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des témoins à charge sont déclarés coupables de faux témoignage, régit méme les condamnations prononcées par les tribunaux militaires. Le renvoi doit avoir lieu devant un conseil de guerre, à moins qu'il n'y ait attribution à une autre juridiction par une loi spéciale.

ARRÊT (Aff. Mohamed ben Mahmar, etc.).

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LA COUR; vu le jugement rendu le 6 sept. 1858 par le 2e conseil de guerre séant à Oran...; vu la décision du conseil de révision d'Oran...; vu et vérifié la décision de la Cour d'assises d'Oran, à la date du 7 août 1860, qui déclare: 1o Ben Aouda ben Zian; 2o Abderrahman ben Zitourni, et 3° Ahmed ben Lezman coupables de faux témoignages à charge contre les accusés Mohamed ben Mahmar, Maklouf dit Mouchi Tordjemann et Ben Douch ben Guigni, à l'audience du 2o Conseil de guerre d'Oran, en septembre 1858, et qui admet en leur faveur des circonstances atténuantes; — vu l'ariêt de la mème Cour, du même jour, qui condamne ces accusés chacun à deux années d'emprisonnement, à des dommages-intérêts et aux frais, et l'arrêt du 4 octobre suivant, qui a rejeté le pourvoi en cassation formé par les condamnés; - attendu que toutes ces décisions sont ainsi passées en force de chose jugée;-vu l'art. 445 C. d'instr. cr.; - attendu que cette disposition n'est qu'énonciative; quelle régit les condamnations prononcées par les tribunaux militaires aussi bien que celles qui émanent des Cours d'assises; attendu qu'il résulte de la nature des choses et de l'art. 445 lui-même que la révision doit être portée devant un tribunal autre, mais du même ordre que celui qui a prononcé la condamnation annulée, et qui, comme lui, statue au fond; attendu que l'art. 1er du décret du 15 mars 1860, qui dessaisit pour l'avenir les Conseils de guerre de la connaissance des crimes commis en territoire militaire algérien par des Israélites, qualité qui appartient à deux des inculpés, Maklouf dit Mouchi Tordjemann, et Ben Douch ben Guigni, et attribue à leur égard juridiction aux Cours d'assises, ne permet plus le renvoi devant un autre Conseil de guerre et impose la nécessité de saisir une Cour d'assises, d'où ressort virtuellement une dérogation exceptionnelle, pour le cas tout spécial de la cause, à la disposition finale de l'art. 271 du C. d'instr. cr. et à celle des autres dispositions du mème Code dont l'application devient inconciliable avec l'exécution, dans l'espèce, des articles combinés 445 du C. d'instr. cr. et 1er du décret; - attendu que Mohamed ben Mahmar, compris dans la mème poursuite à raison du mème crime, doit suivre, quant à la compétence de droit commun, le sort de ses coaccusés; enfin le décret du 15 mars dernier; la Cour casse et annule le jugement rendu le 8 septembre 1858 par le 2o Conseil de guerre d'Oran, qui condamne les accusés Mohammed ben Mahmar, Maklouf dit Mouchi Tordjemann et Ben Douch ben Guigni aux peines de la réclusion et des travaux forcés à temps, et la décision du Conseil de révision d'Oran, en date du 16 du mème mois, qui le confirme; et, pour ètre procédé à l'interrogatoire des accusés, à l'ouverture de nouveaux débats sur les faits de faux et de complicité de faux qui ont été l'objet de la première poursuite et qui sont prérappelés, ainsi qu'à une nouvelle position de questions faite conformément à la loi, et à un nouveau jugement, renvoie la cause et les accusés, en l'état où ils étaient au moment de la précédente condamnation, devant la Cour d'assises d'Alger, à ce déterminée par délibération prise en chambre du conseil; ordonne la signification du présent arrèt aux mèmes accusés, ainsi que du réquisitoire.

Du 30 novembre 4860. C. de cass.

M. Legagneur, rapp.

- vu

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1o La sanction pénale que la loi du 25 juin 1844 avait donnée aux dispositions réglementaires anterieures, concernant les ventes publiques aux enchères de marchandises en gros, n'a pas été appliquée par la loi du 28 mai 1858, abrogeant ces dispositions, au règlement d'administration publique qu'elle a prescrit et qui a été émis pour l'exécution de cette loi modificative.

