).

183. Mais, bien que le tribunal de répression ne soit pas dessaisi par le jugement de renvoi à fins civiles, il ne peut cependant, tant que les tribunaux civils n'ont pas statué sur l'exception et hors le cas de déchéance dont il sera parlé ci-après, passer outre au jugement du délit, puisque ce tribunal, après avoir décidé qu'il y a lieu à sursis, violerait son propre jugement. — Aussi a-t-il été jugé que, dans le cas où les tribunaux de répression admettent, sur la demande du prévenu, l'exception préjudicielle de propriété et prononcent un sursis, ils sont incompétents pour statuer sur la prévention, jusqu'à ce que cette exception ait été appréciée par les tribunaux civils, et par conséquent, pour prononcer, soit la relaxe du prévenu (Crim. cass., 23 sept. 1836) (3),... soit une condamnation contre lui (Crim.

(1) (Min. pub. C. Boisvinet.)-LA COUR ;-Attendu que le fait dont il s'agit présente la même contravention que celui sur lequel est intervenu, le 7 août dernier, le jugement qui a sursis à statuer jusqu'à ce que l'exception de propriété proposée par le prévenu ait été décidee par la juridiction compétente; Qu'en continuant donc de surseoir jusqu'après la sentence à intervenir sur cette exception, le tribunal de simple police de Tours s'est conformé aux règles de la matière, puisque le caractère du second fait dépend, comme celui du premier, de l'issue de l'instance qui a pour objet de les faire déclarer l'un et l'autre légitimes; -Rejette ce moyen;

Mais, vu l'art. 182 c. for., qui régit toutes les affaires susceptibles de son application; Attendu qu'aux termes de cet article, le jugement dénoncé devait se borner à surseoir, et retenir la prévention, afin de l'apprécier ultérieurement, ainsi que de droit; - D'où il suit que le tribunal qui l'a rendu a commis une violation expresse de sa disposition, en so dessaisissant de la poursuite par le relaxe du défendeur; - Casse. Du 18 déc. 1840.-C. C., ch. crim.-MM. de Bastard, pr.-Rives, rap. (2) (Mergoux C. min. pub.)- LA COUR; Attendu qu'une question préjudicielle sur la propriété des bois litigieux, s'étant élevée sur la plainte portée par Gasne contre Mergoux devant le tribunal correctionnel à l'occasion de l'exploitation de ces bois, ce tribunal a dû les renvoyer devant les tribunaux civils; Attendu qu'en prononçant ce renvoi il a pu reconnaître que la décision des tribunaux civils sur la propriété n'exclurait pas la possibilité d'un délit, et que, dans ce cas, il a dù se réserver d'y prononcer; qu'ainsi, le jugement, loin de violer les règles de la compétence, s'y est exactement conformé ; - Rejette. Du 14 oct. 1824.-C. C., sect. crim.-MM. Portalis, pr.-De Bernard, r. (3) (Min. pub. C. Boige.) LA COUR; Vu les art. 408 et 413 c. inst. crim., en exécution desquels doivent être annulés les arrêts ou Jugements en dernier ressort qui présentent une violation des règles de la compétence, ensemble l'art. 182 c. for.; Attendu, en droit, qu'anx termes de ce dernier article, les tribunaux de répression sont tenus de statuer sur les contraventions dont ils se trouvent saisis, nonobstant

[ocr errors]

cass., 19 juin 1846, aff. Touchard. D. P. 46.4.434). —V. (1o 148 8. 184. Ce tribunal violerait, non-seulement son propre jugement, mais les règles de sa compétence, si, malgré le renvoi prononcé, il statuait lui-même sur la question de propriété réservée aux juges civils (V. no 145).

