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nière volonté. Car il faut observer que l'acte qui constate une libéralité, ne peut être qu'une donation entre vifs ou un testament; si les clauses qu'il renferme, et la manière dont il est rédigé, ne caractérisaient précisément ni l'un ni l'autre de ces actes, alors l'acte serait nul. » C'est ce que nous avions dit au no 224. M. Favard, dans son Répertoire, au mot Testament, sect. 1, § 2, no 15, se décide aussi pour l'opinion que la forme du testament par lettre missive peut encore être usitée.

Mais nous pouvons invoquer un arrêt de la Cour royale de Colmar, par lequel cette Cour s'est déclarée pour la même opinion. L'arrêt est du 5 avril 1824; il est rapporté par M. Dalloz, vol. 25, 2° partie, p. 62. Cet arrêt pourrait n'être pas exempt de critique, en ce qu'après avoir déclaré en principe que le testament dont il était question était valable, quoique fait sous la forme d'une lettre missive, il l'a cependant annulé, ainsi que l'avait fait le jugement dont était appel, et cela sur le fondement d'un écrit de la testatrice, non daté, qui portait révocation de cette même lettre, laquelle avait été déjà considérée comme ayant force de testament. Or, on pourrait trèsraisonnablement douter qu'un testament avoué pour tel, ait pu être révoqué par un acte qui ne pouvait être regardé comme un testament. Aussi M. Dalloz en fait judicieusement l'observation dans une note au bas de l'arrêt.

Mais ce n'est pas ce dont il s'agit dans le moment. Il n'est pas moins vrai que la Cour de Colmar a décidé la question en principe. Elle a eu soin de s'en expliquer, pour improuver, en cette partie, les motifs du jugement attaqué, d'après lesquels les premiers juges avaient adopté l'opinion, qu'un testament fait par une lettre missive était nul.

<< Considérant, porte l'arrêt, qu'aucune forme spéciale n'est assignée par la loi aux testamens olographes; que l'acte du 9 mars 1813 est signé et écrit en entier par la dame de Burckenvald; que, bien qu'il soit adressé à Joseph Klein, en forme de lettre, il est qualifié acte de déclaration, et écrit sur papier timbré; qu'ainsi cet acte doit

conserver son caractère essentiel, et ne peut être envisagé comme un traité, ni comme une donation entre vifs, et qu'il n'a pas été nécessaire qu'il fût fait double. >>

Nous avions traité la question ainsi qu'on vient de le voir, lorsque nous avons reçu le 17° volume du Répertoire de M. Merlin. On y voit, au mot Testament, sect. 2, S 1er, art. 5, une forte discussion à l'appui de l'opinion pour laquelle nous venons de nous décider.

Nous observons encore que, par suite de la simplicité des formes admises par le testament olographe, ce testament peut être écrit sur toute espèce de papier; qu'il n'est pas nécessaire, pour sa validité, qu'il soit écrit sur du papier timbré. Un arrêt de la Cour de Nîmes, du 20 janvier 1810, rapporté par Sirey, vol. 10, 2o partie, page 23, a jugé valable un testament écrit sur le livre de compte du testateur. Cet arrêt semble bien rendu, dit M. Toullier, n° 361. Nous partageons cette opinion. Cependant il y aurait, dans ces deux cas, une amende encourue pour la contravention à la loi sur le timbre. On peut voir encore le Répertoire de M. Favard, au passage que nous avons ci-dessus indiqué ]

SECTION II.

DU TESTAMENT PAR ACTE PUBLIC.

Définition de ce testament. - Division de cette section.

229. Le testament par acte public remplace celui qui était anciennement connu sous la qualification de testament nuncupatif, qui était public, c'est-à-dire, dicté par le testateur aux notaires et aux témoins.

« Ce testament, dit l'article 971 du Code, est celui qui » est reçu par deux notaires en présence de deux témoins, » ou par un notaire en présence de quatre témoins. »

Ici s'ouvre une carrière encore plus aride que celle que j'ai déjà parcourue, puisqu'il s'agit de s'occuper de formes dont plusieurs peuvent paraître minutieuses. Mais la

matière n'est pas moins importante, et je tâcherai de dédommager de la sécheresse du sujet par l'ordre et par la méthode.

Dans un premier paragraphie, je m'occuperai des formes générales du testament par acte public.

Dans un second, je traiterai de ce qui concerne les signatures, la qualité des témoins et la parenté respective de tous ceux qui concourent au testament.

§ Ier.

DES FORMES GÉNÉRALES DU TESTAMENT PAR ACTE PUBLIC.

Quelles sont ces formes.

De l'équipollence dans les formes et les termes employés par le notaire.

230. Il est dit dans l'article 972 : « Si le testament est >> reçu par deux notaires, il leur est dicté par le testateur, » et il doit être écrit par l'un de ces notaires, tel qu'il est » dicté.

» S'il n'y a qu'un notaire, il doit également être dicté » par le testateur, et écrit par ce notaire.

