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entre l'arrivée de l'éclair et celle du tonnerre, on déduit la distance qui sépare du lieu où le météore s'est manifesté. On multiplie le nombre des secondes par 337, et le produit exprime en mètres la distance cherchée. De l'Isle a compté jusqu'à 72 secondes entre l'éclair et le tonnerre, nombre qui donne pour la distance du nuage où l'éclair s'était montré, 24 264 mètres, soit 6 lieues de 4000 mètres (1).

INFLUENCES SPÉCIALES DES LIEUX. Dès 1803, W. Dillwyn signalait une fréquence et une force spéciales des orages dans les contrées calcaires de l'Angleterre en même temps qu'il constatait les faits suivants: Est du Devonshire, peu de mines métalliques, orages nombreux; Cornouailles, plusieurs mines, peu d'orages; Swansea, pays de mines de fer, orages très rares. D'après un ingénieur français, M. Blavier, dans le département de la Mayenne les orages se dissipent à l'approche des mines de fer ou les tournent dans certaines directions.

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EFFETS DE LA FOUDRE. La foudre se manifeste par des effets mécaniques, physiques et chimiques. Les premiers consistent dans le déplacement et la divulsion des objets frappés; les effets physiques se réduisent à une élévation de température qui souvent détermine la combustion; enfin l'action chimique de la foudre se traduit souvent par la fusion des minéraux. De Saussure en a constaté des traces sur la cîme du mont Blanc, dans l'amphibole schisteux; Ramond, sur le Pic du Midi, dans le schiste micacé, sur le mont Perdu, sur un calcaire fétide mêlé de sablon quartzeux. Enfin, sur la cîme du volcan de Tolucca, M. de Humboldt a trouvé la surface du rocher vitrifiée sur une étendue de plus de deux pieds carrés.

(1) Lors du siége de Gênes par les Français, le bruit de leur artillerie était entendu à Livourne, à 147 kilomètres ou à 36 lieues 3/4. Le capitaine Parry rapporte que lors de son voyage au pôle nord, tant que régna le froid intense, il entendait souvent à la distance de un mille (1600 mètres), des hommes causant entre eux avec leur voix ordinaire.

La foudre fend le bois et opère la fusion des métaux qu'elle frappe, ainsi que l'avaient déjà remarqué les anciens naturalistes. « On a vu, dit Aristote, le cuivre d'un bouclier se fondre >> sans que le bois fût endommagé par la foudre. » Selon Sénèque, « l'argent se fond sans que la bourse soit endommagée, l'é» pée se liquéfie dans le fourreau qui demeure intact. >> Pline et Lucrèce signalent des faits analogues. La foudre raccourcit les fils métalliques à travers lesquels elle passe, lorsqu'elle n'est pas assez puissante pour en effectuer la fusion. De Saussure, Ramond et M. de Humboldt ont constaté la vitrification de certains rochers opérée par la foudre; dans d'autres circonstances, les corps frappés se trouvent percés de plusieurs trous ou lancés à une distance plus ou moins considérable.

AIMANTATION DES MÉTAUX. La foudre étant tombée en Souabe, dans la chambre d'un cordonnier, y aimanta tellement les outils, que cet homme se trouva sans cesse occupé à débarrasser son marteau, ses tenailles et son tranchet des clous, des aiguilles, des alènes dont ils s'étaient saisis sur l'établi.

On comprend que l'aimantation des instruments de fer ou d'acier trouvés sur un individu mort, peut avoir une certaine valeur, en médecine légale, pour l'appréciation de la cause du décès.

Les altérations que la foudre fait éprouver aux aiguilles des boussoles ont souvent de graves résultats, et l'on a vu des navires, à la suite de coups de foudre, trompés par de fausses indications, se jeter sur des écueils dont ils croyaient s'éloigner. L'aimantation instantanée des masses de fer des navires peut créer des centres d'attraction.

ALTÉRATION DE LA BOUSSOLE. En 1675, un navire anglais se rendait à la Barbade; ayant eu un de ses mâts brisé par la foudre à la hauteur des Bermudes, il reprenait la route de l'Angleterre, lorsqu'il fut averti de son erreur par un autre

2 SÉRIE, 1854.

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TOME II. 2o PARTIE.

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bâtiment. Les boussoles du navire foudroyé avaient subi un complet renversement.