185. Si, pendant le sursis prononcé par le tribunal criminel, le prévenu se livrait à de nouveaux faits de même nature que ceux qui ont motivé les poursuites dirigées contre lui, et que ces faits donnassent lieu à des poursuites nouvelles, le tribunal de répression n'en pourrait connaître et devrait surseoir au jugement de la seconde poursuite comme il a sursis au jugement de la première, puisque si l'exception est accueillie par le tribunal compétent, les actes qui ont donné lieu à ces deux poursuites se trouveront également justifiés (Conf. Mangin, no 224 ). — Jagé en conséquence 1° que le prévenu qui, pendant la durée du sursis, ou pendant l'instance civile sur la question préjudicielle, continue ou renouvelle les faits qui ont donné lieu aux poursuites, ne peut être actionné au criminel à raison de ces nouveaux faits; et spécialement, qu'un tribunal de police qui, sur l'exception de propriété invoquée par un particulier prévenu d'avoir fait des excavations dans une place publique, a sursis à statuer jusqu'a près la décision de la question de propriété, ne peut ensuite, avant que cette décision soit intervenue, prononcer, pour le fait des excavations dont il s'agit, des peines de police contre le même défendeur, en se fondant sur un arrêté spécial pris postérieurement par le maire de la commune (Crim. cass. 19 juill. 1821, MM. Barris, pr., Aumont, rap., aff. Barbier C. min. pub.). 2o Qu'un second fait de contravention de même nature qu'un premier qui a déjà donné lieu à un sursis jusqu'après jugement d'une question préjudicielle, doit faire prononcer la continuation du même sursis (Crim. cass. 18 déc. 1840, aff. Boisvinet, V. n°181-40); -3° Que si, sur la plainte d'une commune en usurpation de la voie publique par la construction d'un mur, il a été prononcé un sursis pour la décision d'une question préjudicielle de propriété élevée par le prévenu, et que ce prévenu, sans attendre la décision de cette question, continue la construction du mur commencé; cette continuation, bien qu'irrégulière, ne constitue pas de sa part le délit d'usurpation de la voie publique, et le tribunal correctionnel où il est traduit de nouveau pour ce fait, et où il excipe toujours de son droit de propriété, doit surseoir à prononcer jusqu'à ce qu'il ait été statué sur ce droit de propriété par les tribunaux civils (Crim. cass. 14 août 1823 (4);

-

l'exception préjudicielle de propriété qui avait été d'abord proposée devant eux, lorsque le prévenu ne justifie pas avoir saisi la juridiction compétente du jugement de cette exception, dans le délai qu'ils lui avaient fixé à cet effet; Qu'ils ne peuvent, en aucun cas, juger la question qui a déterminé le sursis par eux prononcé; - D'où il suit, dans l'espèce, qu'en relaxant Hugon-Boige, parce qu'il le déclare propriétaire du chemin public par lui obstrué, le tribunal de simple police du canton de Clermont-Ferrand a commis une violation expresse des règles de la compétence et du principe consacré par l'art. 182 c. for.; En conséquence, faisant droit au pourvoi, casse le jugement que ce fribunal a prononcé, le 20 août dernier, au profit dudit Hugon-Boige. Du 23 sept. 1836.-C. C., ch. crim.-MM. de Bastard, pr.-Rives, rap. (4) (Dubaret C. min. pub.) - LA COUR (ap. délib. en ch. du cons.); -Vu les art. 408 et 413 c. inst. crim.; -Vu l'art. 130 du même code; Vu l'art. 40 de la loi du 28 sept. 1791; - Attendu que, sur une première plainte contre lui portée en usurpation de la voie publique, lo demandeur avait soutenu que l'emplacement supposé usurpé par lui était sa propriété, dont il jouissait depuis près de dix ans; que, par jugement Ju tribunal correctionnel de Pontoise, la contestation sur cette exception préjudicielle avait été renvoyée devant les tribunaux civils, et qu'elle y forme l'objet d'un litige non encore jugé; qu'en cet état, et lors de la seconde instance correctionnelle sur laquelle a statué le jugement attaqué, il était incertain si ce même emplacement prétendu usurpé par le demandeur était ou non une voie publique ; Que, par suite, il ne pouvait être et n'était pas légalement constaté que la construction d'un mur par lui faite sur cet emplacement constituât le délit d'usurpation de voie publique, prévu et puni par l'art. 40 de la loi du 28 sept. 1791; que cette constatation ne pouvait résulter de la proposition faite par le demandeur de transporter le passage des habitants de Taverny au chemin appelé des Princes; qu'en effet, au lieu d'accepter définitivement cette proposition, le conseil municipal de Taverny, dans sa dernière délibération, y avait ajouté de nouvelles conditions; que ces conditions paraissant trop onéreuses au demandeur, il avait rétracté sa pro

