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banniers), parce que leur signe de ralliment est un ruban à leur chapeau, troublèrent la paix dans plusieurs comtés. On a dit au parlement que les radicaux d'Angleterre avaient leurs émissaires en Irlande; d'ailleurs, l'union des rubanniers avait pour objet spécial d'obtenir, de gré ou de force, la diminution des fermages. On a soupçonné les fermiers, surnommés middlemen, à cause de leur position intermédiaire entre le propriétaire et les paysans, d'avoir excité la sédition chez leurs sous-fermiers, afin de pouvoir refuser le paiement de leurs baux aux propriétaires. La révolte commencée dans le comté du Roi, dès le mois de janvier, s'étendit à l'ouest dans les comtés de Roscommon, Mayo et Galway. Les conjurés entraient la nuit, de vive force, dans les maisons des protestants, dont ils enlevaient les armes, et allaient ensuite d'une ferme à l'autre, exigeant du paysan le serment de ne payer ni les redevances, ni les dîmes, jusqu'à ce qu'on eut diminué les fermages, de porter le signe du ralliment, de se trouver exactement aux rendez-vous de chaque canton, et de ne rien révéler des secrets de l'association. Il se forma, pour arrêter ces désordres, une association armée comme les Yéomen d'Angleterre; mais les protestants étaient trop peu nombreux et trop isolés. Bientôt les ribbon-men devinrent plus audacieux, et se rassemblèrent en plein jour. Les protestants demandérent la remise en vigueur de l'acte d'insurrection. Mais le gouvernement. persuadé qu'il suffisait de la vigilance des autorités et des lois ordinaires pour mettre un terme aux excès des ribbon-men, se contenta d'envoyer plusieurs régiments d'infanterie dans les comtés de l'ouest. Les magistrats reprirent leur énergie; les ribbon-men soutinrent plusieurs petits combats contre la troupe réglée; ils étaient si bien instruits par leurs nombreux espions, qu'ils échappaient aisément aux poursuites. Cependant on en prit un si grand nombre, que les prisons en furent remplies on fut obligé d'en relâcher plusieurs sous caution. Plusieurs chefs furent condamnés à mort ou à la déportation.

Leurs complices poursuivirent leurs brigandages avec plus de férocité; mais ils diminuèrent. On espéra que des mesures de conciliation et la diminution des fermages achèveraient de pacifier le pays.

Les élections au parlement furent très-paisibles dans tout le royaume.: on supposa que le ministère avait gagné des

Le 21, la chambre des communes réélut pour orateur M. Ch. Manners Sutton, dont le choix fut confirmé.

Le 27, le roi ouvrit la session : il annonça l'intention de suivre l'exemple de son père et de consacrer tous ses soins aux intérêts publics et au bonheur du peuple; il promit de faire toutes les économies possibles, et témoigna le désir qu'il ne fût rien ajouté à la liste civile, telle qu'elle avait été réglée en 1816. Le roi parla ensuite des machinations des factieux, exprima sa satisfaction de la vigilance et du zèle déployés par les magistrats, déplora la détresse qui pesait sur les classes laborieuses de la société, et espéra qu'elle aurait un terme, quand la tranquillité serait parfaitement rétablie, et que les hommes égarés seraient rentrés dans la bonne voie. Les adresses en réponse au discours du roi furent votées dans les deux chambres, sans la moindre contradiction.

Le 2 mai, la chambre des communes, sur la proposition du chancelier de l'échiquier, fixa la liste civile à 1,057,000 liv. La couronne renonçait, en conséquence, à tous ses revenus héréditaires qui étaient réunis au fonds consolidé, sauf la réserve de quelques revenus et droits particuliers: il en résulterait pour l'État une économie de 130,000 liv.

sans

M. Brougham, après avoir exposé que la possession, contrôle, des droits sur les prises faites sur l'ennemi, sur les successions non réclamées, sur les navires naufragés, dont les propriétaires sont inconnus, des impôts levés dans les Antilles, et autres, procuraient à la couronne des fonds qui pourraient l'engager à entreprendre la guerre ou à augmenter son influence sur les élections, demanda que la chambre s'occupât de cet objet important, afin de prendre une résolution qui fût conforme à l'honneur et à la dignité de la couronne, à l'intérêt du peuple et au maintien de la constitution.

