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blement le neveu de l'écrivain connu de ce nom, écrivit un opuscule sur une foule de sujets en signalant occasionnellement les antinomies renfermées dans les sources (y). L'une des matières (3) le plus fréquemment traitées est la procédure alors si importante des tribunaux ecclésiastiques (a). Bientôt parurent aussi de grands ou vrages systématiques sur tout le droit pratique, où, indépendamment de la théorie de la procédure, le droit ecclésiastique et le droit civil étaient présentés dans leur application à des espèces données, et par suite avec indication des formules d'action correspondantes (b). Tel est le Speculum de Guillaume Durantis, dont la première rédaction parut en 1272, et une seconde vers 1290. Johannes Andreæ y fit en 1346 des additions qui offrent de l'intérêt, même pour l'histoire littéraire de la science parcequ'il a placé dans l'introduction un tableau détaillé des canonistes jusqu'à son temps. Cette variété de formes est une preuve de la vivacité avec laquelle les esprits saisissaient alors les matières du droit. Mais peut à peu cette vivacité se ralentit, et au quinzième siècle les travaux des jurisconsultes se bornèrent presque uniquement à d'amples commentaires ou lectures sur les recueils reçus, lesquels ordinairement n'étaient que la rédaction des leçons sur lesdits recueils. Il fut écrit de tels commentaires sur les décrétales de Grégoire IX par Baldus de Ubaldis († 1400), Petrus de Ancharano († 1415), Johannes ab Imola († 1436), Nicolaus de Tudeschis (1445) (c), Alexander Tartagnus +1477), Andreas Barbatia Siculus († 1482), Franciscus de Accoltis + 1486), Felinus Sandeus (1444-1503), Philippus Decius († 1454-1536); sur le Sextus par Petrus de Ancharano, Johannes ab Imola, Alexander Tartagnus; sur les Clémentines par Petrus de Ancharano, Johannes ab Imola, Nicolaus de

(y) Petri Blesensis opusculum de distinctionibus in canonum interpretatione adhibendis sive ut auctor voluit speculum juris canonici edidit T. A. Reimarus. Berolini

1837.8.

(z) Au rang des ouvrages sur des matières spéciales figurent la Summa de Matrimonio composée par Tancrède vers 1210, la Summa de electionibus de Bernard de Compostelle l'ancien, le Libellus electionum composé par Guillaume de Mandagoto vers 1300 et retouché par Johannes Andreæ.

(a) Ici doivent être mentionnés les écrits sur l'Ordo judiciarius de Richardus Anglus, Petrus Hispanus, Tancrède vers 1240, Johannes de Deo, Ægidius Fuscararius vers 1260.

(b) Tels sont les deux ouvrages composés par Roffredus Epiphanii de 1227 à 1243 ŝous les titres de Libellis et ordine judiciorum et Libelli de jure canonico. L'un s'occupe du Droit romain, l'autre non terminé du Droit canonique, et ensemble ils sont à considérer comme un tout.

(c) Ce Nicolaus était né en Sicile, fut abbé, puis archevêque de Palerme, et par suite est désigné sous les noms de Siculus, Abbas et Panormitanus. Ses ouvrages ont été souvent imprimés, en dernier lieu à Venise 1617 en neuf volumes in-folio, dont sept renferment lesdits commentaires,

Tudeschis, Alexander Tartagnus, Andreas Barbatia Siculus. Enfin le décret dut encore subir une refonte systématique complète; Johannes à Turrecremata († 1468) le démembra et le reconstruisit d'après un plan nouveau principalement basé sur les recueils de décrétales. Mais cette entreprise n'obtint point un grand succès (d).

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2) Sources particulières dans les divers états. a) En Allemagne, en France, en Angleterre et en Hongrie.