2o Dans le silence de la loi nouvelle sur les pénalités, le règlement d'administration publique doit trouver sa sanction pénale dans l'art. 471, no 45, C. pén., qui s'applique à tous règlements légalement faits par l'autorité administrative.

3° Lorsque le tribunal correctionnel, saisi d'un fait supposé constitutif de délit et qui ne peut constituer qu'une contravention de police, s'est déclaré incompétent sans examiner le fait au point de vue de la contravention, l'appel pour délit autorise la Cour impériale à juger la contravention elle-même, en annulant et évoquant.

Pour prévenir des fraudes trop faciles et pour garantir les marchands sédentaires contre une concurrence funeste, la loi du 25 juin 1841 a interdit les ventes en détail des marchandises neuves, à cri public, hors les cas de nécessité réglés par les lois (Voy. Rép. cr., vo Fraudes diverses, no 18-22; J. cr., art. 3415, 3580, 3682 et 6697). A l'égard des ventes en gros, cette loi a dit, art. 6: « Les ventes publiques aux enchères de marchandises en gros continueront à être faites par le ministère des courtiers, dans les cas, aux conditions et selon les formes indiquées par les décrets des 22 nov. 1814, 17 avril 1812, la loi du 15 mai 1818, et les ordonnances des 1er juill. 4818 et 9 avril 4819. >> La sanction pénale des dispositions prohibitives, même pour celles qui concernaient les ventes en gros, se trouva dans l'art. 7, portant: «< Toute contravention aux dispositions ci-dessus sera punie de la confiscation des marchandises mises en vente, et, en outre, d'une amende de 50 à 3,000 fr., qui sera prononcée solidairement, tant contre le vendeur que contre l'officier public qui l'aura assisté, sans préjudice des dommagesintérêts, s'il y a lieu. Ces condamnations seront prononcées par les tribunaux correctionnels. » L'applicabilité de cet art. 7 aux ventes en gros prohibées aurait été douteuse d'après le projet de loi, qui l'avait placé avant la disposition renvoyant pour ces autres ventes à leurs règlements particuliers; le doute fut levé par la transposition qui mettait après celle-ci la disposition pénale émise contre toute contravention aux dispositions ci-dessus, et par cette déclaration du rapporteur à la chambre des députés : « Les ventes aux enchères qui seraient faites en contravention aux lois, règlements et ordonnances sur les ventes des marchandises en gros, et qui rentreraient ainsi dans la classe des ventes

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prohibées, donneraient lieu à l'application des peines portées par la présente loi. »—Le législateur avait imposé comme garantie nécessaire pour le commerce sédentaire, qui serait compromis par la concurrence libre des vendeurs en gros, l'obligation d'obtenir l'autorisation du tribunal de commerce. Une loi du 28 mai-11 juin 1858, considérant qu'il y avait là une gêne pour le commerce en général, a dispensé de cette autorisation, pour les ventes en gros des marchandises comprises au tableau qui l'accompagne ou qui y seraient ajoutées par un décret (art. 4er); puis, après avoir réglé les droits des courtiers (art. 2-5) et prescrit de procéder aux ventes dans les locaux spécialement autorisés à cet effet sur avis de la chambre et du tribunal de commerce (art. 6), elle a dit : « Art. 7. Un règlement d'administration publique prescrira les mesures nécessaires à l'exécution de la présente loi. Il déterminera notamment les formes et les conditions des autorisations prévues par l'art. 6. Art. 8. Les décrets du 22 nov. 1811 et du 17 avril 1842, et les ordonnances des 1er juillet 1848 et 9 avril 1819 sont abrogés en ce qui concerne les ventes régies par la présente loi; ils sont maintenus en ce qui touche les ventes publiques de marchandises faites par autorité de justice. »> Le règlement d'exécution a eu lieu par un décret du 12-31 mars 1859, qui a des dispositions communes aux magasins généraux (autorisés par une autre loi du 28 mai 1858) et aux salles de ventes publiques, et des dispositions particulières aux ventes publiques de marchandises en gros (Bull. des lois, no 6304).

De là plusieurs questions, relativement à la répression des infractions aux règles nouvelles.

JUGEMENT (Pelletreau C. Durand).

