15. Le domicile de chacun est inviolable. Aucune perquisition domiciliaire ne peut être opérée que dans les cas et selon les formes prévues par la loi. 16. La Traite est prohibée. Tout esclave est considéré libre dès qu'il se trouve sur le sol Crétois. 17 Aucun genre de travail, d'industrie, ou de culture ne peut être prohibé, à moins qu'il ne porte atteinte à la morale, à la sécurité ou à la santé des habitants. 18. Il ne peut y avoir d'autres monopoles que ceux établis en vertu d'une loi pour creér des revenus publics, ou dans l'intérêt de la sécurité publique. 19. Nul n'est privé de son bien que pour cause d'utilité publique, dans les cas et selon les formes établis par la loi, toujours moyennant une indemnité préalable. Une loi spéciale réglera les questions relatives à l'acquisition et disposition des mines, carrières, antiquités, et sources thermales. Il ne peut être acquis des droits immobiliers sur les îlots adjacents, sans une autorisation du Gouvernement Crétois. En cas de transmission de tels droits, le Gouvernement Crétois conserve le droit de préemption. 20. Les tortures et la confiscation générale sont défendues. 21. L'enseignement est libre; il est exercé par des personnes ayant les qualités et la moralité requises par la loi, sous la surveillance de l'autorité compétente, en ce qui concerne les bonnes mœurs, l'ordre public, et le respect des lois du pays. L'enseignement primaire est obligatoire et gratuit. 22. Chacun est libre de manifester ses opinions de vive voix, par écrit ou par voie de la presse, en se conformant aux lois. La loi réprime l'abus de cette liberté. 23. La loi sur la presse doit contenir les dispositions sui vantes : (1.) La publication d'un journal ou recueil périodique est subordonnée à une autorisation du pouvoir exécutif; (2.) S'il s'agit de la publication d'un journal ou d'un recueil périodique contenant de la matière politique, l'éditeur doit fournir une caution de 2,000 fr. destinée à assurer le payement des amendes ou indemnités éventuelles. En cas de condamnation d'un éditeur, par jugement exécutoire, à une peine pécuniaire ou indemnité, la publication du journal ou recueil périodique est suspendue, en attendant le payement de la peine pécuniaire ou indemnité. (3.) L'autorisation ne peut être refusée au requérant, s'il possède les qualités requises et s'il a fourni la caution sus-indiquée. La saisie du journal, du recueil périodique, ou de tout imprimé peut être opérée (1.) Si une des religions reconnues et professées dans l'île est attaquée; (2.) En cas d'offense contre la personne du Prince; (3.) Si, par ces publications, il est provoqué une irritation dangereuse parmi les habitants de nature à compromettre l'ordre public. La saisie est levée de plein droit, si, dans le lendemain, elle n'est pas sanctionnée par une ordonnance judiciaire. La censure préalable ne peut être établie. 24. La correspondance livrée à la poste est soustraite à toute recherche des autorités judiciaires. 25. Les Crétois ont le droit de s'assembler paisiblement et sans armes, en se conformant aux lois qui peuvent régler l'exercice de ce droit, sans toutefois le subordonner à une autorisation préalable. Sont exceptés les rassemblements à ciel ouvert, qui sont soumis absolument aux règlements de police. 26. Les Crétois ont le droit de former des associations, pourvu que dans le but de l'association ou dans les moyens employées à cet effet il n'y ait rien d'illicite, d'immoral, ou de dangereux pour l'État. La loi règle l'exercice du droit d'association, ayant en vue le maintien de l'ordre public. 27. Chaque citoyen a le droit d'adresser aux autorités des pétitions, signées par une ou plusieurs personnes. CHAPITRE II.-Du Prince. 28. Le Prince est le chef de l'État. Il confectionne les lois, de concert avec la Chambre des Représentants, exerce le pouvoir exécutif, par l'entremise de Conseillers responsables, et rend la justice par les Tribunaux. 