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papier émis par la banque. Depuis deux ans, elle avait réduit de 5,000,000 livres le montant de ces billets; les banques provinciales en avaient fait autant pour 4,000,000; cette somme, retirée de la circulation, n'avait pas été remplacée par une seule pièce de monnaie.

Il fut aussi question de la diminution des recettes et de l'augmentation des dépenses, ce qui devait paraître extraordinaire après plusieurs années de paix ; on trouva qu'il y avait peu de clarté dans les comptes publics, notamment pour ce qui concernait les billets de l'échiquier; on observa que le fonds d'amortissement devait être tellement diminué, que probablement il ne s'élevait pas à plus de 4,000,000; et qu'il n'était pas surprenant que le crédit public souffrît beaucoup de ce sistème de réduire ce fonds à rien et de perpétuer les déficit.

Des commerçants anglais élevaient depuis long-tems des plaintes sur l'indifférence avec laquelle le gouvernement semblait regarder l'insurrection des colonies espagnoles en Amérique, pour y établir des relations. Cependant il avait fait tout ce que la bienséance et les traités existants avec l'Espagne lui permettaient; car il avait obtenu du vice-roi du Pérou et du gouvernement républicain de Buenos-Aires, divers priviléges et la faculté d'exporter de l'argent. Le 6 juillet, une proposition de reconnaître les nouveaux gouvernements fut faite dans la chambre des communes; elle s'appuyait surtout sur une négociation qui avait dû avoir lieu entre le gouvernement français et Buenos-Aires, pour nommer roi d'une partie de l'Amérique espagnole du sud, un prince de la maison de Bourbon. On demandait qu'une adresse fût présentée au roi, pour qu'il fit donner communication à la chambre de toutes les notifications officielles reçues à ce sujet. Lord Castlereagh répondit que les renseignements parvenus au gouvernement, sur cette affaire, n'avaient aucun caractère officiel, et ne consistaient que dans des notes ou des lettres dépourvues de tout caractère authentique ; que quant à l'opportunité de reconnaître quelqu'un des nouveaux gouvernements de l'Amérique du sud, il pouvait assûrer que l'opinion énoncée à cet égard était mal fondée. La proposition fut retirée.

Sir James Mackintosh présenta plusieurs bills pour modifier les lois pénales d'Angleterre; il y en eut trois d'adoptés.

Le procès de la reine fixa uniquement l'attention publique

durant la dernière moitié de l'année. Depuis que cette princesse avait quitté l'Angleterré, en 1814, elle s'était rendue à Brunswick, sa patrie, et ensuite avait effectué des voyages annoncés d'avance. Elle visita successivement l'Allemagne, l'Italie, la Grèce, la Turquie, la Palestine et les côtes de Barbarie; elle revint ensuite sur le continent européen, et résida alternativement dans deux maisons de campagne qu'elle avait achetées, l'une sur le lac de Côme, l'autre à Pésaro, dans l'État romain. Sa suite, organisée comme une petite cour, était composée en grande partie d'Italiens. Des rapports peu favorables étaient parvenus en Angleterre, sur sa conduite avec Barthélemi Bergami, italien entré à son service en qualité de courrier, et qu'elle avait brusquement élevé au rang de chambellan. Des commissaires avaient été envoyés secrètement à Milan, pour recueillir des informations sur ces rumeurs. On disait, en Angleterre, que la masse des témoignages obtenus avait été soumise à l'examen des jurisconsultes de la couronne, et qu'ils avaient été unanimement d'avis qu'il était impossible d'établir légalement une accusation sur cette base.

On a supposé que le gouvernement anglais avait résolu d'exiger seulement de la reine une résidence constante en pays étranger, et à ne jamais prendre le titre de reine de la Grande-Bretagne, ni aucun autre appartenant à la famille royale. Mais il paraît qu'il ne fit aucune démarche pour qu'une négociation promte conduisit à l'accommodement qu'il désirait.

