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intérieure pour les plus grands vaisseaux a été perfectionnée; de sorte que les rades de l'Isle-d'Aix, du Saumouard, de Talemont, et les rades de la Gironde, forment pour ainsi dire un même port.

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Après Toulón, la Spezzia est le plus beau port de la Méditerranée. Des fortifications du côté de terre et du côté de mer devenaient nécessaires pour y mettre nos escadres en sûreté. Ces fortifications offrent déjà une résistance convenable.

Ainsi, à peine six ans se sont écoulés depuis que le système permanent de guerre maritime a été arrêté, que les ports du Texel, de l'Escaut, de Cherbourg, de Brest, de Toulon et de la Spezzia sont assurés, et offrent, sous le point de vue maritime et militaire, toutes les propriétés désirables.

» En même temps qu'on construisait et qu'on fortifiait les ports, on pensa à établir des chantiers pour construire des vaisseaux. Sous l'ancienne dynastie nous étions réduits à moins de vingt-cinq.

» Brest pouvait tout au plus offrir les moyens de radoub. On dut renoncer à tout projet de construction, ou établir sur l'Escaut un chantier où vingt vaisseaux à trois ponts, de quatre-vingts et soixante-quatorze, pussent se construire à la fois. Ce chantier, approvisionné par le Rhin et la Meuse, et par tous les affluens du continent de la France et de l'Allemagne, est constamment pourvu, abondamment et à bon

marché.

» On reconnut la possibilité de construire, sur les chantiers d'Amsterdam et de Rotterdam, des frégates et des vaisseaux de soixante-quatorze, de notre modèle, en attendant que les chantiers et les établissemens fussent formés sur Niew-Dypp.

» Sur les chantiers de Cherbourg, on construit des vaisseaux à trois ponts de quatre-vingts et de soixante-quatorze. » On construit des vaisseaux à Gènes et à Venise, profitant ainsi de toutes les ressources de l'Albanie, de l'Istrie, du Frioul, des Alpes-Juliennes et des Apennins.

» Les chantiers de Lorient, de Rochefort et de Toulon, continuent à avoir l'activité dont ils sont susceptibles, et d'employer tous les matériaux que leur offrent les bassins des rivières destinées à les alimenter.

» En peu d'années nous serons arrivés à avoir cent cinquante vaisseaux, dont douze à trois ponts, et un plus grand nombre de frégates.

» La marine française, dans la plus grande prospérité, n'a jamais eu plus de cinq vaisseaux à trois ponts.

» Nous pouvons facilement construire et armer quinze à vingt vaisseaux de haut bord par an.

» L'administration a donc réussi sous le point de vue des constructions; mais le plus difficile restait à faire. Les gens de l'art, après avoir médité sur les ressources et l'étendue de l'Empire, avaient compris qu'effectivement le gouvernement ayant à sa disposition, par les fleuves qui alimentent nos ports, presque tous les bois de l'Europe, et d'immenses richesses en fer et en chanvre, il était possible d'avoir une marine aussi nombreuse qu'on le voudrait, et qu'on ne serait arrêté que par l'étendue des sacrifices pécuniaires qu'on voudrait faire pour l'accroissement de cette partie de nos forces.

» Mais on se demandait où trouver les matelots pour monter ces escadres. Des camps, des exercices forment en peu d'années une armée de terre; mais où trouver de quoi remplacer des camps et des exercices pour les troupes de mer?

» Les institutions de Colbert et les principes qu'il avait posés pour le recrutement des armées navales étaient presque nuls; notre commerce maritime était excessivement réduit. On avait admis comme un axiome cette maxime point de commerce, point de marine militaire; cependant c'était un cercle vicieux; car on aurait pu dire tout aussi justement: point de marine militaire, point de commerce.

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L'administration conçut alors l'idée de recruter les armées navales de la même manière que l'armée de terre, d'avoir recours à la conscription sans abandonner les ressources que pouvait produire l'inscription maritime.

» Les départemens maritimes furent en partie exemptés de la conscription de l'armée de terre, et toute leur jeunesse appelée à la conscription maritime.