LE TRIBUNAL; attendu qu'en supposant qu'il fût démontré que Durand n'a point accompli toutes les prescriptions édictées par le décret du 28 mai 1858, il n'en résulterait pas qu'une peine correctionnelle pût lui être légalement appliquée; qu'en effet, l'art. 8 du décret du 28 mai 1858 abroge expressément les décrets du 22 novembre 1811 et du 17 avril 1812, en ce qui concerne les ventes de marchandises en gros; qu'il en résulte que l'amende de 50 à 3,000 fr. prononcée par l'art. 7 de la loi du 25 juin 1841 ne peut, en aucun cas, être applicable à ceux qui auraient enfreint les prescriptions du décret du 28 mai 1858, et qu'il importe peu que ce décret n'ait pas abrogé la pénalité dudit article, puisqu'il résulte de l'art. 6 de la même loi que cette pénalité ne pouvait être encourue pour les ventes de marchandises en gros qu'autant qu'il aurait été contrevenu aux conditions et aux formes indiquées par les décrets des 22 no vembre 1811, 17 avril 1812, et les ordonnances des 1er juillet 1818 et 9 avril 1819; et qu'ainsi qu'il vient d'ètre dit, ces dispositions législatives sont abrogées par le décret du 28 mai 1858; — attendu, en conséquence, qu'en supposant que les faits imputés à Durand et Pouillet fussent établis, ils ne constitueraient aucun délit; qu'ainsi le tribunal correctionnel n'est pas compétent pour en connaître; se déclare incompétent, et condamne Pelletreau aux dépens.

Du 27 juin 1860. - Trib. corr. de la Seine, 6o ch.

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ARRÊT.

sur le point de savoir si les peines établies par l'art. 7 de la

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loi du 25 juin 1841 sont applicables à la violation des dispositions de la loi du 28 mai 1858 et du décret du 12 mars 1859 sur les ventes publiques de marchandises en gros : adoptant les motifs des premiers juges; mais considérant que les règlements d'administration publique rendus pour l'exécution d'une loi qui ne contient pas de disposition pénale, ne sont pas cependant dépourvus de sanction; qu'ils trouvent cette sauction dans l'art. 471, § 15 C. pén.; qu'en effet, cet article, par la généralité de ses termes, embrasse tous les règlements émanés de l'autorité administrative, et principalement les décrets impériaux portant règlement d'administration publique; qu'il est donc applicable à toute infraction commise aux dispositions du décret du 12 mars 1859 sur les ventes de marchandises en gros; que le tribunal était compétent, aux termes de l'art. 192 C. inst. cr., pour prononcer la peine de simple police édictée par ledit art. 471, et pour statuer sur les dommages-intérêts réclamés par la partie civile; met l'appellation et ce dont est appel au néant, en ce que les premiers juges se sont déclarés incompétents; -émendant, déclare la juridiction correctionnelle compétente; - évoquant, conformément à l'art. 215 C. inst. cr., et statuant en vertu des art. 212 et 213 du mème Code; considérant qu'il n'est pas établi que Durand et Pouillet aient contrevenu aux dispositions du décret du 12 mars 1859; renvoie lesdits Durand et Pouillet des poursuites dirigées contre eux, sans dépens; condamne la partie civile aux frais de son appel.

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Du 14 décemb. 1860. C. de Paris, ch. corr. - M. de Gaujal, prés.

OBSERVATIONS. Le jugement et l'arrêt que nous recueillons décident avec raison, à notre avis, que l'abrogation des règlements qu'avait sanctionnés la loi de 1841 a fait tomber cette sanction pénale sans qu'elle ait été reportée par la loi abrogative de 1858 sur les dispositions réglementaires qui remplacent les anciennes d'après cette loi et le règlement de 1859. Ce résultat n'avait probablement pas été prévu par le législateur de 1858, puisque l'exposé de motifs disait : « Nous n'avons pas besoin de faire remarquer que toutes les dispositions réglementaires utiles et conformes à l'esprit de la loi nouvelle qui se trouvent dans le décret de 1812 et dans les ordonnances des 1er juillet 1848 et 9 avril 1849, qu'on propose d'abroger, seront remplacées dans le règlement d'administration publique qui sera fait pour l'exécution de la loi. » Mais les nouvelles dispositions sont autres que celles qui avaient reçu la sanction pénale de 1844; il eût fallu que la loi nouvelle rappelât cette sanction, pour qu'elle appartînt au nouveau règlement; puisqu'elle n'a rien dit quant à la répression des infractions, on ne peut y voir des délits par application d'une disposition pénale dont l'objet est changé.— Doit-on du moins, comme le décide l'arrêt, appliquer aux nouvelles dispositions réglementaires la sanction de l'art. 471 C. pén., de telle sorte que les infractions seraient des contraventions de police? Voici les raisons de douter: Lorsqu'une matière est spécialement réglée par la loi, c'est au législateur seul qu'il appartient de voir si ses prescriptions ou prohibitions doivent être sanctionnées par une peine, et de choisir les pénalités applicables aux infractions; aussi est-il de jurisprudence, en pareil cas que le pouvoir exécutif ou réglementaire, en rap

