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moins que la crainte d'être trop long, pour nous empêcher de rapporter le dispositif de cet arrêt : nous le regardons comme un modèle de rédaction.

Cependant, en revenant sur ce qui doit être pratiqué d'après la législation actuelle, pour la conservation du privilége, il y a une autre précaution importante à prendre de la part du légataire et du créancier de la succession, en cas de vente des biens de cette succession, de la part des héritiers.

Il résulte de l'art. 834 du Code de procédure civile, que tout créancier hypothécaire, en cas d'aliénation des objets hypothéqués, et de transcription de l'acte d'aliénation, est obligé de prendre inscription, au plus tard dans la quinzaine, à compter de cette transcription.

Il est ajouté : « Il en sera de même à l'égard des créan» ciers ayant privilége sur des immeubles, sans préjudice » des autres droits résultant au vendeur et aux héritiers, » des art. 2108 et 2109 du Code civil. »

De ces termes, « des créanciers ayant privilége sur des >> immeubles, » on peut tirer la conséquence que la nécessité de l'inscription frappe sur le privilége dont il s'agit, en cas de vente des immeubles de la succession et de transcription de cette vente, même avant l'expiration des six mois, à compter de l'ouverture de la succession. Cet article 834 ne fait point de distinction entre les priviléges; il fait une exception pour deux cas seulement, et cette exception fait reporter tous les autres cas dans la règle.

A défaut d'inventaire, les légataires sont tenus ultrà vires des dettes et legs à leur charge.

313. Il reste à examiner la question de savoir si les légataires universels, ou à titre universel, sont tenus ultrà vires des dettes ou des legs qui sont à leur charge, à défaut d'inventaire de leur part.

L'affirmative ne peut faire de difficulté, par deux raisons décisives.

La première est que ces légataires sont, comme les héritiers, de véritables successeurs à titre universel. Dans l'ancienne jurisprudence, cette proposition souffrait quelques

difficultés en théorie, d'après les lois romaines, suivant lesquelles on pouvait soutenir qu'il n'y avait, à proprement parler, de véritables successeurs à titre universel que les héritiers. Mais, en pratique, il devenait indispensable d'assimiler ces légataires aux héritiers; la seule différence provenait de ce que les uns tenaient leur droit de la disposition de l'homme, et les autres de celle de la loi; et notre législation considère les légataires universels, ou à titre universel, comme de véritables successeurs à titre universel. Je l'ai déjà établi, no 310, en raisonnant d'après les art. 873, 874, 875, et 876 du Code civil.

La seconde raison est que, par rapport à ces légataires, il y aurait les mêmes inconvéniens que relativement aux héritiers, s'ils pouvaient abdiquer leur legs, en faisant arbitrairement raison aux créanciers des effets mobiliers qu'ils auraient retirés, puisque le titre qui constitue leur qualité ne constate point par lui-même la consistance et la valeur de ces effets. Aussi lorsque Lebrun, Traité des Successions, liv. 4, chapitre 2, sect. 1re, no 3, dit que le légataire universel n'est point tenu indéfiniment au delà des forces de son legs, il ajoute, pourvu qu'il ait fait inventaire; et ce qu'il dit du légataire universel doit avoir lieu pour les légataires à titre universel: il y a parité de motifs.

Il n'en est pas de même du donataire universel, ou à titre universel, de biens présens.

314. Mais ce que je viens de dire du légataire universel et des légataires à titre universel, ne peut s'appliquer, soit au donataire universel, soit au donataire à titre universel des biens présens par donations entre vifs; en sorte que, dans les cas où ces donataires peuvent se dégager de leurs obligations par l'abdication de la donation, ils en ont le droit, quoiqu'ils n'aient pas fait d'inventaire. D'un côté, ces donataires ne sont point des successeurs à titre universel; leur droit ne se réfère point à l'époque du décès du donateur; ils ne peuvent jamais être que des successeurs à titre singulier. D'un autre côté, il n'y a, à l'égard de ces donataires, aucun inconvénient dans le défaut d'inventaire : on ne peut même

concevoir la nécessité de cet inventaire, dès qu'il concerne principalement le mobilier, et qu'il est suppléé à cet inventaire par l'état qui doit se trouver dans l'acte même qui fait leur titre. Le défaut d'inventaire ne pourrait être opposé qu'aux donataires contractuels universels dont il est question dans les art. 1082 et 1084 du Code, parce que ces donataires sont mis par le contrat à la place des héritiers, que leur droit se réfère à la mort du donateur, et que l'acte qui fait leur titre ne donne aucune connaissance du mobilier; en sorte que je crois pouvoir persister dans ce que j'ai dit à ce sujet dans la première partie, chap. II, sect. II, § III, nos 95 et suiv.

Du mode de contribution aux dettes, de la part des légataires en usufruit.

