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préliminaires d'une pacification générale. (Voyez la note de M. de Saint-Aignar au § 1er du n° XIII. ) L'ambassadeur anglais, le lord Aberdeen, était présent à cette conférence. Remarquez bien ce dernier fait, sénateurs; il est important.

» M. le baron de Saint-Aignan, chargé de transmettre à sa cour tout ce qu'il avait entendu, s'en est acquitté fidèlement. Quoique la France eût droit d'espérer d'autres propositions, l'empereur a tout sacrifié au désir sincère de la paix.

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» Il a fait écrire à M. le prince de Metternich, par M. le duc de Bassano, qu'il admettait pour base de la négociation le principe général contenu dans le rapport confidentiel de M. de Saint-Aignan.

» M. le prince de Metternich, en répondant à M. le duc de Bassano, a paru croire qu'il restait un peu de vague dans l'adhésion donnée par la France.

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Alors, pour lever toute difficulté, M. le duc de Vicence, après avoir pris les ordres de Sa Majesté, a fait connaître au cabinet d'Autriche qu'elle adhérait aux bases générales et sommaires communiquées par M. de Saint-Aignan. La lettre 'de M. le duc de Vicence est du 2 décembre; elle a été reçue 5 du même mois. M. le prince de Metternich n'a répondu que le 10. Ces dates doivent être soigneusement relevées; vous jugerez bientôt qu'elles ne sont pas sans quelque conséquence.

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» On peut concevoir de justes espérances pour la paix en lisant la réponse de M. le prince de Metternich à la dépêche de M. le duc de Vicence seulement, à la fin de sa lettre, il annonce qu'avant d'ouvrir la négociation il faut en conférer avec les alliés. Ces alliés ne peuvent être que les Anglais; or leur ambassadeur assistait à l'entretien dout M. de SaintAignan avait été témoin. Nous ne voulons point exciter de défiance; nous racontons.

» Nous avons marqué avec soin la date des dernières correspondances entre le cabinet français et le cabinet autrichien; nous avons dit que la lettre de M. le duc de Vicence avait dû parvenir le 5 décembre, et qu'on n'en avait accusé la réception que le 10.

>> Dans l'intervalle une gazette, aujourd'hui sous l'influence des puissances coalisées, a publié dans toute l'Europe une déclaration qu'on dit être revêtue de leur autorité. Il serait triste de le croire. (Voyez cette DÉCLARATION au § 1er du n° XIII.)

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Cette déclaration est d'un caractère inusité dans la diplomatie des rois ce n'est plus aux rois comme eux qu'ils développent leurs griefs, et qu'ils envoient leurs manifestes; c'est aux peuples qu'ils les adressent. Et par quels motifs adopte

t-on cette marche si nouvelle ? C'est pour séparer la cause des peuples et celle de leur chef, quoique partout l'intérêt social les ait confondues. Cet exemple ne peut-il pas être funeste? Faut-il le donner surtout à cette époque où les esprits, travaillés de toutes les maladies de l'orgueil, ont tant de peine à fléchir sous l'autorité qui les protége en réprimant leur audace? Et contre qui cette attaque indirecte est-elle dirigée? Contre un grand homme qui mérita la reconnaissance de tous. les rois; car en rétablissant le trône de la France il a fermé le foyer de ce volcan qui les menaçait tous.

» Il ne faut pas dissimuler qu'à certains égards ce manifeste extraordinaire est d'un ton modéré cela prouverait que l'expérience des coalitions s'est perfectionnée:

» On s'est souvenu peut-être que le manifeste du duc de Brunswick avait irrité l'orgueil d'un grand peuple : ceux mêmes en effet qui ne partageaient point les opinions dominantes à cette époque, en lisant ce manifeste injurieux, se sentirent blessés dans l'honneur national.

» On a donc pris un autre langage. L'Europe, aujourd'hui fatiguée, a plus besoin de repos que de passions.

» Mais s'il y a tant de modération dans les conseils ennemis, pourquoi, parlant toujours de paix, menacent-ils toujours des frontières qu'ils avaient promis de respecter quand nous n'aurions plus que le Rhin pour barrière?

