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1789. la France, avoient arrêté de demeurer constamment réunis pendant toute la durée des Etats-Généraux, pris même quelques délibérations séditieuses, et on l'avoit souffert. Le 13 juillet, plusieurs d'entr'eux choisis par l'assemblée électorale se réunirent à l'Hôtel-deVille, se donnèrent le nom de comité permanent et de magistrats provisoires; ils créèrent une milice parisienne, et firent substituer la cocarde tricolore (bleue, blanche et rouge) à la cocarde verte, qu'on avoit portée jusqu'alors. De son côté, l'assemblée nationale députe au roi pour demander l'éloignement des troupes, dont la présence, disoit-elle, irritoit le peuple. (C'était demander l'éloignement des pompiers au fort de l'incendie.) Le roi s'y refuse. Elle prend un arrêté pour insister sur sa demande, et déclare que les quatre ministres qu'on vient d'écarter emportent sou estime et ses regrets. C'étoit encou→ rager et enflammer la révolte, dont leur dis-. grâce formoit le prétexte; aussi continua-t-elle avec fureur. La tête du comte d'Artois fut mise à prix par des affiches apposées dans les principales rues de Paris. Le 14 juillet, sur Finvitation des motionnaires du Palais-Royal, qui avoient passé la nuit dans le jardin, lat populace, parmi laquelle se mêlèrent plusieurs

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tèrent; il se retira, et, à peine sorti, fut tué 1789. d'un coup de pistolet. Sa tête, celle de Launay, et quelques autres, placées sur des piques, furent portées en triomphe au Palais-Royal; c'étoit un trophée digne de ce capitole de rebelles et de scélérats.

L'assemblée nationale les secondoit puissamment à Versailles, et lorsqu'elle eût dû supplier le roi de faire agir les troupes pour réprimer la révolte, elle l'obsédoit de remontrances pour demander leur éloignement, afin d'assurer et de consolider le triomphe des révoltés, dont les chefs étoient dans son sein (1). Le but de ceux-ci étoit de porter au trône le duc d'Orléans. Ils l'eussent d'abord fait nommer lieutenant-général du royaume, et eussent mis entre ses mains toutes les forces de l'Etat. Si ce prince avoit eu l'énergie du crime autant qu'il en avoit la volonté, le succès n'auroit guère été douteux. Les directeurs de la faction s'assembloient à Montrouge, près de Paris: c'étoit de là que partoient les ordres ou les instructions qui mettoient en feu la capitale et les provinces. Il étoit arrêté que le duc d'Orléans demanderoit au roi la lieutenance géné

(') On entendit Mirabeau s'écrier, d'une voix de tonnerre : « Je demande la tête du maréchal de Broglie.

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1789. rale, en offrant à ce prix d'apaiser la fureur du peuple. On comptoit que le monarque, intimidé par la catastrophe du 14 juillet, n'oseroit rien refuser; mais, au moment de l'exécution, le duc sent défaillir son courage, et, au lieu de demander la lieutenance générale, il sollicite la permission de se retirer en Angleterre. Cette pusillanimité donna un accès de fureur à Mirabeau (1). Cependant le duc ne fut pas encore abandonné par sa faction; elle n'avoit pas eu le temps de dévorer son immense fortune; elle pouvoit d'ailleurs saisir ou créer d'autres occasions.

Le roi avoit à choisir entre trois partis : l'archevêque d'Aix conseilloit de rétablir l'obéissance par la force. Quoiqu'on tût tout tenté pour les séduire, les troupes, à l'exception des gardes - françoises, étoient disposées à faire leur devoir. On eut ensuite separé les Etats-Généraux, qui, en rejetant la déclaration du 23 juin, avoient trahi à la fois le souverain et la nation; qui, par leur désobéissance insolente aux ordres du roi, avoient soulevé contre eux tous les bons esprits,

(1) Ce député n'eut pas de longues relations avec le duc d'Orléans, et Syeyès n'en eut aucune, quoi qu'on en ait dit.

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