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civils et militaires de notre maison, resteront de service auprès de sa haute personne.

» Ainsi fait et conclu le présent acte, sous notre signature; lequel acte sera porté à la connaissance du Corps législatif, où il sera déposé; de quoi seront faites les expéditions et publications nécessaires, etc. Signé Louis. »

RAPPORT fait à l'empereur par le ministre des relations extérieures.

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« Paris, le 9 juillet 1810.

Sire, j'ai l'honneur de mettre sous les yeux de Votre Majesté un acte du roi de Hollande, en date du 3 de ce mois, par lequel ce monarque déclare qu'il abdique la couronne en faveur de son fils aîné; laisse, conformément à la Constitution, la régence à la reine, et établit un conseil de régence composé de ses ministres.

» Un pareil acte, Sire, n'aurait dû paraître qu'après avoir été concerté avec Votre Majesté; il ne peut avoir de force sans son approbation. Votre Majesté doit-elle confirmer la disposition prise par le roi de Hollande ?

» La réunion de la Belgique à la France a détruit l'indépendance de la Hollande; son système est devenu nécessairement celui de la France; elle est obligée de prendre part à toutes les guerres maritimes qu'a la France, comme si elle était une de ses provinces. Depuis la création de l'arsenal de l'Escaut et la réunion à la France des provinces composant les départemens des Bouches-du-Rhin et des Bouches-de-l'Escaut, l'existence commerciale de la Hollande est devenue incertaine. Les négocians d'Anvers, de Gand, de Middelbourg, qui peuvent sans entraves étendre leurs spéculations jusqu'aux extrémités de l'Empire, dont ils font partie, doivent nécessairement faire le commerce que faisait la Hollande. Déjà Rotterdam et Dordrecht sont à la veille de leur ruine, ces villes perdant le coinmerce du Rhin, qui va directement, par la nouvelle frontière, daus les ports de l'Escaut en traversant le Biesbooch. La partie de la Hollande encore étrangère à l'Empire est privée des avantages dont jouit la partie qui y est réunie. Obligée cependant de faire cause commune avec la France, la Hollande supportera les charges de cette association sans en recueillir les bienfaits.

» La Hollande est accablée sous le poids de sa dette publique, qui s'élève de quatre-vingt-cinq à quatre-vingt-dix millions, c'est à dire à un quart de plus que la dette de tout l'Empire réuni; et si on projetait une réduction par gouvernement du pays, il ne serait pas en son pouvoir de donner une garantie de l'inviolabilité de cette disposition

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et de sa fixité, puisque cette dette, même réduite à trente millions, serait encore au-dessus des moyens et des forces réelles de ce pays. On estime que la Hollande paie le triple de ce que paie la France. Le peuple gémit sous le poids de vingttrois espèces de contributions diverses; la nation hollandaise succombe sous ses contributions; elle ne peut plus les payer. » Et cependant les dépenses nécessaires du gouvernement exigent que le fardeau soit augmenté. Le budget de la marine ne s'est composé en 1809 que de trois millions de florins, qui ont été à peine suffisans pour solder les administrateurs, les états majors et le corps de la marine, et entretenir les arsenaux, mais qui n'ont pas permis l'armement d'un seul vaisseau de guerre. Pour satisfaire aux armemens qui ont été ordonnés en 1810, et qui sont le minimum de la force navale propre à la défense de la Hollande, il faudra le triple de cette somme. Le budget de la guerre a fourni à peine à l'entretien des forteresses et de seize bataillons; et pendant que deux départemens de cette importance sont si loin d'avoir ce qui leur est nécessaire pour soutenir l'honneur et la dignité de l'indépendance, l'intérêt de la dette publique a cessé d'être payé ; il est arriéré de plus d'un

an et demi.

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Si, dans un tel état de choses, Votre Majesté maintient les dernières dispositions, en donnant ainsi à la Hollande un gouvernement provisoire, elle ne fait que prolonger sa douloureuse agonie. Si le gouvernement d'un prince dans la force de l'âge a laissé ce pays dans un tel état de souffrance, que pourrait-il espérer d'une longue minorité ? Il ne peut donc être sauvé que par un nouvel ordre de choses. Le temps de la force et de la prospérité de la Hollande a été celui où elle faisait partie de la plus grande monarchie qui fût alors en Europe. La réunion au grand Empire est le seul état stable où la Hollande puisse désormais se reposer de ses souffrances et de ses longues vicissitudes, et retrouver son ancienne prospérité.

