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les regrets que lui causait le résultat des délibérations du parlement sur l'émancipation. Le roi sembla s'attacher surtout à faire renaître la concorde entre les partis qui divisent ce malheureux pays; il en partit le 4 septembre, dans la confiance d'y avoir réussi.

A la fin du mois, le roi partit pour aller visiter ses états du continent; il attérit à Calais : le 8 octobre, il descendit au château d'Herrenhosen, près de Hanovre. Le prince de Metternich y vint de la part de l'empereur d'Autriche comme pour complimenter le roi sur son arrivée; il eut avec le marquis de Londonderry plusieurs conférences relatives à l'espèce de médiation qu'exerçaient alors en commun la Grande-Bretagne et l'Autriche, entre la Russie et la Porte. Le comte de Bulow y vint de la part de la Prusse, le comte de Liéven, ambassadeur de Russie à Londres, n'y arriva que le 28, veille du départ du roi. Ce prince revint par Calais, et le 8 novembre, remit le pied sur le territoire britannique.

Avant de partir pour le Hanovre, le roi avait nommé un Conseil de régence, composé des principaux personnages de l'État. Il était à peine installé que les troubles de l'Irlande reprirent avec un caractère plus alarmant que l'année précédente. Le parti des Orange-men n'avait pu cacher, même en présence du roi, la joie que lui causait le rejet du bill d'émancipation des catholiques. Les paysans irlandais, exaspérés, se soulevèrent dans les comtés de Cork, Limerik et autres situés dans le sud; ils commirent des excès affreux. A la faveur de la nuit, des bandes allaient piller les maisons des propriétaires et des fermiers; ayant enlevé des armes, ils devinrent plus redoutables; toute personne condamnée dans une des réunions mystérieuses des insurgés, était impitoyablement assassinée par des hommes étrangers au canton, et par cela même plus difficiles à reconnaître. Le corps de l'Yeomanri du pays s'était rassemblé; il était trop peu nombreux, les révoltés en devinrent plus audacieux, ils résistèrent même aux troupes de ligne, et dans quelques rencontres les forcèrent à reculer. Bientôt tous les petits fermiers firent cause commune avec eux, obligeant les fermiers intermédiaires ou midlemen, à diminuer leurs baux, ou à rappeler les tenanciers qu'ils avaient chassés, sous peine de voir brûler leurs maisons et d'être assassinés : l'exécution suivait de près la menace.

Au retour du roi, le

gouvernement envoya Ides renforts de

troupes en Irlande. Leur nombre fut porté à vingt mille hommes. Le marquis de Wellesley fut nommé vice-roi. A la fin de l'année, douze comtés étaient plus ou moins soulevés; les révoltés allaient en plein jour par bandes de douze à quinze cents. Ceux que l'on prenait les armes à la main, étaient fusillés. Cependant on comptait encore moins, pour la pacification du pays, sur la rigueur des moyens déployés, que sur les talents du nouveau vice-roi; il n'était arrivé à Dublin que le 9 décembre.

Le résultat du dénombrement, terminé à la fin de l'année précédente, fit connaître que la population du royaume uni était de plus de 20,000,000 d'âmes.

Le 3 mars, mourut la princesse Élisabeth-Géorgine-Adélaïde, fille du duc de Clarence.

Dans l'Inde, une escadre envoyée contre les Béni bou Ali, pirates arabes qui désolaient le Golfe-Persique, s'empara de leurs places fortes au mois de mars, et alla ensuite bombarder Moka; puis conclut un traité de commerce avantageux avec l'iman de Saana.