29. Légalement le Prince n'est ni responsable ni sujet à aucune contrainte. Chacun de ses actes doit être contresigné par son Conseiller compétent, lequel par sa seule signature assume toute la responsabilité pour cet acte. Cette signature n'est pas nécessaire pour l'investiture du Métropolitain et des Évêques, pour la nomination des membres de la Chambre nommés par le Prince, pour la nomination ou la révocation des Cadis et des Muftis, des Conseillers du Prince, du Président et du Procureur près la Cour d'Appel, et des Préfets. 30. Le Prince représente l'État, conclut des Conventions, pour lesquelles il demande le vote de la Chambre, frappe monnaie et confère les décorations. 31. Le Prince est le Chef Suprême de la force armée. Il confère les grades militaires; nomme aux places et selon les formes établies par la loi et destitue tous les employés publics, y compris les Muftis et Cadis. Ces derniers sont pris parmi les personnes ayant une autorisation du Cheikh-ul-Islam pour exercer leurs fonctions. Il accorde ou non son assentiment pour l'investiture du Métropolitain élu par le Patriarchat Ecuménique, ainsi que des Évêques élus par le Synode Episcopal de Crète. Il a le droit de sanctionner les projets de loi votés par la Chambre, promulgue les lois et rend les ordonnances concernant leur exécution. Il ne peut toutefois suspendre l'application d'une loi, une fois publiée, ni d'en soustraire qui que ce soit. 32. Le Prince convoque la Chambre et en prononce l'ouverture et la clôture. Il a le droit d'ajourner, suspendre, proroger, ou dissoudre la Chambre. L'ajournement, suspension, ou prorogation ne peuvent durer plus de quarante jours, ni se répéter dans la même période sans l'assentiment de la Chambre. Le décret de dissolution doit fixer en même temps la date de la convocation de la nouvelle Chambre, qui doit avoir lieu dans les trois mois. 33. Le Prince a le droit de commuer, réduire, ou remettre à son gré les peines prononcées par les Tribunaux en cas de délits politiques ou ceux de la presse; en cas de délits communs il faut l'avis préalable du Conseil de Justice. Il a également le droit d'amnistie dans le seul cas de délits politiques. 34. Le Prince peut, par Ordonnance contresignée par tous les membres de son Conseil, proclamer la loi martiale dans toute l'île ou une de ses parties. 35. Toute décision de l'Assemblée, concernant la personne du Prince, est prise à la majorité des deux tiers et par scrutin de couvert. 36. La Liste Civile du Prince est fixée par une loi. Celle de Son Altesse Royale le Prince Georges de Grèce est fixée à 200,000 fr. par an. CHAPITRE III.-De la Chambre. 37. La Chambre partage avec le Prince le pouvoir législatif. Elle se compose de membres élus par le peuple et de membres nommés par le Prince. 38. Pour être élu ou nommé Député il faut avoir son domicile en Crète depuis cinq ans au moins; jouir de l'indigénat Crétois ; avoir l'âge de 30 ans accomplis et posséder les autres qualités requises par la loi électorale. 39. Les fonctions de Député sont incompatibles avec celles d'employé public ou municipal rétribué, de représentant ou employé de Puissance étrangère, de Ministre de Culte et le Militaire en général, à l'exception des retraités ou réformés, qui peuvent être élus ou nommés Députés, si la réforme n'a pas eu pour cause une conduite repréhensible dans les rangs de l'armée où ils ont servi. 40. Dans les deux années qui suivent son élection, le Député ne peut être nommé à un emploi public ou municipal rétribué, sauf à celui de Conseiller du Prince. 41. Les membres électifs de la Chambre sont élus par Département au vote uninominal, dans la proportion d'un Député sur 5,000 habitants ou fraction de ce chiffre et au moyen d'un mode de suffrage assurant, autant que possible, la représentation des minorités. 