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lement affecté de cette idée de division en aucun autre sens; car on ne doit pas aisément considérer comme légers des motifs qui ont déterminé une Cour qui renferme autant de lumières.

Mais toujours il est à croire que la Cour de cassation se serait décidée contre l'accroissement, si, dans la clause qui lui était soumise, il avait été dit simplement, ainsi que je l'ai déjà supposé, j'institue Pierre et Jean par portions égales, ou par égalité. S'il en était autrement, il serait impossible de déterminer dans quels cas il y aurait lieu, ou à l'accroissement, lorsqu'il s'agirait d'une assignation de parts par portions égales, ou par égalité, à moins qu'on ne soutînt que ces termes n'emportent pas une assignation de parts. Mais cette assertion serait contraire à tous les principes reçus jusqu'à présent, et qui paraissent avoir été confirmés, plutôt que changés, par le Code civil.

non,

Du cas où une chose non susceptible de division a été léguée à plusieurs personnes.

351. Notre législation admet encore l'accroissement dans un autre cas. « Le legs sera encore réputé fait conjointe»ment, quand une chose, qui n'est pas susceptible d'être » divisée sans détérioration, aura été donnée par le même » acte à plusieurs personnes, même séparément. » Article 1045. Dans ce cas l'accroissement prend son principe dans l'indivisibilité, qui fait présumer dans l'intention du testateur une espèce de solidarité entre les légataires. Mais on sent que l'impossibilité de diviser sans détérioration, doit être bien établie.

Observation quant à la forme de la disposition de l'accroissement en legs d'usufruit.

352. Tout ce que je viens de dire sur l'accroissement, s'applique au cas où la disposition serait conçue sous la forme d'institution d'héritiers, comme sous celle de legs. J'ai déjà eu occasion plusieurs fois de dire que toutes nos dispositions testamentaires ne sont que des legs. Notre lé

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gislation ne reconnaît point l'institution testamentaire dans le sens dans lequel les Romains l'entendaient.

J'ai dit encore au commencement du chapitre II de cette seconde partie, en distinguant les différentes espèces de legs, qu'une institution faite simplement de plusieurs héritiers, ou qu'un legs qui serait fait à plusieurs personnes, et qui porterait sur tous les biens du testateur, ou sur tous ses biens disponibles, sans affectation d'aucune portion, ne laisseraient pas de devoir être considérés comme legs universels; mais que si la disposition était faite avec indication de portions pour chacun des appelés, égales ou non, alors la disposition serait, pour chacun, à titre universel.

La part d'un des usufruitiers, après son décès, passe-t-elle de suite à l'héritier?

555. Les principes sont les mêmes relativement à l'accroissement de legs d'usufruit fait à plusieurs, que pour le legs de propriété.

Il y avait cependant à ce sujet une particularité dans le droit romain. Il résultait de plusieurs lois, et notamment de la loi 1o, § 3, ff. de usufr. accresc., que même après le partage entre co-légataires d'un objet à titre d'usufruit, lorsque le décès d'un des usufruitiers arrivait, sa part ne revenait pas de suite à l'héritier, mais les co-légataires restans avaient droit d'en jouir pendant leur vie, et c'était seulement au décès du dernier mourant que l'usufruit se consolidait à la propriété, en faveur de l'héritier, ou de celui qui avait été grevé du legs d'usufruit. Le motif de cette législation était que le droit d'usufruit est un droit successif qui ne s'acquiert qu'à mesure qu'on jouit de la chose, quotidiè constituitur et legatur. Lors donc que l'un des co-légataires cesse par sa mort de jouir de sa part dans cet usufruit, on peut dire que cette part a défailli en sa personne, et qu'il y a lieu par conséquent au droit d'usufruit de cette part au profit des co-légataires, qui, étant chacun légataire de l'usufruit pour le total, ont droit de le

retenir lorsque les autres parts viennent à défaillir. C'est ainsi que s'en explique Pothier, des Donations testam., chap. 6, sect. 5, § 4. Ricard avait enseigné la même doctrine, 3 part., nos 444 et 523.

Ces deux auteurs devaient soutenir cette opinion, parce qu'elle était fondée sur les dispositions précises des lois romaines. Elles étaient lois dans les pays de droit écrit, et elles avaient la plus grande influence dans les pays coutumiers, les Coutumes ne s'étant pas expliquées sur cette

matière.

Mais actuellement que les lois romaines ne peuvent être consultées que comme raison écrite, dans tout ce qui n'est pas contraire à notre législation, on peut raisonnablement révoquer en doute que cette opinion doive être suivie.

