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PREMIÈRE PARTIE

PRÉCIS HISTORIQUE DES RÉVOLUTIONS,

DES CRISES MINISTÉRIELLES, PRÉSIDENTIELLES ET GOUVERNEMENTALES, ET DES CHANGEMENTS DE CONSTITUTIONS DE LA FRANCE

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Louis XVI', roi de France et de Navarre

(10 MAI 1774 21 SEPTEMBRE 1792)

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Le roi Louis XVI, petit-fils de Louis XV, est monté sur le trône de France le 10 mai 1774, à la mort de son aïeul.

Les États Généraux, élus en vertu de l'ordonnance royale du 24 janvier 1789, se sont réunis à Versailles, le 5 mai

1. Second fils de Louis, Dauphin de France (fils de Louis XV), né le 23 août 1754, marié le 16 mai 1770 à l'archiduchesse Marie-Antoinette, née à Vienne le 2 novembre 1755, fille de François Ier, empereur d'Allemagne, et de l'impératrice Marie-Thérèse. Louis XVI est un en ligne directe de Henri IV, premier souverain de la branche des Bourbons

descendant

suivant; ils étaient divisés en trois ordres: la Noblesse, le Clergé et le Tiers État ou Assemblée des Communes. Le Clergé et la Noblesse étaient représentés chacun par 300 membres et le Tiers État par 600. Le 17 juin suivant, sur la proposition de l'abbé Sieyès, l'Assemblée des Communes, à laquelle les deux autres ordres refusaient de se joindre pour délibérer, prend la dénomination d'Assemblée nationale. Le 20 juin, l'entrée de leur salle ayant été interdite, par ordre du roi, aux députés de l'Assemblée nationale, ils se rendent à la salle du Jeu de Paume où le président Bailly et après lui, tous les députés, sauf un seul, Martin (d'Auch), prêtent le serment suivant :

Nous jurons de ne jamais nous séparer de l'Assemblée nationale, et de nous réunir partout où les circonstances l'exigeront, jusqu'à ce que la constitution du royaume soit établie et affermie sur des fondements solides.

Renvoi de Necker (11 juillet) — Révolution de 1789.

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Avant le 14 juillet 1789, les ministres de Louis XVI étaient :

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La révolution de 1789 a eu des causes multiples; le renvoi de Necker, ministre des finances, en a été le signal.

La noblesse qui ne s'était réunie qu'à regret aux deux autres ordres (27 juin) protestait contre les travaux de l'Assemblée nationale et ne voulait pas y prendre part. De son côté, la cour tramait un complot contre la représentation

nationale et le peuple de Paris. Le Moniteur du 17 juillet 1789 publie à ce sujet les lignes suivantes :

Cinquante mille hommes, cent pièces de canon et six princes dirigeant leurs coups, allaient renverser sur ses ministres le sanctuaire de la liberté, et bouleverser l'empire français de fond en comble. L'Assemblée nationale devait être dispersée, ses arrêts déclarés séditieux, ses membres proscrits, le Palais-Royal et les maisons des patriotes livrés au pillage, les électeurs et les députés aux bourreaux. Tout était prêt pour consommer le crime. Des brigands armés de haches, de torches et de poignards, attendaient leur proie; la Bastille et les gibets, leurs victimes. La nuit du 14 au 15 juillet avait été fixée, dit-on, pour l'invasion de Paris. Au premier coup de canon, toutes les troupes de Paris et des environs devaient marcher sur la capitale, s'emparer de l'Hôtel de Ville, enlever les magistrats et les échevins, charger, le sabre à la main, tout ce qui se présenterait. Les régiments de Besançon et de la Fère devaient foudroyer Paris des hauteurs de Montmartre avec cinquante pièces d'artillerie...

Dès le 9 juillet, l'Assemblée nationale avait voté une adresse au roi, pour protester contre le rassemblement extraordinaire de troupes formé à Paris, à Versailles et aux environs, et en demander le renvoi. Cette adresse, proposée et rédigée par le comte de Mirabeau', contenait le passage suivant :

Sire, nous vous en conjurons au nom de la patrie, au nom de votre bonheur et de votre gloire, renvoyez vos soldats aux postes d'où vos conseillers les ont tirés; renvoyez coite artillerie destinée à couvrir nos frontières; renvoyez surtout les troupes étrangères, ces alliés de la nation que nous payons pour défendre et non pour troubler nos foyers; Votre Majesté n'en a pas besoin. Eh! pourquoi un Roi, adoré de vingt-cinq millions de Français, ferait-il accourir à grands frais autour du trône quelques milliers d'étrangers? Sire, au milieu de vos enfants, soyez gardé par leur amour; les députés de la nation sont appelés à consacrer avec vous les droits éminents de la royauté sur la base immuable de la liberté du peuple...

