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mineur de l'intérêt des intérêts dont il n'aurait pas été fait emploi; mais que cette obligation cesse d'être applicable à partir de la majorité du pupille (Lyon, 19 août 1853, aff. Collon, D. 54. 2. 165; V. l'arrêt de 1830 qui expose parfaitement les principes et M. Magnin, no 688; V. en outre nos 628 et s.).—Un acte de notoriété du Châtelet, du 11 juill. 1698, porte que « en matière de tutelle, les intérêts doivent être comptés par accumulation jusqu'au jour de la majorité du pupille, et non par colonne morte; mais qu'après la majorité, le débet composé des sommes principales, des intérêts et des intérêts d'intérêts, comptés par accumulation, font une somme fixe qui produit des intérêts, lesquels intérêts n'en produisent plus après la majorité, ou après le compte rendu et clos (Conf. arr. parlem. de Paris, 11 juill. 1698). L'arrêt de Nancy est conforme à ces principes. Mais lorsqu'un tuteur est autorisé par le conseil de famille à placer les intérêts au-dessous du taux légal, par exemple à 4 pour 100, et qu'au lieu de les placer en mains tierces, il les emploie à ses affaires personnelles, ne devra-t-il pas compte des intérêts au taux légal? Il a été jugé que le tuteur qui emploie à ses affaires personnelles les deniers du pupille, doit les intérêts au taux légal de 5 pour 100, bien que le conseil de famille l'ait autorisé, mais seulement pour le cas où il ne trouverait pas d'emploi plus avantageux, à les placer à 4 pour 100 (c. nap. 455, 456; Lyon, 19 août 1853, aff. Collon, D. P. 54. 2. 165).

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Les intérêts

Rien de plus incontestable que cette décision. courent contre le tuteur en vertu de la loi, et par conséquent au taux légal; ils courent pour le seul défaut d'emploi des deniers pupillaires, à plus forte raison quand le tuteur détourne ces deniers de leur destination. La délibération du conseil de famille qui autorisait le tuteur à placer au besoin à 4 pour 100 ne le dispensait pas de chercher un placement plus avantageux. Cette délibération n'avait ni prévu ni dû prévoir que le tuteur abuserait de ses fonctions jusqu'à employer les fonds du pupille à ses propres affaires, encore moins avait-elle entendu faire profiter le tuteur personnellement d'un abaissement d'intérêt qui n'était consenti que sous la condition d'un placement par bonne hypothèque ou en rentes sur l'Etat.

472. Quant à la question de savoir si le tuteur a le droit de réclamer des intérêts pour des avances faites par lui pendant le cours de la tutelle, V. nos 637 et s.

non employées, quelque modiques qu'elles soient; qu'il faut inférer de cette disposition, que les intérêts, en excédant sur la dépense, doivent être capitalisés pour produire eux-mêmes des intérêts annuels; mais que cette règle sévère, exorbitante du droit commun, établie en faveur des deniers pupillaires, ne peut pas être arbitrairement étendue; qu'en droit, la tutelle finit par la majorité du pupille; qu'en fait, si le tuteur a gardé par devers lui les sommes qu'il avait entre les mains, il a cessé d'administrer les biens immeubles dont les béritiers présomptifs de Grégoire Parisot se sont mis en possession du moment qu'il n'a plus donné de ses nouvelles; que la jurisprudence ancienne admettait aussi la distinction des intérêts antérieurs à la majorité et de ceux qui étaient échus postérieurement; que si l'art. 472 c. civ. a voulu prémunir le mineur, devenu majeur, contre les surprises dont il pouvait être victime dans les traités qui interviendraient entre lui et son tuteur,

n'est pas une raison de décider que ce mineur, devenu majeur, doit bujours être réputé mineur à l'égard de son tuteur, jusqu'à la reddition du compte de tutelle; que cette fiction est d'autant moins admissible que, suivant l'art. 475 c. civ., toute action du mineur contre son tuteur, relativement aux faits de la tutelle, se prescrit par dix ans, à compter de la majorité, le code civil se relâchant à cet égard de la sévérité de l'ancienne jurisprudence, qui n'admettait que la prescription de trente ans contre l'action en reddition de compte de tutelle; qu'ainsi, à compter du 10 nov. 1811, date de la majorité de Gregoire Parisot, on ne devait exiger de son tuteur que les intérêts ordinaires des sommes dont il se trouvait alors debiteur, en principal et intérêts, et qui se portaient à la somme de 1765 fr. 70 c.

Considérant, au surplus, que le tuteur est présumé avoir employé à son usage les sommes dont il n'a pas fait emploi, au nom de son pupille mineur ou majeur; que, sous ce rapport et comme mandataire, il est soumis aux obligations que lui impose l'art. 1996 c. civ.; Considérant que les intérêts dont il est debiteur ne peuvent être assimilés aux intérêts des sommes prêtées; qu'ils ne sont pas non plus payables par année, et que le mineur devenu majeur, ignorant, jusqu'à l'apurement du compte, ce qui peut lui être dû, n'aurait pas même les moyens d'en exiger le payement; qu'ainsi ces intérêts ne sont pas assujettis à la prescription de cinq ans établie par l'art. 2277 c. civ.;- Considérant enfin TOME XXXII.

478. Les dispositions des art. 455 et 456 s'appliquent-elles à la tutelle légale? - Il a été jugé dans le sens de l'affirmative que les dispositions de l'art. 456 c. nap. sont générales et s'appliquent à la tutelle des père et mère comme à toute autre tutelle. Spécialement, que la mère tutrice, alors surtout qu'elle est remariée, est tenue des intérêts de l'excédant des revenus du pupille non employés, quelque modique que soit cet excédant, lorsqu'elle n'a pas fait fixer par le conseil de famille, la somme à laquelle devra commencer l'emploi (Bordeaux, 5 août 1841) (1). - Mais il est évident que cette obligation ne peut peser sur le père ou la mère qu'après que l'usufruit légal a pris fin, ce qui, du reste, avait eu lieu dans l'espèce, par suite du convol de la tutrice.

474. Si le conseil de famille n'a pas déterminé, avant l'ouverture de la tutelle, la somme à partir de laquelle il devra être fait emploi, cette fixation peut être faite en tous temps. Elle pourrait avoir lieu, dans la tutelle légale, après l'époque où l'usufruit a pris fin, soit sur la demande du père ou de la mère, soit sur la réquisition du subrogé tuteur; car ce n'est que pour les cas ordinaires que la dispense de faire régler, soit la dépense, soit la somme à laquelle commencera l'obligation de faire un emploi, a été introduite (MM. Magnin, no 689; Duranton, t. 3, no 561).

