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président et le secrétaire, choisis indifféremment dans l'un des deux éléments dont se composent les commissions.

La commission ne peut délibérer que s'il y a trois membres présents, dans les commissions de trois ou cinq personnes, et cinq, dans les commissions de sept membres.

Elle peut s'adjoindre des notables commerçants, avec voix consultative, pour l'établissement des tarifs; elle désignera des experts, si elle le juge utile pour l'estimation des dommages; les frais d'expertise seront à la charge de l'administration.

VI.- La loi du 29 janvier 1881, sur la marine marchande, n'a-t-elle pas étendu le droit de réquisition de l'autorité maritime, à l'égard des navires, bateaux, embarcations, en état de tenir la mer?

Nous avons examiné déjà une question analogue, au sujet du droit de réquisition de l'autorité militaire, dans les explications que nous avons données plus haut, sur le titre II de la loi et du décret de 1877 (1).

Le titre VII de la loi et du décret de 1877 ne semble guère avoir prévu que les réquisitions effectuées par l'autorité maritime, dans les eaux territoriales. Des contestations pouvaient s'élever pour les réquisitions à exercer en pleine mer, par les officiers de la marine de l'Etat. Le paragraphe 8 de l'article 9 de la loi du 29 janvier 1882, en stipulant que: « En cas de guerre, les navires de commerce peuvent être réquisitionnés par l'Etat,» a levé tous les doutes qui étaient susceptibles de s'élever sur la question. Le principe de la liberté des mers est étranger aux rapports qui existent entre les bateaux de la marine marchande et les navires militaires de leur propre Etat. Ce principe ne peut donc être ici un obstacle au droit. de réquisition et, par conséquent, il est certain désormais que, par application du paragraphe de l'article 9 précité, les bateaux de la marine marchande française, peuvent être réquisitionnés en pleine mer ou dans les ports étrangers, en cas de guerre, par les officiers de la marine de l'Etat.

1. V. suprà, p. 204.

TITRE VI

DES RÉQUISITIONS AYANT POUR BUT LA FORMATION DES

APPROVISIONNE

MENTS NÉCESSAIRES AUX HABITANTS DES PLACES DE GUERRE.

(Article 7 de la loi du 3 juillet 1877. Loi du 3 mars et règlement d'administration publique du 3 juin 1890. — Décret du 12 mars 1890).

I. Une des conclusions qui se dégage de l'étude qui précède est qu'en principe la réquisition n'est applicable qu'aux besoins de l'armée. Il y a cependant une circonstance importante où il peut être indispensable d'y recourir, en dehors de ce cas : c'est quand il s'agit des approvisionnements nécessaires à la subsistance de la population civile des places de guerre. Comme l'observait M. le baron Reille, dans son rapport à la Chambre des Députés (1) : « En cas de blocus ou de siège, les habitants de ces places voient, en effet, leur sort intimement lié à celui de la garnison, ils ont droit, de la part de l'autorité militaire, aux mêmes soins que les défenseurs actifs, dont ils partagent les dangers et les privations. La limite de la résistance est la plupart du temps marquée par l'épuisement des moyens d'existence de la population enfermée dans la place: la justice et l'intérêt de la défense concouraient donc à réclamer une légère dérogation au droit commun, » dérogation qui a été prévue en ces termes par l'article 7 de la loi du 3 juillet 1877 : « En cas d'urgence, sur l'ordre du Ministre de la guerre ou de l'autorité militaire supérieure chargée de la défense de la place, il peut être pourvu, par voie de réquisition, à la formation des approvisionnements nécessaires à la subsistance des habitants des places de guerre. »

D'un autre côté, le règlement du 23 octobre 1883 sur le service dans les places de guerre et villes de garnison s'est préoccupé d'as

1. V. Journal officiel, loc. cit., p. 6480.

surer la conservation et l'augmentation des approvisionnements des places de guerre. Car, après avoir stipulé dans l'article 198, au sujet des Devoirs du général commandant d'armée, que « les gouverneurs de places et les commandants de forts isolés, situés dans la zone d'une armée ou d'un corps d'armée agissant isolément, sont sous les ordres du commandant de cette armée ou de ce corps d'armée, » il ajoutait qu'« en territoire national, celui-ci ne peut ni toucher aux approvisionments de guerre et de bouche formant la dotation normale de la place, ni faire aucune réquisition de vivres ou de matériel dans son périmètre...

« Si la place est menacée d'un siège, il complète la garnison et les approvisionnements par tous les moyens qui sont en son pouvoir. » Quelques difficultés s'étant élevées sur la manière d'entendre le périmètre de la zone de réquisition réservée par l'article 198 en question, une note du Ministre de la guerre en date du 21 janvier 1884 (1) les résolut de la manière suivante: « Par analogie avec les dispositions des décrets du 3 mars 1874 et du 8 septembre 1878, au sujet de la réglementation des travaux mixtes, on doit entendre par zone de réquisition réservée pour les places pourvues d'une simple enceinte, pour celles entourées de forts détachés, pour les groupes d'ouvrages réunis sous l'autorité d'un gouverneur unique, la zone de terrain qui comprend toutes les communes dont le centre (représenté par la mairie) est situé dans un rayon de dix kilomètres en avant des ouvrages les plus avancés. — Pour les forts isolés, il n'y a aucune zone de réquisition réservée.

