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PROCÈS

DU

GÉNÉRAL SARRAZIN.

SUR

LE GÉNÉRAL SARRAZÍN.

Aux vivans comme aux morts on ne doit que la vérité; tous, sans doute, méritent que l'on s'exprime à leur égard avec quelque indulgence et quelque ménagement, lors qu'une courte erreur est venue, par un concours de circonstances fortuites, obscurcir une vie jusqu'alors, et depuis, conforme aux principes de la vertu ; mais il n'en est peut-être de même à l'égard de l'homme qui, violateur de ses sermens les plus sacrés, a indignement trahi l'honneur et trafiqué de l'intérêt de sa patrie; qui, couvert de ce crime, le plus infâme qu'on puisse qualifier, rentre au milieu de ses concitoyens, pour leur donner le spectacle douloureux du scandale et du mépris des lois conservatrices de la morale; celui-là, fût-il vivant, n'a droit à aucune considération, et le général Sarrazin, quoique la mort ne l'ait pas encore arraché à l'infamie qui le flétrit, ne doit s'attendre qu'à l'inflexible impartialité. Toute sévère qu'elle soit, ce serait donner au vice de funestes encouragemens que d'user d'égards envers un grand coupable en esquissant les prin

cipaux traits de sa vie et l'histoire du procès criminel qui a mis le terme à son existence civile.

SARRAZIN (Jean) est né au bourg de Saint-Sylvestre, département de Lot-et-Garonne, le 15 août 1770, de parens cultivateurs. A l'âge de seize ans il s'engagea dans le 5e régiment de dragons, et fut réformé l'année suivante (1787), le 14 septembre. A cette époque il alla s'établir à la Réole, département de la Gironde, où il exerça la profession de maître de mathématiques, et obtint ensuite, le 1er septembre 1790, la place de professeur de mathématiques à l'école de Corrèze, que dirigeaient alors des Bénédictins. Cette circonstance fit dire plus tard qu'il avait été moine, mais ce fait n'est nullement prouvé. Cependant, deux ans après, il quitta cet emploi pour suivre le mouvement général qui dirigeait alors presque tous les Français vers les frontières, et il se rendit à l'armée du Nord. Si l'on en croit Sarrazin, il fut alors appelé à Châlons, pour l'instruction des aspirans à l'école d'artillerie, et il se trouvait dans cette place lorsque, après la prise de Verdun, les habitans de Châlons formèrent un bataillon dont il fut nommé adjudant-major, fonctions qu'il remplit jusqu'au 20 septembre 1792, que ce bataillon fut dissous. Mais ce qu'il y a de bien certain, c'est que Sarrazin fut fait à Melz lieutenant d'une compagnie franche, dite de SaintMaurice, à la fin de 1792, et capitaine de la même compagnie le 18 mars 1793; c'était alors la pluralité des voix qui décidait les nominations.

Il paraît que, dès son entrée au service, Sarrazin donnait déjà des marques de cet esprit inquiet et tracassier

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