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tusion. Le peuple, qui s'étoit attroupé, aida ǎ relever la caisse, et un gendarme ouvrit la portière, qui, pendant tout le voyage, avoit été soigneusement fermée à clef. Le saint Père et le cardinal descendirent. En les voyant, le peuple ne put retenir ses murmures, et apostrophoit tout haut les gendarmes. Le saint Père s'occupoit à calmer ces plaintes du geste et de la voix. On le fit monter, avec le cardinal, dans le carrosse, où étoient venas le prince Doria et M. Pacca, et on continua le voyage vers la Chartreuse de Florence, où l'on arriva le soir ».

Ici finit cette relation. On remarquera sans doute la modération avec laquelle elle est conçue. Les faits y sont retracés simplement, sans plainte, sans amertume, sans aucune trace de ressentiment. Point de réflexions et d'épithètes désobligeantes. C'est ainsi que s'énonce la vérité. C'est ainsi, qu'on nous passe cette comparaison, que les Apôtres racontent la Passion de leur divin Maître. Nous espérons que l'on voudra bien nous envoyer la suite d'un récit si précieux, et nous nous recommandons, à cet égard, à la bienveillance de la personne à qui nous devons ce commencement. Nous désirerions aussi avoir quelques détails sur le séjour de S. S. à Savone et à Fontainebleau. On ne peut disconvenir que ce qui a été publié jusqu'ici est loin d'être complet et satisfaisant. Il y a beaucoup de lacunes, et les faits sont altérés, tantôt par un motif, tantôt par un autre. Quelquefois même les récits qu'on en donne sont rédigés avec une inattention à peine concevable. C'est ainsi que, dans un ouvrage périodique qui, par son titre, sembleroit devoir annoncer plus de connoissances et d'exactitude sur ces matières, on place au mois de juin 1811 la

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translation du Pape de Savone à Fontainebleau, tan dis que cet événement est postérieur d'une année. Cet nachronisme est d'autant moins pardonnable, qu'il est assez connu qu'au mois d'août 1811, une dépu tation du concile fut envoyée à Savone. Nous ne nous ferons pas un mérite d'éviter de si lourdes erreurs, et nous tâcherons de rassembler les documens les plus sûrs, avant d'entreprendre de raconter les particularités d'une persécution qui doit être écrite pour l'honneur de l'Eglise, pour l'instruction de nos neveux, et pour la confusion de ceux qui espéroient avoir enfin trouvé le moyen de briser cette pierre dont la solidité les fatigue, et dont la durée les importune, et qui, comme tant d'autres, y ont trouvé leur écueil.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

PARIS. Une ordonnance du Roi, du 8 février, relative à la gestion de l'établissement de Sainte-Périne de Chaillot, et aux poursuites à exercer contre le sieur du Chailla, fondateur de cet établissement, est précédé du considérant qui suit:

Considérant qu'en appelant, par ses Prospectus, les souscripteurs à lui fournir des fonds, le sieur du Chailla avoit contracté envers eux l'obligation de les entretenir sur certain pied, à dater de leur admission, et jusqu'à la fin de leur vie, ainsi que celle de gérer et de placer, selon certaines formes et dans des proportions déterminées, les fonds de l'établissement, ne se réservant qu'une retenue de 5 pour 100, et un traitement comme direc teur; que la liste civile a payé une somme de 284,640 liv. pour faire admettre dans l'établissement cent quatre personnes, dont trente n'y sont jamais entrées;

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Que le rapport des commissaires nommés, en 1806, par le ministre de l'intérieur, établit que le sieur du Chailla ne s'est point mis en état de remplir ses engagemens, et qu'à l'exception d'un immeuble qu'il a acquis en son propre et privé nom, bien qu'avec les fonds de ses souscripteurs, il n'a point disposé des capitaux qu'il a reçus d'une manière productive, et qu'il n'a offert pour gage de l'accomplissement de ses promesses, que cet immeuble, qui est manifestement d'une valeur très-insuffisante;

Que, dans ces circonstances, le gouvernement s'est vu obligé de charger l'administration des hospices de l'entretien des vieillards, ainsi exposés au dénuement par le sieur du Chailla, ce qui a causé aux hospices un surcroît de dépense considérable.

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Considérant que cette mesure paternelle en faveur des vieillards de Sainte-Périne tourneroit au détriment des pauvres en général, si le sieur du Chailla n'étoit contraint de réparer, par tous les moyens qui lui restent, les torts occasionnés à ses sonscripteurs par des invitations qui ne reposoient que sur des calculs insuffisans, ou sur des espérances trop éventuelles;

En conséquence, l'administration des hospices de Paris continuera de gérer l'établissement de Sainte-Périne, conformément aux décrets des 10 novembre 1807 et 1er avril 1808.