[ocr errors]
[ocr errors]

Conf. Crim. cass. 21 oct. 1824, MM. Portalis, pr., Aumont, rap., aff. Serouart C. min. pub.); - 4° Que, même lorsque le tribunal de police saisi d'une prévention d'empiétement sur un chemin rural, a sursis à statuer jusqu'à ce que les tribunaux civils aient prononcé sur l'exception de propriété opposée par le prévenu, l'arrêté du maire qui, pendant la durée du sursis, enjoint le rétablissement du chemin dans son état primitif, est illégal, et ne peut donner lien à l'application d'aucune peine (Crim. cass. 6 sept. 1850, aff. veuve Plisson, D. P. 50. 5. 596).

Il a

déchéances ne peuvent se suppléer. - Jugé en ce sens qu'un tribunal de police qui, à raison d'une question préjudicielle de propriété, élevée par le défendeur, a sursis indéfiniment à statuer sur la contravention, ne peut, avant la décision sur la question préjudicielle, et sous le prétexte qu'il s'est écoulé trois mois depuis le jugement qui prononce le sursis, et que cette décision devrait être obtenue, statuer définitivement sur l'action en répression du délit (Crim. cass. 10 août 1821) (1).

189. Le prévenu ne serait même pas fatalement déchu par le seul fait de l'expiration du délai; il faut que les poursuites aient été reprises, et qu'au préalable, le prévenu ait été cité de nouveau devant le tribunal de répression par le ministère public ou par la partie plaignante à l'effet de justifier de ses diligences; cette citation pourrait être donnée même avant que le délai fût ex

186. Si même le prévenu renvoyé à fins civiles s'appropriait de nouveaux faits de même nature que ceux qui ont donné lieu aux poursuites intentées contre lui, en prenant fait et cause pour le prétendu délinquant auteur de ces nouveaux faits, le sursis prononcé par le jugement de renvoi devrait s'étendre également aux poursuites auxquelles ces derniers faits donne-piré, pourvu que le jour indiqué pour la comparution fût postéraient lieu, et il ne pourrait être statué par celles-ci qu'après le jugement de la question préjudicielle de propriété, surtout si le jugement de renvoi était passé en force de chose jugée. été décidé en ce sens que lorsque sur l'exception préjudicielle deve propriété, élevée par le prévenu d'un délit de dépaissance, un tribunal correctionnel a, par un jugement ayant force de chose jugée, prononcé le renvoi à fins civiles, si ce prévenu intervient ensuite comme civilement responsable sur la poursuite exercée contre un autre prévenu qui propose la même exception, et adhère à ses conclusions, les deux causes deviennent indivisibles et il doit être également ordonné un sursis dans le second procès (Crim. cass. 23 nov. 1833, M. Crouseilhes, rap., aff. Mercier C. Montredon).

187. Si le prévenu laisse expirer le délai qui lui a été accordé sans faire les diligences prescrites, il y a lieu de reprendre et de mener à fin les poursuites commencées, car le prévenu est réputé, dans ce cas, avoir renoncé à l'exception qu'il avait proposée, et le cours de la justice ne doit pas rester plus longtemps suspendu.-V. nos 175 et suiv.