M. Canning combattit cette proposition comme inconstitutionnelle, et surtout comme injurieuse à la dignité du trône. Il observa que l'emploi des sommes dont il était question, avait été précédemment communiqué au parlement ; et que quant à l'avenir, une des clauses du nouvel arrangement, était que tout emploi de ces fonds serait naturellement soumis à la chambre à chaque session, après avoir été fait. De sorte que son opinion ne différait sur ce point de celle de M. Brougham, qu'en ceci : l'emploi de ces fonds sera-t-il préalablement discuté dans la chambre et effectué d'après le vote du parlement, ou bien ne sera-t-il

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soumis au parlement qu'après avoir été fait?« Les minis» tres,» ajouta M. Canning, « ne sont pas préparés à pro» poser l'abolition d'un usage presque immémorial, Sans » avoir une preuve bien évidente que son existence est incompatible avec notre constitution. Le grand argument » pour s'en écarter dans cette occasion, est qu'il faut réfor» mer la monarchie et effacer tout vestige des coutumes » féodales. Sans doute, nous pouvons ériger quelque nou» velle institution digne de grands éloges; mais j'ai de la répugnance à voir effacer toute trace d'antiquité dans la >> constitution britannique. Rien de plus aisé que de former » un sistème qui est très-net sur le papier, un sistème qui, » en dépouillant le roi et ses ministres de tout ornement » particulier, les rendrait, quant à leur dignité et à la » forme, ce qu'ils sont réellement, de simples fonctionnaires » du peuple. Mais bientôt on trouverait que le salaire est » trop fort. La motion est intempestive et inutile; nulle » nouvelle demande n'a été faite, nul fardeau nouveau n'a » été proposé. Je demande l'ordre du jour. » Il fut adopté par deux cent soixante-treize voix contre cent cinquante-cinq. Le 9 mai, une pétition de la chambre de commerce d'Édinbourg et une autre d'un grand nombre des principaux négociants de Londres furent lues à la chambre des communes. Toutes deux demandaient qu'il fût donné plus de liberté au commerce extérieur, en le débarrassant de plusieurs entraves qui le gênaient. M. Baring indiqua les diverses restrictions qui nuisaient au développement des entreprises commerciales. M. Robinson, président du conseil de commerce, convint que le sistème des restrictions était erroné dans son principe et nuisible à l'objet pour lequel il avait été adopté; mais il ajouta, qu'adopté depuis long-tems et intimement lié à d'autres branches de l'administration, il ne pouvait être brusquement abandonné; depuis deux ou trois ans, on y avait introduit diverses améliorations; d'autres pourraient être suggérées par des comités d'enquête, ou dans les discussions de la chambre; mais il existait, relativement aux relations de commerce avec d'autres nations et nolamment avec la France, des préjugés réciproques à vaincre. Le comité nommé pour prendre en considération l'état du commerce extérieur et intérieur, reconnut, comme une des causes principales du malaise commercial, la confusion et l'incohérence des lois. Il y en avait encore onze cents en vigueur concernant le commerce. Un négociant ne peut donc entre

prendre une spéculation avant d'avoir consulté un homme de loi, pour savoir s'il ne s'expose pas à violer quelque statut et à faire confisquer son navire et sa cargaison. Le comité pensa que l'acte de navigation pouvait être modifié dans ses deux dispositions principales, savoir: qu'il serait permis aux navires anglais d'importer toutes sortes de marchandises d'Europe, sans qu'il fût nécessaire de les avoir chargées dans le pays même qui les produit ou les fabrique; il convenait de donner, à l'exemple de la France et de la Hollande, une extension illimitée au sistème d'entrepôt des marchandises étrangères, destinées à être réexportées, excepté dans les colonies anglaises, et de les exemter de tout droit. Toutefois, le comité sentait qu'on ne pouvait pas, sans un grand inconvénient, abandonner tout à coup le sistème prohibitif; mais il observait que ce n'était pas à son maintien que l'Angleterre avait dû son commerce immense et sa puissance maritime; que c'était aux principes libéraux de la constitution, à la liberté individuelle efficacement assûrée par les lois, à la garantie donnée aux propriétés, aux récompenses décernées au talent, dans toutes les carrières où les honmes déploient leur activité.

