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loignement du corps, elle vous retrouvera plus parfaitement dans l'exécution de vos ordres.

O que de merveilles & de grandeurs fe trouvent dans cette commiffion! foit que F'on confidere la perfonne qui envoie, qui eft Jefus Chrift, foit celle qui eft envoyée, qui est Madeleine, foit ceux à qui elle eft envoyée qui font les Apôtres ; foit que l'on faffe réflexion à la chofe pour faquelle elle eft envoyée, qui eft d'annoncer la Résurrection de Jefus-Chrift qui eft le fondement de la Religion, & le fceau de la divinité de Jefus ; foit aux termes dont Jefus-Chrift fe fert en envoyant Madeleine : car il lui manifeste sa divinité & fa qualité de Fils de Dieu en appellant Dieu fon Pere; il lui fait connoître fon humanité en appellant Dieu fon Dieu ; & il lui manifefte fon Eglife, en appellant les Apôtres & les Fidéles, fes freres; & par-là il lui donne à entendre qu'il eft le premier-né d'entre les freres, que les Fidéles font les enfans de Dieu par adoption.

Méditons attentivement toutes ces grandes vérités & toutes ces merveilles, qui nous font manifeftées dans l'apparition faite à fainte Madeleine.

APPARITION DE JESUS aux deux Difciples d'Emmaus.

Dbourg nommé Emmaus

Eux Difciples de Jefus allant à un & parlant enfemble de tout ce qui s'étoit paffé, Jefus fe joignit à eux, & fe mit à marcher avec eux. Telle devroit être la converíation des Chrétiens, ils devroient s'entretenir de chofes faintes dans leurs converfations ordinaires & dans leurs voyages, & non point de bagatelles; ce feroit le moyen d'attirer Jefus Chrift parmi eux. & de le rendre le compagnon de leurs voyages,

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Jeius leur demande de quoi ils s'entre-tiennent, & d'où vient qu'ils font fi tri-ftes? Vous prenez ainfi part, ô Jefus, à notre trifteffe ; & quand notre trifteffe eft: raifonnable vous nous vifitez alors & vous nous confolez: ô quelle bonté ! Mais vous demandez à vos Difciples ce qui les rend triftes eh! peuvent-ils, Seigneur, n'être pas triftes de vous avoir abandonné ? d'avoir appris votre paffion & votre mort: & de ne fçavoir ce que vous êtes devenu? Peut-on n'être pas trifte quand on a perdu Jefus; & n'est-ce pas la feule chofe au monde de laquelle on doive s'affliger?! Mais pourquoi, Seigneur, leur demander lè fujet de leur trifteffe jufqu'à deux fois ? Eh! ne le favez-vous pas mieux que qui queTM ce foit? Mais vous le faites pour les obligers

eux-mêmes à y faire plus de réflexion & à s'occuper davantage de vous.

Auffi vous répondent-ils, que le fujet de leur trifteffe eft touchant Jefus de Nazareth, qui a été un Prophéte puiffant en œuvre & en paroles devant Dieu & devant tout le peuple. O le bel éloge qu'ils font de vous! ils vous reconnoiffent pour Prophéte & Prophéte par excellence, qui aviez été promis en cette qualité au peuple Juif par Moyfe; ils reconnoiffent la force de vos paroles, la fainteté de vos actions, la puiffance de vos miracles. Telle doit être la vie d'un Prêtre & d'un Pafteur dans l'Eglife; il doit être puiffant par les œuvres d'une fainte vie & par des paroles efficaces; c'eft peu qu'il éblouiffe les yeux du peuple par des actions éclatantes & par de beaux difcours, s'il ne mène une vie qui soit fainte devant Dieu.

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Vos Difciples parlent amplement de votre Paffion & de votre mort & de l'efpérance de votre Réfurrection; mais ils Vous avouent qu'elle eft bien affoiblie en eux: c'eft ce qui vous donne occafion de leur expliquer ce qui a été dit de vous dans les Ecritures depuis Moyfe jufqu'à vous; de leur marquer qu'il falloit que le Chrift fouffrit, & qu'il entrât par ce moyen dans la gloire. Ainfi vous portez doucement vos Difciples à faire un aveu fincére de leur foibleffe, afin d'avoir occafion de les rele ver & de les inftruire. C'est ainsi que vous nous mettez fouvent dans cette heureufe

néceffité de confeffer notre néant & notre mifere, afin d'attirer en nous par-là la lu• miere & le fecours de votre grace.

O Seigneur, que furent heureux ces Difciples, de vous entendre ainfi expliquer ce que les Prophétes ont dit de vous ! quelle fut la joie & la douceur dont leur cœur fut rempli dans cette fainte conférence? Auffi reconnurent-ils depuis, que leur cœur avoit été alors tout plein d'ardeur & tout enflammé d'amour, en entendant fortir de votre bouche facrée ces paroles de vie. Ne pourrions-nous pas nous procurer la même confolation fi nous voulions nous rendre fidéles & attentifs à la le Aure des Ecritures, & les lire dans cette vue & dans cet efprit, que de n'y chercher que vous, ô Jesus ?

Vous dites à vos Difciples, qu'il falloit que le Chrift fouffrit tout cela, & qu'il entrât ainfi dans fa gloire. [Luc. 24. 26.] Il l'a fallu pour fatisfaire la juftice de votre Pere; il l'a fallu pour que vos fouffrances devinffent un titre nouveau qui vous acquît la gloire qui vous étoit dûe par tant d'autres; il l'a fallu pour notre exemple. Eh! s'il l'a fallu pour vous, Seigneur, ne le faudra-t-il pas pour nous, qui ne pouvons fatisfaire à Dieu fans fouffrir, qui ne pou vons nous exemter des peines de l'autre vie que par celles de la vie préfente, qui ne pouvons acheter la gloire qu'au prix de nos fouffrances unies aux vôtres ?

Lorfque vos Difciples furent proche du

Bourg d'Emmaüs 2 vous fites femblant, Seigneur, d'aller plus loin. Lorfqu'il femble que vous vous éloignez d'une ame, c'eft quelquefois alors que vous êtes plus près de vous manifefter à elle; & vous en ufez de la forte, pour augmenter en elle l'eftime de vos dons & les defirs qu'elle a de vous pofféder.

Auffi eft-ce ce que l'on remarque dans Vos Difciples qui vous forcent de demeurer, en vous difant: Demeurez avec nous parce qu'il eft déja tard, & que le jour eft fur fon déclin. [ v. 29. J O Seigneur, que n'imitons-nous la conduite de vos Difciples, en vous forçant de demeurer avec nous par une nouvelle ferveur dans les bonnes œuvres, lorfque nos offenfes & nos tiédeurs femblent vous contraindre de nous quitter! Que ne vous forçons-nous de demeurer avec nous en la perfonne des pauvres, par l'hofpitalité & l'aumône! Oui, Seigneur, demeurez avec nous, le foleil de la juftice s'abaiffe en nous, jour de la foi diminue & dans nous & dans nos freres, & le jour de notre vie est sur son déclin.

car

le

Vous reftez donc avec vos Disciples, & étant à table avec eux, vous prenez du pain & le béniffez ; & l'ayant rompu, vous le leur donnez, & en même tems leurs yeux font ouverts & ils vous reconnoiffent. O que l'on est bien récompensé d'exercer l'hofpitalité! on croit ne recevoir qu'un paffant, on reçoit Jelus

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