1. Député de la Provence, faisant partie du Tiers État.

2. Régiments suisses et allemands.

Le 11 juillet, le roi Louis XVI avait fait répondre par son garde des sceaux que ces troupes n'étaient destinées « qu'à réprimer ou plutôt à prévenir les désordres et les scènes scandaleuses qui avaient lieu à Paris et à Versailles, et à protéger l'Assemblée au milieu de ses délibérations ».

Un des premiers actes nécessaires à l'exécution des projets de la Cour, c'était le renvoi de Necker, qui était favorable à la cause populaire. Le 11 juillet, le ministre des finances reçoit de Louis XVI l'ordre de sortir du royaume dans les vingt-quatre heures et dans le plus grand secret.

Necker, obligé de fuir comme un crimine! ce royaume auquel il avait consacré son repos, ses forces, sa re et sa vie, quitte la France et se rend à Bruxelles.

Paris n'apprend cette nouvelle que le 12 vers midi. La consternation est générale; l'exil d'un seul homme devient une calamité publique. On ne considère cette disgrâce qu'en frémissant; on la regarde comme le signal des trois épouvantables fléaux de la famine, de la banqueroute et de la guerre civile. On court au Palais-Royal; l'indignation est à son comble; on voit des Français assemblés en grand nombre, portant sur leur front la pâleur du désespoir et sur leurs lèvres le frémissement de la vengeance, s'apprêtant comme des lions, quoique sans armes, à voler au-devant du péril, pour sauver la patrie.

Dans ce moment, un jeune homme, Camille Desmoulins, monte sur une table, crie: Aux armes, tire l'épée, montre un pistolet et une cocarde verte. La foule qui le regarde et l'écoute en silence, électrisée par son courage, pousse tout à coup de violentes clameurs. On s'anime, on s'excite, et les feuilles des arbres arrachées en un instant, servent de cocardes à plusieurs milliers d'hommes qui donnent le premier signal de l'insurrection dans tous les quartiers de la ville1.

Alors commence dans les rues entre les troupes et le peuple de Paris une guerre civile effroyable, une lutte sanglante qui dure jusqu'au 15 juillet et dans laquelle la Bastille assiégée tombe au pouvoir du peuple le 14 juillet.

1. Moniteur du 17 juillet 1789.

Ministère du 12 juillet 1789

Les ministres renvoyés par le roi Louis XVI le 11 juillet avaient été remplacés par les suivants :

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De Barentin et Laurent de Villedeuil du ministère précédent avaient été maintenus.

2

Le lundi 13 juillet, un député annonce à l'Assemblée nationale le changement survenu dans le ministère, le renvoi de Necker, son exil hors du royaume, la disgrâce des autres ministres, de Montmorin, de la Luzerne, et de Saint-Priest qui avaient la confiance publique, et leur remplacement par des hommes connus pour leur opposition à la cause populaire. L'Assemblée s'alarme de cet événement qui coïncide avec le déploiement extraordinaire de troupes autour de Versailles et de Paris.

Elle se déclare en

permanence; Mounier propose, au milieu du plus grand tumulte, « d'envoyer au roi une adresse et une députation pour le supplier de rappeler MM. Necker, de Montmorin, de la Luzerne et de Saint-Priest ».

MM. Target et de Lally-Tollendal appuient la proposition de Mounier. M. de Lally-Tollendal fait l'éloge de Necker, rappelle les services qu'il a rendus au pays en le sauvant de la famine et de la banqueroute. Il termine ainsi :

Si le roi nous refuse, nous pouvons et nous devons voter des

1. Nommé seulement le 13 juillet.

2. Le Moniteur ne donne pas son nom.

3. Necker, renvoyé une première fois par Louis XVI, le 21 mai 1781, avait été rappelé par lui le 26 août 1788.

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