475. Baux des biens des mineurs. L'art. 1718 c. nap. déclare que les articles du titre du contrat de mariage et des droits respectifs des époux, relatifs aux baux des femmes mariées, sont applicables aux baux des oiens de mineurs. » Le tuteur a donc le droit de passer des baux des héritages ruraux du mineur, comme de ses maisons: ces baux sont soumis, pour leur durée et leur renouvellement, aux dispositions des art. 1418,1429, 1430 c. nap., relatifs aux baux passés par le mari.—Toutefois, quoiqu'ils puissent être passés ou renouvelés pour neuf ans on a prétendu que cela devait être entendu en ce sens qu'ils ne sont pas obligatoires après la majorité du mineur, quoique le mari puisse passer des baux qui ne prennent pas fin avec la dissolution de la communauté ; la raison en est que l'époque de cette dissolution échappe à nos prévisions, tandis que la majorité est prévue et certaine, et qu'alors le pouvoir du tuteur aura cessé (M. Duranton, t. 3, no 545, et à l'art. 1418; Zachariæ, édit. Massé el Vergé, t. 1, p. 483. notes 8 et 9). — Cependant la loi ne fait pas cette limitation au

que l'art. 2151 du même code, qui borne à deux années et à l'année courante la collocation des intérêts au même rang que pour le capital, ne concerne, ainsi que son texte l'indique suffisamment, que les créances dont les hypothèques ne prennent de force et de rang que par l'inscription, et non celle des mineurs, dont l'hypothèque légale existe indépendamment de toute inscription; qu'il serait dèrisoire d'assujettir à prendre une inscription pour les intérêts celui qui ne doit pas en prendre pour le capital; que les intérêts d'une créance en forment l'accessoire ; qu'ils sont de même nature, qu'ils participent aux mêmes avantages, et sont régis par les mêmes règles; qu'ils doivent donc être colloqués au même rang que le capital; Par ces motifs, a mis l'appellation et ce dont est appel au néant, en ce que, etc.; émendant, maintient la collocation faite au profit des époux Jolliot, à l'exception des intérêts de la somme de 1765 fr. 70 c., à compter du 10 nov. 1811, lesquels intérêts. pour tout ce qui excède le taux ordinaire de 5 p. 100 seront retranché de ladite collocation, etc.

Du 19 mars 1830.-C. de Nancy.-M. Breton, pr.

(1) (Teynac C. Marcoulet.) – LA COUR ; Attendu, sur les intérêts, que les dispositions de l'art. 456 c. civ. sont générales et s'appliquent à la tutelle des père et mère comme à toute autre ; que, dans l'espece, la tutrice n'a pas fait déte miner par le conseil de famille la somme à laquelle devait commencer l'emploi; que dès lors elle a dû être constituée débitrice, à partir de l'expiration des six mois, des intérêts de l'excédant des revenus sur la dépense, excédant non employé, et dont la modicité, aux termes de l'article précité, ne relève pas du defaut d'emploi ;

En ce qui touche les erreurs signalées : — Attendu qu'aux termes de l'art 541 du code de procédure, c'est devant :es magistrats, auteurs du jugement intervenu sur l'instance du compte, que les parties doivent former leurs demandes en rectification des erreurs qui se seraient glissées dans ledit compte ;- Adoptant les motifs des premiers juges, met an néant l'appel que les époux Teynac ont interjeté; déclare les parties respectivement non recevables à demander devant la cour la réparation des erreurs qui pourraient exister dans le règlement de compt» opéré nam le jugement dont est appel.

Du 5 août 1841.-C. de Bordeaux, 2o ch.-M. Poumeyrol, pr.

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être considéré comme un acte d'aliénation interdit au tuteur | (Rennes, 6 janv. 1824) (1).

pouvoir du tuteur, et une doctrine contraire se trouve consacrée, vrir et d'exploiter une carrière sur les terres affermées ne peut dans les motifs d'un arrêt du 28 janv. 1824 de la cour de Limoges, aff. Chardin,V. no 480-2o (Conf. MM. Demolombe, t. 7, p. 416; Magnin, no 672; Proudhon, t. 2, p. 372). La limitation de durée des baux fixée par les art. 1418, 1429, 1450, repose sur la crainte des pots-de-vins, et en outre sur ce que des baux à plus long terme ont indirectement un caractère d'aliénation qui peut naire essentiellement à la valeur de la propriété et à sa transmission. Le mineur pourrait donc, à sa majorité, demander la nullité d'un bail à long terme, pour tout le temps qui excéderait la première période de neuf ans, si l'on n'était pas encore entré dans la seconde, ou pour tout le temps qui excéderait la seconde, sí celle-ci était commencée (Conf. M. Demolombe, t. 7, p. 415). Mais les baux à long terme ne sont pas nuls de plein droit, et ils peuvent être ratifiés par le mineur devenu majeur.-V. Louage, n° 58.

476. Le tuteur le pourrait-il, quoiqu'il eût fait et signé le bail sa qualité de tuteur?-Il a été jugé, quant à la vente, que le tueur qui a vendu les biens du mineur sans l'accomplissement des lormalités exigées, est recevable à demander lui-même la nullité de cette vente, surtout lorsque la vente est opposée au mineur (Rej. 21 déc. 1856, aff. Baret, V. Vente).-Le tuteur, dans ce cas, dit M. Demolombe, t. 7, p. 415, agit de la même manière que le mari qui a vendu l'immeuble dotal, et qui, néanmoins, peut luimême, en sa qualité de mari, demander la nullité de la vente (V. Contr. de mar., nos 5801 et s.). En est-il de même pour les baux? Oui, suivant le même auteur, il y a identité de motif. Le tuteur, dans ce cas, n'agit pas en son nom personnel, mais uniquement comme tuteur; seulement il serait soumis à des dommages-intérêts envers le preneur, s'il s'était engagé personnellement à le faire jouir. Hors ce cas, le preneur n'aurait aucune action en garantic.

Cependant il a été jugé que la mère survivante et tutrice de ses enfants mineurs est non recevable à demander, contre le preneur, la résiliation de baux à vil prix qu'elle a passés en cette qualité; que les enfants seuls ont, à cet égard, une action en indemnité contre leur mère (Bordeaux, 25 mai 1840, aff. Michelin, V. Disposit. entre-vifs; V. en outre, v Obligat., la solution de cette question se rattachant à l'interprétation et à l'étendue qu'on doit donner à l'art. 1505 c. nap.).

