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Après ces deux avantages, le prince de 1759. . Soubise, appelé au conseil d'Etat, laisse son armée au duc de Broglie. Ce dernier attaqué à Berghen (13 avril ) par Ferdinand, le repousse et le contraint à la retraite. Mais Contade fut vaincu par le même prince à Minden le 1er août (1), et alors on déféra le commandement général au maréchal de Broglie. I battit à Corbach, dans la Vétéravie 1760. (8 juillet), un détachement du prince héréditaire de Brunswick, avec des forces, à la vérité, supérieures. Ce prince prit bientôt sa revanche, et nous enleva un corps entier de trois mille hommes, à Kirchhaqui, dans la Hesse. De Broglie s'en vengea sur l'arrièregarde du prince Ferdinand; mais celui-ci et son neveu défirent M. de Muy près de Warbourg. Ferdinand, las de ces chances alternatives, qui ne décidoient rien, fit faire, par son neveu, une diversion sur le BasRhin. De Broglie lui opposa le marquis de Castries; les deux armées se rencontrent près Wesel. Dans la nuit du 15 au 16 octobre, le

(1) Le même jour, le prince héréditaire battit M. de Brissac, à quelques lieues de là. Dans une affaire postėrieure, près de Munden (qu'il ne faut pas confondre avec Minden), M. de Saint-Germain, par sa bonne conduite, sauva le bagage de notre armée encore battue.

1760. chevalier d'Assas est envoyé à la découverte, avec la compagnie qu'il commandoit dans le régiment d'Auvergne, et marche de quelques pas en avant. Il tombe dans une embuscade; on lui déclare qu'il est mort s'il fait le moindre bruit; il crie: « A moi, Auvergne ! voilà les >> ennemis!» et meurt percé de vingt coups de baïonnettes. Sa famille a reçu la récompense de ce dévouement héroïque une pension perpétuelle a été accordée aux aînés de son nom. Le prince héréditaire vint attaquer le marquis de Castries, à un quart de lieue de Clostercamp; mais il fut forcé de céder au nombre; après un combat de quatre heures, et une perte de douze cents hommes, il se retira sans être poursuivi.

1761.

L'hiver duroit encore, lorsque les deux Brunswick reprirent les hostilités. Le prince héréditaire réduisit Fritzlar, vaillamment défendu par Narbonne, officier françois, qui, à cette occasion, fut surnommé Fritzlar, usage imité des Romains. Ferdinand, de son côté, fit investir Cassel, et envoya son neveu observer les François vers Francfort. Le maréchal de Broglie tomba sur le détachement de ce jeune prince, lui tua trois cents hommes et défit un autre corps d'Hanovriens, qui assiégeoit une ville voisine peu importante. Ces

deux petits échecs contraignirent Ferdinand 1761. d'évacuer la Hesse, et de se retirer dans le Hanovre. De part et d'autre, on étoit las de tant de combats, à peu près inutiles. On se reposa jusqu'aux derniers jours du mois de juin. Le maréchal de Soubise avoit repris le commandement d'une armée, et de la plus considérable. Le maréchal de Broglie commandoit l'autre ; ils se joignirent, et leurs forces réunies surpassoient d'un tiers celles de Ferdinand. Ils enveloppèrent, en quelque sorte, l'armée de ce prince à Willinghausen, sur la Lippe, et l'attaquèrent le 15 et le 16 juillet; ils furent battus, et s'en attribuèrent réciproquement la faute. Le prince de Soubise prétendit le maréchal de Broglie, pour ne point partager l'honneur de la victoire qu'il croyoit assurée, ne l'avoit point prévenu du moment de son attaque; le dernier, au contraire, soutint que son collègue, par des motifs d'envie, s'étoit abstenu de le seconder. Le gouvernement jugea contre de Broglie, et l'exila dans ses terres. Le public ne ratifia point cette décision (1).

que

(1) On jouoit alors la tragédie de Tancrède. Les spectateurs applaudirent avec affectation ce vers de la pièce:

C'est le sort d'un héros d'être persécuté.

1762.

Le maréchal d'Estrées reprit le commandement à la place de M. de Broglie; de cone cert avec le prince de Soubise, il défendit nos conquêtes en Allemagne. M. le prince de Condé qui avoit fait ses premières armes à la bataille de Hastembeck, couvrit le BasRhin avec une réserve. Les deux maréchaux attaqués par Ferdinand (24 juin) à Vilhelstadt, près de Cassel; essuyèrent un échec ; le prince de Condé nous en vengea (30 août) à Fridberg, situé à six lieues de Francfortsur-le-Mein. Le prince héréditaire l'y ayant attaqué, fut défait et dangereusement blessé ; néanmoins, un peu plus de deux mois après sa défaite, il termina la campagne par la prise de Cassel (7 novembre ). Ce fut la dernière opération de la guerre. Le roi de Prusse avoit continué de se couvrir de gloire, en résistant seul, avec les Hanovriens, les Hessois et la maison de Brunswick, à presque tout le réste de l'Europe; il s'étoit vu plus d'une fois au moment de sa ruine, surtout dans la campagné de 1759. Lui-même avoue «< qu'il n'au>> roit dépendu que de ses ennemis de termi» ner la guerre; qu'ils n'avoient qu'à donner »le coup de grâce. » Mais tantôt ils cessoient de s'entendre, tantôt ils agissoient avec mollesse. Toutefois, après la campagne de 1761,

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il étoit encore réduit à la dernière extrémité; 1762. il n'avoit plus dans ses armées que des recrues sans expérience; et, quant aux finances, il s'étoit vu dans la triste nécessité d'altérer la monnoie, et d'affoiblir les espèces de moitié. Un événement inattendu le sauva : l'impératrice de Russie (Elisabeth) mourut le 5 janvier 1762, à cinquante et un ans. Son successeur Pierre III, admirateur de Frédéric jusqu'à l'enthousiasme, loin de persister dans la ligue formée contre lui, unit ses armes à celles de ce prince. La Suède se hâta de faire sa paix avec lui; elle n'avoit jamais poussé la guerre avec beaucoup de vigueur. Pierre III, à la vérité, ne régna que six mois, et sa veuve Catherine II, qui lui succéda, rappela ses troupes devenues auxiliaires de Frédéric ; mais elle se déclara neutre, et c'étoit un grand poids de moins dans la balance de la confédération. Quant à la France, la paix lui étoit presque aussi nécessaire qu'à la Prusse. Nous avions perdu beaucoup d'hommes et d'argent dans une guerre où il n'y avoit rien à gagner pour nous, et à laquelle nous n'avions par conséquent aucun intérêt. Mais nos malheurs sur le continent n'approchoient pas de nos désastres sur la mer et dáns les colonies.

Dans l'Inde, dès le mois de mars 1757,

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