Pendant qu'à l'aide de la législation et de la pratique le droit canonique commun se développait, celui des divers états en particulier faisait les mêmes progrès. Ce fut l'œuvre des conciles provinciaux, des statuts synodaux et des lois séculières. Parmi les lois importantes de l'empire d'Allemagne sur les matières ecclésiastiques figurent la transaction passée à Worms en 1122 entre Calixte II et Henri V, laquelle mit un terme à la longue querelle sur l'investiture des évêques (e), la bulle d'or de Frédéric II en date de 1213 (f), plusieurs autres lois rendues par le même empereur en 1220 sur les franchises ecclésiastiques et sur les droits des princes ecclésiastiques (g), et deux constitutions de Charles IV des années 1350 et 1377 par lesquelles il confirma et étendit ces franchises (h): toutes ces lois ont été ratifiées par plusieurs papes et par le concile de Constance (i). En France, le zèle avec lequel saint Louis se consacra à toutes les branches de son administration le conduisit à s'occuper aussi des choses de l'Eglise et du clergé. Ce furent d'importants monuments que ses établissements de 1255 sur la réformation des mœurs et la pragmatique sanction de 1268 sur la provision des offices ecclésiastiques et la liberté d'élection (k). En Angleterre, Jean-Sans-Terre confirma en 1215 la liberté d'élection du clergé par un titre solennel; la grande charte qu'il concéda dans la même année aux prélats et barons du royaume, contenait aussi la reconnaissance générale des droits et libertés ecclésiastiques. Lá fixation de l'organisme ecclésiastique est principalement due aux

(d) Cet ouvrage a été imprimé pour la première fois dans le siècle dernier. Gratiani Decretorum libri V. secundum Gregorianos Decretalium libros titulosque distincti per Johannem a Turrecremata, ordinis prædicatorum, S. R. E. episcopum cardinalem Sabinum, nunc primum prodeunt ex codice bibliothecæ Barberinæ, præfatione, brevibus scholiis et quatuor indicibus illustrati cura Justi Fontanini Archiepiscopi Aneyrani. Romæ 1727. fol.

(c) Les doubles échangés à ce sujet à la diète de Worms ont été souvent imprimés; la meilleure édition est dans Pertz Monument. T. IV. p. 75.

(f) Elle se trouve dans Pertz Monument. T. IV. p. 224.

(g) Elles sont insérées dans Pertz Monument. T. IV. p. 236. 238. 243. (h) Elles sont imprimées dans Goldast. T. ÌÍ. p. 92. T. III. p. 415,

(i) Les actes confirmatifs se trouvent dans Goldast. T. II. p. 95-106.

(*) Ces deux monuments se trouvent dans Mansi Conc. T. XXIII. col. 877-84. 1259-62.

dispositions publiées vers 1230 et 1268 sous Othon légat de Grégoire IX et Othobon légat de Clément IV, et commentées par Jean d'Athon, ainsi qu'aux décisions de divers conciles provinciaux tenus sous les archevêques de Cantorbéry depuis Etienne Langton jusqu'à Henri Chichiley, lesquelles ont été glosées par Guillaume Linwood, sous Henri V (1422), et reçues dans la province d'York en 1463. Dans cette période il fut rendu aussi par les rois plusieurs lois en matière ecclésiastique, notamment sur les rapports des juridictions ecclésiastique et civile. De ce nombre sont plusieurs ordonnances d'Henri III (1272) et Edouard ler (+1307) (/), les articles adressés à Edouard II par les prélats anglais (1316), et la charte d'Edouard IV (1463) sur les franchises du clergé (m). En Hongrie le légat apostolique Gentilis publia sous Charles 1er de 1308 à 1311 des constitutions pour l'Eglise et le royaume, qui néanmoins avaient principalement trait à l'organisation politique de ce temps (n).

$ 104. b) Sources dans les royaumes du Nord.