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Une autre note du 6 juillet 1877 (2) complète la première, en ces termes: «Dans le périmètre tracé par les saillants des ouvrages les plus avancés, le droit aux réquisitions de toute nature est exclusivement réservé au gouverneur. En dehors de ce périmètre et jusqu'à la limite de la zone myriamétrique, les commandants de troupes actives concentrées dans cette zone peuvent exercer le droit de réquisition, à charge d'en donner avis au gouverneur, mais seulement en ce qui concerne les vivres et les fourrages. Le gouverneur conserve d'ailleurs le droit de requérir dans cette zone tous les éléments nécessaires à la défense. »

1. V. Journal militaire officiel, P. R., 1er semestre 1884, no 10, p. 124.

2. V. Bulletin officiel du Ministère de la guerre, P. R., 2o semestre 1887, no 46, p. 11 et 12.

Le même règlement du 23 octobre 1883, après avoir indiqué, le rôle du comité de surveillance des approvisionnements de siège dans la réception et la conservation des denrées destinées aux troupes qui défendent la place (art. 214 de ce règlement complété par l'article 71 de l'instruction du 30 août 1885), ajoute: « A la fin de chaque mois le sous-intendant militaire adresse au président du comité l'état de situation des approvisionnements de siège du service des subsistances, de l'éclairage et du chauffage..... Le comité signe cet état et l'envoie au gouverneur, pour être transmis hiérarchiquement au Ministre. Le comité peut, en outre, toutes les fois qu'il le croit utile, faire le recensement des denrées et du matériel existant dans les magasins d'approvisionnements. Il fait connaitre au gouverneur celles qui ne peuvent plus, sans danger d'altération, être conservées au delà d'une période de temps déterminée, et propose les moyens de les employer utilement. Le gouverneur statue. » (art. 216)

Puis le règlement sur le service des places parlant de l'approvisionnement de la population prescrit en ces termes des mesures semblables: << Legouverneur fait exercer par l'autorité civile une surveillance analogue sur les approvisionnements constitués pour les besoins de la population. Il fait procéder également au recensement des denrées qui peuvent exister chez les particuliers, et règle, au moyen du droit de réquisition, l'emploi et la répartition des ressources de toute nature existant dans la ville, quelle que soit leur provenance, en vue de prolongation de la défense. » (art. 217)

Telles étaient, en dehors des instructions ministérielles, les principales dispositions sur la matière. Ni la loi du 3 juillet 1877, ni le décret du 23 octobre 1883 n'avaient ouvert le droit de réquisition à l'autorité civile.

Bien plus, la commission chargée par le Ministre de la guerre de préparer le projet devenu la loi de 1877 avait songé à introduire sur ce point « une disposition particulière aux places assiégées ou bloquées, et aux termes de laquelle il pouvait être également pourvu par voie de réquisitions faites de concert par les autorités civiles et militaires à la formation des approvisionnements nécessaires à la subsistance des habitants des places de guerre (1). »-« Le Conseil d'Etat,

1 Rapport de la commission cité par M. Hély d'Oissel, à la séance de la Chambre des Députés du 25 février 1890, Journal officiel du 26, p. 363.

saisi de cette rédaction, la supprima, considérant d'une part, que s'il s'agissait du concours apporté par l'autorité civile à l'autorité militaire pour préparer les réquisitions, ce concours était certain, et qu'en tout cas il pouvait être assuré par voie d'instruction ministérielle; et d'autre part, que l'introduction de ces mots l'autorité civile » constituait une atteinte portée au principe essentiel de la loi, que le droit de requérir appartient à l'autorité militaire exclusivement » (1).

Le dessein du législateur était donc bien avéré la réquisition n'était pas permise à l'autorité civile.

II.

a.) La question de l'approvisionnement de la population des places de guerre n'avait cessé d'attirer l'attention de l'administration de la guerre qui avait édicté dans des instructions ou des décisions non livrées à la publicité, les mesures destinées à former ou à entretenir cet approvisionnement par voie de réquisition ou autrement. Le 12 juin 1888, un décret rendu sur le rapport du Ministre de la guerre (2) institua une commission supérieure « composée de représentants des diverses administrations et services publics à l'effet de rechercher les voies et moyens pour assurer la nourriture de la population civile des places fortes en cas de guerre. » Les principes à suivre pour la solution des questions multiples soulevées par un problème aussi vaste et aussi complexe furent posés, et une commission locale, établie en chaque place pour y dresser le plan de ravitaillement (3).

La commission supérieure ayant terminé ses travaux, et les plans de ravitaillement dans lesquels étaient prévues jour par jour, pour chaque place de guerre, les diverses opérations à effectuer en vue d'assurer l'alimentation de la population étant achevées, la commission fut remplacée par le comité permanent des subsistances, créé en vertu d'un décret du 3 août 1889. Ce comité, dans lequel figuraient des représentants de tous les départements ministériels et de la plupart des grandes administrations et services publics, avait pour but d'aider le Ministre dans les difficultés d'exécution, et de combiner les

1. Discours de M. Hély d'Oissel, loc. cit.

2. V. Journal officiel du 13 juin 1888 le décret du 12 juin et le rapport qui le précède, p. 2445.

3. V. Journal officiel du 24 août 1888 le rapport du Ministre de la guerre, p. 3582.

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