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cette nullité frappe-t-elle sur les deux saisies?

Dans l'espèce de cette question, il a été jugé, par arrêt de la cour d'Orléans, du 9 février 1810 (roy. Hautefeuille, p. 390), que toutes les poursuites qui ont été faites postérieurement à la jonction sont également nulles, parce que, à compter de cette époque, les deux saisies n'en ont plus formé qu'une, et que la partie à laquelle cette saisie annulée appartient doit supporter tous les dépens.

Mais le même arrêt a jugé que la nullité de cette poursuite n'entraînerait pas la nullité de celle à laquelle elle avait été jointe, parce qu'avant la jonction il y avait deux poursuites, des intérêts distincts et séparés; en sorte que la partie dont la saisie était valable devait reprendre ses poursuites à partir de l'état dans lequel elles étaient au moment de la jonction. On pensera sans doute que cet arrêt concilie les conséquences qui résultent de la jonction des saisies avec les principes de la justice, qui ne permettent pas qu'une partie souffre préjudice d'une faute imputable à un tiers.

[Nous adoptons avec Thomine, no 822; Dalloz, t. 24, p. 349, no 3, et Persil fils, Comm., p. 266, n° 509, l'opinion de Carré. Néanmoins nous conseillons aux avoués des deux saisissants de bien examiner respectivement chacune de leurs saisies avant de les laisser se fondre en une seule, car chacun des créanciers a le droit de se refuser à cette jonction, s'il y a une nullité dans celle de son cosaisissant.]

ART. 721. Faute par le premier saisissant d'avoir poursuivi sur la seconde saisie à lui dénoncée, conformément à l'article ci-dessus, le second saisissant pourra, par un simple acte, demander la subrogation(1).

Tarif, 119.[Tar. rais., nos 600, 601 et 602.]-C. de proc., art. 723, 724 et suiv. (Voy. FORMULE, 316.)

[2427 bis. Si la demande en subrogation est formée le même jour par,plusieurs créanciers inscrits, à qui appartiendra la poursuite?

la

Paignon, t. 1, p. 201, no 144, pense que, par analogie avec le cas prévu par l'art. 719, poursuite doit appartenir à l'avoué porteur du titre le plus ancien; et si les titres sont de la même date, à l'avoué le plus ancien.

Nous ne voyons pas d'objection à ce mode de faire cesser le conflit qui pourrait s'élever entre plusieurs créanciers.

Et comme le faisait observer Pascalis, dans son travail de 1838, p. 72, note 3, la poursuite appartient au créancier le plus diligent, et non pas à celui qui, le premier, se serait adressé au conservateur des hypothèques. C'est ainsi que pense Persil fils, Comm., p. 278, no 332.] 2428. Comment se forme la demande en subrogation? Comment est-elle instruite et jugée, et quels sont les effets du jugement?

Cette demande se forme non par requête, mais par un simple acte d'avoué à avoué, contenant seulement des conclusions auxquelles l'avoué adverse a droit de faire une réponse; l'incident se juge à l'audience, et, en vertu du jugement qui intervient, le second saisissant est chargé de poursuivre, tant sur la saisie qu'il a faite que sur la première, et, par conséquent, si elles ne sont pas toutes deux au même état, il surseoit aux procédures de la première, jusqu'à ce qu'il ait conduit l'autre au même degré, afin de continuer les poursuites comme si les deux saisies ne formaient qu'une seule et même saisie.

[Persil fils, Comm., p. 271, no 315, fait observer qu'il n'y a pas de nécessité d'un commandement de la part d'un créancier qui demande cette subrogation. Cela est évident, et la cour de cassation l'avait ainsi jugé, le 3 mars 1838 (Sirey, t. 38, 1, p. 521).

Dalloz, t. 24 p. 351, no 11, et Decamps, 2427. En quelles circonstances le premier p. 82, indiquent aussi la forme du simple acte; saisissant peut-il étre constitué en faute et la cour de Rennes a jugé, le 1er déc. 1828, de n'avoir pas poursuivi sur la seconde que le demandeur en subrogation ne peut pas saisie, de manière que le droit de deman-être forcé d'intervenir selon le mode fixé par der la subrogation soit acquis au second saisissant?

Le droit de faire prononcer la subrogation est acquis au second saisissant, si, depuis la

dénonciation faite de la seconde saisie au premier saisissant, celui-ci fait un nouvel acte sur la sienne, sans commencer les poursuites sur la seconde. (Voy. Delaporte, t. 2, p. 321, et Demiau, p. 455.)

