Page images
PDF
EPUB

contrats passés à cet effet n'engageront pas le gouvernement légal, qui n'aura pas à en tenir compte lorsque l'occupation aura pris fin.

Quant aux exploitations agricoles, l'envahisseur en percevra les fruits naturels et industriels, ainsi que le prix des baux à ferme.

Il profitera également du produit des forêts, en se conformant autant que possible aux lois et aux règles de l'administration forestière du pays. Pour les bois taillis, il observera l'ordre et la quotité des coupes, suivant l'aménagement normal. Il devra également se conformer aux époques et aux usages établis pour les parties de bois de haute futaie qui auront été mises en coupes réglées, soit que ces coupes se fassent périodiquement sur une certaine étendue de terrain, soit qu'elles ne portent que sur une certaine quantité d'arbres pris indistinctement sur toute l'exploitation. L'observation stricte de ces règles lui sera parfois difficile, par suite de la retraite ou du refus de concours des agents forestiers: il s'efforcera d'y suppléer. Dans tous les cas, il s'abstiendra rigoureusement de faire procéder à des coupes dévastatrices, et il évitera de compromettre les revenus futurs par une exploitation abusive. Il prendra, en outre, les mesures de surveillance nécessaires pour assurer la répression des délits forestiers, qui seraient commis à la faveur du désordre produit par l'invasion. Enfin, il ne perdra pas de vue que le gouvernement du pays ne reconnaitra

plus tard ni valeur légale ni force obligatoire au contrats passés durant l'occupation et non encore exécutés.

En dehors des biens de rapport dont il vient d'être question, l'Etat possède d'autres immeubles consacrés aux cultes, à la charité, à l'instruction, aux arts et aux sciences; ceux-là sont placés sous un régime spécial, dont les conditions seront indiquées dans la deuxième partie de ce chapitre.

2° Biens mobiliers.

Tous les biens mobiliers de l'Etat, de nature à servir aux opérations de la guerre, peuvent être saisis par l'occupant, qui est fondé à se les approprier sans être tenu à aucune indemnité.

L'occupant peut donc s'emparer de tous les capitaux du gouvernement, c'est-à-dire des sommes disponibles et des valeurs ou créances exigibles, appartenant en propre et exclusivement à l'Etat, tels que le numéraire, les lingots d'or et d'argent, les fonds quelconques, etc. Les capitaux appartenant à des particuliers ou à des associations, et déposés dans les caisses publiques ou administrés par l'Etat, doivent rester intacts et demeurer à l'abri de toute atteinte: tel est souvent le cas des caisses d'épargne ou de retraite.

Les armes ou dépôts d'armes appartenant à l'Etat peuvent être saisis et définitivement conservés par l'occupant. Il en est de même des munitions et dépôts de munitions.

Le matériel des chemins de fer, les télégraphes terrestres, les bateaux à vapeur et autres embarcations, et, en général, tous les moyens de transport, qui appartiennent à l'Etat, sont saisis par l'occupant, comme étant de nature à servir aux opérations de la guerre. L'attribution définitive en sera réglée lors de la paix. Toutefois l'envahisseur est tenu d'apporter dans l'exercice de son droit tous les tempéraments compatibles avec les nécessités militaires et conseillés par l'intérêt des populations. Ainsi, dans le cas où des bateaux serviraient d'unique moyen de communication entre une localité et le reste du pays, il devrait avoir égard aux conditions de la vie publique dans cette localité.

§ II.

AUTRES BIENS PUBLICS.

Outre les propriétés de l'Etat, il existe plusieurs catégories de biens affectés à un usage public: le droit actuel de la guerre a consacré pour eux un régime de faveur.

Ce sont d'abord les biens des communes et des autres corps administratifs ayant qualité de personnes civiles : ils doivent être traités par l'occupant comme la propriété privée, conformément aux règles exposées au chapitre suivant.

Ce sont ensuite tous les biens tenant à l'instruction et aux arts, à la religion, à la charité et à

l'histoire. Dans cette catégorie rentrent les établissements hospitaliers de tous genres, les écoles, les établissements consacrés aux cultes, les musées, les bibliothèques, les archives publiques, les collections historiques, artistiques ou scientifiques, et les objets, monuments et travaux d'art ou de science, qui sont en dehors des musées. Tous ces biens doivent être respectés par l'occupant autant et plus même que la propriété privée; non-seulement les lois de la guerre ne permettent plus que l'occupant se les approprie, mais elles les placent sous sa protection particulière, et lui imposent l'obligation de les préserver de toute atteinte. Toute saisie de biens mobiliers appartenant aux établissements ci-dessus énumérés, toute destruction ou dégradation intentionnelle des monuments historiques, des œuvres d'art ou de science, doit être poursuivie par les juridictions compétentes.

Il ne faut pourtant pas exagérer la portée de ces prescriptions toutes modernes, au point d'y sacrifier les exigences militaires. Ainsi les établissements affectés aux cultes ou à l'instruction pourront, en cas de besoin, servir d'ambulances, d'observatoires, de dépôts, etc. Ce sont là des questions de mesure et de convenance, dont le règlement dépend des circonstances et n'est point inconciliable avec le respect dû au patrimoine de la science et de la religion.

CHAPITRE II.

Biens privés.

Au respect des personnes s'ajoute le respect de la propriété privée ce sont deux principes corrélatifs que le XIXe siècle a vus prévaloir et dont l'observation implique un adoucissement marqué des maux de la guerre.

Entendue dans un sens absolu, l'obligation de respecter la propriété privée serait incompatible avec la guerre il n'est pas une opération militaire, un mouvement de troupes, un engagement qui n'entraîne des dommages pour les biens d'un certain nombre de personnes. Mais l'envahisseur doit s'efforcer d'en atténuer l'importance et s'abstenir de toute dévastation qui n'est pas nécessaire. De plus, si l'occupation est de quelque durée, il lui appartient de faire constater d'une manière authentique le préjudice souffert, afin de ménager aux particuliers atteints dans leurs biens les moyens de participer plus tard aux ré– parations qui pourront être accordées.

Sur le territoire ennemi, comme sur le sol national, le soldat ne doit commettre aucun acte de destruction inutile. La maraude n'est plus tolérée. Le vol et tous les actes délictueux commis contre la propriété sont criminels et punissables comme en temps de paix.

« PreviousContinue »