1822. Malgré les clameurs qui retentissaient dans plusieurs parties de l'Angleterre, la détresse de ce pays n'était pas aussi grande qu'on affectait de le représenter. Toutes les manufactures, notamment celles de coton et de laine, étaient actives et même florissantes; les ouvriers étaient employés et bien payés. Le commerce augmentait; ses bénéfices, quoique moindres qu'auparavant, étaient fixes et uniformes. Toutes les classes du peuple pouvaient acheter les choses de première nécessité à un prix plus modéré qu'on ne l'avait vu depuis près de trente ans. Les cultivateurs souffraient parce que, dans le tems où les productions de la terre avaient une valeur plus grande, que dans le moment actuel, ils avaient contracté des engagements qu'ils étaient obligés de payer, et que leurs moyens pour les acquitter avaient diminué. Mais c'était un mal que la législature n'avait pas le pouvoir de guérir. Cependant, les plaintes des propriétaires, membres du Parlement, étaient si fortes, que le ministère crut devoir s'étayer de l'appui du parti Grenville, qui depuis un certain tems votait avec l'opposition, sans pourtant favoriser l'accroissement de l'influence populaire, car la différence d'opinion concernait moins les principes que la nature des mesures particulières. L'opposition perdit plus que le ministère ne gagua, le parti de Grenville n'étant ni populaire ni nombreux.

Au mois de janvier, lord Sidmouth, secrétaire d'état de l'intérieur, se retira volontairement des affaires ; il eut pour successeur M. Peel.

Le 5 février, le roi ouvrit la session du parlement; il annonça qu'il continuait à recevoir de toutes les puissances étrangères les assurances les plus fortes de leurs dispositions pacifiques, et qu'il s'était efforcé avec ses alliés d'ajuster les différends élevés entre la Russie et la Porte. Il donna des espérances d'accroissement de revenus et de diminution des dépenses, et déplora les troubles de l'Irlande ainsi que la détresse de l'agriculture.

Dans les débats relatifs à l'adresse en réponse au discours du roi, l'opposition accusa le ministère de trop de rigueur dans le sistême qu'il suivait envers l'Irlande, et proposa des amendements pour demander la réduction de diverses dépenses; mais ils furent rejetés à une grande majorité.

Le 7 février, le marquis de Londonderry déposa, sur le bureau de la chambre des communes, des dépêches du viceroi d'Irlande : il déclarait que l'obstination des paysans rebelles était telle, que les moyens pacifiques échoueraient pour les faire rentrer dans le devoir. En conséquence, le ministre proposa de remettre en vigueur pour l'Irlande, l'acte d'insurrection, et d'y suspendre l'habeas corpus : mais seulement jusqu'au 1er août 1823, sauf à prolonger ces mesures, si malheureusement elles étaient encore nécessaires. Le ministre fit observer que les troubles de l'Irlande n'avaient aucun caractère politique ou religieux; que les catholiques avaient d'eux-mêmes suspendu les réclamations qu'ils devaient adresser au parlement.

On convenait de la nécessité d'étouffer la rébellion; mais on regardait la loi proposée comme trop rigoureuse et propre seulement à séparer éternellement l'Irlande de l'Angleterre, et à transformer une révolte partielle en une guerre civile. D'un autre côté, M. Grant, avocat ordinaire des catholiques irlandais, avouait qu'il était urgent d'opposer des remèdes efficaces aux progrès d'une rébellion absolument étrangère à la question des catholiques, et propre seulement à former un grand obstacle au redressement de leurs griefs. D'autres membres qui connaissaient bien l'Irlande, parlèrent dans le même sens. Les nouvelles qui arrivèrent dans le courant de la discussion, apprirent que chaque jour l'Irlande était le théâtre de nouvelles atrocités. Les bills passèrent, dans les deux chambres, à de fortes majorités.

Le 11 mars, le parlement adopta deux nouveaux bills comme supplémentaires à l'acte d'insurrection: le premier était un acte d'indemnité pour toute personne qui, depuis le 1er novembre 1821, avait, dans le dessein de maintenir la tranquillité publique, mais sans autorité légale, saisi ou détenu des armes ou de la poudre le second avait pour but de rendre plus difficile aux rebelles de se procurer des moyens d'attaque, en mettant des restrictions rigoureuses à l'importation des armes, de la poudre et des munitions en Irlande, à la fabrication de la poudre dans ce pays, et à leur transport d'un lieu à un autre.