Selon Pline, la foudre ne pénètre jamais en terre au-delà de 5 pieds (1), et l'on considérait les cavernes comme des asiles parfaitement sûrs. On sait aujourd'hui que la foudre pénètre au-delà de 10 mètres dans le sol. On a supposé aussi que les personnes au lit et couchées n'avaient pas à redouter la foudre. Il est certain qu'en juillet 1828 la foudre tomba le 3 à Birdham et le 9 à Houghton sur un lit occupé sans faire aucun mal aux personnes couchées; par contre, la foudre tua, le 27 septembre 1819, une femme couchée dans son lit à Conflens, dans le département de la Charente. Au mois d'août 1805, la foudre étant tombée à Saint-Jean-d'Aubrigon (Haute-Loire), tua une fille qui était dans son lit et laissa sans connaissance une autre fille couchée près d'elle.

TÉLÉGRAPHES ÉLECTRIQUES. Il est aujourd'hui constaté que la foudre frappe quelquefois les poteaux qui supportent les fils métalliques des télégraphes électriques en épargnant ces derniers; d'autre part on a vu des étincelles se produire dans l'intervalle qui sépare les rails des chemins de fer. De petits oiseaux ont été trouvés suspendus aux fils du télégraphe. Ces faits sont de nature à conseiller un certain éloignement des fils en temps d'orage.

STATISTIQUE MÉDICALE. « La statistique des coups de ton» nerre foudroyants que j'ai pu constater dans quelques » années, dit M. Arago, démontre que le nombre des vic>> times de la foudre est assez restreint pour qu'on puisse >> regarder comme faible la chance de périr par le tonnerre... >> En France, les journaux de 1805, si je suis bien informé, » n'annoncèrent pas de coup de tonnerre suivi de la mort >> d'un seul homme; en 1806 ils ne parlèrent que de la mort » de deux enfants, à Aubagne; en 1807 ils ne citèrent que (1) Non unquam altiorem quinque pedibus descendit in terram; ideo pavidi altiores specus tulissimos putant. (L. II, c. 57.)

» deux jeunes agriculteurs foudroyés; en 1808 ils ne firent
» mention que d'un batelier tué sur les bords de l'eau, à
» Angers (1). »

« Les cas de fulguration, dit M. Kæmtz, ne sont pas très
>>> communs ; aussi la crainte du tonnerre n'est-elle nullement
>> excusable, et elle ne peut tenir qu'à des préjugés inculqués
» aux enfants par des parents ignorants (2). »

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En regard de l'opinion un peu optimiste des deux savants
que nous venons de citer, interrogeons les faits. Il va de soi
que nous laisserons en dehors de nos évaluations certains coups
de foudre tout à fait exceptionnels, tels que celui de Brescia,
en 1769, qui causa la mort de plusieurs milliers d'indi-
vidus (3).

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FRANCE. En consultant les archives du ministère de la
justice, nous nous sommes assuré que pendant la période de
dix-huit années, de 1835 à 1852 inclusivement, le nombre
des individus tués roide par la foudre, et signalés comme tels
à l'autorité, n'a pas été moindre de 1308.

Les 1308 décès se répartissent ainsi entre les diverses

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(1) OEuvres de François Arago; Paris, 1854, t. II, p. 265.

(2) Cours complet de météorologie, traduction de M. Martins, p. 351.
(3) En tombant sur un magasin à poudre.

Ce chiffre, qui n'est évidemment qu'un minimum et qui ne comprend pas d'ailleurs les individus blessés, rendus infirmes ou estropiés, donne une moyenne annuelle de plus de 72 individus tués par la foudre.

Dans aucune année, le chiffre n'est descendu au-dessous de 48; il s'est élevé en 1847 à 108, en 1835 à 111.

Voilà la vérité pour la France, passons à l'Angleterre.

ANGLETERRE.

Ici nous n'avons pu nous procurer que deux

années d'observation; mais nous trouvons :

En 1838.. 25 personnes tuées par la foudre,

En 4839.

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18

D

Soit une moyenne annuelle de 22. Notons que l'Écosse et l'Irlande ne sont pas comprises dans cette statistique.

BELGIQUE. - En Belgique dix années d'observation ont donné 30 décès par fulguration, ainsi répartis :

Décès annuels
en Belgique.

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3

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Voici quelques documents météorologiques dont nous sommes redevable à l'obligeance de M. Quételet (1):

Nombre annuel
des jours de tonnerre.

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(1) A. Quételet, Sur le climat de la Belgique, Bruxelles, 1852, p. 79.

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