315. Dans tout ce que j'ai dit jusqu'à présent sur les legs, j'ai supposé que ces legs portaient sur la propriété. Mais des legs peuvent être faits en usufruit; ils peuvent, comme les legs en propriété, être ou universels, ou à titre universel, ou enfin à titre particulier. Le législateur devait établir des règles particulières sur le mode de contribution aux dettes de la part de ces légataires. C'est aussi ce qu'il a fait dans la section 2o du chapitre 1er du titre du Code, concernant l'usufruit. Mais ces règles se trouvent en harmonie avec celles qui ont été établies au titre des Donations et Testamens, pour les légataires de la pleine propriété, c'est-à-dire, de la propriété avec la jouissance. La différence du mode de contribution devait seulement résulter de la différence de valeur entre la pleine propriété et l'usufruit seulement.

Ainsi l'article 612 est ainsi conçu: « L'usufruitier, ou >> universel, ou à titre universel, doit contribuer avec le » propriétaire au paiement des dettes, ainsi qu'il suit :

>> On estime la valeur du fonds sujet à l'usufruit; on >> fixe ensuite la contribution aux dettes à raison de cette >> valeur.

>> Si l'usufruitier veut avancer la somme pour laquelle le >> fonds doit contribuer, le capital lui en est restitué à la fin » de l'usufruit, sans aucun intérêt.

>> Si l'usufruitier ne veut pas faire cette avance, le pro>> priétaire a le choix, ou de payer cette somme, et, dans » ce cas, l'usufruitier lui tient compte des intérêts pendant » la durée de l'usufruit, ou de faire vendre, jusqu'à due » concurrence, une portion des biens soumis à l'usufruit. » Cette disposition est infiniment juste ; elle met fin à une foule de difficultés qui s'élevaient à ce sujet, d'après la diversité d'opinions des auteurs, dont parle Ricard, des Donations, partie 5°, no 1533. Et c'est le cas de rendre à cet auteur cette justice, que ses vues étaient conformes à la disposition de cet article du Code. Il en avait trouvé l'idée dans la loi dernière, § Si autem aes alienum, du Code de bon. quæ lib.

Mais on sent qu'il ne devait pas en être de même du legs fait par un testateur, d'une rente viagère ou d'une pension alimentaire, que pour les dettes. Aussi est-il dit dans l'art. 610, qu'un pareil legs doit être acquitté par le légataire universel de l'usufruit dans son intégrité, et par le légataire à titre universel de l'usufruit dans la proportion de sa jouissance, sans aucune répétition de leur part. Le legs portant sur une charge annuelle et viagère devient une charge de l'usufruit.

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A l'égard du légataire en usufruit à titre particulier, il ne devait pas participer à la contribution générale des dettes, dès que la loi, au titre des Donations et Testamens, en affranchit le légataire particulier de la pleine propriété. Tel est aussi le résultat de l'article 611.

Il est néanmoins ajouté dans cet article : « Sauf ce qui est » dit à l'article 1020, au titre des Donations et Testa» mens. » Je m'expliquerai au numero 318, sur les dispositions de cet article 1020.

Cette section 2o du chapitre 1er du titre de l'Usufruit, contient encore d'autres règles particulières concernant les usufruitiers. Mais leur explication n'entre pas dans mon sujet; il suffit d'y renvoyer pour ce qui concerne les usufruitiers qui tiennent leur droit en vertu de dispositions gratuites.

SECTION IV.

DE L'EXÉCUTION DES LEGS, EN CAS DE CHANGEMENS ARRIVÉS DANS L'ÉTAT DE LA CHOSE LÉGUÉE, PAR LA VOLONTÉ, OU SANS LA VOLONTÉ DU TESTATEUR, OU EN CAS D'ERREUR SUR LA DÉSIGNATION DE L'OBJET LÉGUÉ.

De quelques difficultés sur la détermination et l'exécution des legs. Du legs d'objets mobiliers.- De l'augmentation faite par alluvion à l'objet légué. - Du changement de la chose léguée dans sa forme et dans son nom.

316. Je passe actuellement à quelques dispositions de la loi, dont l'objet a été de faire cesser les difficultés qui, dans certains cas, se seraient élevées sur la détermination et sur l'exécution des legs.

En premier lieu, il est dit dans l'art. 1018, que la chose léguée sera délivrée avec les accessoires nécessaires, et dans l'état où elle se trouvera au jour du décès du testateur.

Il y a des objets qui sont meubles sous quelques rapports, et qui néanmoins sont déclarés immeubles, parce qu'ils sont des accessoires ou des dépendances d'un immeuble; en sorte que quoique ces objets ne soient pas déclarés particulièrement dans la disposition à titre gratuit, de l'immeuble, ils ne laissent pas d'y être compris.

Or, les règles qu'on doit suivre à ce sujet sont tracées dans le chap. 1er du livre 2 du Code civil.

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S'il s'agit du legs d'un meuble particulier, on ne peut guères prévoir qu'il se présente des difficultés. Ce meuble doit être délivré tel qu'il est au décès du testateur.

Mais il peut s'élever des contestations lorsque le legs porte sur des objets mobiliers en masse. Selon que le testateur se sera expliqué, la disposition pourra emporter la totalité de tout ce qui, suivant la loi, sort nature de mobilier, en y comprenant même les droits incorporels mobiliers, tels que les obligations, cheptels, rentes, etc., ou elle ne portera que sur une partie de ces objets.

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