477. C'est au tuteur seul qu'il appartient d'affermer les biens du mineur et de l'interdit en telle sorte que les baux par lui faits ne peuvent être annulés pour cause de vilité du prix, lorsqu'on ne prouve pas l'existence d'un concert frauduleux entre le tuteur et les preneurs (c. nap., art. 450, 509; Cass. 11 août 1818, aff. Berdin, V. n° 205).

47. Il a été jugé qu'un bail à ferme contenant faculté d'ou

(7) (Simonet C. Quintin.) --- La Cour; Considérant qu'un bail à terme ne peut être considéré comme un acte d'aliénation interdit au tuteur, parce qu'il comprend la faculté d'ouvrir et d'exploiter une carrière sur les terres allermées; Que les juges du tribunal de Châteaulieu, en déclarant nul, pour cette cause, le bail du nov. 1811, ont tiré une induction forcée de l'art. 598 c. civ. ;-Que cet article n'a point d'application directe à l'espèce; — Qu'autres sont les principes qui déterminent la jouissance de l'usufruitier, autres ceux qui règlent l'administration d'un tuteur;- Que le tuteur des mineurs Quintin, en affermant la carrière d'ardoises qu'ils possédaient en indivis avec des propriétaires majeurs, s'est conformé à l'usage des lieux, dans la jouissance et l'administration de cette sorte de biens, a agi de concert avec les majeurs, et, de l'aveu de toutes les parties, a fait le bien de ses mineurs;-Que la loi du 21 avril 1810, concernant l'exploitation des mines, minières e fcarrières, est la loi spéciale et en même temps la loi la plus récente sur la matière; qu'elle a fait deux classes distinctes des mines et des carrières qui, dans l'art. 598 du code, sont réunies et soumises à un même droit; qu'elle a expressément déclaré que les mines étaient-immeubles, et exposé des règles analogues à leur nature immobilière; qu'à Pégard des carrières, elle n'a rien dit, ni rien établi de semblable: Que la destination et l'objet du bail d'une carrière, est l'extraction des matériaux qu'elle renferme; niatériaux qui sont meubles par leur nature, quand ils sont extraits, et avant de l'être, peuvent devenir meubles par destination;-Que l'exploitation n'enleve point le fonds au propriétaire; que loin de le détériorer, nécessairement elle lui donne le plus souvent la seule valeur dont il soit, susceptible, et quelquefois est un moyen de le rendre à la culture:- - Par ces motifs, corrigeant et réformant...; Ordonne que le bail du 4 nov. 1811 aura son exécution suivant sa teneur;- Et vu qu'il résulte de cette disposition, qu'il n'y avait pas lieu

47. Quant à la location des coupes de bois ou vente de la superficie, il faut distinguer les bois mis en coupes réglées des bois de haute futaic; il loue les bois mis en coupe réglée, lorsqu'ils font partie des produits annuels d'un domaine; ils ne sont alors que des accessoires.-Mais si ces bois ne font pas partie de la location d'une terre, c'est dans la réalité une vente qu'il en fait sous le titre de bail; il doit suivre les formes établies pour la vente du mobilier. Toutefois, MM. Rolland de Villargues, no 164, et Duranton, t. 5, no 547, pensent que ces coupes ne cessent pas d'être des fruits, et que la vente ou location, n'importe, qui en est faite, n'est toujours qu'un acte de simple administration, quelle que soit l'importance des coupes.-M. Demolombe (1.7, p. 421) dit que le tuteur fera très-sagement de ne passer la vente de ces coupes qu'avec publicité et concurrence, cependant il ne pense pas que la vente serait nulle à l'égard des tiers. Vente ou location, ditil, cet acte est essentiellement relatif à la culture et à la jouissance des biens; ces bois, quelle que soit leur valeur, ne sont, après tout, que des fruits auxquels ne s'applique pas l'árt. 452, Or le tuteur a le droit de vendre les fruits comme il le juge convenable. S'agit-il de bois de haute futaie, ils font partie intégrante de l'immeuble. Alors l'art. 457 c. nap. est nécessairement applicable.

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480. Le tuteur a-t-il le droit de stipuler que le preneur payera par anticipation les lovers ou fermages? Non, suivant M. Demolombe (t. 7, p. 418). « Le bail cesse d'être considéré comme un acte d'administration dès qu'il sort des conditions ordinaires à ces sortes de contrats. Or, ce qui est vrai pour la durée des baux (art. 1429, 1450, 595, 1718) ne nous paraît pas l'être moins pour la durée des fermages..., il est presque de l'essence d'un bail (du moins relativement à celui qui le passe an nom d'autrui), que les fermages soient payés annuellement, etc. >> Il a été jugé que le bail des biens du pupille consenti pour plusieurs années, moyennant une somme unique versée par anticipation dans les mains du tuteur, est nul comme excédant les limites du pouvoir d'administration du tuteur (Poitiers, 2 juill. 1845, aff. Boutoleau, D. P. 46.2.128).—Et relativement à un prix de bail touché pour des années qui s'étendaient au delà de la majorité, il a été jugé que quoiqu'un tuteur puisse consentir des baux dont la durée se prolonge ati delà de la majorité, il ne s'ensuit pas qu'il ait le droit de toucher, par anticipation, le prix du bail pour les années postérieures à la majorité en conséquence, le mineur, devenu majeur, est fondé à faire déclarer ce payement non libératoire à son égard (Limoges, 28 janv. 1824) (2). — Nous nous rangeons

à l'action en garantie contre le tuteur;- Condamné l'appelant aux dépens de l'action en garantic,... etc.