» Si les ennemis sont si modérés, pourquoi ont-ils violé la capitulation de Dresde? pourquoi n'ont-ils pas fait droit aux nobles plaintes du général qui commandait cette place? » S'ils sont si modérés, pourquoi n'ont-ils pas établi le cartel d'échange conformément à tous les usages de la guerre? » S'ils sont si modérés enfin, pourquoi ces protecteurs des droits des peuples n'ont-ils pas respecté ceux des cantons suisses? Pourquoi ce gouvernement sage et libre, qui s'était déclaré neutre à la face de l'Europe, voit-il dans ce moment ses vallées et ses montagnes paisibles ravagées par tous les fléaux de la guerre?

» La modération n'est quelquefois qu'une ruse de la diplomatie. Si nous voulions employer le même artifice, en attestant aussi la justice et la bonne foi, qu'il nous serait aisé de confondre nos accusateurs par leurs propres armes !

» Cette reine, échappée de la Sicile, et qui d'exil en exil a porté son infortune chez les Ottomans, prouve-t-elle au monde que nos ennemis aient tant de respect pour la majesté royale ? » Le souverain de la Saxe s'est mis à la disposition des puissances coalisées; a-t-il trouvé des actions d'accord avec les paroles? Des bruits sinistres se répandent en Europe; puis

sent-ils ne pas se réaliser! Voudrait-on punir la foi des sermens sur ce front royal vieilli par l'âge et les douleurs, et couronné de tant de vertus?

» Ce n'est point du haut de cette tribune qu'on outragera les gouvernemens qui se permettraient même de nous outrager; mais il est permis d'apprécier à leur juste valeur ces reproches si auciens et si connus, prodigués à toutes les puissances qui out joué un grand rôle depuis Charles-Quint jusqu'à Louis XIV, et depuis Louis XIV jusqu'à l'empereur. Ce système d'envahissement, de prépondérance, de monarchie universelle, fut toujours un cri de ralliement pour toutes les coalitions; et du sein même de ces coalitions, étonnées de leur imprudence, s'éleva souvent une puissance plus ambitieuse que celle dont on dénonçait l'ambition.

» Les abus de la force sont marqués en caractères de sang dans toutes les pages de l'histoire : toutes les nations se sont égarées; tous les gouvernemens ont commis des excès; tous doivent se pardonner.

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Si, comme nous aimons à le croire, les puissances coalisées forment des vœux sincères pour la paix, rien ne s'oppose à son rétablissement.

» Nous avons démontré, par le dépouillement des pièces officielles, que l'empereur veut la paix, et l'achetera même par des sacrifices où sa grande âme semble négliger sa gloire personnelle pour ne s'occuper que des besoins de la nation.

Quand on jette les yeux sur cette coalition, formée d'élémens qui se repoussent; quand on voit le mélange fortuit et bizarre de tant de peuples que la nature a fait rivaux ; quand on songe que plusieurs, par des alliances peu réfléchies, s'exposent à des dangers qui ne sont point une chimère, on ne peut croire qu'un pareil assemblage d'intérêts si divers ait une longue durée.

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N'aperçois-je pas au milieu des rangs ennemis ce prince né avec tous les sentimens français (1), dans le pays où ils ont peut-être le plus d'activité? Le guerrier qui défendit autrefois la France ne peut demeurer longtemps armé contre elle.

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Rappelons-nous encore qu'un monarque du nord, et le plus puissant de tous, mettait naguère au nombre de ses titres de gloire l'amitié du grand homme qu'il combat aujourd'hui.

»Nos regards tombent avec confiance sur cet empereur que tant de nœuds joignent au nôtre, qui nous fit le plus beau don dans une souveraine chérie, et qui voit dans son petit-fils l'héritier de l'Empire français.

(1) Le prince royal de Suède, Bernadote, né à Pau, dans le Béarn.

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» Avec tant de motifs pour s'entendre et se réunir, la paix est-elle si difficile?

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Qu'on fixe tout à l'heure le lieu des conférences; que les plénipotentiaires s'avancent de part et d'autre avec la noble volonté de pacifier le monde; que la modération soit dans les conseils ainsi que dans le langage. Les puissances étrangères elles-mêmes l'ont dit dans cette déclaration qu'on leur attribue, une nation valeureuse ne déchoit pas pour avoir éprouvé à son tour des revers dans une lutte opiniâtre et sanglante, où elle a combattu avec son audace accoutumée.

