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Car cet amour et ce culte ne sauraient conserver leur beauté et leur mérite s'ils ne sont bien réglés; et sans cela ils sont plutôt injurieux à cette sainte Mère, que respectueux envers elle. L'auteur de ce petit livre, bien loin d'y soutenir aucune erreur, y garde une telle retenue et une telle précaution, pour éviter les égarements de ceux qui ont erré en cette matière, les uns par excès et les autres par défaut, que l'on doit espérer que ses sentiments serviront beaucoup, s'il plaît à Dieu, à ôter à la plupart de nos hérétiques un des obstacles qui les empêchent de retourner dans le sein de l'Église, à établir parmi les fidèles une véritable et solide dévotion, et à détruire celle qui est fausse et mal réglée; et enfin à bannir la vaine confiance dont quelques âmes impénitentes se flattent malheureusement. Et comme le simple peuple est plus sujet à tomber dans cette illusion, qui doit être d'autant plus combattue qu'elle est plus déplorable, tout ce qu'il y a de gens de bien trouveront sans doute cette version très-utile, ou même très-nécessaire, et elle est certes d'autant plus estimable qu'elle ne cède en rien à son original, pour ne pas dire qu'elle le surpasse même en quelque manière. C'est là mon sentiment. Donné à Lille, le septième mars 1674.

JACQ. BOUDArt.

GILBERT DE CHOISEUL DU PLESSY-PRASLAIN, PAR LA PROVIDENCE DIVINE ÉVÊQUE DE TOURNAY, A TOUS CEUX QUI CES PRÉSENTES VERRONT, SALUT ET BÉNÉDICTION.

Vu les approbations des théologiens, nous avons permis et permettons l'impression du livre intitulé : Avis salutaires de la bienheureuse Vierge Marie à ses dévots indiscrets.

Et parce que la matière nous semble importante et délicate, quoique nous ayons grande confiance en la vertu, piété et suffisance de ces approbateurs, nous avons néanmoins été bien aises de juger de ce livre par nous-même; et l'ayant lu et examiné sérieusement, non-seulement nous n'y avons

rien découvert qui soit contre la foi, les bonnes mœurs ou la dévotion envers la très-sainte Vierge, mais nous l'avons trouvé très-conforme à l'esprit de l'Église et capable d'instruire les simples qui, mettant leur confiance dans des choses toutes matérielles, s'assurent vainement de leur salut sans faire ce que Dieu nous commande; d'ouvrir les yeux aux impénitents, qui appuient leurs espérances sur une fausse dévotion, en demeurant cependant dans l'habitude de leurs crimes, et présumant que la Vierge ou les autres saints qu'ils s'imaginent honorer, et qu'ils outragent en effet, obligeront Dieu de leur donner la grâce de la conversion dans les derniers moments de leur vie, après l'avoir employée tout entière à le déshonorer et à l'offenser; et enfin de détromper nos frères séparés, qui calomnient l'Église en l'accusant d'idolâtrie. L'auteur de cet écrit ayant très-ingé nieusement et très-solidement démêlé l'usage légitime des images, la vénération que nous devons avoir pour les reliques, les sentiments que les vrais chrétiens ont en invoquant les saints, d'avec les excès de toutes ces choses qu'on impute très-injustement et très-faussement à l'Église catholique, qui ne se sert des images que par rapport à leurs prototypes, n'honore les reliques que parce qu'elles ont été le temple du Saint-Esprit, pendant que les saints ont été sur la terre, et qu'elles le doivent être encore après leur résurrection, et n'invoque les saints que pour obtenir par le secours de leurs prières les grâces de notre seul et souverain médiateur Jésus-Christ, au nom duquel uniquement nous devons être sauvés. Dans ces vues, nous autorisons ce livre, non-seulement quant à l'original latin, mais encore quant à la traduction française, qui est fidèle, et que nous jugeons devoir être utile, et nous en recommandons la lecture, l'usage et la pratique à tous les fidèles de notre diocèse. Donné à Tournay le 13 mars 1674.

Et plus bas :

GILBERT,
Évêque de Tournay.

Par monseigneur, DESCHAMPS, Secrétaire.

LETTRE DE MONSEIGNEUR L'ARCHEVÈQUE DE COLOGNE, PRINCE ET ÉLECTEUR DU SAINT-EMPIRE, A NOSSEIGNEURS LES CARDINAUX DE LA CONGREGATION DU SAINT-OFFICE, TOUCHANT LE LIVRE INTITULÉ : AVIS SALUTAIRES DE LA BIENHEUREUSE VIERGE A SES DÉVOTS INDISCRETS.