Du 6 janv. 1824. C. de Rennes.-M. Duplessix de Grénedan, pr. (2) Espèce (Chardin C. sa fille.) La dame Chardin tutrice de sa fille agée de dix-huit ans, issue d'un premier mariage, donne à bail pour six ans au sieur Dazat une prairie de la mineure. Le prix du bail est de 100 fr. par an; il est payé en entier sur-le champ, ou plutôt il est compensé avec une dette de la dame Chardin envers Dizat.-Le bail est cédé par celui-ci à Chanteau, aubergiste. Depuis, la mineure épouse le sieur Lefevre, et demande contre Chanteau la résiliation du bail; elle soutient 1° que sa mère n'a pas eu qualité pour le consentir, attendu qu'elle l'avait perdue en convolant sans autorisation; 2o que d'ailleurs il y a eu fraude, ainsi que l'annonce le payement anticipé; 3 que le bail dut-il être maintenu pour les années écoulées pendant la minorité, on devait reconnaitre que la tutrice était sans droit pour toucher les lovers échus depuis la majorité.-Sur ce, action en garantie de Chanteau contre Dazat et de Dazat contre la dame Chardin.-Jugement du tribunal civil qui, statuant en dernier ressort, annule le bail, condamne Chanteau à rapporter les prix de ferme échus, et fait droit aux actions en garantie, -Appel par la dame Chardin et consorts. Elle produit la délibération du conseil de famille, antérieure au convol, qui lui conserve la tutelle. Elle soutient qu'il n'y a pas eu fraude, et qu'elle a pu recevoir les fermages par anticipation. Arrêt,

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LA COUR; Attendu, au fond, que l'épousé Chardin, après son convol, fut maintenue dans la tutelle de sa fille; que sa qualité de tutrice lui donnait le droit de consentir des baux dont la durée pouvait se prolonger jusqu'à neuf ans, et que les tiers qui ont traité de bonne foi avec celle-ci dans des actes qui ressortaient de ses attributions, ne peuvent être inquiétés sous le prétexte qu'elle n'aurait eu en vue que son intérés

difficilement à cette opinion qui nous paraît trop absolue. D'abord l'époque du payement des fermages n'est pas de l'essence, mais seulement de la nature du contrat de bail. Il est souvent d'un excellente administration de recevoir immédiatement les fermages, puisque le mineur n'a plus rien à craindre de l'insolvabilité du fermier, ou des événements quelconques; qu'en outre le tuteur peut et doit placer les fonds dans les six mois, de sorte qu'il y a un bénéfice évident pour le mineur qui reçoit deux fois l'intérêt de son capital. Nous sommes donc disposés à croire qu'une pareille disposition ne pourrait être annulée que s'il y avait fraude entre le tuteur et le preneur.-Cependant il y a une différence essentielle entre les espèces des deux arrêts de Limoges et de Poitiers qu'il faut signaler. —La cour de Limoges ne s'élève contre la légalité de l'anticipation de loyers percus par le tuteur, qu'en raison de ce que cette anticipation s'est étendue à des fermages à échoir après la majorité du pupille, et sous ce rapport elle a peut-être bien jugé. Mais l'arrêt de Poitiers va bien plus oin; il se prononce contre toute anticipation qui ne serait pas conforme aux usages reçus pour le payement des fermages, et ajoute en outre que si le tuteur peut recevoir un capital mobilier, un tel droit ne lui est conféré que pour la circonstance seulement où ce capital est acquis au mineur d'après le cours ordinaire des choses. - Or ces principes sont inadmissibles; la loi n'a pas établi de distinction et sur les usages en matière de perception de fermage, et sur les cas ou le tuteur pourra ou ne pourra pas recevoir un capital mobilier; le législateur confère le droit sans restriction, il doit être exercé de même, sauf les modifications dont nous avons parlé nos 449 et s. - M. Demolombe cite à l'appui de son opinion celle de M. Troplong (Comment. du Louage, no 145). Mais il y a, suivant nous, erreur de sa part.-M. Troplong dit : « Comme le droit de passer des baux est un simple droit d'administration, et qu'il ne se traduit pas en aliénation, il s'ensuit que le mineur émancipé peut passer des baux qui n'excèdent pas neuf ans, sans l'assistance de son curateur; remarquez cependant qu'il y aurait du danger pour le preneur à lui payer les loyers par anticipation. — Un tel payement pourrait avoir la couleur d'un emprunt, et le mineur en le recevant ferait plus qu'un acte d'administration. >> Comme on le voit, il ne s'agit que du mineur émancipé, et il y a une très-grande différence entre le mineur émancipé et le tuteur. Le mineur émancipé reçoit les fonds pour lui et peut en disposer comme il l'entend. Le tuteur reçoit pour le mineur et doit placer les fonds dans un court délai. Quoi qu'il en soit, il nous semble qu'on ne peut s'attacher ici à un principe absolu, et que la question doit être décidée suivant les circonstances diverses qui se présenteront.

481. Le tuteur peut-il affermer en son nom, et comme un preneur ordinaire, les biens de son pupille? Non, aux termes de l'art. 450 c. nap., qui porte: «Il ne peut ni acheter les biens du mineur ni les prendre à ferme, à moins que le conseil de famille n'ait autorisé le subrogé tuteur à lui en passer bail, etc.»>

no 548; Zachariæ, éd. Massé et Vergé, t. 1, p. 434, et note 4 de ses annotateurs; Fréminville, t. 1, no 554; Taulier, t. 2, p. 60). Mais nous sommes disposés à adopter l'opinion contraire qui était celle de Pothier et du président de Lamoignon.—Le président de Lamoignon n'accordait aux tuteurs le droit de faire valoir par leurs mains les héritages du mineur que lorsqu'ils n'avaient pas pu trouver de fermiers (arrêtés, titre de la Tutelle, art. 91, p. 25), et Pothier dit que ce mode d'exploitation serait dangereux: « Le compte de l'exploitation que le tuteur ferait lui-même serait d'une trop longue discussion » (des Personnes, part. 1, tit. 6, § 3, art. 4). Ce mode d'exploitation favoriserait d'abord extrêmement la fraude du tuteur, s'il voulait en commettre, puis c'est jeter le mineur, à la majorité, dans des débats de compte interminables.-On dit, il est vrai, que les états de situation que le tuteur remettra ammuellement (c. nap. 470) éveilleront l'attention du subrogé tuteur, qui, s'il lui apparaît qu'il y a eu ignorance ou dol, convoquera le conseil (MM. Duranton, t. 9, no 548; Magnin, no 675). Mais quand il s'agit d'une grande exploitation surtout, l'état de situation d'une année, de plusieurs années, ne prouvera rien. Souvent on ne peut apprécier qu'après dix ou douze ans d'exploitation les résultats obtenus. -Lors même qu'il n'y aurait aucun dol, nous croyons qu'il est très-dangereux de laisser à un tuteur le droit d'exploiter par lui-même, surtout si le tuteur n'est pas un cultivateur exercé depuis longtemps; car en matière de culture, l'expérience yaut souvent mieux que la science.