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Le 15 février, le marquis de Londonderry proposa, pour le soulagement de l'agriculture, une diminution de 2,000,000 livres dans diverses dépenses de l'Etat ; cette somme devait accroître annuellement le fonds de l'amortissement. Les cinq pour cent consolidés devaient, par des remboursements, devenir des quatre pour cent. La taxe additionnelle sur la drèche devait être modérée. Ces mesures devaient augmenter la confiance publique, et faire monter les fonds publics; par conséquent faire baisser l'intérêt de l'argent. L'agriculteur emprunte ait donc à meilleur marché, ce qui serait pour lui le soulagement le pius désirable. La banque avancerait au gouvernement 4,000,000 livres à trois pour cent; ce qui servirait à opérer sur le fonds d'amortissement, à faire des prêts aux agriculteurs, et à aider également par des avances, des paroisses qui succombaient sous le poids de la taxe des pauvres. Le ministre observa que l'abolition de plusieurs impôts, imaginée par l'opposition, obligerait de supprimer le fonds d'amortissement, et même de diminuer l'intérêt de la dette. Ce manque de foi ruinerait le crédit public et rendrait les emprunts particuliers plus difficiles, les intérêts du commerce plus onéreux, la situation du fermier plus précaire. La partie des impôts qui pesait directement sur celui-ci, ne s'élevait qu'à cinq pour cent de son revenu net; en considérant par combien de canaux les impôts passent et repassent, on doit croire que la moitié en revient au cultivateur, et qu'ainsi sa charge est réduite à deux et demi pour cent. La seule cause réelle de ses embarras était la disproportion entre la quantité de blé qui est produite et celle qui peut se vendre; de là vient la baisse du prix : c'est un inconvénient dont toute l'Europe souffre partout la marche ordinaire du commerce des grains est dérangée; c'est au tems à remettre les choses dans leur cours ordinaire.

M. Brougham répondit que la réduction proposée sur l'impôt de la drèche, était insignifiante pour l'agriculture, et insista sur la suppression de ces énormes sinécures qui ne servaient qu'à entretenir dans l'abondance des membres de la chambre très-fidèles aux ministres. M. Robinson, trésorier de la marine, répliqua, comme lord Londonderry l'avait déjà fait, qu'il ne fallait pas comparer l'économie d'un empire à celle d'un particulier, ni surtout ébranler le sistème du principe d'amortissement.

Afin que la chambre fût en état de délibérer sur les mesures proposées, le ministre demanda que le compte des revenus et des dépenses des années 1821 et 1822, ainsi que le compte de la dette fondée et non-fondée, et des sommes applicables à leur rachat, fussent déposés sur le bureau : ce qui fut ordonné.

L'opération relative à la conversion des cinq pour cent de la marine en quatre pour cent, ayant été proposée dans une assemblée de banquiers et négociants, et autres capitalistes possesseurs de cette sorte de fonds, ne rencontra nulle opposition. La condition principale était de donner pour 100 liv. d'annuités de cinq pour cent, 105 livres en actions du nouveau fonds de quatre pour cent. Ceux qui n'acquiesceraient pas à la proposition, seraient remboursés dans l'ordre numérique de l'inscription de leurs noms. Le capital des cinq pour cent, créés depuis 1784, s'élevait à 141,830,057 livres. Leur conversion produisit peu de variation à la bourse, et n'éprouva que peu de refus de la part des propriétaires. Il résulta de cette opération une économie annuelle de 1,400,000 livres, et une autre de 90,000 liv. une réduction sempar blable en Irlande.

Le 30 avril, M. Canning proposa un bill à l'effet de révoquer la partie de la loi de 1678, qui prive les pairs catholiques des droits de siéger et de voter dans la chambre haute. Il exposa que cette loi, dont le but réel avait été d'exclure le duc d'York du trône, ne devait plus être en vigueur, puisque l'on ne courait plus le risque d'avoir un prince papiste pour héritier présomptif. La loi avait pris naissance dans un moment d'agitation singulière. Le complot papiste, imaginé par tus Oates, avait rempli l'Angleterre d'effroi. La chambre des pairs avait laissé arrêter six de ses membres catholiques accusés de complicité dans la conspiration : le bill qui excluait les douze autres membres, fut porté au milieu des cris d'une populace furieuse. Ils furent exclus, non pour motifs d'in

Ti

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