rieure à l'échéance de ce délai. Jugé en conséquence que quand un délai a été accordé sur une question préjudicielle, pour faire une justification, on doit, dans l'assignation au prévenu à l'effet de justifier de ses diligences, avoir égard, non au jour où cette assignation a été donnée, mais à celui indiqué dans cet acte pour la comparution; et que la circonstance que cette assignation a été donnée avant l'expiration du délai fixé pour la justification, n'est pas une cause de nullité, si la comparution ne doit avoir lieu qu'après ce délai (Crim. cass. 21 mai 1836) (2). 190. La citation produit un autre effet important, celui d'empêcher la prescription qui courrait au profit du prévenu par le seul fait de l'expiration du délai. — Jugé en effet que la prescription court, dans le cas où un délai a été imparti au prévenu pour justifier l'exception préjudicielle qu'il a invoquée, à partir de l'expiration de ce délai, lorsque dans l'intervalle aucune citation n'a été donnée à ce prévenu (Crim. rej. 1er déc. 1848, aff. Petit, D. P. 48. 5. 309).

-

191. Si le tribunal décide qu'à défaut d'avoir justifié de ses diligences dans le délai fixé, le prévenu a encouru la forclusion, 188. Néanmoins, si le jugement de renvoi n'avait fixé aucun le jugement définitif qui interviendra sera nécessairement un délai, il ne pourrait être passé outre à la condamnation du pré-jugement de condamnation toutes les fois que la matérialité du fait et sa criminalité seront constantes.

venu,

quel que fût le temps écoulé depuis ce jugement, car les

mière proposition, qui restait dès lors comme non avenue; que d'ailleurs une offre de cette nature, déterminée par des vues de conciliation, ne pouvait être envisagée que comme un sacrifice volontaire, consenti pour prévenir ou terminer des débats judiciaires, et non comme la reconnaissance d'un droit légalement établi; - Que par conséquent, sous aucun rapport, cette offre ne pouvait avoir pour objet et pour résultat d'attribuer à l'emplacement contentieux le caractère de voie publique, ni de prouver que le demandeur ait reconnu à cet emplacement ce caractère ; qu'ainsi l'incertitude sur le point de savoir si l'emplacement prétendu usurpe était une voie publique continuait de subsister après cette proposition conciliatoire comme lors du renvoi devant les tribunaux civils; Que si le demandeur eût agi plus régulièrement, en faisant juger au civil la question de la propriété de l'emplacement contentieux avant que de continuer la construction de son mur, tant qu'il restait incertain si cet emplacement formait une voie publique, le fait de la continuation des constructions ne pouvait constituer le délit d'usurpation de voie publique, prévu et puni par l'art. 40 de la loi du 28 sept. 1791; -Que néanmoins le jugement attaqué, considérant ce fait comme une usurpation de la voie publique, lui a appliqué la peine portée par l'art. 40 précité; en quoi ce jugement a tout à la fois fait une fausse application de la loi pénale et violé les règles de compétence; Par ces motifs, casse.

Du 14 août 1823.-C. C., sect. crim.-MM. Barris, pr.-Ollivier, rap. (†) (Bézuchet C. min. puh.) — La cOUR ; —Vu les art. 408 et 413 c. inst. crim.; Attendu qu'à l'audience du tribunal de police de SaintGermain-en-Laye, du 20 mars dernier, où il était cité comme prévenu de contravention à un règlement de police de cette ville, et à l'art. 471, n° 4, c. pén.. Pierre-Antoine Bézuchet avait dit pour défense qu'il était propriétaire du terrain sur lequel se trouvaient les matériaux dont le dépôt en ce lieu avait été le motif de l'action qui lui était intentée par le ministère public, et que le tribunal, voyant dans cette défense du prévenu une question préjudicielle, avait sursis, par jugement dudit jour 20 mars, à faire droit au fond, jusqu'à ce qu'il eût été statué sur cette question par l'autorité compétente; Que ce jugement, conforme aux principes et aux lois de la matière, n'ayant pas été attaqué par le ministère public, devait recevoir son exécution; qu'ainsi le prévenu, devenu demandeur par l'allégation de propriété qu'il opposait à l'action formée contre lui, était tenu de faire des diligences pour obtenir de la juridiction civile un jugement qui le déclarât contradictoirement avec le maire, procédant au nom de la commune, propriétaire du terrain dont