»Les hommes de mer les plus expérimentés voulaient qu'on appelât cette conscription dès l'âge de dix à douze ans, prétendant qu'il était impossible de faire un homme de mer d'un homme formé.

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Mais comment concevoir la possibilité d'entasser dans des vaisseaux soixante ou quatre-vingt mille enfans ?

» Les dépenses qu'il fallait faire pour leur instruction pendant dix ans, mais surtout la consommation d'hommes, devenaient effrayantes.

» On prit un terine moyen; on appela à la conscription maritime les jeunes gens de seize à dix-sept ans. On pouvait espérer qu'après quatre ou cinq années de navigation, lorsqu'ils seraient parvenus à l'âge de vingt-un ou vingt-deux ans, on aurait des matelots habiles.

>> Mais comment faire naviguer tant de jeunes gens, lorsque la mer nous était presque partout interdite ?

» On construisit des flottilles. Cinq ou six cents bâtimens, bricks, chaloupes canonnières, goëlettes, naviguèrent sur le Zuyderzée, l'Escaut, les rades de Boulogne, de Brest et de Toulon, protégèrent et alimentèrent notre cabotage.

» En même temps on arma nos escadres dans les ports de Toulon, de la Charente, de l'Escaut et du Zuyderzée. Les équipages, toujours consignés à bord, évoluant en présence de l'ennemi, ont rempli l'espérance qu'on en avait conçue. Les conscrits se sont formés. Les jeunes gens de dix-huit ans après cinq années de navigation, ont aujourd'hui atteint leur vingt-troisième ou vingt-quatrième année, et servent dans les hautes manoeuvres avec une agilité et une adresse remarquables; et nos escadres évoluent avec autant de promptitude et de précision qu'à aucune époque de l'histoire de notre marine.

Depuis cinq ans que ce système a été adopté, quatrevingt mille jeunes gens tirés de la conscription sont venus augmenter notre population maritime.

» Il a fallu bien de la constance pour se résoudre à tous les sacrifices qu'un pareil système nous a coûté.

» Pendant les premières années, les avaries étaient désespé→ rantes; chaque sortie nous coûtait autant qu'un combat; mais progressivement les abordages ont cessé, les avaries ont diminué, et aujourd'hui nos escadres n'en éprouvent pas plus qu'il n'est ordinaire d'en éprouver dans les évolutions maritimes.

» Les officiers se forment le coup d'œil dans les manœuvres nautiques : ils ne font presque point de sorties qu'ils ne voient l'ennemi. Nous devons reconnaître que nos équipages, passant ainsi des années sans quitter le bord, comme s'ils étaient en pleine mer, méritent un témoignage éclatant de satisfaction. C'est par des exercices qu'ils se forment sans doute, mais les fatigues n'en sont pas moins pénibles.

» Deux vaisseaux, le Tourville et le Duquesne, stationnés dans les rades de Brest et de Toulon, offrent une instruction à la fois pratique et théorique aux jeunes gens destinés à entrer comme officiers dans la marine.

» Enfin, sur nos cent vaisseaux, nous en avons aujourd'hui soixante-cinq armés, équipés, approvisionnés pour six mois, constamment en partance, appareillant tous les jours, et dans une situation telle, qu'aucun ne sait, au moment où on leve l'ancre, si c'est pour un exercice ou pour une expédition lointaine.

» La conscription maritime produit tous les ans vingt mille jeunes gens. L'inscription des pêcheurs produit aussi des resSources importantes.

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» Enfin, au moment où la paix continentale aurait rendu disponible la conscription de tout l'Empire, nous pourrions à volonté accroître la conscription maritime.

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Les garnisons des vaisseaux étaient tirés de l'armée de

» Une partie du canonnage à bord se faisait par le corps impérial des canonniers de la marine.

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L'administration de la marine a désiré que l'un ou l'autre de ces corps fût rendu à l'armée de terre, et que le service fût fait par des marins propres aux manœuvres hautes comme aux manœuvres basses, qui pussent également monter au haut des mâts, faire la manoeuvre du canon, et servir comme garnison de vaisseaux. L'avantage de ce système était évident; c'était doubler uos gens de mer, et nous mettre à même un jour, en envoyant des hommes de garnison sur nos escadres avec quelques canonniers, de doubler les équipages. Les circonstances actuelles, où nous avons à soutenir deux guerres continentales, ont fait apprécier l'avantage d'avoir dans l'armée quarante mille vieux soldats propres au service de terre comme au service de

mer.