Dans les royaumes du Nord où depuis le onzième siècle le christianisme s'était fortement enraciné, l'Eglise avait été constituée sur le même modèle que dans les autres pays chrétiens, et dut à la coopération des rois un accroissement de stabilité et de force. Les recueils alors usités de lois ecclésiastiques y ont-ils pénétré? On l'ignore. Mais bientôt il s'y forma des sources particulières. Lès plus importantes de celles qui concernent le Danemark (0) sont le droit ecclésiastique de Scanie, donné en 1161 ou 1163 par l'archevêque Eskild et approuvé par Waldemar Ier, le droit ecclésiastique de Seeland fixé par l'archevêque Absalon et concordant au fond avec le précédent, la constitution donnée en 1256 dans le concile de Weile et approuvée l'année suivante par le pape, deux mandements de l'archevêque Pierre Hansen de 1345 et 1349 sur la juridiction ecclésiastique et l'année de grâce, enfin plusieurs autres décrets de conciles et statuts synodaux (p). En Suède, où les prélats étaient les membres les plus influents des diètes, les disposi

(7) Antiquæ constitutiones regni Angliæ sub regibus Joanne Henrico III. et Edoardo I. circa jurisdictionem et potestatem ecclesiasticam, per Gul. Pryne archivorum regiorum custodem. Londini 1672. fol.

(m) Ces deux pièces sont insérées dans Wilkins Conc. Britann. T. II. p. 406. T. III. p. 583. On trouve aussi les articles dans Mansi Conc. T. XXIV. col. 561., et la charte d'Edouard dans Harduin Conc. T. IX. col. 1469.

(n) Mansi Conc. T. XXIV. col. 151-66.

(o) Les anciennes lois ecclésiastiques danoises sont en partie réunies dans Thorke lin Recueil des lois ecclésiastiques du Danemark. Copenhague 1781 4.

(p) On trouvera plus de renseignements historiques et bibliographiques dans Kolderup-Rosenvinge Esquisse de l'histoire du droit danois §. 37. 87. Cet ouvrage est traduit du danois en allemand par Homeyer (Berlin 1825. 8.).

tions relatives à l'Eglise furent particulièrement émises dans ces assemblées conjointement avec le droit civil, et elles forment régulièrement, sous le nom de Kirkiubalker, le premier chapitre des divers livres de droit suédois. On peut s'en convaincre par le Westgot a Laghbook et les Ostgatha Laghen, tous deux de la seconde moitié du treizième siècle, les Uplandz Laghen (1296), les Sue hermanna Lagen (1327), !e Vestmanna, Hels.nga et Dahle-lagh de la première moitié du quatorzième siècle (q), et le Allmen Swer kes Lagbok, composé en 1347, mais refondu en 1442 (r). En Norwége, il parut dès le douzième siècle différents recueils de droit ecclésiastique (s). La seconde section du code du ro Magnus (1263-80) est aussi intitulée Kristinndóm Bólkr; mais elle contient en grande partie des dispositions politiques (t). L'Islande enfin, éclairée par la Norwége de la lumière du christianisme en l'an 1000, fut dotée de deux recueils de droit ecclésiastique. L'un fut élaboré en 1123 par les évêques Thorlak et Kettil, et approuvé dans une assemblée nationale par le grand-juge et les principaux du peuple (u). L'autre a été composé par l'archevêque Arna en 1275, alors que l'Islande était retombée sous la domination de la Norwége (v).

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La translation de la résidence papale à Avignon sous Clément V (1305) avait fait tomber les papes et les cardinaux dans la dépendance de la couronne de France. A l'effet de s'en affranchir, les

(q) 11 parait un recueil de ces anciens livres de droit suédois: Corpus juris SueoGotorum antiqui. Stockholm 1827. 1830. II. vol. 4.

(7) Il a été édité d'après une traduction latine faite en 1481 : Suecorum Gothorumque per doctorem Ragvaldum Ingemundi ecclesiæ Ubsaliensis archidiaconum a. MCDLXXXI latinitate primum donatæ. Stockh. 1614. 4.

(s) Ils sont insérés en danois dans Pauls Samling af gamle Norske Love. Kiöbenh. 1751. 52. II. Th. 4. Un autre droit ecclésiastique très ancien, le Jus Vicensium, a été édité par J. Finnãus à Copenhague 1760 et par Magnus Olaus Beronius à Upsal 1761, in-4°.

(1) Le texte original de ce code a é1é imprimé pour la première fois dans ces derniers temps: Regis Magni Legum Reformatoris Leges Gula-Thingenses sive jus commune Norwegicum. Hanniæ 1817. 4.