etc.

pelant les dispositions législatives, et les tribunaux, en jugeant les infractions, ne peuvent appliquer une peine que cette loi spéciale n'a point édictée par elle-même (Voy. Rép. cr., vo Lois criminelles, no 3; J. cr., art. 154, 1746 et 2594). En doit-il être autrement, quand le législateur, réglant une matière et prévoyant la nécessité de dispositions complémentaires, charge le pouvoir exécutif de compléter son œuvre pour les détails? Dans ce cas, il y a délégation d'une partie de la puissance législative au gouvernement, le règlement d'exécution s'identifie avec la loi à laquelle il se conforme: ce serait donc également au législateur à fixer la sanction pénale qu'auront les dispositions réglementaires par lui émises ou autorisées, et c'est ce qu'il fait presque toujours, ainsi qu'on le voit par les lois sur la police des chemins de fer, sur les appareils à vapeur, sur les marques de fabrique et de commerce, Tout au moins faudrait-il que l'interprétation de la loi y fît reconnaître l'intention du législateur de déléguer au pouvoir exécutif ou réglementaire la création de délits ou contraventions par l'émission de prescriptions ou prohibitions avec sanction pénale, comme cela fut jugé par arrêt du 12 août 1835, d'après la loi du 27 juillet 18221. Or il ne paraît pas que telle ait été l'intention du législateur de 1858, puisque le rapport ne remarquait point l'effet de l'abrogation des anciens règlements quant à la sanction pénale de 1844. Pour écarter cette objection, on doit dire le pouvoir réglementaire dérive de la souveraineté ; sous notre constitution, il appartient de plein droit au chef de l'État, sauf délégation aux autorités secondaires; ses attributions comprennent non-seulement ce qui est nécessaire pour l'exécution des lois, mais même la réglementation des points accessoires; tout règlement légalement fait et publié doit avoir une sanction pénale; c'est sans doute au législateur seul qu'il appartient d'édicter les peines, lorsque celles des simples contraventions de police paraissent insuffisantes; mais son silence, qui prouve seulement qu'il n'a pas voulu de pénalités plus sévères, n'em

1. Cette loi, art. 10, autorisait le roi à prescrire par voie d'ordonnance les moyens d'ordre et de police nécessaires pour empêcher la fraude dans l'introduction des bestiaux venant de l'étranger. L'ordonnance du 28 juillet 1822 a édicté la peine du double droit pour contravention à ses mesures réglementaires. Un tribunal ayant jugé que cette disposition pénale n'était point obligatoire, il y a eu cassation par l'arrêt de 1835, « attendu que de la généralité des expressions de l'art. 10 de la loi du 27 juillet 1822, il résulte que le législateur n'a pas seulement conféré au roi le droit, qui lui appartient, en vertu de l'art. 13 de la charte constitutionnelle, de faire des règlements pour l'exécution des lois, mais a voulu de plus que ces règlements fussent le complément de la loi elle-mème; et que le roi pût en conséquence en ordonner l'exécution sous une sanction pénale, sans laquelle la loi et les ordonnances rendues pour son exécution seraient toujours demeurées sans effet.» La délégation législative étant incontestable pour les mesures réglementaires et leur sanction, cela ne fait pas que le pouvoir exécutif puisse édicter une véritable peine; et la sanction admise par l'arrêt n'avait pas absolument ce caractère, puisqu'il s'agissait de fraude en matière de douanes et d'une sorte de réparation civile jugée par les tribunaux civils. Mais il reste toujours que le législateur a voulu que le règlement qu'il autorisait eût une sanction.

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