» Sénateurs, nous n'aurions point rempli les devoirs que vous attendez de votre commission si, en montrant avec une si parfaite évidence les intentions pacifiques de l'empereur, nos dernières paroles ne rappelaient au peuple ce qu'il se doit à lui-même, ce qu'il doit au monarque.

» Le moment est décisif, Les étrangers tiennent un langage pacifique; mais quelques unes de nos frontières sont envahies, et la guerre est à nos portes. Trente-six millions d'hommes ne peuvent trahir leur gloire et leur destinée. Des peuples illustres, dans ce grand différend, ont essuyé de nombreux revers; plus d'une fois ils ont été mis hors de combat; leurs plaies sanglantes ruissèlent encore. La France a reçu aussi quelques atteintes; mais elle est loin d'être abattue : elle peut être fière de ses blessures comme de ses triomphes passés. Le découragement dans le malheur serait encore plus inexcusable que la jactance dans le succès. Ainsi donc, en invoquant la paix, que les préparatifs militaires soient partout accélérés, et soutiennent la négociation. Rallions-nous autour de ce diademe où l'éclat de cinquante victoires brille à travers un nuage passager. fortune ne manque pas longtemps aux nations qui ne se manquent pas à elles-mêmes.

La

l'amour même

» Cet appel à l'honneur national est dicté par de la paix, de cette paix qu'on n'obtient point par la faiblesse, mais par la constance, de cette paix enfin que l'empereur, par un nouveau genre de courage, promet d'accorder au prix de grands sacrifices. Nous avons la douce confiance que ses vœux et les nôtres seront réalisés, et que cette brave nation, après de si longues fatigues et tant de sang répandu, trouvera le repos sous les auspices d'un trône qui cut assez de gloire, et qui ne veut plus s'entourer que des images de la félicité publique.

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RAPPORT fait au Corps législatif, au nom de sa commission extraordinaire, par M. Lainé. - Comité secret du 28 décembre 1813.

<«< Messieurs, la commission extraordinaire que vous avez nommée, en vertu du décret de l'empereur du 20 décembre 1813, vient vous présenter le rapport que vous attendez en ces graves circonstances.

» Ce n'est pas à la commission seulement, c'est au Corps législatif en entier à exprimer les sentimens qu'inspire la communication ordonnée par Sa Majesté des pièces originales du portefeuille des affaires étrangères.

>> Cette communication a eu lieu, messieurs, sous la prési dence de S. A. S. l'archichancelier de l'Empire.

» Les pièces qu'on a mises sous nos yeux sont au nombre de neuf.

» Parmi ces pièces se trouvent des notes du ministre de France et du ministre d'Autriche. qui remontent aux 18 et

21 août.

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On y trouve le discours prononcé par le régent le 5 novembre au parlement d'Angleterre; il y disait :

<< Il n'est ni dans les intentions de Sa Majesté, ni dans celles >> des puissances alliées, de demander à la France aucun sacrifice qui puisse être incompatible avec son honneur et ses justes » droits. »

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» La négociation actuelle pour la paix commence au 10 novembre dernier; elle s'engagea par l'entremise d'un ministre de France en Allemagne. Témoin d'un entretien entre les ministres d'Autriche, de Russie et d'Angleterre, il fut chargé de rapporter en France des paroles de paix, et de faire connaître les bases générales et sommaires sur lesquelles la paix pouvait se négocier.

» Le ministre des relations extérieures, M. le duc de Bassano, a répondu le 16 à cette communication du ministre d'Autriche. Il a déclaré qu'une paix fondée sur la base de l'indépendance générale des nations, tant sur terre que sur mer, était l'objet des désirs et de la politique de l'empereur : en conséquence il proposait la réunion d'un congrès à Manheim.

» Le ministre d'Autriche répondit, le 25 novembre, que Leurs Majestés impériales et le roi de Prusse étaient prêts négocier dès qu'ils auraient la certitude que l'empereur des Français admettrait les bases générales et sommaires précédemment communiquées. Les puissances trouvaient que principes contenus dans la lettre du 16, quoique généralement

les

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