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suivant la distance. Cette loi de 1831 ne fait d'ailleurs que modifier la loi adoptée dans le royaume des PaysBas, le 2 août 1822, qui avait fixé le délai à vingt jours. 6o L'art. 13 de la constitution belge, qui supprime la mort civile, et le décret du 11 février 1831, qui règle les effets transitoires de cette suppression.

7° La loi du 20 mai 1837, qui modifie les articles 726 et 912 du Code civil dans leur combinaison avec l'art. 11. Les étrangers peuvent recueillir en Belgique les successions ou donations, si les Belges sont admis à ces mêmes droits dans le pays de ces étrangers; ce droit de réciprocité n'a pas besoin d'être établi par des traités, il suffit qu'il existe et que le fait soit constaté d'une manière suffisante.

8° Nous n'avons pas cité comme loi modificative celle du 3 janvier 1824, qui exige la transcription des actes portant mutation des biens immeubles, dans les deux mois du dernier jour du délai fixé pour l'enregistrement, sous peine de double droit, etc. Quoique cette loi fiscale ait eu pour résultat, en général, d'exciter à faire la transcription, ce n'est pas là un principe de droit civil, et la loi de 1824 ne change rien, en droit, au système établi par les articles 1583 et 2181, Code civil, 834 et 835, Code de procédure civile.

CH. N. OULIF.

XXVI. De la responsabilité des propriétaires de navires.

Par M. BERGSON, docteur en droit.

Un projet de loi sur la responsabilité des propriétaires de navires, destiné à modifier la rédaction de Tarticle 216 du Code de commerce et présenté pour la

seconde fois à la Chambre des députés, vient d'être adopté par elle. Il ne sera donc pas sans intérêt d'examiner, sous le rapport historique et comparatif, une des plus anciennes controverses du droit maritime.

Deux principes se sont trouvés en présence dans cette grave question, l'un dérivé du droit romain, l'autre du droit coutumier. Le premier impose à l'armateur d'un navire une responsabilité illimitée pour les actes passés par le capitaine dans les limites de son pouvoir; mais le droit coutumier du moyen âge n'a admis cette responsabilité que jusqu'a concurrence de la valeur du navire. Cette coutume nous apparaît pour la première fois dans le Consulat de la mer, dont l'autorité a été également reconnue en Espagne, sa terre natale, à Marseille et en Italie. Nous la retrouvons encore en Hollande, où son existence est constatée par les nombreux écrits sur le droit maritime, tels que ceux de Grotius, Bynkershoek, etc. Cette coutume a aussi passé dans le statut de Hambourg. Toutefois, les autres lois maritimes de cette époque n'en contiennent aucun vestige, et le statut de l'île de Wisby paraît même admettre le principe romain. C'est dans l'article 68 de ce statut qu'a été puisée la disposition de l'article 298 du Code de commerce, article qui a donné lieu à tant de laborieux travaux, de commentaires et d'interprétations. En vain on a voulu justifier par des institutions du droit romain cette responsabilité ainsi limitée en Hollande, par exemple, des auteurs l'ont fait remonter à la noxæ datio des Romains; mais, quoiqu'on ne puisse nier l'existence de plusieurs points de rapprochement entre ces deux espèces de libération par délaissement,

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Barels, Parere (Advyzen) 4.