[Cette solution nous paraît exacte.]

(1) Voy. Comment. de l'art. 719.

CARRÉ, PROCÉDURE CIVILE.—TONE V.

l'art. 339 du Code proc. civ. La cour de Lyon, 1er mars 1831 (Sirey, t. 31, 2o, p. 221), va jusqu'à admettre que la demande soit formée par des conclusions prises à la barre sans avenir préalable.] 2429. La subrogation doit-elle être prononcée contradictoirement avec la partie saisie.

Il n'en est pas question dans l'art. 721, mais Desevaux, dans son Traité sur la procédure en saisie immobilière, p. 45, pense qu'on doit notifier au saisi cette demande à personne ou domicile, s'il n'a pas d'avoué; telle est aussi notre opinion, fondée sur ce que le saisi est

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· LIV. V.

véritablement la partie principale, et que parfaites pendant la litispendance sont un attentat conséquent rien ne doit être fait à son insu.

[Nous partageons complétement cette opinion de Carré, qui est combattue par Persil fils, Comm., p. 271, no 316. Ce dernier auteur se fonde sur ce que le législateur a eu le soin d'imposer aux intéressés l'obligation d'appeler le saisi quand il voulait qu'il assistat aux autres actes de la saisie; mais on oublie que le saisi est assigné et partie à l'instance, et qu'il n'est nullement besoin que la loi parle pour qu'il soit évident que tout doit lui être signifié; il faudrait, pour que le contraire fût admis, qu'une défense de signification fût écrite dans la loi. L'art. 722 ne parle pas non plus du saisi, et cependant, comme on va le voir, on ne pourrait pas raisonnablement soutenir qu'un créancier peut faire juger en son absence qu'il s'est rendu coupable d'une fraude ou d'une collusion avec le poursuivant.

L'opinion que nous embrassons, s'étaye d'un arrêt de la cour de Caen du 22 février 1828; mais celle de Persil a, de son côté, l'autorité de la cour de Dijon, 28 mars 1828.

à l'autorité de la justice: elles ne peuvent donc être validées............. A plus forte raison, ne pourrait-on prononcer la subrogation que sous condition, puisque ce serait modifier la loi, dont la disposition est absolue.

Nonobstant ces observations, nous estimons que l'on doit décider négativement la question ci-dessus posée, parce que l'art. 721 se borne à déclarer que le second saisissant pourra demander la subrogation, et ne dit pas qu'il sera de plein droit subrogé, par cela seul qu'il aura fait la dénonciation de sa saisie. Si les juges étaient rigoureusement obligés à prononcer cette subrogation en sa faveur, il eût été inutile d'exiger qu'il obtint jugement. Au reste, ce qui nous confirme dans cette opinion, c'est qu'autrefois ils avaient le pouvoir d'accorder des délais. (Voy. d'Héricourt, chap. 6, no 24.) Or, nous ne trouvons dans le Code de procédure aucune disposition qui défende au juge d'en agir ainsi, et de là nous nous croyons fondé à conclure qu'il le peut, et que telle est l'intention du législateur.

Quant aux auteurs, Pigeau, Comm., t. 2, p. 359, dit, à la vérité, que la demande en subrogation n'a pas besoin d'être instruite contradictoirement avec le saisi; mais Dalloz, t. 24, p. 351, no 11, et Lachaize, t. 2, p. 92, profes-» sent l'avis opposé.]

2430. De la disposition de l'art. 721, résultet-il que le tribunal soit toujours tenu d'accorder la subrogation?

On peut dire, pour la négative, que cet article, loin d'exprimer que le second saisissant acquiert de plein droit la subrogation, porte au contraire qu'elle doit être demandée d'où suivrait, premièrement, que, dans le cas où l'avoué du premier saisissant se serait mis en règle depuis la demande en subrogation, mais avant le jugement de l'incident, le tribunal pourrait, en condamnant l'avoué aux dépens, le dispenser de la subrogation; secondement, qu'il pourrait même, lorsque l'avoué n'aurait pas fait ses diligences depuis la demande, ne l'accorder que conditionnellement, et dans le cas seulement où cet avoué ne se mettrait pas en règle dans un délai donné.