La reine, ignorant quelle serait sa position à l'avenir, n'apprit, que par les journaux anglais, la mort de Georges III, et l'omission de son propre nom dans la liturgie. Elle s'était déjà plainte des dégoûts et des affronts qu'elle avait éprouvés de la part des agents de divers gouvernements étrangers et des ministres de la Grande-Bretagne accrédités auprès d'eux. Finalement, elle avait vendu sa maison du lac de Côme, pour se fixer à Pésaro. Traitée auparavant avec beaucoup d'égards, tout changea depuis qu'elle fut devenue reine; ce fut le sujet de deux lettres qu'elle écrivit le 16 mars, de Rome, à Lord Liverpool, et dans l'une desquelles elle annonça son prochain retour en Angleterre. Elle quitta Pésaro le 19 avril, elle arriva le 1er juin à Saint-Omer.

Dès que sa résolution avait été connue, lady Anne Hamilton, qui avait fait partie de sa maison, et l'alderman Wood s'étaient mis en route pour aller au-devant d'elle; ils la ren

contrèrent à Montbar. D'après une conversation tenue avec eux, la reine écrivit à M. Brougham, son procureur-général, de venir la joindre à Saint-Omer. Le 29 mai, elle expédia de Villeneuve-le-Roi, un courrier à lord Liverpool, pour lui annoncer qu'elle comptait arriver à Londres le 3 juin et demander qu'on lui préparât une résidence convenable à son rang, et qu'un yacht de la marine royale vint l'attendre à Calais. On ne fit pas de réponse à ces dépêches.

Le 3 juin, lord Hutchinson et M. Brougham étaient à Saint-Omer; le premier s'annonça comme chargé d'une proposition de la part du ministère; elle se réduisait à celle qui avait déjà été faite : la reine aurait une pension de 50,000 I. Lord Hutchinson insinua que, dans le cas où elle serait assez mal conseillée pour mettre le pied en Angleterre, toute négociation serait rompue, et il serait à l'instant procédé contre elle. La reine, indignée, fit répondre qu'elle ne pouvait accepter ces propositions; elle partit pour Calais et s'embarqua sur un paquebot anglais. Le 6 juin, elle entra dans Douvres. Le gouverneur, qui n'avait pas d'ordres contraires, lui rendit tous les honneurs dûs à son rang; la multitude, en la voyant, fit retentir l'air d'acclamations de joie; sur la route de Douvres à Londres, la population entière se porta sur son passage; tous les travaux furent suspendus; partout les cloches sonnèrent; dans les villes, on lui présenta des adresses conçues dans les termes les plus respectueux; elle y répondit avec les formules ordinaires de la souveraineté ; dans la capitale, elle reçut les honneurs d'une espèce de triomphe; elle descendit à la maison de l'alderman Wood, à six heures du soir.

Une heure avant, lord Liverpool avait porté à la chambre des pairs, et lord Castlereagh à la chambre des communes un message du roi qui, en conséquence de l'arrivée de la reine, annonçait qu'il avait jugé nécessaire de leur communiquer divers renseignements relatifs à la conduite de cette princesse depuis son départ du royaume, et qu'il recommandait à leur sérieuse et immédiate considération. Le roi aurait désiré vivement qu'il lui fût possible d'éviter des révélations et des discussions aussi pénibles pour son peuple que pour ses propres sentiments; mais la démarche de la reine ne lui laissait pas d'alternative. Le roi, en fesant cette communication, était persuadé que la chambre des pairs adopterait la marche que requéraient à la fois, la justice de cause, ainsi que l'honneur et la dignité de la couronne

la

Ce message était accompagné d'un sac vert contenant les documents annoncés.

La chambre des pairs remit au lendemain la discussion de l'adresse proposée en réponse au message; dans la chambre des communes, les orateurs de l'opposition se récrièrent sur les insultes prodiguées à la reine.

Le 7, la chambre des pairs décida qu'il serait nommé, au scrutin, un comité qui examinerait les papiers remis la veille, et proposerait la marche à tenir. Dans la chambre des communes, M. Brougham lut un message de la reine, qui déclarait qu'elle était revenue en Angleterre à cause des manoeuvres insidieuses dirigées contre elle dans les pays étrangers, et protégées par le gouvernement britannique, et afin de défendre sa réputation et le maintien des droits qui lui étaient légitimement dévolus. La reine témoignait sa surprise extrême du message envoyé au parlement; et après avoir demandé un examen solennel de sa conduite et protesté contre toute formation d'un tribunal secret, elle se plaignait des moyens employés pour faire naître des préventions défavorables contre elle.

