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son indépendance et plus tard sa nationalité.

Il eut été absurde de vouloir que le plus faible état de la coalition se soutînt seul dans une lutte corps à corps avec un géant nourri de victoires. La Hollande périt donc après avoir vaillamment combattu pour sa conservation et dans l'intérêt de la cause commune; elle périt sous le poids et par le concours d'une multitude de circonstances funestes; enfin, et surtout elle pérít victime de l'abandon où la laissèrent tous ses alliés à la suite de leur désunion!

de la nationalitë

La république des Pays-Bas avait cessé d'exister, Rétablissement et ses riches provinces ne formaient en dernier hollandaise. lieu que des départemens du Grand Empire.

Mais l'énergie du peuple n'y
Ce peuple, toujours calme,

était point éteinte. réfléchi et sage, n'a

vait pas dégénéré de ses ancêtres. Leur patriotisme et leur valeur, bien que momentanément comprimés, n'avaient rien perdu de leur force vitale, ni de leur élasticité. La Hollande supportait, sans bassesse comme sans vaines clameurs, le joug qui lui était imposé par la fatalité, en

attendant que le moment de le secouer vînt se rendre à ses vœux, et favoriser les courageuses résolutions qui germaient en secret dans les cœurs de ses meilleurs citoyens.

Ge moment si ardemment désiré se présenta enfin, entouré de belles espérances, mais aussi de grands dangers. C'est sur ce dernier point que j'appelle surtout l'attention de mes lecteurs.

En effet, les armes et les glaces de la Russie avaient anéanti la superbe armée conduite par Napoléon dans la vaste domination des Czars. Remplacée par de nouvelles forces, sorties comme par enchantement du sol guerrier de la France elles avaient à leur tour péri, soit dans les victoires, soit dans les défaites. Tous les alliés de l'Empereur l'avaient successivement abandonné en même temps que sa bonne fortune; et parmi les nations jadis enchaînées à son char triomphal, les Prussiens surtout, par les élans du plus sublime patriotisme, lui fesaient payer bien cher les humiliations dont on ne sait trop par quel vertige d'une politique insensée, il

s'était plu à les abreuver gratuitement, et comme de gaité de cœur. Le prestige du nom de Napoléon et de la toute-puissance française était dissipé.

Mais la France avait encore de grandes ressources; le génie de Napoléon, qui dans les derniers temps avait faibli sous l'habitude des succès, s'était retrempé dans le malheur. La redoutable barrière du Rhin n'était pas encore franchie. Il fallait s'attendre à la voir disputer avec la force d'un terrible désespoir. Une guerre faite au cœur de la France devait succéder au passage du Rhin; et les annales militaires de tous les siècles avaient mille fois prouvé que la victoire se plaît à flotter d'un camp à l'autre. Les succès que les Alliés avaient obtenus jusqu'alors étaient compromis si la dernière entreprise, celle qui devait les couronner tous, venait à échouer ; et le ; pas décisif qui y conduisait, n'était pas encore fait.

A ces considérations il faut encore ajouter que la Hollande, quoique faiblement gardée, n'était pas entièrement dégarnie de troupes. La nation

avait pour elle l'universalité des citoyens et par conséquent une immense supériorité numérique de défenseurs. Mais la force physique de ses nobles enfans était paralysée par le désarmement général que depuis long-temps ils avaient subi. Les légions françaises, au contraire, jouissaient de l'inappréciable avantage d'une organisation régulière, d'une éducation militaire parfaite, de leur réunion en masse, de la discipline, et de l'habitude des combats et des victoires.

L'insurrection avait donc deux écueils à redouter; d'abord l'opposition des corps français chargés de la défense du pays, puis l'issue toujours incertaine de la grande lutte qui devait se décider au centre de la France, lutte qui semblait ajournée à la prochaine campagne.

Mais l'amour de la patrie dans les ames généreuses et dignes de la liberté ne s'effraie pas des dangers, pour peu qu'ils soient contrebalancés par un espoir raisonnable de succès. Le moment était opportun; il n'était pas probable que jamais des chances aussi favorables pussent se

pro

reproduire, si celles-ci n' étaient pas mises à fit. En multipliant les embarras déjà sans nombre, qui entouraient l'ennemi commun de toutes parts, la Hollande augmentait dans la même proportion les forces des Alliés, dont le triomphe définitif était nécessairement dans ses intérêts et dans ses vœux.

Enfin l'affranchissement du pays, s'il venait à s'accomplir par ses propres forces, jetait un poids immense dans la balance de ses destinées. Ne le devant qu'à ses glorieux efforts isolés de tout secours, il avait le droit de s'en constituer l'unique arbitre et d'en écarter la tutelle toujours intéressée de l'Étranger.

Ces considérations, et surtout la dernière, dont l'importance était universellement sentie, bannirent toute hésitation du sein des courageux citoyens qui avaient conçu le dessein de briser les fers de leur pays natal; et c'est à leur mâle et patriotique appel qu'en novembre 1813 la hollande se releva de sa mort politique, uniquement par sa propre énergie, et sans aucun secours

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