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483. Aucune forme spéciale n'est prescrite au tuteur pour les baux; la loj n'exige ni affiches, ni actes notarié, ni autorisation, ni mise aux enchères. Le conseil de famille est impuissant à cet égard si le bail est sous seing privé, il sera en double original (c. nap., art. 1325). Le tuteur fera bien toutefois, si les actes ont de l'importance, de consulter la famille, et de leur donner de la publicité. Il n'est pas obligé d'exiger une caution ou une hypothèque, car cela pourrait écarter un bon fermier; si le preneur devient insolvable, le tuteur n'est point garant, dès qu'il s'est conduit avec prudence (M. Duranton, t. 3, no 546). — Il a été jugé que le ministère public ne peut demander, et un tribunal ne peut ordonner, sans excéder ses pouvoirs, que les baux des biens d'un mineur ou d'un interdit soient adjugés aux enchères publiques (Cass. 11 août 1818, aff. Berdin, V. no 205). Le ministère public n'a aucune action en matière de tutelle, et la cour de cassation se borne, dans le considérant de l'arrêt, à constater sur ce point l'impuissance des membres du parquet.-V. Ministère pub., no 144.

484. Réparations. Il faut distinguer entre les réparations d'entretien et les grosses réparations. Le tuteur fait faire, sans formalités, les réparations ordinaires et de simple entretien, cela ne fait aucun doute; quant aux grosses réparations, les anciens docteurs n'avaient pas tranché nettement la question. Meslé a dit: Quand il s'agit de grosses réparations, et qui soient considérables, il semble qu'elles ne doivent être faites par le tuteur que sur avis de parents et de l'autorité du juge (part. 1, ch. 8, no 27). Pothier et Domat paraissent ne soumettre le tuteur à l'avis de parents et à l'autorisation du juge pour les grosses réparations, que lorsqu'il n'a aucuns deniers du mineur entre les mains (Pothier, des Personnes, part. 1, tit. 6, § 2, art. 4, et introd. à la cour d'Orléans, tit. 9; Domat, liv. 1, tit. 2, sect. 2, no 4).—

489. Le tuteur pourrait-il, au lieu de louer les biens du mineur, les cultiver par lui-même ?-Ferrières (part. 4, sect. 4, n° 209) dit qu'il est de l'intérêt du pupille qu'on lui épargne es frais des annonces et qu'on lui conserve les profits qui seraient faits par un fermier, et que cette double considération suffirait sans contredit pour prouver qu'il doit être libre au tuteur de jouir par ses propres mains des biens pupillaires. - M. Demolombe (t. 7, p. 419) se range à cette opinion en disant qu'au-Toullier dit que les grosses réparations doivent être faites par cun texte ne s'oppose à ce que le tuteur cultive lui-même; qu'en cas d'abus, le conseil de famille pourrait enjoindre au tuteur d'affermer les biens (arg. de l'art. 444.-Conf. MM. Duranton, t. 3,

personnel; Attendu que rien ne prouve que la femme Chardin ait consenti le bail dont s'agit, en considération des projets de la famille, de provoquer l'émancipation de la mineure; qu'elle était capable de percevoir les revenus de sa fille, et placer l'excédant de la depense de la manière dont elle le jugerait convenable, sauf à elle à rendre compte; qu'il est impossible de voir une fraude contre la pupille, dans un contrat de bail où l'on n'a rien cherché à soustraire. et contre lequel on n'allègue même pas la vileté du prix; - Attendu que si la tutrice a pu, dans l'intérêt de la mineure, passer un bail qui se prolongeait au delà de la tutelle, elle n'a pu recevoir, par anticipation, les termes qui ne devaient venir à échéances qu'à sa majorité, surtout lorsque, comme dans l'espèce, l'intérêt de la mineure ne le commandait pas; que Dazat ayant

adjudication au rabais, à moins que le tuteur ne soit autorisé par le conseil de famille à les faire par économie (t. 2, no 1209). Mais, dit très-bien M. Demolombe, aucun texte du code n'exige

reçu quittance d'une personne incapable de toucher les revenus à échoir pendant la majorité de l'épouse Lefèvre, a mal payè, quant a ce, et no peut obtenir que répétition contre la femme Chardin qui lui doit garantie;

Emendant, ordonne que les baux consentis par la femme Chardin à Dazat, et par celui-ci à Chanteau, seront exécutés, à la charge par eux de payer à la femme Lefèvre les termes du prix du bail consenti à Dazat et échus depuis la majorité d'icelle; - Faisant droit sur les demandes en garantie, condamne Dazat à garantir Chanteau des condamnations prononcées contre lui, et la femme Chardin à indemniser Dazat des suites de la garantie à laquelle il a été condamné à l'égard de Chanteau. Du 28 janv. 1824.-C. de Limoges.-M. Beauregard, pr.

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une adjudication au rabais. Les autres auteurs modernes pensent, non pas que l'autorisation du conseil soit requise, mais qu'il est prudent de la demander (MM. Chardon, t. 5, no 395; Duranton, t. 3, no 559; Taulier, t. 2, p. 60). Mais la question n'est pas de savoir s'il est prudent de demander l'autorisation du conseil, mais si le tuteur a le droit de les faire faire sans cette autorisation. En d'autres termes, le traité que le tuteur ferait à cet égard avec un architecte sans recourir à l'autorisation, serait-il nul par rapport au mineur? - De deux choses l'une, suivant nous; ou il s'agit réellement et uniquement d'une grosse réparation, où sous l'apparence d'une réparation, il s'agit d'une construction nouvelle. Dans le premier cas, par exemple s'il s'agit d'une poutre qui menace ruine, comme réparer c'est administrer, le tuteur n'a pas évidemment besoin d'autorisation du conseil, et le mineur ne pourrait demander la nullité du traité sur ce motif qu'il n'existe aucune autorisation; il ne pourrait tout au plus avoir recours que contre son tuteur, si celui-ci avait surpayé les travaux, ou fait faire des réparations inutiles.-Dans le second cas, soit qu'il s'agisse réellement d'une construction nouvelle, soit même que cette construction soit amenée par la gravité des réparations, et lors même que, dans l'intérêt du mineur, il serait plus avantageux de reconstruire que de réparer, il y a alors nécessité pour le tuteur d'avoir l'autorisation du conseil de famille; sans quoi le mineur pourrait demander la nullité du traité.-Il n'est pas nécessaire de rechercher si le tuteur avait, ou non, en mains des capitaux suffisants; construire à novo, ce n'est pas seulement réparer, et c'est plus qu'administrer; il y a dans ce fait une aliénation du capital qui exige l'intervention du conseil (Conf. MM. Massé et Vergé sur Zachariæ, t. 1, p. 454, note 5). Dans ce cas et à défaut d'autorisation, les entrepreneurs n'ont d'action que contre le tuteur. Il a été jugé que lorsqu'un tuteur fait des constructions dans le fonds du mineur, sans autorisation du conseil de fa- | mille, l'ouvrier n'a pas action contre le mineur en payement du prix. Il ne peut actionner que le tuteur, sauf à celui-ci à porter en compte de tutelle le montant des améliorations qui en sont résultées (Grenoble, 2 mars 1810, aff. Brugeoit C. Beranger, etc.).

