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distinctions, produit bizarre d'une demi-civilisation. Il admettait avec le droit remain la maxime nuptias non concubitus sed consensus facit. L. 30, de Regulis juris.

Le Code civil a adopté cette sage règle (1).

Ainsi l'on ne peut opposer au mariage que les nullités absolues ou relatives qui ont été examinées dans la 1oo et la 2o section de ce chapitre (2).

Dans la section suivante nous distinguerons les nullités temporaires de celles qui sont perpétuelles, et les nullités qui peuvent être réparées ou couvertes de celles qui ne peuvent l'être.

Section IV.

Des nullités perpétuelles; des nullités temporaires; de celles qui sont ou non susceptibles d'être réparées ou couvertes.

Parmi les nullités quelques-unes sont seulement temporaires, d'autres sont réparables,

Les plus graves sont perpétuelles et irréparables.
Examinons d'abord celles-ci :

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486. La bigamie est une nullité perpétuelle et irréparable. 487. Les enfants nés pendant le premier mariage sont adultérins. Ceux nés depuis sa dissolution sont bâtards simples.

488. Ces derniers peuvent être légitimés par un nouveau mariage. 489. Secus si le premier mariage était nul.

(1) Exposé des motifs, par Portalis.

(2) Le Code des Deux-Siciles, art. 157, défend aux officiers de l'État civil de célébrer le mariage entre le tuteur ou ses enfants et le mineur ou la pupille durant la tutelle et avant la reddition des comptes, à moins que le tribunal ne l'ait autorisé en connaissance de cause, après avoir entendu le ministère public.

490. Le mariage incestueux est nul et ne peut être validé.

491. Celui qui aurait pu se faire avec des dispenses n'est pas inces

tueux.

492. Doit-il être renouvelé après les dispenses?

493. Le mariage du mort civilement réhabilité doit être renouvelé. 494. Quid en cas de révision?

495. Que doit-on décider pour le mariage des princes?

486. C'est parmi les nullités absolues que se trouvent celles qui ne peuvent s'effacer.

Ainsi la bigamie est une cause perpétuelle et ineffaçable de la nullité d'un mariage.

Nul dans son principe comme dans son essence le mariage du bigame est constamment vicieux pendant toute sa durée. La possession d'état la plus longue ne peut en couvrir le vice. L'ordre social blessé, la morale publique outragée réclament toujours. Seulement l'action criminelle et la peine peuvent prescrire (Code d'instruction criminelle art. 637, Code civil art. 32); mais la nullité subsiste comme l'incapacité du bigame. (Arrêt de la Cour de Paris, du 1er août 1818; Denevers, vol. de 1819, supl., p. 8; Sirey, t. 17, 2o p. p. 63; V. au Répertoire de Merlin, vo Mariage, sect. 6, S2, sur l'art, 184, 5o question, une dissertation étendue.) Le coupable, lui-même, peut opposer la nullité du mariage qu'il a illégitimement contracté.

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487. Les malheureux fruits de cette union criminelle sont adultérins aux yeux de la loi, sauf le bénéfice de la bonne foi lorsqu'elle a existé de la part de l'un des époux.

Cette doctrine est sévère, mais juste, mais commandée par l'intérêt public, et nécessaire pour prévenir les désordres qu'entraîneraient ces funestes exemples et les scandaleux procès qu'ils feraient naître.

La dissolution du premier mariage après la célébration du second est insuffisante pour donner à celui-ci une valeur que la loi lui refusait dans son origine; car cet événement n'efface pas la tache première de l'union. Les enfants nés postė

rieurement à la dissolution ne sont pas légitimes; seulement on ne peut les déclarer adultérins comme ceux nés avant l'extinction du premier mariage. Ce sont des bâtards simples étant procréés ex soluto el soluta.

488. Ils pourraient, par conséquent, être légitimés par un nouveau mariage que contracteraient les auteurs de leurs jours, tandis qu'un tel avantage ne pourrait être conféré aux autres enfants.

Nous disons par un nouveau mariage; car le précédent.ne peut être ratifié ; on ne ratifie pas ce qui est radicalement nul. Il faut, comme pour les donations, un nouvel acte, un nouveau contrat légalement formé (Code civil 1339 (1).

489. Mais si le premier mariage était nul, il n'y aurait pas de bigamie. Seulement ce serait à l'époux poursuivi comme bigame à faire prononcer la nullité du premier mariage, , pour se garantir des poursuites. Et un délai devrait lui être accordé à cet effet.