>> C'est leur changement de destination qui a rendu nécessaire l'appel de la conscription maritime de 1814.

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L'Angleterre peut avoir le nombre de vaisseaux et de troupes de terre qu'elle voudra; elle peut donner à son commerce la direction qui lui convient; mais nous prétendons rester dans les mêmes droits. Si elle prétend nous imposer la condition secrète de détruire nos escadres, de les réduire à trente vaisseaux, ou de souscrire à des traités de commerce non conformes à nos intérêts, une telle paix ne sera signée par l'empereur, ni désirée par aucun Français.

jamais

» Nous désirons la paix; mais si nous ne pouvions l'avoir qu'à ces conditions, il faudrait bien continuer la guerre, et chaque année de guerre nous accroîtrions nos forces navales sans que la supériorité de l'ennemi pût nous en empêcher.

» L'armée de terre se compose de la garde impériale, qui comprend vingt régimens d'infanterie et quarante-quatre escadrons ; de cent cinquante-deux régimens de ligne, et de trente-sept d'infanterie légère, faisant cent quatre-vingtneuf régimens d'infanterie ou neuf cent quarante-cinq bataillons français; de quinze régimens d'artillerie; de trente bataillons du train, de quatre-vingt-dix régimens de cavalerie, à huit compagnies chacun, indépendamment de quatre régimens suisses, de six régimens étrangers, et de plusieurs bataillons coloniaux.

» Je ne vous parlerai point, messieurs, d'événemens mili

taires ni politiques; je ne pourrais rien ajouter à ce qui est à votre connaissance et à ce que l'empereur vous a dit en peu de mots, mais avec tant de profondeur.

» Il m'a paru que le simple Exposé de notre Situation intérieure, appuyée sur des états et sur des chiffres, l'Exposé de notre Situation maritime et militaire, étaient suffisans pour faire comprendre l'immensité de nos ressources, la solidité de notre système, et les grâces que nous avons à rendre à un gouvernement vigilant dont les travaux sont constantment consacrés à tout ce qui est grand, et utile à la gloire de l'Empire.

» Le compte de l'administration des finances, qui vous sera incessamment communiqué, vous fera connaître leur situation prospère ; ce que je pourrais en dire serait insuffisant et incomplet.

» La ferme résolution du souverain de protéger également toutes les parties de son Empire, et de marcher constamment dans le même système d'économie et de grande administration, ne peut que redoubler, s'il est possible, la confiance et l'amour que lui portent tous ses sujets.

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ADRESSE du Corps législatif à l'empereur, présentée par M. le comte de Montesquiou, président. Le 23 mars 1813.

« Sire, vos fidèles sujets les députés des départemens au Corps législatif nous ont chargés de déposer au pied du trône le nouvel hommage de leur reconnaissance et de leur fidélité. » Tandis que de grands intérêts politiques retenaient Votre Majesté si loin de ses Etats, elle était toujours présente à leur pensée; ils s'associaient par leurs vœux à ses nobles travaux dont leurs enfans partageaient l'honneur et les périls. Aujourd'hui, comme alors, tous nos cœurs répondent au vôtre, et l'on dirait que nos triomphes n'ont été suspendus que pour mieux faire connaître à l'Europe l'énergie de votre caractère, l'étendue de nos ressources et notre confiance dans Votre Majesté.

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"Oui, Sire, les divers peuples de ce vaste Empire, naguère divisés de mœurs et d'intérêts, réunis par l'honneur et la fidélité, ne rivalisent plus que de zèle et de dévouement pour Votre Majesté. Repoussant jusqu'à l'idée d'une paix qui pourrait flétrir l'honneur national, aucuns sacrifices ne leur coûteront pour maintenir l'intégrité de leur territoire, celui de vos alliés, la prépondérance que vous leur avez acquise, et pour

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