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Quant à ceux qui ont été interdits judiciairement, incapables suivant les lois naturelles, incapables aussi suivant les lois civiles, ils ne peuvent donner de consentement valable ni par conséquent contracter mariage. Et si par l'erreur ou l'ignorance de l'officier de l'État civil leur mariage avait été célébré, la nullité pourrait en être demandée sinon par eux-mêmes, puisqu'ils ne peuvent pas agir personnellement en justice, mais par leur tuteur en leur nom.

L'époux d'un interdit, qui aurait ignoré sa position, serait admis aussi à en provoquer la nullité pourvu que son action fût exercée dans les six mois de sa cohabitation après la découverte de l'erreur, suivant la disposition de l'art, 180.

Mais celui qui l'aurait connue ne pourrait se plaindre d'une union à laquelle il aurait sciemment consenti (argument de l'art. 180).

Le mariage contracté par l'homme en état de démence ou par l'interdit serait aussi susceptible de la ratification tacite résultant d'une cohabitation de six mois après l'époque à laquelle la démence aurait cessé ou l'interdiction aurait été levée.

566. Nous n'avons parlé plus haut, en commentant l'article 181, que de la cohabitation comme étant approbative du mariage.

Cette cohabitation de six mois, qui couvre le vice du consentement au mariage, n'est qu'une ratification tacite, c'està-dire une simple présomption d'approbation d'un mariage originairement nul.

A plus forte raison doit-on donner le même effet à une ratification expresse. Car l'expression positive de la volonté doit bien produire au moins le même effet qu'un simple indice, qu'une présomptiou quelquefois trompeuse. Telle est aussi l'opinion de Dalloz aîné et de Duranton (1).

Ce dernier auteur fait observer qu'il ne serait pas néces

(1) Dalloz ainė, l. 10, t. 85, no 11; Duranton, t. 2, no 282, 283,

saire que l'acte approbatif renfermât toutes les conditions prescrites par l'art. 1338 pour les ratifications de contrat ordinaire ; c'est-à-dire la substance de la convention, la mention de la nullite et l'intention de la réparer. « Le mariage, >> dit-il, est une matière spéciale qui admet plus facilement » tout ce qui peut réhabiliter le consentement, ce qui peut en couvrir les vices, lorsque, d'ailleurs, l'ordre public » n'est point intéressé à son annulation. >>>

Ces réflexions quoique justes méritent cependant quelques explications.

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Sans doute on doit être moins rigoureux dans l'appréciation des actes de ratification pour les mariages que pour les conventions ordinaires et d'un intérêt purement matériel.

L'ordre social est lui-même intéressé à ce que les mariages ne soient pas trop facilement annulés sous prétexte d'erreur ou de violence.

Cependant il est nécessaire que l'acte de ratification annonce, dans l'époux qui pourrait réclamer, que le vice de son consentement lui était connu, et qu'il a eu l'intention de le réparer ou d'y renoncer; autrement il serait facile de surprendre à l'époux trompé ou contraint, après la découverte de l'erreur ou la cessation de la violence, quelque déclararation vague, quelques expressions affectueuses, reste ou continuation des habitudes d'une vie intime et des relations

continues d'une union qui existait depuis quelque temps, quoiqu'illégale. Confondre ces indices équivoques avec une ratification expresse, leur attribuer autant de force pour effacer le vice du mariage qu'à une cohabitation soutenue pendant six mois, ce serait s'exposer à une grave erreur, ce serait blesser et la volonté du législateur et le texte de la loi, en privant l'époux, par une fausse interprétation de ses actes ou de ses paroles, du droit de faire annuler un mariage dans lequel il aurait été la victime de la surprise ou de la violence.

Pour qu'il y ait ratification expresse, il faut, et le mot ex

presse l'indique assez, qu'il y ait volonté exprimée de renoncer à des nullités qui seraient au moins indiquées dans l'acte de ratification.

D'ailleurs cette ratification expresse est aussi valable de la part du mineur de 21 ou 25 ans, mais pubère, que de la part d'un majeur. Car, comme déjà nous l'avons dit ailleurs, celui qui peut consentir au mariage peut aussi le ratifier.

En raisonnant ainsi nous supposons que le mariage a été contracté du consentement des père et mère ou des autres parents désignés par la loi.

Examinons les conséquences du défaut de ce consente

ment.

ARTICLE II.

De la nullité pour défaut du consentement des parents.

SOMMAIRE.

567. Texte des articles du Code relatifs aux nullilės.

Objet de ce numéro.

568. L'action en nullité n'est accordée qu'à ceux dont le consentement

est nécessaire.

569. Droit ancien antérieur à l'édit de 1556.

570. Prescription de cet édit.

Il ne prononçait pas la nullité du mariage.