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M. Demolombe (t. 7, nos 649 et suiv.) présente un tout autre système relativement aux travaux de réparation. Il faut distinguer, suivant lui, si le tuleur fait faire les réparations avec les revenus ou avec les capitaux qu'il a en mains, et sans emprunt, et alors il n'a pas besoin d'autorisation. Si, au contraire, le tuteur fait un traité avec un entrepreneur et est obligé de prendre des termes pour payer parce qu'il n'a pas l'argent nécessaire, M. Demolombe distingue encore.— « Ou l'obligation, ditil, est de nature à pouvoir être acquittée avec les revenus du mineur, et alors le mineur est engagé légalement envers l'entre

(1) (Ducluzeau C. Margueré.)-LE TRIBUNAL;-En ce qui touche les différents chefs du jugement d'homologation : -- Attendu qu'on ne peut pas refuser à Margueré la faculté de faire faire, après visite et estimation, les réparations urgentes et nécessaires que comportent les immeubles appartenant en propre à ses pupilles ou qu'il possède en communauté avec elles; mais que l'autorisation demandée pour faire faire des réparations d'un autre genre sous prétexte d'utilité et amélioration des produits est dangereuse et abusive ; — Qu'à l'égard des réparations déjà faites, c'est à Margueré de s'imputer de les avoir faites sans autorisation ni visite préalables; qu'il est présumé en ce cas avoir voulu faire à ses dépens le bien de ses pupilles, qui sont en même temps ses enfants, et qu'il n'est pas recevable, après que les lieux ont ent èrement changé de face, à vouloir en constater l'état d'après des renseignements incertains et des déclarations de voisins et locataires, même des anciens locataires; -Que l'autorisation d'employer annuellement le sixième du produit net des maisons en réparation paraît excessive;-Dit qu'il a été mal jugé, -Ordonne que, par de nouveaux experts, il sera procédé à la visite des maisons dont il s'agit, à l'effet seulement de constater les réparations urgentes et nécessaires qui sont présentement à faire, et qu'à l'avenir le père pourra, sans visite d'experts, employer en réparations à faire auxdites maisons annuellement jusqu'à concurrence seulement du dixième du produit net.

Du 12 vent. an 11.-Trib. d'app. de Paris.

(2) Gauguier C. d'Alsace.)-LA COUR ; — A!tendu que, si la dame d'Alsace a figuré en qualité de tutrice dans les actes d'acquiescement et dans les transactions de 1825 et 1826,il sera juste de remarquer que ces acquiescements, considérés comme une interprétation volontaire du bail de Longues années, intéressant une mineure, excédaient les limites de l'ad

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preneur; ou bien, pour payer le prix des travaux, le tuteur est obligé de prendre sur le capital qu'il a entre les mains, et, par conséquent, d'amoindrir la fortune du mineur, et alors le mincur n'est pas engagé. »— Mais on répond avec raison que les entrepreneurs n'ont pas le moyen de vérifier si les engagements contractés par le tuteur excèdent les revenus et entament le capital (MM. Massé et Vergé, eod.).

Il a été jugé : 1o qu'un tuteur ne peut être autorisé par le conseil de famille à faire faire aux immeubles du mineur d'autres réparations que celles urgentes et nécessaires, sous prétexte d'utilité et d'amélioration des produits (Paris, 12 vent. an 11) (1); 2o Qu'à l'égard des réparations que le tuteur a fait faire sans l'autorisation du conseil, il ne lui est pas permis d'en faire constater après coup la nécessité, surtout lorsque les lieux ont entièrement changé de face (même arrét); 3° Que le tuteur n'a pas le droit, dans ce dernier cas, de répéter les dépenses faites jusqu'à concurrence de la valeur dont la propriété a pu se trouver augmentée par suite de réparations (sol. impl., même arrêt). — Dans cette affaire, les diverses circonstances du procès ont pu déterminer les magistrats à adopter les solutions que l'arrêt constate; mais nous ne pensons pas qu'on puisse, à cet égard, tracer des règles générales. En toute chose, c'est l'intérêt da mineur qu'il faut consulter, et il a toujours été admis que les tribunaux sont entièrement libres dans l'appréciation des dépenses. A eux seuls appartient le droit de reconnaitre leur utilité, ou de les rejeter comme superflues (Conf. Meslé, p. 250, § 438; Bourjon, Droit commun de la France, p. 49; Lacombe, vo Tuteur, sect 8; Pothier, des Personnes, ch. 4). On ne peut pas non plus dire que le conseil de famille ne peut autoriser que les réparations urgentes, car, à cet égard, le tuteur n'a pas besoin d'autorisation.-4° 11 a encore été jugé qu'une transaction par laquelle le tuteur, agissant au nom du mineur, s'oblige à payer des réparations qui sont de nature à se reproduire annuellement dans le canal d'une usine affermée pour douze années, doit être limitée aux réparations à faire à l'époque où elle est passée; si elle était étendue aux réparations à venir, elle serait considérée comme une interprétation d'un bail à longues années, laquelle ne serait valable qu'autant qu'elle aurait été autorisée par le conseil de famille, dans les formes de l'art, 467 c. nap. (Nancy, s août 1831) (2).

485. Créances du tuteur contre le mineur et du mineur contre le tuteur. Si le tuteur est créancier du mineur, et qu'il ait en mains les fonds nécessaires il peut se payer lui-même; son devoir est d'éteindre toutes les dettes du mineur, surtout lorsqu'elles portent intérêt. — Il a été jugé : 1o qu'il peut, dans ce cas, se payer lui-même, même sans l'intervention du subrogé tuteur (Toulouse, 21 juin 1832) (3);

ministration tutélaire, et qu'ils ne pouvaient être valables sans l'autorisation régulière d'un conseil de famille (art. 467 et 2045 c. civ.); qu'ainsi ces acquiescements et transactions, si légèrement consentis par la veuve et les mineurs d'Alsace, seraient radicalement nuls, et conséquemment incapables d'établir aujourd'hui des fins de non-recevoir contre l'interprétation plus exacte du bail et des actes de 1821. Du 8 août 1831.-C. de Nancy.