(u) Jus ecclesiasticum vetus sive Thorlaco Ketillianum constitutum An. Chr. MCXXII. Kristinrettr hinn gamli edr Thorlaks oc Ketils Biscups. Ex mss. Legati Magnæani cum versione latina, lectioribus variantibus, notis, collatione cum jure canonico, juribus ecclesiasticis exoticis, indiceque vocum. Ed. Grimus Johannes Thorkelin Isl. Hauniæ 1775 9.

(v) Ins ecclesiasticum novum sive Arnaeanum constitutum anno Domini MCCLXXV. Kristinrettr hinn nyi edr Arna Biscups. Ex mss. Legati Magnæani cum versione latina, lectionum varietate, notis, collatione cum jure canonico, conciliis, juribus ecclesiasticis exoticis, indiceque vocum primus edit G. J. Thorkelin Is1. Hauniæ 1777. 8.

Romains avaient profité de cé que Grégoire IX était mort à Rome pendant un séjour momentané (1378), pour faire élire Urbain VI, Vénitien d'origine; mais le parti français, parmi les cardinaux, lui opposa Clément VII, et de là un long schisme, où une partie de la chrétienté reconnut comme successeurs légitimes les papes de Rome, l'autre ceux d'Avignon. Ce fut la source d'indicibles confusions, abus et scandales. Pour y mettre un terme les cardinaux élurent au concile général assemblé à Pise Alexandre V; mais les deux autres papes n'en persistèrent pas moins dans leurs prétentions, et ce choix ne fit qu'augmenter la confusion (w). Enfin le concile de Constance (1414-18), répudiant à la fois les trois papes, élut Martin V, et parvint à le faire universellement reconnaître. Ce concile rendit en outre des décrets de réformation contre les abus enracinés dans la discipline ecclésiastique, s'en remettant de leur exécution à des conciles ultérieurs (x). Conséquemment Eugène IV convoqua à Bâle un nouveau synode (1431); mais après la première séance l'assemblée tomba en désaccord avec lui; toutefois l'harmonie fut rétablie avant la quinzième séance, et le pape reconnut la légitimité du concile. Alors la désunion éclata derechef, et donna naissance à de nouveaux différends. Le pape se détermina après la vingt-cinquième séance (1437) à transférer la réunion de Bâle à Ferrare: là il ouvrit (1438) un nouveau concile, qui fut continué à Florence (1439), et reconnu par l'Eglise comme le vrai concile œcuménique. Par suite, l'assemblée restée à Bâle se trouva schismatique; elle n'en continua pas moins ses travaux, renouvela dans la trente-unième séance, comme elle avait déjà fait dans les deuxième et dix-huitième, les décrets du concile de Constance, qui sous l'empire des circonstances d'alors avait placé les conciles au dessus des pápes, prononça la déposition du pape, et élut Amédée, duc de Savoie, sous le nom de Félix V (1439). Cependant Eugène travaillait à Florence avec un zèle infatigable à la réunion de l'Eglise grecque, qui lui réussit en effet, du moins pour le moment. La dissolution de l'assemblée de Bâle s'opéra peu à peu d'elle-même (1443), et enfin l'antipape, Félix V, se démit au si volontairement (1449). Après bien des agitations la paix et l'ordre se trouvèrent ainsi rétablis dans l'Eglise. Un nouveau schisme fut suscité par le concile que quelques cardinaux assemblèrent à Pise contre Jules II (1511); il fut étouffé par le cinquième concile de Latran (1512-17), qui rendit en outre plusieurs dispositions disciplinaires très utiles, mais n'a pas été reconnu partout comme œcuménique.

(w) J. Lenfant Histoire du Concile de Pise. Amst. 1724. 2 vol. 4.

(x) Herrm. von der Hardt Magnum œcumenicum Constantiense Concilium ex ingenti antiquissimorum Msctorum mole diligentissime erutum. T. I-VI Francof. et Lips. 1700. T. VII. Berolini 1742. fol., Bourgeois du Chastenet Nouvelle histoire du Concile de Constance. Paris 1718. 4., C. Royko Geschichte der Kirchenversammlung zu Kostnitz. Prag. 1796. 5. Th. 8.

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