[ocr errors]

il s'agissait, soit d'après les preuves qu'il aurait administrées, soit
d'après la déclaration du maire de n'entendre lui contester les droits
qu'il prétendait avoir sur ce terrain; - Mais qu'aucune loi n'a établi
un délai à l'expiration duquel les prévenus qui opposent à l'action pour
contravention formée contre eux, l'exception préjudicielle de propriété,
et qui n'ont point encore agi pour obtenir une décision sur cette excep
tion, sont réputés l'avoir abandonnée; que c'est donc aux tribunaux de
police qu'il appartient de déterminer ce délai; que, s'il n'en a été fixé
aucun, les prevenus ne sauraient être poursuivis de nouveau, faute d'avoir
obéi au jugement qui les a renvoyés devant l'autorité compétente; qu'il
n'existe point de présomption légale de leur renonciation à l'exception
qu'ils ont invoquée; que la question de propriété reste toujours indécise;
que leur culpabilité, qui dépend de la décision de cette question, restant
ainsi toujours incertaine, leur condamnation ne peut avoir de base le-
gale;
Attendu que dans l'espèce aucun délai n'ayant été fixé par le
premier jugement du tribunal de police, Bézuchet ne pouvait être appelé
de nouveau devant ce tribunal que pour le voir faire, par un second ju◄
gement, ce qu'il n'avait pas fait par le premier, et déterminer le temps
pendant lequel ce prevenu serait tenu de provoquer une décision sur la
question préjudicielle; qu'en se hâtant de prononcer sa condamnation
dans l'état, comme si cette question avait été décidée coutre lui par lo
tribunal civil, ou comme si le délai de trois mois était un délai fatal
après lequel il dût être légalement présumé s'être reconnu sans droits
sur le terrain dont il s'était, dans le principe, prétendu propriétaire, le
tribunal de police de Saint-Germain a méconnu l'autorité de la chose
jugée par le jugement du 20 mars; qu'il a commis un excès de pouvoir
et violé les règles de compétence; Casse.

Du 10 août 1821.-C. Č., sect. crim.-M. Aumont, rap. (2) (Forêts C. Seube et autres.)- LA COUR; Attendu que, dans l'assignation donnée à un prévenu, par suite de l'art. 182 c. for., l'effet de justifier de ses diligences, on doit avoir égard, non au jour où elle a été donnée, mais à celui indiqué pour la comparution; que, daus l'espèce, l'assignation a été donnée le 22 août, pour comparaître le 31; qu'à ce dernier jour, le délai de deux mois, fixé par le jugement du 29 juin, était expiré, que cette assignation était donc dans les termes dudit Jugement, et que c'est par un excès de pouvoir et une fausse interprétation de l'art. 182 c. for. que le jugement allaqué en a prononcé l'annulation;- Par ces motifs, casse.

Du 21 mai 1836.-C. Ć., ch. crim.-MM. Bastard, pr.-Ricard, rap.

[ocr errors]
[ocr errors]

102. Toutefois, comme il pourrait se faire que, même après la condamnation du prévenu, le droit, qui servait de fondement à l'exception proposée, fût judiciairement reconnu, cette reconnaissance, en faisant évanouir le délit, anéantirait les effets du jugement de condamnation. C'est pourquoi l'exécution de ce jugement demeurera suspendue. Le texte des art. 182 et 59 porte en effet dans sa disposition finale « qu'il sera soumis à la peine de l'emprisonnement si elle a été prononcée, et que le montant des amendes, restitutions et dommages-intérêts sera versé à la caisse des dépôts et consignations, pour être remis à qui il sera ordonné par le tribunal qui statuera sur le fond du droit.» La jurisprudence est muette sur cette disposition, qui pourtant peut donner lieu à des difficultés d'interprétation assez graves.