Elle paraît contraire au principe fondamental en matière d'accroissement. Ce principe est qu'il ne peut y avoir lieu à l'accroissement, que tant que subsiste la solidarité sous laquelle les co-légataires ont été appelés, selon le mode de conjonction qui les unit, et que nous venons d'expliquer. Or, cette solidarité existe seulement avant le partage entre co-légataires ; c'est seulement lorsqu'une des parts est défaillante avant ce partage, qu'il y a lieu au droit d'accroissement; et ce droit cesse dès l'instant du partage.

dès

Cela étant, le droit d'usufruit, qui est l'objet légué, étant partagé entre les co-légataires, on peut dire que lors il ne peut plus y avoir lieu au droit d'accroissement entr'eux, et qu'après le décès de chacun d'eux, l'usufruit de sa portion se consolide à la propriété, en faveur du propriétaire. La différence que faisaient les lois romaines à cet égard, entre le legs d'usufruit et le legs de propriété, paraît plus subtile que solide. Il est difficile de soutenir que le legs d'usufruit se renouvelle chaque année. Il est dans les principes et dans la nature des choses, qu'un legs d'usufruit est un droit individuel qui affecte la propriété pour la vie de l'usufruitier. Et ce droit, qui est un droit immobilier corporel, qui est en lui-même une propriété, puisqu'on pourrait le faire saisir immobilièrement, est évidemment divisible. Il cesse à la mort de celui

sur la tête duquel il a été déterminé par le partage qui a été l'exécution du legs.

Notre législation ne s'étant pas expliquée sur ce cas particulier, on peut dire qu'elle est demeurée, par rapport à l'accroissement en legs d'usufruit, dans les mêmes termes que respectivement à l'accroissement en legs de propriété ; et j'ai cru pouvoir en soumettre l'observation.

Du legs de la propriété à l'un, et de l'usufruit à l'autre.

354. Quelques jurisconsultes avaient encore prétendu, en se méprenant sur le sens de certaines lois romaines, que dans le cas du legs de la propriété à l'un, et de l'usufruit à l'autre, lorsque le légataire de l'usufruit ne prenait pas son legs, cet usufruit ne se réunissait pas dès cet instant à la propriété, et que l'héritier devait jouir de l'objet pendant la vie de celui auquel l'usufruit en était légué.

Mais Ricard, nos 525 et suiv., réfute solidement cette opinion. Il établit qu'il ne peut plus alors être question de droit d'accroissement, et que c'est le cas de la consolidation de l'usufruit à la propriété, en faveur de celui auquel la propriété a été léguée. Cette décision est cependant susceptible de quelques exceptions relatives à certains cas lesquelles on peut consulter cet auteur.

§ IV.

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sur

LA RÉVOCATION DU TESTAMENT PEUT ÊTRE DEMANDÉE

DANS CERTAINS CAS.

Quels sont ces cas.

355. Il est dit dans l'article 1046: « Les mêmes causes » qui; suivant l'article 954 et les deux premières disposi» tions de l'art. 955, autoriseront la demande en révoca » tion de la donation entre vifs, seront admises pour la de>> mande en révocation des dispositions testamentaires. »

Ainsi, en combinant cet article avec les articles 954 et 955, la demande en révocation des dispositions testamentaires pourra avoir lieu,

1o. Pour cause d'inexécution des conditions sous lesquelles la disposition aura été faite;

2o. Si celui à qui la disposition aurait été faite, avait attenté à la vie du testateur;

3o. S'il s'était rendu coupable envers lui de sévices, délits ou injures graves.

Mais si la demande est fondée sur une injure grave faite à la mémoire du testateur, elle doit être intentée dans l'année, à compter du jour du délit.

Voyez, sur cette matière, ce que j'ai dit dans la première partie, chap. 9, § 2 et 3.

REMARQUES SUR LE CHAPITRE PRÉCÉDENT.

La matière qui est traitée dans ce chapitre correspond à une loi du 28 février 1825, faisant partie du 12o titre du 2o livre du Code des Pays-Bas; en voici le texte :

SECTION HUITIÈME.

De la révocation des testamens et de leur caducité.

CXXI. Les testamens ne pourront être révoqués, en tout ou en partie, que par un testament postérieur, ou par un acte devant notaire, portant déclaration du changement de volonté.

CXXII. Lorsqu'un testament postérieur, contenant la révocation expresse des précédens, n'est pas revêtu des formalités prescrites pour la validité des testamens, mais bien des formalités requises pour la validité des actes notariés, la révocation n'aura pas d'effet à l'égard des dispositions antérieures, répétées dans l'acte postérieur.

CXXIII. Les testamens postérieurs qui ne révoqueront pas d'une manière expresse les précédens, n'annuleront dans ceux-ci que celles des dispositions y contenues, qui se trouveront incompatibles avec les nouvelles, ou qui y seront contraires.

Le présent article n'est pas applicable, lorsque les testamens postérieurs sont nuls pour défaut de formes, quoique valables comme actes notariés. CXXIV. La révocation expresse ou tacite, faite dans un testament postérieur, aura tout son effet, quoique ce nouvel acte reste sans exécution par l'incapacité de l'héritier institué ou du légataire, ou par leur refus de recueillir.

CXXV. Toute aliénation, celle même par vente avec faculté de rachat, ou par échange, que fera le testateur de tout ou partie de la chose léguée, emportera la révocation du legs pour tout ce qui a été aliéné, encore que l'aliénation soit nulle et que l'objet soit rentré dans la main du testateur. CXXVI. Toute disposition testamentaire, faite sous une condition dé

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