(3) (Desasars C. Laglasière.) — LA COUR;- Attendu qu'un tuteur, créancier des mineurs, peut et doit payer, avec les fonds tutélaires, les créances qu'il a personnellement sur la tutelle, comme il peut et doit payer les créanciers étrangers; qu'il n'est assujetti à aucune formalité spéciale pour opérer ce payement, qui n'est qu'un simple acte d'administration; qu'il n'y a aucune nécessité de faire intervenir le subrogé tuteur, qui ne doit jamais administrer personnellement, et qui doit seulement représen'er les mineurs lorsque leurs intérêts sont opposés à ceux des tuteurs; que le véritable intérêt des mineurs exigeant que leurs dettes soient payées le plus tôt possible, le tuteur n'a aucune formalité à remplir pour se payer de ce qu'il lui est dû personnellement ;-Qu'il peut même compenser ses créances avec les sommes qu'il reçoit pour le compte de tutelle, pourvu que ces créances personnelles soient liquides, certaines et exigibles; que la compensation n'est qu'un mode de payement qui s'opère, aux termes de l'art. 1290 c. civ., de plein droit, par la seule force de la loi, même à l'insu des débiteurs, et qui éteint reciproquement les deux dettes à l'instant où elles se trouvent exister à la fois, et jusqu'à concurrence de leurs quotités respectives; que tels sont les principes reconnus par les anciennes lois, qui doivent être appliqués sous le code, et dont l'observation garantit les véritables intérêts des tuteurs et des mineurs;—Attendu que le droit de compensation dont s'iit

2° Qu'un tuteur, créancier de son mineur, doit acquitter sa propre créance sur les fonds qu'il reçoit pendant le cours de son administration, sauf à employer le montant dans la décharge du compte qu'il aura à rendre à la fin de sa gestion (Rennes, 28 avr. 1830) (1).

486. Si le tuteur n'a pas à sa disposition les sommes nécessaires pour se remplir de ses avances, peut-il, pendant le Cours de la tutelle, poursuivre la vente des biens du mineur et se faire payer sur le prix ? Le droit romain avait prévu ce cas. Ou la créance du tuteur était étrangère à sa gestion, et alors le tuteur pouvait se faire rembourser comme tout autre créancier (D. I. 1, § 5, De tutel et rat. distrah.), ou la créance avait pour cause la gestion elle-même, par exemple, parce qu'il aurait dépensé pour le mineur plus qu'il n'aurait reçu, et alors le tuteur ne pouvait se faire payer qu'à la fin de la tutelle (D. 1. 1, § 3, eod., tit.). Ce second point souffre difficulté. M. Demolombe, t. 8, p. 48, pense que le tuteur n'est pas obligé d'attendre la fin de la tutelle pour se faire rembourser de ses avances. Les principes, aussi bien que l'équité, s'opposent à ce qu'on repousse sa demande, « et d'abord, dit-il, point de doute, qu'il ne pût et même qu'il ne dût se payer lui-même, s'il avait en mains les deniers suffisants. Mais alors même que le mineur n'aurait pas d'argent comptant, le tuteur pourrait demander au conseil de famille d'être autorisé à faire vendre les biens du mineur pour être remboursé de ses avances; et, en cas de refus, il pourrait se pourvoir devant le tribunal contre sa délibération. >> Nous ne pouvons nous ranger à cette opinion, qui, suivant nous, est en désaccord avec tout le système général de la tutelle. N'oublions pas que le tuteur n'est pas un simple mandataire, il représente le père de famille. Il est le conservateur né des intérêts et des biens des mineurs. Admettre que lorsque le tuteur aura fait quelques avances volontairement il pourra se pourvoir devant

a pu être exercé par la dame Laglasière, quoique la succession qu'elle administrait n'eût été acceptée par ses enfants que sous bénéfice d'inventaire ;-Attendu que, dans l'espèce, la dame Laglasière était créancière de la tutelle ;-Vidant le renvoi, démet de l'appel.

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Du 21 juin 1832.-C. de Toulouse, 1re ch.-M. d'Aldéguier, pr. (1) Espèce:-(Penquer C. Bellouan.)-En l'an 8, le conseil de famille nomme au mineur de Penquer d'abord le sieur Bellouan tuteur et, en cette qualité, administrateur des biens dépendants de la succession, puis le sieur Hureaux cotuteur, chargé de l'administration des affaires commerciales. Ces deux tuteurs sont déclarés solidairement responsables de leurs gestions respectives. En l'an 11, un jugement, rendu à Jérémie (Saint-Domingue), sur la demande du sieur Bellouan formée contre le cotuteur Hureaux, déclare les mineurs débiteurs de 26,456 fr. envers leur tuteur. Le compte de tutelle ne fut pas rendu. En 1826, les héritiers de Bellouan mirent opposition, en vertu de ce jugement, sur l'indemnité coloniale revenant aux enfants de Penquer. Ceux-ci demandent la nullité de cette opposition, attendu que Bellouan, leur tuteur, n'avait pu les poursuivre dans la personne d'Hureaux, qui, chargé seulement des affaires commerciales, n'avait pas le droit de les représenter en justice. En conséquence, ils demandent que le jugement de l'an 11 soit déclaré non avenu. En outre, ils disent que les héritiers Bellouan ne peuvent se prétendre créanciers tant qu'ils ne rendent pas le compte de tutelle dû par leur père. — Le 3 juin 1829, jugement du tribunal de Redon, qui déclare que les mineurs de Penquer avaient été dûment représentés; ordonne que le jugement de Jérémie sortirait son plein effet, et valide, en conséquence, l'opposition mise à la requête des héritiers de Bellouan; il décide, en outre, que ceux-ci étaient dispensés de rendre un compte de tutelle, à cause de la force majeure et même de la prescription. Appel. LA COUR; Considérant que s'il paraît résulter des dispositions de l'acte de tutelle des enfants mineurs Penquer, fait le 8 frim. an 11, devant le tribunal de Jérémie, île de Saint-Domingue, timbré et enregistré à Redon, le 23 avr. 1828, que les sieurs Bellouan et Hureaux, par ledit acte, l'un tuteur et administrateur seul pourrait faire connaître, d'après le règlement qui en serait fait, si le tuteur demeurait créancier de ses mineurs au moment où sa gestion a cessé (a); — Considérant que quelque peu longue qu'ait été cette gestion, à raison du désastre de la colonie, le tuteur fut dans l'obligation de faire inventaire après la mort du père; que cet inventaire, et la vente du mobilier qui est reconnue avoir eu lieu, durent mettre à la disposition du tuteur des valeurs plus ou moins considérables, sur lesquelles il dut prélever le montant de ce qui lui était da, et dont la perte, si elle a eu lieu depuis, n'a pas pu être au compte des mineurs, au moins pour la partie que le tuteur devait imputer à sa créance, et dont il était ou devait être saisi; qu'on alléguerait également

- Arrêt.

