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qu'à la Cour & dans les Palais des Grands, font traités les Miniftres Evangéliques ceux qui veulent prendre le parti de la vérité, y maintenir les véritables intérêts de la Religion, qui ne s'accordent point avec les faux intérêts de l'Etat & les maximes du monde : c'eft ce qui devroit détacher toutes les perfonnes fincérement touchées de l'amour de leur falut, & fur - tout les Miniftres de Jefus-Chrift, de ces lieux, où ils ne fe doivent jamais trouver fans une vo cation particuliere; car on ne peut s'y foutenir fans une grace très-forte.

Mais il arriva que cette déférence que Pilate eut pour Hérode, fervit à les ren dre amis d'ennemis qu'ils étoient auparavant. Il arrive fouvent que les hérétiques & les méchans s'uniffent ensemble pour perfécuter Jefus - Christ, la vérité & fon Eglife; & qu'ils font leur paix aux dépens des gens de bien qu'ils déchirent entr'eux parce qu'ils ne veulent point avoir d'union avec eux, &. que leurs œuvres leur font contraires.

Mais je remarque, ô Jefus, que cette paix qui arrive ici entre un Juif & un Payen, eft une figure de l'union que vous deviez faire par votre mort, des deux peuples dans une même Eglife. Tout eft plein de myftéres dans votre conduite;il n'eft rien qui n'ait un très-grand fens.

BARABBAS PREFERE à Jefus Chrift.

Ilate ayant reconnu l'innocence de

P Jefus Chrift, pour engager le peuple

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à demander fa délivrance, s'avife de fe fervir de l'obligation où il étoit à la Fête de Pâques de délivrer un criminel: il leur propofe donc Jefus-Chrift & Barabbas qui étoit un féditieux, un voleur & un meurtrier; afin que touché par cette comparai fon fi injurieufe à Jesus-Chrift, le peuple n'héfitât pas à en demander la délivrance: mais ce peuple ingrat oublie tout ce qu'il doit à Jefus-Chrift & il demande qu'on délivre Barabbas. Je reconnois que cette injuftice de ce peuple eft celle que j'ai com mife moi-même une infinité de fois, en préférant la fatisfaction de mes paffions, à la loi & à là volonté de Jefus; en préférant dans mon cœur & dans ma conduite, les maximes corrompues du monde, aux ma→ ximes faintes de l'Evangile; en préférant dans mon eftime le riche vicieux & le noble impie & libertin, au pauvre & au roturier

vertueux.

Je comprends que tout ce qui fe paffe ici eft une figure de la délivrance d'Adam pé→ cheur, & du genre humain délivré de la mort éternelle; & de Jefus-Chrift le fecond Adam, livré en fa place à la mort C'est donc ainfi, divin Jefus, que des cri minels, du nombre defquels je fuis, des

féditieux qui troublent par leurs péchés l'ordre établi de Dieu, des meurtriers qui donnent la mort à leurs ames par leurs crimes, à leur prochain par leurs mauvais exemples, & à vous qui êtes l'auteur de la paix & de la vie, vous font préférés par une conduite très-adorable de votre Pere, qui vous condamne à la mort & qui nous en délivre.

FLAGELLATION
de Jefus-Chrift.

ESUS CHRIST eft abandonné par

lui ôtent fes habits. O Jefus, abandonné ainfi, vous êtes dans cet état, la confolation des gens de bien, qui font quelquefois expofés aux infultes & aux mocqueries des méchants.

Vous êtes fouetté très - cruellement, & Jefus, par ces Soldats; votre corps facré eft mis tout en fang, & eft tout couvert de plaies par ce traitement fi indigne; co font comme autant de fillons que l'on tra→ ce fur votre corps facré, pour y renfermer le Chrétien comme une femence qui doit être cachée en vous pour y germer, y jetter les fondemens de l'édifice de l'Eglife, laquelle eft fondée fur vous, qui en êtes la pierre fondamentale & la pierre de l'angle; & dans la ftructure duquel édifice nous devons entrer comme des pierres vi vantes.

Jefus, que je fois comme un grain 'de froment caché dans vos plaies facrées arrofé de votre fang précieux; que je fois comme une ente toute renfermée en vous, qui en tire tout fon fuc & toute la nourriture; & qui par l'infufion de votre grace, porte des fruits avec abondance: que je fois uniquement fondé & appuyé fur vous, & qu'à jamais je fois une pierre vivante de l'édifice, dont vous ferez éternellement la pierre fondamentale dans la Jérufalem célefte.

Mais cette flagellation honteufe & cruelle à laquelle vous êtes expofé, ô Jefus, eft pour expier la délicateffe criminelle avec laquelle les personnes du monde traitent d'ordinaire leurs corps. Que cet exemple m'apprenne à vivre dans la mortification de mes fens, & à fuir toute délicatesse & toute fenfibilité,

COURONNEMENT D'EPINES.

Es Soldats enfoncent à force de coups

Jefus Chrift. O précieufe tête digne de commander à tout l'univers, digne des adorations des Anges & des hommes, qui - renfermez les tréfors de la fageffe & tous les deffeins de Dieu! c'eft donc ainfi que yous êtes traitée pour expier tant de pen fées profanes, tant d'intrigues & de deffeins criminels que les hommes forment dans leur efprit; & c'eft ainfi que vous fatisfaites pour

des parures vaines & immodeftes dont les femmes ornent leurs têtes.

Les Soldats vous mettent un rofeau à la main en guise de fceptre; ils couvrent vos épaules d'un manteau d'écarlate, & fe moquent de votre qualité de Roi; ils vous faluent, en difant: Je vous falue, Roi des Juifs. [ Matth. 29. 27. ] C'est par ces traitemens fi indignes que vous fatisfaites, Jefus, pour la fotte vanité des hommes, qui recherchent avec tant d'ambition les premieres places, qui veulent toujours s'élever & commander aux autres, & qui fe feroient Rois, s'il étoit en leur pouvoir.

On tourne en dérifion votre Royauté, & moi je l'adore avec refpe& & m'y foumets humblement : foyez préfentement le Roi de mon cœur › en Paffujettiffant au doux joug de votre amour; afin que votre fceptre ne fe change point un jour pour moi en une verge de fer, comme il arrivera à l'égard de tous ceux qui ne fe feront pas foumis ici-bas volontairement à l'empire de votre loi.

Les Soldats dans cet état, couvrent votre face adorable de crachats, & la noir-ciffent de coups. Un de vos Prophétes vous voyant dans cet état, dit, qu'il ne décou vre plus rien en vous de cet éclat & de cette beauté qu'il y avoit vue autrefois : que -vous n'êtes plus reconnoiffable; que vous êtes devenu l'objet du mépris du monde, le dernier des hommes, un homme de douleur qui a éprouvé toutes les fouffrances &

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