MESSEIGNEURS,

Nous avons appris qu'on a déféré à vos Éminences un petit livre intitulé les Avis salutaires de la bienheureuse Vierge Marie à ses dévots indiscrets, qui a été approuvé avec éloge par monseigneur l'évêque de Mysie, notre suffragant, et par notre vicaire général, et autres des principaux et des plus doctes de notre clergé séculier. Nous savons aussi que monseigneur l'évêque de Tournay, et monseigneur l'évêque de Castorie, qui est vicaire apostolique dans les Provinces-Unies, et autres personnes illustres et qui ont servi l'Église, lui ont donné leurs approbations, et ont jugé que ce livre, non-seulement ne doit point être flétri par aucune censure, mais qu'il est trèsutile à l'Église, et qu'il avertit et persuade avec beaucoup de discrétion d'éviter les erreurs et certains abus ou excès que les prédicateurs et autres personnes indiscrètes et peu éclairées commettent souvent à l'égard du culte de la Vierge, au grand scandale de l'Église, et contre les sentiments qu'elle nous a déclarés dans ses conciles généraux et ses autres décrets. Ces indiscrétions jettent dans l'erreur le peuple qui n'est pas instruit, et donnent aux hérétiques occasion de faire cette injure à l'Église, que de dire qu'elle rend à la créature l'honneur qui n'est dû qu'à Dieu seul, ce qui empêche la conversion de plusieurs on estime donc qu'on ne peut condamner ou défendre ce livre, sans exposer l'Église à de très-grands périls, et qu'on a sujet de craindre, 1o que cette condamnation ne confirme dans leur erreur les simples et les moins éclairés; 2o que les hérétiques n'en prennent occasion de justifier leurs calomnies, et de faire croire que l'Église

approuve les erreurs et les abus qu'elle condamne et déteste; 3° qu'il ne s'élève des contestations scandaleuses entre ceux qui ont approuvé ce livre, et ceux qui le condamnent; ce que nous craignons fort qu'il n'arrive entre les séculiers et les réguliers de notre clergé; 4o que des personnes de piété, entre lesquelles celui qu'on dit être l'auteur de ce petit livre mérite bien d'être considéré, qui s'appliquent à servir l'Église et à rappeler dans son sein ceux que l'hérésie en a séparés, ne tombassent dans la confusion et ne fussent détournés de leur application par la condamnation de ce livre. Nous avons donc tout sujet de croire que Vos Éminences, qui sont employées au gouvernement de l'Église, trouveront bon que pour satisfaire à notre charge, qui nous oblige à en prendre une partie du soin, et de veiller sur notre diocèse, nous leur ayons proposé toutes ces raisons pour être plus mûrement considérées et examinées, en les priant de ne rien prononcer contre ce livre sans nous avoir ouïs, vous assurant au reste de nos services, et vous souhaitant un surcroît de prospérités. Donné à Cologne ce 3 juin 1674.

Il paraît que les marianistes extorquèrent à Rome une condamnation, le 22 juin 1675. Elle n'ôte rien au mérite des Avis, qui n'en restent pas moins salutaires. On s'étonne que Bourdaloue les ait attaqués. Fut-ce de son propre mouvement, ou agit-il sous l'influence de ses confrères, les Jésuites? Quoi qu'il en soit, forcé de s'appuyer sur les textes apocryphes dont j'ai parlé et sur les écarts où ils avaient jeté saint Bernard, il fait pitié.

FIN DU PREMIER LIVRE.

LIVRE II.

Pouvoirs gouvernementaux.

CHAPITRE I.

Pouvoirs gouvernementaux.

Maintenir la doctrine, la discipline, se donner des pasteurs, tel est l'objet du gouvernement de l'Église. Elle concourt tout entière à se gouverner, comme elle concourt tout entière à régénérer l'homme car les paroles de Jésus-Christ, qui lui communiquent ce dernier pouvoir, lui communiquent l'autre.

Reprenons ces paroles: Comme mon Père m'a envoyė, je vous envoie. Il souffle sur eux, et il ajoute: Recevez le SaintEsprit. Les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez, et ils seront retenus à ceux à qui vous les retiendrez '. Que dit Jésus-Christ? qu'il envoie les apôtres, comme il est lui-même envoyé par son Père. Il les envoie donc avec tous ses pouvoirs, par conséquent avec celui de gouverner comme avec celui de régénérer.

Tu es Pierre, sur cette Pierre je bâtirai mon Église, et les portes de l'enfer ne prévaudront point contre elle. Je te donnerai les clefs du royaume des cieux: tout ce que tu lieras sur la terre, sera lié dans le ciel, et tout ce que tu délieras sur la terre, sera délié dans le ciel 2. Pierre venait de confesser la divinité de Jésus-Christ, c'est-à-dire d'enseigner le genre humain. Jésus-Christ lui déclare qu'il bâtira l'Église sur

1. Joan. XX, 22. 2. Matth. XVI, 18.

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