Dans la discussion qui suivit sur l'adresse à présenter au roi, lord Castlereagh s'efforça de défendre la conduite du ministère relativement aux négociations de Saint-Omer; il dit que l'avis du comité secret ne préjugeait rien quant à l'innocence ou la culpabilité de la reine; que l'omission du nom de cette princesse dans la liturgie n'était pas sans exemple; qu'enfin le désir le plus sincère des ministres était de voir les choses terminées par une conciliation. M. Brougham insista de nouveau sur les traitements indignes qu'on avait fait éprouver à la reine. M. Canning convint avec M. Brougham que le résultat de l'enquête ne pouvait qu'être pernicieux au royaume et aux personages qu'elle concernait; mais il soutint d'un autre côté que, loin d'avoir provoqué ou cherché cette enquête, les ministres avaient employé tous les moyens en leur pouvoir pour détourner une telle calamité. Ils avaient demandé non une renonciation au titre de reine, ni à tout autre usité par la famille royale, mais que cette princesse en prît un comme font les souverains qui voyagent incognito. M. Canning ajouta qu'en 1814, consulté par la princesse ce sujet, il lui avait donné le conseil de résider dans un pays étranger, et qu'elle y avait consenti. Il regretta beaucoup que la dernière négociation eût échoué; il n'en attribuait la

à

cause ni à lord Hutchinson, ni à M. Brougham; elle tenait uniquement à un parti pris, d'après des conseils qui, s'ils n'étaient pas dictés par de mauvaises intentions, étaient encore moins suggérés par la sagesse. La rupture de la négociation avait forcé le gouvernement à recourir à un appel au parlement. M. Canning finit par déclarer qu'après s'être acquitté de son devoir, en présentant à la chambre les observations qu'il venait de faire, son intention était de suivre ses sentiments particuliers, en s'abstenant, autant qu'il lui serait possible, de prendre aucune part à la discussion de cette

affaire.

M. Wilbeforce proposa d'ajourner le débat au 9. Lord Castlereagh voyant que cet avis était goûté par la majorité de la chambre qui l'avait accueilli avec des applaudissements, dit qu'il ne s'y opposait pas, quoiqu'il fût bien convaincu qu'il n'en résulterait rien.

:

Le 8, la chambre des pairs élut pour membres du comité secret l'archevêque de Cantorbéri, le chancelier, le président du conseil, les ducs de Beaufort et de Northumberland, les marquis de Lansdowne et de Buckingham, les comtes de Liverpool, Donoughmore, Beauchamp et Lauderdale, les lords Sidmouth, Erskine et Redesdale, et l'évêque de Londres.

Il s'offrait une occasion de négocier; mais les deux partis répugnaient également à faire le premier pas. Enfin les conseils judiciaires de la reine la décidèrent à autoriser M. Brougham à annoncer par écrit à lord Liverpool qu'elle était prête à prendre en considération tout arrangement compatible avec son honneur et sa dignité. Lord Liverpool répondit que le 15 avril dernier il avait remis à M. Brougham les propositions du roi. La reine répliqua que jusqu'à ce moment elle ne les avait pas connues; qu'elles n'étaient pas d'accord avec ce qu'elle regardait comme convenable à son honneur et à sa dignité; que cependant elle s'empresserait de soumettre ses souhaits à l'autorité du parlement, mais que la base de tout arrangement devait être la reconnaissance de son rang et de ses priviléges comme reine. Lord Liverpool répondit que la condition de la résidence dans un pays étranger devait passer avant tout. Deux autres lettres furent écrites; enfin il fut convenu que le projet d'un arrangement serait discuté par des arbitres : le duc de Wellington et lord Castlereagh furent ceux du roi; MM. Brougham et Denham ceux de la reine. Dans cet intervalle, les deux cham

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