42. Les membres de la Chambre nommés par le Prince sont au nombre de dix; ils sont choisis, en proportion de la population, dans tous les Départements et parmi les citoyens en vue pour leur honnêteté et leur expérience. 43. Le candidat qui a échoué aux élections législatives ne peut être nommé membre de la Chambre dans la même Session. Ne peut également siéger comme membre nommé dans une Session de la Chambre celui qui siégeait au même titre dans la 'Session précédente. 44. Le Député représente l'île et non seulement le district où il a été choisi. 45. La vérification des élections contestées est faite par la Cour Supérieure en séance pleinière. 46. Les Députés sont élus ou nommés pour deux ans, et la Chambre se réunit en Session ordinaire une fois chaque deux ans. 47. La durée de la Session ordinaire de la Chambre est de deux mois. La Session terminée, le Député perd la qualité et le titre de Député. 48. En cas de besoin, le Prince peut convoquer la Chambre en Session extraordinaire, même avant la période de deux ans. La durée et le programme de la Session extraordinaire sont réglés par ordonnance princière. La Chambre, en Session extraordinaire, ne peut entrer dans la discussion d'autres sujets que ceux déjà indiqués dans ce programme. 49. En cas d'urgence, le Prince a le droit de convoquer en Session extraordinaire les Députés de la dernière Chambre, s'il ne préfère pas ordonner de nouvelles élections. 50. La Chambre tient ses séances en public. Elle ne peut siéger à huit-clos qu'extraordinairement et après une décision prise à cet effet. 51. Avant d'entrer en fonctions, les Députés prêtent serment dans la Chambre et en séance publique, selon la formule usitée pour chaque culte, qu'ils rempliront consciencieusement leurs devoirs, seront fidèles à la patrie et au Prince, et respecteront les lois du pays. 52. La Chambre établit par son propre règlement la manière de procéder à ses travaux. 53. Au début de chaque Session, la Chambre choisit parmi ses membres son Président, ses Vice-Présidents, et Secrétaires. 54. La Chambre exerce sa police intérieure par l'entremise de son Président. Le Président seul peut donner des ordres à la garde de la Chambre. Aucune force armée ne peut pénétrer dans l'enceinte de la Chambre sans l'autorisation du Président. 55. La Chambre est en nombre légal lorsque la moitié des Députés sont présents. Pour qu'une décision ait force légale, il faut qu'elle soit prise à la majorité absolue des Députés présents. En cas de partage des voix, la motion est rejetée. 56. Chaque Député reçoit, à titre d'indemnité, 10 fr. par jour, tant qu'il participe aux travaux de la Chambre. 57. Le Député est exempt de toute poursuite ou recherche à cause de l'opinion ou du vote par lui émis dans l'exercice de ses fonctions. Durant la Session, et sauf le cas de flagrant délit, le Député ne peut être poursuivi ni arrêté qu'avec l'autorisation de la Chambre. 58. Aucune loi n'a force légale que si elle n'est votée par la Chambre, Article par Article, deux fois, et à deux jours différents, et sanctionnée par le Prince. Le budget est voté une seule fois. Un projet de Loi voté par la Chambre et non sanctionné par le Prince, dans un délai de deux mois, à dater de la clôture de la Session, est considéré comme rejeté. 59. L'interprétation authentique des lois appartient au pouvoir législatif. 60. L'initiative des Lois appartient au Prince et à la Chambre. Les projets de Loi concernant les traitements, pensions ou tout autre disposition d'argent à titre personnel, ne sont introduits à la Chambre que par le Prince. Des propositions de Députés tendant à une augmentation des dépenses du budget ne peuvent être discutées par la Chambre qu'après avoir été préalablement approuvées par la Commission du Budget. 61. Sans une Loi votée par la Chambre et sanctionnée par le Prince, aucun impôt ne peut être imposé ni prélevé; des emprunts ou des conventions engageant les finances de l'État ne sont point [1900-1901. xOIV.] 4 Q |