» Ainsi Votre Majesté doit prononcer cette réunion, pour l'intérêt, je dirai pour le salut de la Hollande; elle doit s'associer à nos biens, comme elle est associée déjà à nos maux. Mais un autre intérêt indique encore plus impérieusement à Votre Majesté la conduite qu'elle doit tenir.

» La Hollande est comme une émanation du territoire de la France; elle est le complément de l'Empire: pour posséder le Rhin tout entier, Votre Majesté doit aller jusqu'au Zuyderzée. Alors tous les cours d'eau qui naissent dans la France, ou qui baignent la frontière, lui appartiendront jusqu'à la mer. Laisser dans des mains étrangères le débouché de nos rivières, c'est, Sire, borner votre puissance à une monarchie mal limitée, au

lieu d'élever un trône impérial : laisser dans des mains étrangères les embouchures du Rhin, de la Meuse, de l'Escaut, c'est lui remettre votre propre législation; c'est rendre tributaires du possesseur de ces embouchures le commerce et les manufactures de vos états ; c'est admettre une influence étrangère sur ce qui importe le plus au bonheur de vos sujets. La réunion de la Hollande est encore nécessaire pour compléter le système de l'Empire, surtout depuis les ordres du conseil britannique de novembre 1807. Deux fois depuis cette époque Votre Majesté a été obligée de fermer ses douanes au commerce hollandais, et par cette mesure la Hollande a été isolée de l'Empire et du continent. Après la paix de Vienne Votre Majesté eut la pensée d'exécuter la réunion: elle en fut détournée par des considérations qui cessent d'exister; elle se contenta à regret du traité du 14 mars, qui a aggravé les maux de la Hollande sans remplir aucune des vues de Votre Majesté. Aujourd'hui la barrière qui l'arrêtait s'est levée d'ellemême : Votre Majesté doit à son Empire de profiter de cette circonstance, qui amène si naturellement la réunion; il ne peut y en avoir de plus favorable à l'exécution de ses vues.

» Votre Majesté a étabii à Anvers un puissant arsenal: l'Escaut, étonné, s'enorgueillit de voir déjà vingt vaisseaux du premier rang portant le pavillon impérial, et protégeant ses rives, à peine fréquentées autrefois par quelques bâtimens de commerce. Mais les vastes projets de Votre Majesté à cet égard ne peuvent être remplis dans leur totalité que par la réunion de la Hollande; elle est nécessaire au complément d'une si merveilleuse création. Avec l'énergie du gouvernement de Votre Majesté, l'année prochaine ne sera pas finie, que, par l'emploi des ressources maritimes que fournit la Hollande, une escadre de quarante vaisseaux et un grand nombre de troupes de ligne pourront être réunis sur l'Escaut et au Texel pour disputer les mers au gouvernement britannique, et repousser ses tyranniques prétentions.

» Ainsi ce n'est pas l'intérêt seul de la France qui exige la réunion; c'est aussi celui de l'Europe continentale, qui demande à la France de réparer les pertes de sa marine pour combattre sur son propre élément l'ennemi de la prospérité de l'Europe, dont il n'a pu étouffer l'industrie, mais dont il gêne les communications par l'excès de ses prétentions et le grand nombre de ses vaisseaux. Enfin la réunion de la Hollande accroît l'Empire en resserrant ses frontières, qu'elle protége, et en augmentant la sécurité de ses arsenaux et de ses chantiers; elle l'enrichit d'un peuple industrieux, économe, laborieux, qui servira à la fortune publique en travaillant à sa

fortune particulière : il n'en est pas de plus estimable et de plus propre à tirer parti des avantages qu'offrent à l'industrie les lois libérales de votre gouvernement; la France ne peut faire une plus précieuse acquisition.

» La réunion de la Hollande à la France est la suite nécessaire de la réunion de la Belgique ; elle complète l'Empire de Votre Majesté, et l'exécution de son système de guerre, de politique et de commerce. C'est un premier pas, mais un pas nécessaire vers la restauration de sa marine; enfin c'est le coup le plus sensible que Votre Majesté puisse porter à l'Angle

terre.