571. Le droit actuel est plus sévère.

572. Les enfants naturels reconnus sont soumis aux mêmes actions. 573. Motifs qui ont fait attribuer l'action, même à l'enfant qui avait besoin de ce consentement, mais en prouvant un préjudice.

574. L'action en nullité ne passe pas aux héritiers, pas même après une instance commencée.

575. Secus s'il y a eu erreur ou violence.

576. Elle ne passe pas aux ascendants, si le père ne décède qu'après le mariage.

577. Mais la mère alors peut l'exercer.

578. Les ascendants ont aussi l'action, si le père et la mère au moment du mariage étaient dans l'impuissance d'agir.

Art. 182.

579. Si l'époux était mineur l'action en nullité appartiendrait au
conseil de famille qui n'aurait pas consenti au mariage.

580. Mais s'il décède, l'action non intentée est éteinte.
581. Secus si elle avait été intentée par l'époux mineur.

582. L'action est effacée par une ratification expresse ou tacite.
583. Caractère de la ratification expresse.

584. Caractères de la ratification tacite. -Elle peut se prouver par
témoins.

585. A défaut de ratification, l'action s'éteint par le délai d'un an du jour où le mariage est connu.

586. Comment se prouve cette époque?

587. La majorité de 21 ou 25 ans n'éteint pas l'action des ascendants si elle est postérieure au mariage.

588. Mais elle éteint celle du conseil de famille,

589. Le délai d'un an éteint aussi l'action de l'époux, et il court pendant sa minorité.

590. La ratification expresse ou tacite des ascendants fait cesser l'action de l'époux, même lorsqu'elle a été déjà intentée,

591. L'époux même mineur doit prouver que son consentement lui a été surpris et que ce mariage lui nuit.

592. Il n'a plus d'action s'il atteint l'age compétent sans réclamer. 593. Qu'entend-on par ȧge compétent?-Avant cet age compétent l'époux ne peut ratifier son mariage. Mais sa ratification pendant l'année de délai doit être expresse.

594. Elle ne peut être opposée aux ascendants.

595. Après l'année de délai l'époux ne peut arguer de la nullité du mariage nipar voie d'action, ni par voie d'exception.

567. L'action en nullité pour défaut du consentement de parents est réglée par les articles 182 et 183 du Code civil. Le premier fait reconnaître quelles sont les personnes qui peuvent l'exercer; le second indique comment elle s'éteint.

<< Le mariage contracté sans le consentement des père et mère, des ascendants, ou du conseil de famille, dans les cas où ce consentement était nécessaire, ne peut être altaqué que par ceux dont le consentement était requis ou par celui des deux époux qui avait besoin de ce consentement (1). »

(2) Même disposition dans le Code du canton de Vaud, art. 86-90; dans celui d'Autriche, art. 96; par le Code prussien, art. 973.

568. On se rappelle que les articles 148, 151, 153, 158, 159 et 160, exigent le consentement des père et mère, ou des ascendants, ou du Conseil de famille, pour le mariage du fils de famille qui n'a pas atteint l'âge de 25 ans accomplis, et pour celui de la fille qui n'est pas âgée de 21 ans accomplis.

La loi, en déclarant nuls les mariages qui n'avaient pas été guidés par la sagesses, par la sollicitude éclairée des parents qu'elle désigne, ne devait cependant pas livrer le sort des mariages aux caprices, aux passions de ceux dont elle ne prescrivait pas l'assentiment.

Aussi est-ce à ceux-là seuls dont le consentement était nécessaire qu'elle a réservé l'action en nullité.

Elle l'accorde aussi à l'enfant qui avait eu besoin de ce consentement.

569. Avant l'édit de Henri II, de février 1556, il n'y avait en France aucune loi en vigueur contre les mariages des enfants de famille contractés sans le consentement de leurs père et mère. C'est ce qu'indique le préambule de cet édit.

Les Capitulaires des rois de la première et de la seconde race ne contenaient de dispositions que relativement aux filles que l'on devait obtenir de leur père, sous la puissance desquels elles étaient placées; sinon le père pouvait exiger qu'on lui rendit sa fille, et l'époux était puni d'une amende.

570. Mais ces lois anciennes étaient tombées en désuétude, lorsque Henri II, pour arrêter des abus nombreux, autorisa, par l'édit de 1556, les père et mère à exhéréder les fils âgés de moins de 30 ans et les filles qui n'avaient pas atteint l'âge de 25 ans accomplis, s'ils se mariaient sans leur consentement; le même édit permettait de punir de la même peine les enfants qui, après l'âge fixé, ne requéraient pas le conseil de leurs père et mère.

Cet édit prononçait aussi, en cas d'exhérédation, la nullité des conventions matrimoniales.

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