490. L'inceste est également un vice que le temps ne peut couvrir, que rien ne peut effacer.

Ces unions monstrueuses, qui souillent les mœurs domestiques, qui ravalent l'homme au niveau de la bête, sont d'autant plus coupables qu'elles se prolongent davantage. Il n'est qu'un moyen d'en affaiblir la honte. C'est de les rompre.

491. Mais la rigueur de la loi s'applique-t-elle aux mariages que des dispenses auraient pu autoriser, tels qu'ont toujours été sous le Code civil les unions des oncles et des nièces, des tantes et des neveux; tels que le sont aujourd'hui depuis la loi du 16 avril 1832 les mariages entre beaux-frères et belles-sœurs?

Nous ne le pensons pas. De telles unions ne peuvent être considérées comme incestueuses. Car si un tel vice les affec

(1) V. sur la bigamie, Vazeilles, nos 217 et suivants; Toullier, t. 1, nos 492 et suivants.

tait, comment supposer que la loi les eût autorisées sous la seule condition d'obtenir préalablement des dispenses?

L'inceste est un crime. La loi qui permettrait le crime serait monstrueuse; la morale publique s'en indignerait; la civilisation et la religion s'uniraient pour la flétrir et la repousser.

Cependant suivant le droit canonique comme suivant le droit civil ces mariages ont toujours été tolérés. Seulement des dispenses, qui s'obtenaient assez facilement, étaient exigées. Il n'y avait donc pas de prohibition absolue. La loi actuelle, en adoptant les mêmes règles, n'a établi elle-même qu'une prohibition relative, puisque cette prohibition disparaît par l'accomplissement d'une simple formalité, celle des dispenses.

Ainsi l'irrégularité d'un premier mariage pourraît être réparée en le renouvelant après s'être conformé à l'exigence de la règle.

Il semble donc que la seule difficulté qui se présente roule sur la nécessité du renouvellement du mariage, nécessité que n'admettait pas le droit ancien, sur laquelle le droit nouveau ne s'explique pas et qui réduirait la question à une simple formalité peu digne de la majesté de la loi qui doit pouvoir aussi approuver et consacrer un fait qu'elle pouvait permettre. On peut voir ce que nous avons déjà dit sur la question en commentant l'art 162 du Code (1).

Cependant, comme les dispenses d'après le texte de la loi et d'après les formules usitées ne portent que sur des mariages à faire et non sur des mariages déjà faits, il serait prudent, dans le doute, de les renouveler lorsque des dispenses ont été obtenues.

492. La mort civile doit être aussi rangée parmi les causes de nullité de mariage qu'aucun moyen ne peut ni effacer ni affaiblir. ›

(1) V. ussi Pothier, du Mariage, no 274.

Les individus frappés de mort civile ne sont plus, dans l'ordre civil, au rang des personnes personam non habent ; mais ils conservent l'état naturel. La mort civile n'est en effet qu'une fiction. Or une fiction ne peut qu'imiter la vérité; elle ne peut la détruire.

Si donc le mort civilement perd les droits civils il jouit du moins des droits naturels qui sont attachés à sa qualité d'homme; et de même qu'il conserve la faculté d'acquérir et de posséder, de même les enfants qui sont procréés d'un mariage qui est illégal aux yeux de la loi, n'en sont pas moins, s'ils sont reconnus par lui, considérés comme ses enfants naturels et peuvent exercer les droits attachés à ce titre, non sur les biens qu'il possédait lorsque la mort civile l'a atteint puisqu'ils sont devenus la propriété de ses hériliers, mais sur ceux qu'il a acquis depuis.

Il ne peut, d'ailleurs, renaître à la vie civile que par une grâce pleine et entière suivie de réhabilitation. Car la grâce a seulement pour effet de faire cesser la peine. Ce n'est que par la réhabilitation, si l'on en croit certains auteurs et si l'on s'en réfère à une décision du Conseil d'État, que le condamné est relevé de toutes les incapacités soit politiques soit civiles qu'il a encourues. La prérogative royale ne s'étend pas jusqu'à attribuer à la gràce les effets de la réhabilitation (1).

La réhabilitation elle-même ne fait cesser que pour l'avenir, dans la personne du condamné, toutes les incapacités qui résultaient de la condamnation. (Code d'instruction criminelle, art. 633.)

493. Alors seulement il pourra contracter un mariage légal. Alors il sera obligé de renouveler la célébration de celui qui existait avant la réhabilitation ou qu'il aurait con

(1) V. Avis du Conseil d'État des 21 décembre 1822 et 8 janvier 1823, rapportés par Sirey, 23. 2. 91.

Mais voir ce qui a été dit sur la mort civile, titre 1, chap. 1, section 5.

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