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ment, cela eft ou cela n'eft pas, fans y ema ployer de jurement. Je fouhaiterois, Seigneur, voyant l'abus extrême que l'on fait des fermens à l'entrée de toutes les profeffions, que l'on regarde comme une pure cérémonie, que vous infpiraffiez aux Puiffances eccléfaftiques & féculiéres de n'en exiger aucun, foit parce que la chofe qu'on promet avec ferment n'eft pas une matiere de jurement, foit parce qu'on viole prefque toujours ces fortes de fermens, que ce font des liens qu'on ne tarde guéres de rompre, & que la corruption du cœur de l'homme, la mulplication des engagemens forme la multiplication des crimes.

HYPOCRISIE

Vous avez grand foin de paroître juftes devant les hommes: mais Dieu connoît vos cœurs ; car ce qui eft grand aux yeux des hommes, eft on abomination devant Dieu. [Luc. 16. 15.]

Onfidérez que Jesus-Chrift découvre Cici le caractère de l'hypocrifie. Les hy pocrites mettent tout leur foin à cacher leurs défauts, & à mettre en évidence le bien qu'ils font, pour être eftimés devant les hommes; au contraire, les personnes vraiment humbles expoferoient volontiers leurs défauts, ils fouhaiteroient que tout le monde en fût informé, s'il étoit à propos; & ils cachent autant qu'il eft eux, leurs ver aus aux yeux des autres & aux leurs propres,

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Confidérez que Jefus - Chrift donne ici une régle admirable pour confondre les hypocrites, & pour obliger les humbles à vivre dans les fentimens de l'humilité, quand il dit: Mais Dieu conncît vos cœurs. Que fervira-t-il à l'hypocrite d'avoir trompé le monde, peut-il tromper Dieu, qui ne juge fur les apparences, mais fur les fenti-. mens du cœur? L'humble n'a garde de s'élever de l'eftime que les autres font de lui, ni de fe laiffer éblouir par l'éclat de quelques actions extérieures qu'il ne peut dérober à fa vue ni à celle des autres; il fçait. trop que c'eft le cœur qui eft le principe & qui fait l'effentiel de la vie chrétienne, que Dieu connoît manifeftement ce cœur, & que les hommes ni lui-même n'y connoiffent prefque rien.

Confidénez que Jesus-Chrift nous apprend une terrible vérité, quand il dit: Ce qui eft grand aux yeux des hommes, eft en abomination devant Dieu. Ces états fi élevés, ces premiers rangs dans le monde & dans l'Eglife, font fouvent occupés par des perfonnes fi indignes, que quelque grandeur que leur naiffance, leurs richeffes, ou leur dignité leur donnent aux yeux des hommes, ils ne font que de vrais néants & des fujets d'abomination aux yeux de Dieu; tant le jugement de Dieu eft différent de celui du mon de. Et encore combien d'actions extérieu res de charité, de pénitence & de piété, rendent ceux qui les pratiquent des sujets d'admirationdevant les hommes, lorsqu'aux

yeux de Dieu, ce ne font que des fujets de rebut, de mépris & d'abomination! Combien dans le monde loue-t-on les gens avec exagération de la moitié de leur devoir dont ils femblent s'acquitter, lorsque Dieu les condamne de l'autre moitié qu'ils négligent!

O mon Dieu, comme vous devez être le principe de mes actions, que vous seul en foyez auffi la fin. Quand je confidére Dieu, puis-je bien encore confidérer les créatures? Ce premier & fouverain objet ne doitil pas remplir toute la capacité de mor cœur? Et fe peut-il faire que j'oublie mon Dieu, qui peut me donner une récompense infinie, pour ne me propofer que l'eftime & l'approbation de viles créatures qui fou-vent ne pensent point à moi, ou qui peuvent au plus ne me donner qu'une très-petite récompenfe temporelle!

USURE CONDAMNE'E..

Faites du bien, & prêvez fans espérer.
[Luc. 6. 35.1

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que l'on faffe du bien, quand même or n'auroit pas lieu d'efpérer de recevoir la pareille, foit à caufe de l'impuiffance où fe trouve le prochain, ou à cause de son ingratitude. Les Saints ont donné effcore un fens plus refferré à ces paroles, & ils les ont ainfi expliquées : Prêtez fans en rien espérer.

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Quand même vous n'efpéreriez pas de retirer votre principal, ce qui eft proprement donner ne laiffez pas de prêter. JefusChrift fe fert toutefois alors du mot de prêter, & non point de celui de donner, pour épargner la confufion du prochain, qui auroit honte de demander, & qui n'en a pas d'emprunter. C'eft pourquoi les Saints ont fort bien remarqué fur ces paroles, le progrès de la vertu & de la Loi de Dieu dans la fuite des tems. Dans la Loi ancienne, il étoit, difent-ils, défendu de prêter à ufure à fon frere,cette Loi permettoit qu'on le fît feulement à l'égard des étrangers. Dans le Prophéte Ezéchiel, il eft défendu abfolument de prendre intérêt pour des chofes prêtées. [c. 18. v. 8. ] Et dans l'Evangile, il eft ordonné de prêter même à ceux de qui on n'efpére point recevoir le principal,. lorfqu'ils font dans le befoin. Il est vrai que cette derniere maniere de prêter n'est un précepte que dans la préparation du cœur. ou fi c'en eft un de le faire en effet, c'èft feulement dans certaines rencontres. Qu'il y a bien peu de perfonnes qui foient dans une fi fainte difpofition!

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Les Canons de l'Eglife & les Saints, fur cette parole de Jesus-Chrift, Prêtez fans en rien efperer, ont déclaré qu'il étoit défendu de tirer jamais intérêt d'un fimple prêt: de forte que fi on retire quelque chofe au-delà de fon principal, ce ne peut être qu'en vertu du dommage non-feulement poffible & éloigné, mais du dommage probable que

l'on fouffre, & qui vient précisément du prêt que l'on fait.

Confidérez fur ce principe combien il y a de perfonnes qui commettent des ufures, & qui s'engagent à des reftitutions qu'il leur faudra faire s'ils veulent fe convertir, & que l'on ne fait prefque jamais. Prenez garde d'abandonner votre cœur au defir de vous enrichir n'entreprenez jamais d'affaires fans avoir beaucoup prié & demandé à Dieu fes lumieres, & fans avoir confulté des perfonnes intelligentes en ces matieres, & qui foient plus difpofées à vous parler felon les maximes pures de l'Evangile, que felon la cupidité qui pourroit être dans vo

tre cœur.

Que le defir de m'enrichir ne m'aveugle pas, Seigneur, jufqu'à ce point, de tranfgreffer votre fainte Loi, & de faire profiter mon argent par des voies iniques: mais que je fuive votre Loi qui a voulu me fermer les voies de la cupidité, & retrécir pour moi les moyens de m'enrichir; afin que marchant dans l'amour & la pratique de la pauvreté chrétienne, je fuffe plus riche des richeffes fpirituelles.

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