193. Pendant combien de temps l'exécution d'un tel jugement devra-t-elle rester suspendue? La loi ne le dit pas. Faut-il conclure de son silence que le sursis puisse se prolonger indéfiniment, et qu'il dépende de la partie condamnée, en s'abstenant de faire statuer sur la question de propriété, non-seulement de se soustraire à l'emprisonnement qui aurait été prononcé, mais même de priver la partie civile du bénéfice des condamnations qu'elle aurait obtenus? On peut dire à l'égard de la partie civile, que celle-ci pourra saisir la juridiction compétente et donner force exécutoire au jugement de condamnation en faisant juger en sa faveur la question préjudicielle. Toutefois nous croyons que la partie civile se résoudra rarement, dans le seul but de recueillir des dommages-intérêts, le plus souvent de minime importance, à engager un procès au civil dont il lui faudrait avancer les frais, et où elle serait obligée en se constituant demanderesse de prendre la preuve à sa charge.

194. Mais comment et à quelle époque le ministère public pourra-t-il faire exécuter la peine de l'emprisonnement? Comme nous l'avons déjà dit ailleurs (no 158), il ne dépend pas de lui de faire juger par les tribunaux civils la question préjudicielle de propriété. Cependant il serait absurde de prétendre que l'exécution d'un tel jugement, en ce qui concerne l'emprisonnement, doive être laissée à la merci du prévenu sans qu'elle puisse avoir un terme autrement que par son bon vouloir! Il faut donc qu'après un délai moral suffisant, le ministère public trouve dans ses attributions un pouvoir suffisant pour passer outre à l'exécution, ou qu'il appartienne au tribunal, qui a prononcé la condamnation, de le rendre éxécutoire. Or, quoique le ministère public soit seul chargé, d'après les art. 197 et 396 c. inst. crim., d'assurer l'exécution des jugements criminels, nous ne croyons pas qu'il lui appartienne de résoudre les difficultés d'exécution qui, comme celles-ci, peuvent présenter un caractère contentieux. D'un autre côté, il est de principe que les tribunaux criminels connaissent de l'exécution de leurs jugements en ce qui concerne l'emprisonnement, ainsi que cela a été plusieurs fois jugé (V. Peine, no 242). C'est pourquoi nous inclinons à penser que le ministère public, en pareil cas, devra saisir le tribunal de répression qui aura rendu le jugement, et faire décider par ce tribunal, qu'à défaut de diligences de la part du prévenu, il sera enfin passé outre à l'exécution.

|

l'appuyant sur d'autres motifs, et en déclarant ne pas approuver tous ceux qui y sont formulés.-Le juge civil empiète, en effet, sur les attributions des juges correctionnels, lorsqu'il prend pour base d'une condamnation à des dommages-intérêts l'exercice d'une action encore pendante devant ces derniers juges, et les atteintes que la considération du prévenu a pu en souffrir. Il est manifeste que c'est à la juridiction saisie d'un procès qu'il appartient exclusivement d'apprécier le caractère et les conséquences préjudiciables de ce procès (V. sur les cas où une personne peut être condamnée à des dommages-intérêts, à raison d'un procès injuste, vo Responsabilité).-En tous cas la condamnation rentre dans les pouvoirs du tribunal civil, si elle a, en outre, pour base la perte de temps et les dépenses considérables que l'instance civile a entraînées au préjudice de la partie qui a été contrainte de l'introduire sur la poursuite correctionnelle dirigée contre elle (Req. 2 janv. 1856, même aff., D. P. 561. 88).

[blocks in formation]

197. Le principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs judiciaire et administratif oblige les tribunaux à renvoyer devant l'autorité administrative l'interprétation de tous les actes émanés de l'administration, sauf dans les cas où une disposition particulière de la loi a attribué exceptionnellement la connaissance de quelques-uns de ces actes à l'autorité judiciaire. Les tribunaux sont également tenus de surseoir toutes les fois que la décision de l'action principale dont ils sont saisis dépend d'une question dont la solution appartient au pouvoir administratif. Cette règle, d'une application journalière, et à laquelle sont assujettis les tribunaux civils, comme ceux de répression, fait naître une foule de questions préjudicielles et a de nombreuses conséquences qui ont déjà été développées ailleurs (V. Compét. alministr., sect. 3). — Nous ne la reprendrons ici que pour rappeler quelques principes qui ont reçu leur application dans certaines matières spéciales, et pour avoir l'occasion de réunir des décisions non mentionnées dans les traités déjà imprimés, et qui complèteront les notions précédemment exposées.