[Persil fils, Comm., p. 272, no 517, partage l'opinion de Carré, et dit avec raison que « le » droit de se décider d'après les faits, de les » apprécier, appartient aux tribunaux, quand la loi ne prescrit pas de rendre rigoureuse» ment telle décision dans un cas donné. »

La plupart des auteurs sont d'accord que l'appréciation des cas de subrogation est exclusivement dans le domaine des juges du fond; ainsi le pensent Pigeau, Comm., t. 2. p. 459, et Dalloz, t. 24, p. 356, no 6. Aussi la cour suprême a-t-elle jugé, le 23 janv. 1855 (Sirey, t. 35, 1, p. 105), que l'arrêt qui rejette une demande en subrogation, en se fondant sur ce qu'il n'y a ni négligence ni fraude de la part des poursuivants, est à l'abri de la cassation."

Un arrêt de la cour de Bourges du 18 avril 1826 a décidé néanmoins, conformément à l'opinion de Demiau, citée par Carré, et à celle de Dalloz, t. 24, p. 351, no 10, qu'autre chose était de reconnaitre ou d'apprécier l'existence d'un fait, autre chose était d'en tirer les conséquences légales; et que si la négligence du créancier était reconnue par le tribunal, il ne pouvait plus refuser la subrogation.

C'est avec raison que Favard, t. 5, p. 70, repousse cette doctrine. Sans doute les juges rejetteront rarement une demande en subrogation fondée sur des motifs réels; mais s'ils le font, ils ne violeront aucune loi.

Demiau, p. 436, s'élève avec force contre cette opinion, qui, suivant lui, consacrerait un abus et une injustice. Le droit de subrogation, dit-il, est pour les parties et non pour les avoués; il est absolu; il est acquis dès l'instant où il y a eu du retard dans l'exécution ART. 722. Elle pourra être également des formalités requises par la loi. D'un autre côté, dès que la demande en subrogation a été demandée en cas de collusion, fraude ou formée, le droit des parties, quant aux pour-négligence de la part du poursuivant. suites, est tout au moins en suspens; aucune d'elles n'a qualité pour les faire, jusqu'à ce que le tribunal en ait décidé; toutes poursuites,

Il y a négligence lorsque le poursuivant n'a pas rempli une formalité ou n'a pas fait un acte de procédure, dans les délais

prescrits, sauf, dans le cas de collusion ou Į p. 361, et Dalloz, t. 24, p. 350, no 8, citent fraude, les dommages-intérêts (1) envers encore d'autres cas de subrogation.] qui il appartiendra (2).

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10 Hors le cas prévu par les art. 721 et 722, les créanciers du saisi sont représentés dans l'instance en expropriation par le poursuivant, qui est seul mandataire légal; et par suite, la demande en intervention formée par l'un d'eux, sur l'appel d'un jugement rendu contradictoirement avec le poursuivant, serait non recevable. (Toulouse, 7 mai 1818; Sirey, t. 18, p. 232; Dalloz, t. 24, p. 346.)

Cette décision nous paraît en opposition formelle avec un arrêt de la cour de cassation, du 13 oct. 1812. (Dalloz, t. 24, p. 381; Sirey, t. 12, p. 42.) Cet arrêt déclare en termes exprès, que l'essence du mandat étant d'être volontaire, on ne connaît de mandat légal que celui qui résulte de la disposition expresse de la loi et qu'aucun article de celle du 11 brumaire an vii, sous laquelle ce même arrêt a été rendu, n'établit mandataire des créanciers du débiteur saisi que celui d'entre eux qui poursuit l'expropriation; que loin de là, l'art. 6 de cette loi charge expressément le créancier poursuivant de notifier la saisie réelle et les affiches individuellement aux créanciers inscrits, et que l'article 23 les autorise à proposer les nullités contre la procédure; ce qui est incompatible avec l'idée d'un mandat légal dans la personne du créancier poursui

vant.

Or, les motifs de cette décision sont les mêmes sous l'empire du Code de procédure. En effet, comme le remarque Coffinières, on ne peut soutenir que le poursuivant soit le mandataire de tous les créanciers, par cela seul qu'ils profitent comme lui de la vente de l'immeuble. Il en est, à cet égard, comme des obligations dont parle l'art. 1121 du Code civil, et le poursuivant n'agit dans l'intérêt des autres créanciers que parce que telle est la nature des poursuites qu'il dirige, qu'elles doivent profiter à tous ceux qui ont un droit réel sur l'immeuble.

Si on attribuait au poursuivant la qualité de mandataire, les créanciers inscrits ne devraient pas figurer dans les poursuites, puisqu'ils y seraient représentés; et cependant l'art. 695 du Code de procédure, aussi bien que l'art. 6 de la loi du 11 brumaire an vii sur les expropriations, renferme une disposition manifestement contraire.

