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1790. feignirent feignirent un soulèvement pour l'effrayer Le 2 septembre, une foule immense, répandue dans les Tuileries et autour de l'assemblée, demandoit à grands cris la mort de M. de Bouillé, qu'abhorroient les Jacobins depuis l'affaire de Nancy; elle demandoit avec encore plus de véhémence le renvoi des ministres. M. de La Fayette, croyant sans doute la personne de Necker en danger, le fit prévenir qu'il n'y auroit point de sûreté pour lui à passer la nuit dans sa maison Le ministre, épouvanté, s'enfuit à la grande satisfaction de tous les partis, laissant une réputation douteuse en matière de finances, mais non pas de politique. L'opinion la plus générale l'absout du reproche de perfidie, et met toutes ses fautes sur le compte de la vanité, de l'ambition, et du dénûment le plus absolu des lumières d'un homme d'Etat. Il s'est condamné lui-même lorsqu'il a dit que combler le déficit étoit un jeu d'enfant; des exemples tant de fois répétés auroient dû lui rappeler que ce n'en étoit pas un d'assembler des Etats-Généraux; c'est une bien misérable excuse d'alléguer, comme il l'a fait, que le roi les avoit promis; falloit-il se piquer du scrupule extravagant de tenir une promesse extorquée par la force des circonstances? promesse, dont l'exé

cution pouvoit compromettre le monarque, monarque, et le royaume, et qui devoit même infailliblement produire cet effet, dès qu'on avoit le dessein d'abandonner, dans la composition des Etats, les formes qui pouvoient seules protéger la monarchie.

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L'insurrection, qui avoit porté la terreur dans l'âme du ministré, n'étoit que factice. Quand le club des Jacobins, chargé du ministère des révoltes, en vouloit de réelles, il en affichoit une espèce de prospectus, en désignant le lieu, le jour, on y promettoit du désordre, des assassinats, du pillage, et une gratification préalable: c'étoit un écu de trois livres ou de six francs; le double dans les grandes entreprises On prétend que Mirabeau disoit qu'avec mille louis on pouvoit faire une jolie insurrection à Paris. Le comité des recherches qui ne s'occupoit point de celles qui, sous ses yeux, agitoient tous les jours la capitale, en cherchoit partout quicussent un caractère aristocratique, et en voyoit où il n'en existoit pas telle fut celle du camp de Jalès, dans le château qui porte ce nom. Les gardes nationales de trois départemens, l'Ardèche l'Hérault et la Lozère, après avoir prêté le serment appelé civique, le jour de la fédération, prirent, de concert avec les autorités locales et

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1790.

1790. plusieurs députés de l'armée, une résolution tendant à établir un club protecteur du bon ordre et des propriétés, conséquemment en tout cpposé à celui des Jacobins, dont le plus grand nombre des députés qui siégeoient au côté gauche de l'assemblée nationale faisoient partic. Ceux-ci sentirent que cet exemple pouvoit devenir contagieux, et ramener la tranquillité dans l'Etat; en conséquence ils firent casser les arrêtés du camp de Jalès, et ordonner des poursuites criminelles contre ceux qui avoient provoqué cette fédération salutaire.

Le même esprit qui dicta ce décret devoit étouffer la procédure instruite par le Châtelet contre la révolte et les assassinats du 5 et du 6 octobre 1789. Ce fut seulement dix mois après que l'information fut terminée; il est vrai que le comité des recherches de Paris avoit attendu plus de six semaines pour faire sa dénonciation. Le 7 août, une députation des juges du Châtelet vint annoncer à l'assemblée que deux de ses membres se trouvoient inculpés, et demander ce que devoit faire le tribunal, Un décret du 26 juin précédent avoit déclaré que les députés ne pouvoient être décrétés si le corps législatif n'avoit, sur le vu du procès, décidé préalablement qu'il y avoit lieu de les accuser. Le duc d'Orléans (revenu d'Angle

terre) et Mirabeau étoient les deux membres 1790. impliqués dans la procédure. Le dernier fit valoir le décret dont on vient de parler, et ordonner qu'il seroit fait un rapport par le comité de l'assemblée chargé de cette sorte de fonctions sur les événemens du 6 octobre. C'étoit amnistier, ou pour mieux dire approuver le crime de la veille, celui de la révolte, dont les assassinats du lendemain n'avoient été que la conséquence immédiate. Le 30 septembre, le rapport fut fait par Chabroud, qui ne jugea coupables que les gardes-du-corps, et ne vit rien de répréhensible dans la conduite du duc d'Orléans, et de Mirabeau. L'abbé Maury, l'orateur le plus distingué du côté droit (1), en opinant contre le prince, dit que les preuves contre Mirabeau ne paroissoient pas assez concluantes, Elles étoient peut-être trop foibles pour le condamner, mais non pour le mettre en jugement. Mounier, plus instruit en cette matière que l'abbé Maury, a pensé, comme le Châtelet, que Mirabeau devoit être décrété aussi bien que le duc d'Orléans ;il a fait, pour le prouver, une brochure (2) qui renferme des

(1) Cazalès, député de l'ordre de la noblesse, avec moins d'instruction, avoit peut-être plus de talent naturel. (2) Appel au tribunal de l'Opinion publique, etc. 1790.

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1790. faits très-curieux, et mérite d'autant plus de confiance, qu'à l'époque des erimés commis à Versailles, il étoit président de l'assemblée nationale, et à même d'examiner la conduite ét la contenance des moteurs qui se trouvoient sous ses yeux car les directeurs de tous les complots étoient là. Le rapport de Chabroud, rapport couvert d'opprobre dans cette brochure, fut maltraité par l'opinion publique. Des bruits injurieux à l'auteur se répandirent sur les motifs qui le lui avoient dicté mais on sent bien qu'il ne pouvoit y avoir que des soupçons de nature à n'être jamais vérifiés. Les deux députés compromis par la procédure (qui ne fut imprimée qu'après le rapport, ne! concurent aucune inquiétude. Mirabeau avoit dit, dans une séance précédénte, que le Châtelet faisoit le procès à la révolution, et que` les témoins devoient être plus tentés de s'en-, fuir que les accusés. Le décret justifia cette sécurité : on décida (8 octobre) qu'il n'y avoit pas lieu d'accuser les deux députés comproinsensiblement l'instruction de cette procédure, un décret du 25 octobre enleva au Châtelet le pouvoir que lui avoit conféré l'assemblée, de juger les crimes appelés de lèse-nation. Dans ce nombre. furent compris ceux du 6 octobre, quoiqu'ils

mis; et, pour éteindre

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