Ce rapport fut imprimé. Diverses villes de commerce et de manufacture adressèrent, au parlement, de nouvelles pétitions, dans le même sens que celles de Londres. Les prohibitions, dont les lois financières de France et d'Allemagne frappaient les produits de l'industrie britannique, furent combattues en Angleterre par divers écrits. D'un autre côté, les propriétaires fonciers anglais demandaient des lois contre l'importation des grains étrangers. Il y eut des débats trèsanimés à ce sujet. On représenta à ceux qui combattaient cette importation, qu'en fesant baisser le prix du grain, il en résulterait nécessairement une diminution dans celui de la main-d'œuvre, qui pouvait seul donner aux produits de l'industrie anglaise la préférence dans les marchés étrangers.

sure,

Le 1er juin, lord Castlereagh proposa la continuation de l'Alien-bill pendant deux ans; il s'appliqua surtout à prévenir les objections souvent alléguées contre cette meen exposant que le nombre des étrangers actuellement en Angleterre, était d'environ vingt-cinq mille; qu'il s'était beaucoup accru depuis 1818, et que très-peu d'entre eux y étaient amenés des affaires de commerce. Il ajouta, que l'Angleterre était regardée, avec raison, comme un asile sûr

par

pour les hommes poursuivis dans d'autres pays; mais qu'il s'agissait de savoir, si dans l'état actuel de l'Europe et du royaume, il pouvait admettre, avec sécurité pour luimême et sans restriction, un mélange d'étrangers, la plupart inconnus? Si on pouvait souffrir qu'ils en fissent un foyer de conspiration contre le repos et la sûreté des autres gouvernements, et compromissent ainsi la paix de la GrandeBretagne avec les nations étrangères; fait dont il pouvait administrer la preuve?

Sir Robert Wilson répondit au ministre par une attaque violente contre le sistème suivi de concert par toutes les puissances. On était généralement porté à croire que l'Alien-bill était un de ces arrangements du congrès de Vienne, dont il était impossible au ministère de se départir. En effet, il offrait toute l'apparence d'une mesure imaginée pour établir un sistème uniforme de police, qui donnât à la sainte alliance la faculté d'ôter tout moyen de refuge à quiconque lui serait suspect, ou seulement encourrait sa disgrâce.

Le bill fut défendu par le procureur-général et blâmé par sir James Mackintosh, comme pouvant devenir l'instrument de malveillances particulières. Lord Castlereagh observa que la Grande-Bretagne ne fesait point partie de la sainte alliance, dans le sens diplomatique de ce mot; et qu'elle ne s'entendait nullement avec les souverains qui la composaient, pour expulser les étrangers qui leur étaient suspects. Il pensait, au contraire, que les autres pays avaient le droit de se plaindre de l'indulgence qu'elle montrait aux étrangers, en considérant le pouvoir que cette loi plaçait dans les mains du ministère. Le bill fut adopté par cent quarante-neuf voix contre soixante trois, puis converti en loi.

D'après les comptes de finance soumis à la chambre des communes, les recettes, en 1819, s'étaient élevées à 53,388,248 livres, et les dépenses à 69,448,899 livres ; il en résultait un déficit de 16,060,651 livres. Le ministre proposa de le couvrir par une émission de billets de l'échiquier, par un emprunt de cinq à sept millions, et par une imputation sur le fonds d'amortissement.

Le service total de l'année 1820 fut estimé à 29,723,000 I.; les voies et moyens proposés devaient produire 30,000,000. Dans la discussion relative à cet objet, on parla beaucoup de la détresse de l'Angleterre depuis cinq ans. On attribua la cause du malaise à la diminution du signe représentatif en

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