l y a toujours cette différence fondamentale, que la noxæ datio ne frappait que la chose même qui était la cause immédiate d'un dommage. La raison de la coutume n'est autre que celle indiquée au chapitre 236 du Consulat de la mer: « Si le navire périt, c'est assez que cette perte soit pour le compte des quirataires.» Malgré l'influence que la coutume a exercée sur les lois rédigées à cette époque, et sur la jurisprudence des tribunaux, elle n'est pourtant point parvenue ici à se substituer entièrement au droit romain, comme elle l'a fait, par exemple, dans la question analogue de l'obligation directe qui pèse sur le mandant par les faits du mandataire, principe sanctionné par toutes les législations actuelles, et reconnu dans les pays mêmes où le droit romain a conservé sa vigueur. Mais, quoique le principe coutumier n'ait pas triomphé entièrement du principe romain, il a su se conquérir une part imposante dans toutes les législations modernes. En France notamment, depuis plusieurs siècles, la coexistence des deux principes a produit une incertitude fort grande, et qui s'est continuée sous l'empire de l'ordonnance de 1681. Emérigon et Valin s'étaient alors constitués les défenseurs des deux principes, et cetle controverse n'a pas cessé par la promulgation du Code de commerce, malgré l'attention que le Conseil d'état apporta à la discussion de l'article 216. La persévérance avec laquelle la Cour de cassation et plusieurs auteurs ont soutenu un système mixte entre la théorie romaine et celle de la coutume se trouve suffisamment expliquée, non-seulement par l'autorité imposante du droit romain et par l'origine que les auteurs hollandais ont cherchée à ce mode de délaissement dans la похӕ datio, mais même par l'analogie de plusieurs législa

tions étrangères. Je cite d'abord le Code de commerce d'Espagne '.

Art. 621. L'armateur est responsable des dettes et obligations contractées par le capitaine de son navire, pour le réparer, le mettre en état et l'approvisionner; il ne peut éluder cette responsabilité en alléguant que le capitaine a excédé ses pouvoirs, ou a agi contre ses ordres et instructions, pourvu que le créancier justifie que la somme réclamée a tourné au profit du navire. Art. 622. L'armateur est encore responsable des indemnités dues aux tiers par suite de la conduite qu'a tenue le capitaine à l'égard des effets chargés sur le navire; néanmoins, il pourra s'en décharger par l'abandon du navire avec ses accessoires, ainsi que du frêt dû pour le voyage.

Le Code espagnol a évidemment distingué entre les engagements contractés par le capitaine et les faits de ce dernier qui peuvent donner lieu à des indemnités. Ce n'est que pour celles-ci que ce Code accorde aux armateurs la faculté de se libérer par l'abandon du navire; dans les autres cas, ils restent obligés sur tous leurs biens.

Les dispositions du Code prussien sur la matière ne sont pas moins dignes de remarque, et consacrent la même règle.

Code général des États prussiens, II. partie, titre 8*. Aux termes de l'article 1524, la vente du navire faite par le capitaine, sans autorisation préalable, est nulle. L'article 1525 continue: A l'égard des autres engage

I Traduit par M. Foucher: Collection des lois civiles et criminelles des états modernes, 6e livraison.

* Traduction officielle de l'an X.

ments contractés par le capitaine relativement au navire pendant le voyage, les armateurs en sont tenus, comme l'est un chef de commerce des faits de son facteur ou gérant.

Art. 1526. Les armateurs ne peuvent alléguer contre ces sortes d'obligations, que le patron a transgressé le mandat qu'il avait reçu.

Art. 1528. Les armateurs sont responsables des dommages éprouvés par la cargaison ou par les passagers, du fait du patron ou de l'équipage, en tant que l'auteur du dommage ne peut lui-même le réparer.

Art. 1529. Cependant les armateurs peuvent se libérer de ces sortes d'obligations, qui procèdent des faits du patron, en abandonnant leur part dans le navire et tous les profits qu'ils en ont retirés dans la traversée.

La faculté de l'abandonnement n'est donc admise qu'à l'égard de la responsabilité résultant des dommages éprouvés par suite de la faute du patron, ou, comme l'exprime l'article 1529 de ce Code, presque dans les mêmes termes que l'article 216 du Code de commerce, pour les obligations qui procèdent du fait du patron. Les articles 1532 et 1533 ne sont pas en contradiction

avec ce résultat.

Art. 1532. En ce qui concerne les délits, les armateurs n'en sont garants que dans le cas où un chef de commerce est responsable des délits de son facteur.

Art. 1533. Mais, d'autre part, l'abandon du navire n'est pas alors admissible.

Evidemment ces deux articles ne sont relatifs qu'au droit pénal, ce qui ne paraîtra pas étonnant dans une législation où les lois civiles, commerciales et pénales se trouvent réunies dans le même Code.

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