(a) (ie considérant, évidemment incomplet, est ainsi rapporté dans les recueils.

les tribunaux pour faire vendre les biens de son pupille, cela nous paralt violer toutes les règles du droit. — Remarquez de suite les conséquences de ce système: si le tuteur a ce droit, ses créanciers l'auront aussi, or, comme aux termes de l'art. 1166, les créanciers exercent tous les droits de leur débiteur, ils auront le droit de poursuivre la vente des biens du mineur; et si le subrogé tuteur résiste, ils auront le droit d'exiger un compte avant même la fin de la tutelle, ils pourront former des saisiesarrêts, même une saisie immobilière, que de contestations, d'arrèts, de frais! Est-ce cela que le législateur a voulu par l'institution tutélaire? - Le tuteur, d'ailleurs, au lieu d'avancer des sommes au mineur, ne pouvait-il pas se faire autoriser ou à emprunter ou à faire vendre des biens jusqu'à concurrence des sommes dues? Alors tout marchait régulièrement. Mais du moment où de son autorité privée il croit devoir avancer des sommes au mineur, elles entrent dans le système général de son administration, et il doit attendre la fin de la tutelle pour s'en faire rembourser. Tels étaient les principes de notre ancienne jurisprudence. Meslé enseigne que le tuteur ne peut, avant que d'avoir cessé d'administrer, offrir le compte ni faire des poursuites pour obtenir adjudication contre le mineur des avances qu'il a faites dans l'administion (part. 1, chap. 12, no 2. · Conf. Duranton, t. 5, no 646). — Il a été jugé, conformément à notre opinion que le tuteur ne peut, avant d'avoir rendu compte, répéter les sommes par lui payées à la décharge des biens dont l'administration lui avait été confiée; mais que cette règle ne s'applique pas aux sommes qui lui sont dues par les mineurs, pour des causes étrangères à l'administration de la tutelle (comme si, par exemple, il s'agit de la dot due à une mère tutrice); les mineurs ne pourraient en pareil cas opposer de compensation avec ce dont le tuteur pourra être déclaré débiteur par suite de la reddition de compte (Grenoble, 9 août 1823) (2). Cependant

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sans succès la perte des papiers relatifs à la tutelle, puisque le sieur Bellouan a pu conserver les titres de sa créance, qui était antérieure à cette tutelle; Considérant, enfin, qu'il ne peut résulter aucune ratification ou acquiescement des héritiers Penquer à l'expédition du jugement du 26 prair. an 11, ni de la procuration donnée par le sieur Leverrière, leur tuteur de France, au feu sieur Bellouan, pour toucher une somme de 5,252 liv., due aux mineurs, par le sieur Magon, ni de ce que ses héritiers Penquer ont reçu le compte dans lequel cette procuration se trouve mentionnée, vu, premièrement, qu'il n'est pas prouvé que ledit Pierre Leverrière eût connaissance de la créance de Bellouan, dont il n'est pas dit un mot dans la procuration, et dont les titres ne durent venir au sieur Bellouan que bien postérieurement à la date de la procuration; Secondement, que la mention de cette pièce, dans le compte reçu par les appelants, ne pouvait les instruire de la cause pour laquelle Bellonan s'était fait autoriser à recevoir la somme dont il s'agit, et qu'une ratification ne peut s'induire que d'un consentement formel donné avec pleine connaissance de cause; - Par ces motifs, faisant droit sur l'appel relevé par de Penquer du jugement rendu par le tribunal civil de l'arrondissement de Redon, le 3 juin 1829, dit qu'il a été mal jugé, en ce que ledit jugement, en déclarant les héritiers de feu Bellouan libérés par l'effet de la prescription et de la force majeure, de l'obligation de rendre compte de la gestion de la tutelle des mineurs de Penquer, dont leur auteur fut chargé, en l'an 11, a ordonné au directeur général des dépôts et consignations, tiers saisi, de se dessaisir aux mains des héritiers Bellouan du dixième du capital de 21,556 fr., à la déduction y exprimée sur les fonds revenant aux héritiers Jeannot de Penquer, à titre d'indemnité, aux termes de la loi du 30 avr. 1826 et de l'ord. du roi du 9 mai suivant, · Currigeant et réformant, donne mainlevée de ladite saisie, faite aux mains dudit directeur, et décharge les appelants de toutes les condamnations énoncées contre eux, si mieux n'aiment les intimés rendre compte de la gestion et administration faite par les auteurs de la tutelle desdits mineurs Penquer, dans la colonie de Saint-Domingue, etc. Du 28 avr. 1850.-C. de Rennes, 3e ch.-M. Aubrée de Kernaour, pr. (2) Espece: (Chevalier C. Lambert.) En 1769, contrat de mariage entre Jean Chevalier, premier du nom, et Françoise Bellissard; celle-ci se constitue en det une somme de 383 fr. Après la mort de Jean Chevalier, Françoise Bellissard, sa veuve, devenue tutrice légale de ses enfants mineurs, paye, pendant le cours de son administration et à la décharge de ses pupilles, diverses sommes. Avant d'avoir rendu aucun compte, elle se remarie et meurt, ainsi que son second mari, laissant pour héritiers plusieurs enfants. Ceux-ci assignent les héritiers Chevalier en restitution: 1° de l'apport dotal de leur mère; - 2o Des sommes par elle payées pour les mineurs pendant la tutelle.

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16 mars 1821, jugement de tribunal de Saint-Marcellin, qui condamne Jean Chevalier au payem < sommes réclamées.

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