Attendu que le sieur du Chailla s'est mis hors d'état de remplir les engagemens qu'il avoit contractés par ses Prospectus, des syndics, que les vieillards qui se trouvoient dans son établissement à l'époque où il a cessé sa gestion, sont autorisés à nommer, et conjointement avec eux, ou, à leur défaut, l'intendant de la liste civile et l'administration des hospices le poursuivront devant les tribunaux pour le faire condamner à rembourser aux vieillards et à la liste civile les avances qu'ils lui ont faites, et aux hospices les frais qu'ils ont été obligés de faire en son lieu et place.

La conférence de M. l'abbé Frayssinous, du dimanche 26 février, étoit sur la morale. L'orateur s'y est proposé de répondre aux principales objections que l'on fait contre la morale chrétienne. Les anciens philosophes avoient bien aussi enseigné une morale; le Lycée et le Portique en donnoient des préceptes. Mais il étoit réservé au christianisme de donner à l'homme un corps de morale aussi simple que pur, bien lié dans toutes ses parties, fondé sur des principes immuables, fertile en conséquences et en applications, approprié à nos besoins, digne enfin, et du législateur qui nous l'apportoit, et d'une créature déjà comblée de tant de dons. Cependant cette morale dont tous les âges ont admiré la perfection, et dont un grand homme disoit, il y a plus de cent ans, que les ennemis même du christia nisme ne pouvoient s'empêcher de reconnoître combien elle étoit supérieure à l'enseignement des sages les plus vantés, cette morale a trouvé de nos jours des détracteurs qui en ont méconnu la beauté et les heureux effets. Leurs reproches peuvent se réduire à trois chefs. La morale chrétienne, ont-ils dit, nuit à la société en prêchant le renoncement aux richesses; elle dégrade l'homme en ordonnant l'humilité; enfin, elle rend la vertu impraticable par une sévérité outrée. Mais un examen impartial justifie la morale chrétienne sur ces trois chefs. La morale chrétienne, au lieu de nuire à la société en prêchant l'abnégation, coupe, au contraire, la racine de la plus grande partie des maux de l'humanité; elle fait par-là la guerre à la cupidité, source de tant de crimes. Il faut d'ailleurs distinguer dans l'enseignement du christianisme, à cet égard, les préceptes des conseils. On ne nous ordonne pas de renoncer aux richesses; mais on en règle le bon usage, on en prévient les abus, et le Sauveur des hommes, loin de troubler l'ordre social par ses préceptes, les a dirigés, au contraire, vers le bien général et vers l'intérêt commun, en nous recommandant si fort la charité, la miséricorde, les se

cours mutuels. Le reproche fait sur l'humilité n'est pas mieux fondé. Cette vertu, en combattant l'orgueil, attaque l'ennemi de notre bonheur et de notre repos. C'est l'orgueil qui trouble la terre, et qui élève tant d'orages dans le coeur de l'homme. L'humilité le ramène à des sentimens paisibles et modérés. En quoi consiste cette vertu? A rapporter à Dieu le bien que nous faisons. Qu'y a-t-il là qui avilisse l'homme? Saint Louis se dégradoit-il en rapportant à Dieu la sagesse de son gouvernement; Turenne, ses talens guerriers et ses grands exploits; Vincent de Paul, la noble activité de son zèle et les effusions de son inépuisable charité; Bossuet, les inventions de son génie, et ses travaux pour l'Eglise et la religion? Depuis quand la créature s'aviliroit-elle en reconnoissant qu'elle tient tout de celui de qui procède en effet tout don parfait? Quant au reproche d'une sévérité impraticable, il est renversé par un fait trop éclatant pour être contesté. Depuis bien des siècles, la morale chrétienne a été pratiquée; elle l'a été dans toutes les conditions, elle l'a été par les plus grands hommes. Tous les âges nous ont offert des exemples d'une vertu portée jusqu'à la perfection. C'est notre lâcheté seule qui nous fait regarder comme impraticable une route que tant d'ames fortes et généreuses ont parcourue avec succès et avec gloire.

Telle est la substance du discours de M. Frayssinous, autant qu'une si courte analyse peut en donner une idée. Il a fini par un morceau de Bossuet qui se lioit très-bien à son sujet. Auparavant il a adressé un compliment à Mme, la duchesse d'Orléans, qui assistoit à sa conférence, à cette princesse, a-t-il dit, qui bien que née sous un ciel étranger, est françoise par ses affections, et l'est aussi par son origine puisqu'elle est issue de la royale maison de Bourbon, et dont la présence dans cette enceinte nous dit assez qu'elle a compris que le plus grand bonheur, comme le premier devoir des rois, est d'honorer publiquement cette religion sainte, gage le plus

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