D'ailleurs, dans la même hypothèse, les créanciers ne pourraient jamais exciper des nullités dans les poursuites, puisqu'ils devraient être réputés avoir commis eux-mêmes ces nullités, et l'on sait que l'art. 733 du Code de procédure dispose dans l'intérêt de la partie saisie : il est donc certain que le poursuivant n'est pas le mandataire des créanciers.

20 Sila demande en subrogation est portée à l'audience indiquée pour l'adjudication préparatoire, et si la

2431. En quelles circonstances la subrogation peut-elle étre ordonnée pour collusion, fraude ou négligence?

La subrogation peut être demandée en cas de collusion; par exemple, quand le poursuivant s'entend avec le saisi pour ne pas poursuivre; qu'il n'a entamé la saisie immobilière que pour empêcher les autres créanciers d'agir plus vivement; qu'il procède irrégulièrement, afin qu'en définitive la saisie soit déclarée nulle,

subrogation est accordée, il peut être passé outre de suite à l'adjudication, nonobstant la faculté d'appel accordée par l'art. 723. (Argum. de l'art. 733; arrêt de Riom, du 21 mars 1816, rapporté par Huet, p. 234 et 255; Dalloz, t. 24, p. 388.)

3o On ne peut demander la subrogation, sous l'appel d'un jugement qui a prononcé sur des nullités de la saisie. Cette demande, comme toute autre, doit nécessairement subir les deux degrés de juridiction. (Turin, 24 juill. 1810, Jurispr. des cours souv., t. 5, p. 398; Dalloz, t. 24, p. 355.)

40 La nullité du jugement en vertu duquel il a été procédé à la saisie, entraîne la nullité des poursuites, de telle sorte que la subrogation ne peut plus être prononcée en faveur d'un autre créancier second ou ultérieur saisissant (Paris, 29 avril 1809; Dalloz, t. 24, p. 400), attendu que la décision souveraine, qui déclare nul le jugement en vertu duquel il a été procédé à la saisie, la rend sans effet, et par conséquent toutes ses suites, dont la demande en subrogation fait partie. (Voy. nos Questions sur l'art. 734.)

50 De même que le payement du créancier poursuivant n'empêche pas la continuation des poursuites de saisie immobilière, s'il plaît à un autre créancier non payé de se faire subroger à la poursuite, ainsi le créancier qui est porteur de plusieurs créances, et qui poursuit à défaut de payement de l'une d'elles, peut, s'il vient à être payé du montant de cette créance, continuer sa poursuite à raison des autres créances non payées, pourvu qu'elles soient inscrites sur les biens saisis. (Grenoble, 14 juill. 1809; Sirey, t. 10, p. 366; Dalloz, t. 24, p. 353.)

60 Lorsque la demande en subrogation est fondée sur ce que le poursuivant n'a pas rempli une formalité, ou n'a pas fait un acte de procédure dans les délais de la loi, elle ne peut être accordée que dans le cas où la nullité résultant de ces contraventions n'a pas été opposée; et si elle l'a été, la subrogation ne peut être accordée que pour les poursuites antérieures aux actes nuls, si toutefois le vice de ces actes n'annule pas ces poursuites elles-mêmes.

70 Lorsque l'appel d'un jugement rendu sur une question de validité d'une saisie immobilière, a empêché les premiers juges de prononcer sur une demande en subrogation aux poursuites de cette saisie, formée par un créancier inscrit et intervenant, il appartient à la cour saisie de l'appel de statuer sur le mérite de l'intervention et sur la subrogation. (Cass., 26 déc. 1820; Dalloz, t. 24, p. 546; Sirey, t. 22, p. 56.)

[Nous pensons qu'un avoué ne peut, au nom de celui pour qui il agit, se subroger lui-même à la poursuite en saisie immobilière abandonnée par l'avoué poursuivant; la subrogation doit être autorisée par justice. (Limoges, 25 mars 1822.)]

et que le saisi conserve plus longtemps l'immeu- | l'art. 722, lie cet article au précédent, qui ble entre ses mains, etc.

En cas de fraude, quand ce n'est que par dol ou par ruse que le poursuivant se trouve le premier au lieu de n'être que le second saisissant; par exemple, s'il a fait antidater son procès-verbal de saisie; ce qui serait un faux de la part de l'huissier; mais ce qui n'en constituerait pas moins en apparence premier saisissant celui qui ne devrait pas l'être, etc.

