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Un malheur ne venant jamais seul, ses amis ont été chassés du royaume, et la Gazette universelle de Lyon, l'enfant chéri de sa faveur, a cessé de vivre, à la grande satisfaction du Journal du Commerce, qui dit, en rendant compte de cet événement: « Le Père Duchêne est mort avec Robespierre, la Gazetle devait tomber avec Franchet et Delavau.

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Je ne rappellerai point ici les nombreux actes arbitraires et la conduite anti-française de ce directeur de police, ni l'instruction menaçante que la justice dirigeait enfin contre lui: nos yeux, nos cœurs en sont encore frappés. Je me bornerai à exprimer le regret que la cour royale n'ait pu satisfaire au désir du pays par une punition que le peuple eût considérée comme nationale, et qui eût attiré à cette cour la plus honorable reconnaissance.

M. Franchet, doué de ce jugement rusé qu'on prête ordinairement aux gens de la campagne, est un homme d'un esprit sans culture, épais, étroit et tracassier; d'un caractère entier et difficile ; d'unc volonté ferme et absolue. On dit qu'il sait un peu de botanique et de musique: tant mieux pour lui; il pourra employer ces petits talens à diminuer quelquefois ses pénibles ennuis et ses remords cui

sans.

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Je voulais d'abord passer sous silence les deux faits suivans; mais je me décide à les rapporter, parce que le premier peut servir à détromper ceux de ses amis qui seraient disposés à lui supposer un cœur reconnaissant, et que l'autre l'empêchera, si

l'envie lui en prenait, de se faire passer comme appartenant à une famille de martyrs du royalisme.

Le comte Alexis de Noailles lui a été utile, et, incontestablement, lui a fait du bien : possesseur de la direction de la police, M. Franchet n'a plus voulu le voir, parce que cet ancien patron s'était plusieurs fois refusé à entrer dans la congrégation.

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Une personne de ma connaissance a dans ses mains une pièce signée d'un très grand nombre d'habitans de Lyon et des environs, parmi lesquels se trouve M. Franchet père. Cette pièce, adressée aux autorités, est une déclaration par laquelle les signataires font connaître qu'ils adhèrent de cœur à la fête anniversaire du 21 janvier.

M. Franchet souhaitait un état de ses services : je le lui donne.

MOUNIER

(CLAUDE-ÉDOUARD-PHILIPPE), baron.

Serment du Jeu de Paume: «Nous jurons de ne ja» mais nous séparer de l'Assemblée nationale, et de » nous réunir partout où les circonstances l'exigeront » jusqu'à ce que la constitution du royaume soit éta» blie sur des fondemens solides. »

Droits de l'Homme: « Art. 1. Les hommes nais» sent et demeurent libres et égaux en droits. Les dis>tinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune.

» Art, 2. Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescripti>>bles de l'homme; ces droits sont la liberté, les pro» priétés, la sûreté et la résistance à l'oppression.

Art. 3. Le principe de toute souveraineté réside » essentiellement dans la nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément. »

L'auteur de ce serment fameux et de cette célèbre déclaration des droits, Jean-Joseph Mounier, secrétaire des États provinciaux du Dauphiné, donna naissance à Claude-Édouard-Philippe Mounier, qui fait le sujet de cette notice.

On voit que M. le baron Mounier naquit, pour ainsi dire, au sein même de principes qui devraient régir le monde.

Il reçut la vie à Grenoble, en 1784. Lorsque son père quitta la France, à la fin de 1789, pour se rendre à Genève, puis en Allemagne, il l'emmena avec lui, et le ramena en France, à son retour, après les événemens du 18 brumaire.

L'élévation du père devait tout naturellement servir à celle du fils: Napoléon en fit, au mois de février 1806 (1) un auditeur au conseil-d'État, en 1809 un secrétaire du cabinet (2), en 1810 un maî

(1) A la fin du mois de janvier de cette année, Napoléon daigna lui exprimer des regrets sur la mort de son père.

(2) Comme secrétaire du cabinet, M. Mounier était chargé de la traduction des gazettes étrangères, travail pour lequel il

tre des requêtes, et le 12 décembre 1813, le jeune baron lui prêta serment en qualité d'intendant des domaines de la couronne.

A la première restauration, Louis XVIII lui conserva ses emplois.

En 1815, le collége électoral de Grenoble l'élut candidat à la chambre des députés, et, dans la même année, le roi le nomma conseiller-d'État : c'était la récompense de son voyage à Gand.

Chargé, en 1817, de l'importante fonction de présider la commission mixte de liquidation des créances étrangères, il donna lieu à quelques plaintes de la part des réclamans.

Le baron Mounier, officier de la Légion-d'Honneur, chevalier de plusieurs ordres, accompagna, en 1818, le duc de Richelieu au congrès d'Aix-la-Chapelle, où l'on arrêta l'évacuation de notre territoire par les troupes alliées (1).

recevait 50,000 fr. par an, qui lui servaient aussi à indemniser les traducteurs qu'il attachait à son service, et qu'il choisissait lui-même.

Au mois de juin ou de juillet 1810, le baron Mounier se rendit à Vincennes pour interroger M. Ouvrard, que l'empereur soupçonnait avoir été en Angleterre, envoyé par Fouché, pour y entamer secrètement des négociations de paix. M. Mounier acquit la certitude que M. Ouvrard n'avait point été en Angleterre; il le dit à l'empereur, et M. Ouvrard sortit de Vincennes.

(1) On connaît l'esprit des négociations d'Aix-la-Chapelle par cette phrase d'une dépêche ministérielle adressée d'Aix

Attaqué par les deux oppositions, libérale et royaliste, et surtout avec fureur par la dernière, M. Decazes fut obligé d'abandonner le poste élevé où, seule, depuis quelque temps, le soutenait la faveur de son

roi.

«

Qui devait recueillir ses dépouilles? Louis XVIII offrit son portefeuille au baron Mounier, qui refusa, en observant au monarque qu'il n'a pas acquis as» sez d'expérience des affaires publiques pour se char» ger d'un aussi grand fardeau. Je ne veux pas faire » mon apprentissage de ministre aux dépens de l'État » et de la nation; mais si V. M. l'ordonne absolu» ment je serai le premier subordonné de M. le comte » Siméon, et je l'aiderai de mon travail et de mon » zèle. »

Et M. le comte Siméon eut le ministère de l'intérieur, et l'on rétablit, le 21 février 1820, la direction générale de police, pour M. Mounier, qui eut le titre de directeur-général de l'administration départementale et de la police.

J'ai rapporté la réponse de M. le baron Mounier à Louis XVIII, sur la foi de l'abbé de Montgaillard. On remarquera qu'un pareil acte de désintéressement ou de modestie, s'il est vrai, méritait toute la bienveillance royale, et que cependant, en lui confiant la direction de la police, le roi n'en fit qu'un

la-Chapelle au conseil des ministres, et qui fut connue dans le public: «< Surtout que M. de La Fayette ne soit pas nommé, car on ne nous croirail plus ici. »

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