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Quant au jeune prince qui est si cher à Votre Majesté, il a déjà ressenti les effets de sa bienveillance particulière; elle lui a donné le grand duché de Berg (1); il n'a donc besoin d'aucun nouvel établissement.

» J'ai l'honneur de proposer à Votre Majesté le projet de décret ci-joint. Signé CHAMPAGNY, duc de Cadore.»

Ce projet de décret, adopté le même jour par l'empereur, portait entr'autres dispositions : « La Hollande est réunie à l'Empire. — » La ville d'Amsterdam sera la troisième ville de l'Empire. - Les » officiers de terre et de mer, de quelque grade qu'ils soient, sont >> confirmés dans leurs emplois ; il leur sera délivré des brevets signés » de notre main. La garde royale sera réunie à notre garde impć>> riale. - Les denrées coloniales qui se trouvent actuellement en >> Hollande resteront à leurs propriétaires, moyennant un droit de cinquante pour cent de la valeur de ces marchandises. Le duc » de Plaisance, architrésorier de l'Empire, se rendra à Amsterdam > en qualité de notre lieutenant général; il présidera le conseil des » ministres, et aura l'expédition des affaires. Ses fonctions cesse»ront au 1er janvier 1811, époque à laquelle l'administration fran» çaise entrerà en exercice. » (Le maréchal Oudinot s'empara immédiatement d'Amsterdam.)

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DIRE de l'empereur à son neveu le prince Napoléon-Louis, grand duc de Berg. Saint-Cloud, le 20 juillet 1810.

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Venez, mon fils, je serai votre père; vous n'y perdrez

(4) Murat, en recevant à Baïonne la couronne de Naples, avait rendu la souveraineté du grand duché de Berg; et Napoléon, par lettres patentes du 3 mars 1809, en avait disposé en faveur du fils ainé de son frère le roi de Hollande.

» La conduite de votre père afflige mon cœur; sa maladie seule peut l'expliquer. Quand vous serez grand vous paierez sa dette et la vôtre. N'oubliez jamais, dans quelque position que vous placent ma politique et l'intérêt de mon Empire, que vos premiers devoirs sont envers moi, vos seconds envers la France; tous vos autres devoirs, même envers les peuples que je pourrais vous confier, ne viennent qu'après.

SÉNAT.

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Séance du 10 décembre 1810, présidée par le prince archichancelier.

MESSAGE de l'empereur.

Sénateurs, j'ordonne à mon ministre des relations extérieures de vous faire connaître les différentes circonstances qui nécessitent la réunion de la Hollande à l'Empire.

» Les arrêts publiés par le conseil britannique en 1806 et 1807 ont déchiré le droit public de l'Europe. Un nouvel ordre de choses régit l'univers. De nouvelles garanties m'étant devenues nécessaires, la réunion des embouchures de l'Escaut, de la Meuse, du Rhin, de l'Ems, du Weser et de l'Elbe à l'Empire, l'établissement d'une navigation intérieure avec la Baltique, m'ont paru être les premières et les plus importantes. » J'ai fait dresser le plan d'un canal qui sera exécuté avant cinq ans, et qui joindra la Baltique à la Seine.

» Des indemnités seront données aux princes qui pourront se trouver froissés par cette grande mesure, que commande la nécessité, et qui appuie sur la Baltique la droite des frontières de mon Empire.

» Avant de prendre ces déterminations j'ai fait pressentir l'Angleterre; elle a su que le seul moyen de maintenir l'indépendance de la Hollande était de rapporter ses arrêts du conseil de 1806 et 1807, ou de revenir enfin à des sentimens pacifiques. Mais cette puissance a été sourde à la voix de ses intérêts, comme au cri de l'Europe. •

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J'espérais pouvoir établir un cartel d'échange des prisonniers entre la France et l'Angleterre, et par suite profiter du séjour des deux commissaires, à Paris et à Londres, pour arriver à un rapprochement entre les deux nations. Mes espérances ont été déçues; je n'ai reconnu dans la manière de négocier du gouvernement anglais qu'astuce et mauvaise foi.

» La réunion du Valais est une conséquence prévue des immenses travaux que je fais faire depuis dix ans dans cette partie des Alpes. Lors de mon acte de médiation, je séparai le Valais

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