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Cependant les pouvoirs de l'occupant ne sont pas strictement limités par les prescriptions de sa loi nationale. Pour les cas non prévus, il tient de la situation même le droit d'édicter, sous sa responsabilité, les prohibitions et les pénalités que les circonstances rendent nécessaires.

Il convient toutefois de retenir que les principes de notre droit pénal répugnent à l'emploi des châtiments corporels : l'emprisonnement et les peines pécuniaires ou amendes sont seulement admissibles. Si des amendes sont imposées à une contrée tout entière ou à une agglomération d'habitants, le montant en doit être fixé et le prélèvement opéré conformément aux règles des contributions (2e partie, titre IV, chapitre III).

TITRE II

DEVOIRS DE L'OCCUPANT.

CHAPITRE PREMIER.:

Maintien de l'ordre et de la vie sociale.

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D'après une doctrine qui ne manque pas d'adhérents, l'autorité du gouvernement légal est suspendue par l'effet de l'occupation et passe entre les mains de l'occupant d'où il résulte pour ce dernier l'obligation de veiller au maintien de la vie sociale. Il faut prendre garde de confondre l'occupation temporaire avec la prise de possession définitive. Consacrée par la cessation de toute résistance, par un traité de paix, par la reconnaissance des Puissances étrangères ou par le temps, la prise de possession définitive est seule apte à subroger le vainqueur aux droits du vaincu, à créer un nouvel état de choses légitime. Quant à l'occupation temporaire, c'est simplement un état de fait, qui produit les conséquences d'un cas de force majeure l'occupant n'est pas substitué en droit au gouvernement légal; il a, en fait, les moyens matériels de faire prévaloir son autorité;

mais il ne saurait oublier que les habitants lui obéissent comme contraints et forcés, et doivent toujours fidélité au gouvernement légal. Cette considération l'engagera à modérer ses exigences et à n'apportér aux institutions établies que les changements absolument indispensables.

Par suite de l'occupation, le gouvernement légal n'est plus en mesure de pourvoir à l'entretien des divers organes dont l'action combinée constitue la vie sociale; l'occupant a seul le pouvoir d'en assurer le jeu régulier : aussi doit-il prendre toutes les mesures qui dépendent de lui, en vue de rétablir autant que possible l'ordre et la vie publique sur le territoire envahi. C'est un devoir d'humanité que lui imposent les lois de la guerre, et c'est le prix de la neutralité qu'il exige lui-même de la population. Il a, d'ailleurs, intérêt ă ce que le désordre në vienne point augmenter les difficultés de son œuvrë.

Les mesures qu'il prendra varieront avec les circonstances. Quelquefois l'abstention suffira; la vie publiqué se rétablira d'elle-même, quand la population sera convaincue que, loin d'y mettre obstacle, l'occupant y est favorable, et veille à la sécurité des relations sociales. Le plus souvent, l'occupant devra seconder directement les efforts des habitants: il se mettra en rapport avec les autorités locales, et stimulera leur zèle pour activer le rétablissement des administrations publiques; il facilitera la reprise des transactions

commerciales, l'approvisionnement des marchés, le service des postes, des chemins de fer et des télégraphes, l'entretien des voies et des moyens de communication, la célébration des cultes, la réouverture des écoles, en un mot, le fonctionnement régulier de tous les rouages de la machine sociale. Rien ne l'empêche, du reste, d'y apporter telles modifications qui seraient nécessaires au succès de ses opérations. De plus, il est fondé à punir ceux qui tenteraient, à la faveur des facilités accordées, de commettre des actes d'hostilité.

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Le meilleur moyen d'assurer la vie publique, c'est de laisser en vigueur les lois établies. Aucune difficulté ne se présente d'ordinaire pour les lois civiles et pénales, l'occupant ayant lui-même intérêt à en imposer l'observation. Il n'en est pas de même des lois politiques, administratives et financières édictées en vue d'un régime qui est suspendu de fait : ces lois contiennent souvent des prescriptions contraires aux intérêts de l'occupant; le cas échéant, celui-ci est nécessairement amené soit à en interdire l'observation, soit à en modifier l'économie, soit même à y substituer d'autres règles. Ainsi son premier soin sera de suspendre l'effet des lois de conscription, et d'empêcher, par la menace de peines sévères, les hommes valides de quitter le territoire occupé pour aller grossir les rangs de l'armée nationale. De même encore, il n'hésitera pas à suspendre l'application des lois de finances, afin d'empêcher

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