» Dans l'un et l'autre cas, il doit en être donné lecture >> au testateur en présence des témoins. Il est fait du tout >> mention expresse. »

Cet art. 972 mérite la plus grande attention, attendu que l'inobservation de tout ce qu'il prescrit donnerait lieu à la nullité du testament, en conséquence de l'article 1001.

Il est cependant arrivé, et il peut arriver encore, que des notaires ne suivent pas les expressions mêmes de la loi, et se servent d'autres expressions qu'ils croient avoir absolument le même sens.

Dans ce cas il faut recourir à une règle qui paraît cer

taine.

C'est que si l'on peut tirer des expressions employées par le notaire, la conséquence nécessaire que tout ce que la loi prescrit a été observé, on ne devrait pas annuler le testament. Je ne crois pas qu'on doive reconnaître encore

dans les mots dont la loi se sert, des termes de formules, des termes sacramentels, auxquels il faille judaïquement s'asservir à peine de nullité. Nous ne sommes plus dans ces temps où, relativement à certaines matières, comme lorsqu'il s'agissait de retrait, l'emploi identique des mots consacrés par la loi, devenait nécessaire ; ce qui avait introduit cette règle marquée au coin d'une sévérité ridicule, Qui cadit à syllabá, cadit à toto.

Ce que je viens de dire, résulte de ce que dit Ricard, partie 1re, nos 1502 et suiv. Il s'est expliqué à cet égard avec autant de sens que d'énergie. En conseillant la stricte observation de ce que la loi prescrivait, il ajoute, ce qu'il ne faut pas toutefois entendre superstitieusement, de sorte que l'équipollence n'y puisse pas être du tout reçue, ce qui serait rendre notre jurisprudence ridicule et sans fondement. Mais en admettant l'équipollence, cet auteur a soin de dire qu'elle doit être rejetée, si elle n'est identique, et si ce qui est employé pour accomplir les solennités prescrites par la Coutume, ne comprend son intention adæquatè et identicè; de sorte que si les mots employés au testament n'avaient pas la même force que ceux qui ont été omis et qui étaient néanmoins désirés par la Coutume, et qu'il s'y puisse figurer quelque sorte de différence, le testament sera déclaré nul.

Cet auteur cite quelques exemples des cas où il y a équipollence, et de ceux où il n'y en a pas, en appliquant des arrêts à chacune de ces espèces.

Les législateurs eux-mêmes ont souvent été comme forcés de reconnaître cette équipollence dans la rédaction des articles des lois, dans lesquels ils prescrivaient des formes. Il est dit dans l'art. 5 de l'ordonnance de 1735: « Lorsque le >>testateur voudra faire un testament nuncupatif écrit, il » en prononcera intelligiblement toutes les dispositions, en » présence, etc. » On lit dans l'art. 23: « Lesquels notaires » ou tabellions, ou l'un d'eux, écriront les dernières vo>> lontés du testateur, telles qu'il les dictera, et lui en feront >> ensuite lecture, de laquelle il sera fait une mention ex» presse; sans néanmoins qu'il soit nécessaire de se servir

» précisément de ces termes, dicté, nommé, lu et relu, » sans suggestion, ou autres requis par les Coutumes ou » Statuts, etc. >>>

Explication à cet égard.

231. Mais quand je parle de l'équipollence, j'entends principalement celle des mots, par comparaison de ceux que le notaire a employés, à ceux dont le législateur s'est servi. Car pour ce qui est de l'équipollence des formes, cette équipollence doit être plus rare, et ne peut se rencontrer que difficilement. On sent, en effet, qu'à cet égard tout se réduit à savoir si la forme voulue par la loi a été suivie exactement ou non. Il est difficile qu'on puisse dire qu'il y ait une question d'équipollence; il n'y en a guère d'autre que celle d'observation ou d'omission des formalités.

Autre remarque. - Le notaire n'est pas garant de la nullité des actes qu'il a reçus, hors les cas de fraude. Arrêts sur ce point.

232. Je dois remarquer encore, qu'on aurait tort de conclure de ce que je viens de dire, que j'admette aisément que les notaires puissent substituer des expressions à celles de la loi; on sent au contraire qu'il ne peut jamais y en avoir de plus propres que celles dont le législateur s'est servi pour exprimer les formes qu'il a voulu établir. Si donc j'ai cru devoir m'expliquer à cet égard, c'est parce que, dans tous les temps, des questions de cette nature se sont élevées, par l'effet, soit de l'inattention, soit de l'ignorance de quelques notaires, et que par ce qui est déjà arrivé, on peut craindre ce qui peut arriver encore; et qu'enfin, en faisant connaître les différentes espèces qui se sont présentées, c'est exciter d'autant plus l'attention des notaires pour l'avenir.

Ce n'est pas qu'on admette en justice une action en garantie contre un notaire, à raison de nullités commises dans les actes dont il a été le ministre. Errare humanum est. Furgole, des Testamens, chap. 12, no 15, cite les auteurs qui rapportent des arrêts qui l'ont ainsi jugé. Il n'y a de responsabilité civile que pour les pertes des mi

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