-

198. Lorsque dans une instance devant un tribunal civil, il s'élève une question qui rentre dans la compétence des tribunaux administratifs, il y a lieu à surseoir et à renvoyer les parties devant l'autorité administrative (V. le rapp. de M. Cormenin sur les conflits, vo Conflit, p. 110, note, no 48). De nombreuses applications de cette règle sont retracés vis Action possess., no 772; Compét. admin., nos 173 s., 226 s.; Compte, no 51; Eaux, nos 303-4°; Expropriat. pub., no 55-2°; Forêts, nos 671, 1325; Impôts indir., no 15; Octroi, Organis, marit., Pèche, no 50; Travaux publ.; Voirie. — Il a été jugé, toujours par application du même principe: 1° qu'il suffit que devant un tribunal, dans une instance sur la propriété d'un terrain, un acquéreur de domaines nationaux soutienne que ce terrain est. compris dans une vente qui lui a été faite par l'Etat, pour que les tribunaux soient obligés de renvoyer à l'autorité administrative pour faire statuer préalablement sur cette question (cons d'Et. 25 juin 1819, M. Cormenin, rap., aff. Fillèle Dacheux C., Guyau);-20 Que bien que les tribunaux soient, compétents pour, statuer sur l'opposition en nullité d'une saisie-exécution tant au fond qu'en la forme, cependant si, pour apprécier le mérite de la saisie, ils sont obligés d'examiner le mérite d'un acte admi-. 196. Le tribunal civil devant lequel a été renvoyée, sur des nistratif, et spécialement la légalité de l'ordre donné par un compoursuites correctionnelles exercées contre un individu pour mandant militaire, ils doivent surseoir jusqu'après la décision avoir abattu et enlevé des arbres sur le terrain d'autrui, l'excep- de l'autorité administrative sur ce point:-«La cour; considérant tion de propriété de ce terrain, est-il compétent, dans le cas où que le lieutenant général d'Erlon avait été investi par le gouverl'exception serait justifiée, pour condamner l'auteur des pour- nement de toutes les attributions que pouvait lui donner la mise suites à des dommages-intérêts comme ayant pris méchamment en état de siége des départements de l'Ouest; qu'en cette qua la voie correctionnelle et porté atteinte à la considération du pré- | lité, attirant à lui tous les pouvoirs administratifs et militaires, venu?-L'affirmative résulte d'un arrêt (Poitiers, 2 janv. 1855, il a donné, sous sa responsabilité, l'ordre du 12 juill. 1852; aff. Robain, D. P. 56. 1. 88).—Mais, sur le pourvoi, la cour de que, conséquemment, il a fait un acte administratif de la plus cassation ne paraît pas avoir donné son assentiment à la doe- haute importance; que décider que cet ordre d' été donné sans trine de l'arrêt attaqué, car elle ne maintient la décision qu'endroit, qu'il repose sur des lois abolies par la Charte, qu'il ast

185. La disposition finale des art. 182 et 59 a fait naître une autre question: celle de savoir s'il fallait l'appliquer à toutes les matières ou seulement au jugement des délits forestiers ou de pêche. MM. Mangin, no 222 et Le Sellyer, t. 4, no 1542, sont de ce dernier avis. Nous hésitons d'autant moins à partager leur opinion, que la disposition dont il s'agit est tout à fait exceptionnelle au droit commun; or il est de règle que les dispositions qui portent ce caractère ne peuvent être étendues hors des cas où leur application résulte d'un texte formel.

« PreviousContinue »