En cas de négligence, comme le dit l'article 722, lorsque le poursuivant n'a pas rempli une formalité, ou n'a pas fait un acte de procédure dans les délais prescrits. Ainsi, par exemple, si on n'appose pas les placards, si on ne fait pas les annonces, si la publication n'a pas lieu au jour qu'elles ont indiqué, si la saisie n'est pas dénoncée dans le délai fixé par l'article 680, etc., il y a incontestablement négligence, et conséquemment ouverture à la demande en subrogation.

[Paignon, t. 1, p. 203, no 147, transcrit textuellement cette explication que Carré donne de l'art. 722.

Persil fils, Comm., p. 274, no 319, fait observer avec raison que « sur les faits de collu»sion, de fraude où de négligence, les tribu»naux ont le droit d'appréciation, et qu'ils » doivent apporter une grande prudence dans » leur examen.» (Voy. suprà, sous l'art. 721, la Quest. 2450.)]

2432. Le saisi pourrait-il se prévaloir de l'inobservation des délais pour empêcher la subrogation?

C'est principalement en faveur des créanciers, dont l'action est paralysée par une saisie transcrite, que le poursuivant est tenu d'agir dans des délais rigoureux : le saisi, dit Thomine, no 823, ne peut donc se prévaloir de la seule inobservation de ces délais pour empècher la subrogation.

[Dalloz, t. 24, p. 558, no 7, a trouvé cette décision trop rigoureuse.]

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2433. Le droit de demander la subrogation appartient-il indifféremment à tout créancier inscrit, ou seulement à un créancier

second ou ultérieur saisissant?

Des deux art. 721 et 722 réunis, et notamment du dernier, Tarrible (voyez Nouveau Répert., vo Saisie immobilière, p. 667), conclut que le droit de demander la subrogation ne peut appartenir qu'à un créancier qui a déjà fait une saisie.

Il se fonde, 1o sur ce que l'expropriation est une mesure si rigoureuse, qu'on ne doit ètre admis à en user que pour une cause bien déterminée, et après avoir mis le débiteur en mesure de l'empêcher; ce qui ne peut avoir lieu que de la part d'un créancier saisissant; 2o sur ce que le mot également, employé dans

n'accorde le droit de demander la subrogation qu'au second saisissant; 5o enfin, sur ce que l'art. 725 paraît exiger une saisie pour titre à la poursuite, puisque après la radiation d'une saisie, il autorise le plus diligent des saisissants postérieurs à poursuivre sur sa propre saisie, sans accorder la même faculté à un simple créancier inscrit qui n'aurait pas fait de saisie postérieure.

Tel est aussi l'avis de Merlin. (Voy. Nour. Répert., vo Subrogation de personnes, section 1re, n° 7, t. 12, p. 246.) Il a été adopté par un arrêt de la cour d'Orléans, du 19 janvier 1811 (Dalloz, t. 24, p. 352; Sirey, t. 15, p. 159), qui a jugé en point de droit que, pour qu'il y ait lieu à subrogation en matière de saisie immobilière, il faut que celui qui forme cette demande soit saisissant, le créancier seulement inscrit n'ayant que l'action ordinaire contre le débiteur, à fin de payement de sa créance. (Voy. Hautefeuille, p. 390.)

Pour l'opinion contraire, on peut citer deux arrêts de rejet, rendus par la cour de cassation, sous l'empire de la loi du 11 brumaire an vii, et qui seront bientôt rapportés; un arrêt de la cour d'Aix, rendu le 7 avril 1808 (Dalloz, t. 24, p. 351; Sirey, t. 13, p. 159), par application des dispositions du Code; le sentiment de Pigeau, liv. II, part. 5, tit. IV, ch. 1er, art. 2,§ 6, t. 2, p. 255; de Lepage (voy. Traité des saisies, p.170); de Demiau, p. 453, et enfin de Persil, liv. III, sect. 7, art. 2, § 1o.

C'est cette dernière opinion que nous croyons devoir adopter par les motifs détaillés ci-après.

Nous convenons que si la saisie n'a pas été notifiée aux créanciers, nul autre qu'un saisissant n'a le droit de se faire subroger. Le poursuivant peut abandonner la saisie; il peut consentir à sa radiation, sans qu'aucun créancier puisse s'y opposer.

Mais lorsque le placard d'affiches a été notifié aux créanciers inscrits (art. 695); que par cet acte la saisie leur est devenu commune, ils ont des droits acquis dont le poursuivant ne peut les priver, soit par négligence, soit par

son consentement à la radiation de la saisie.

(Art. 696. Voy. Pigeau, ubi suprà, les quatre premiers considérants de l'arrêt de la cour d'Aix, et notre Quest. 2340.)

Or, dans le cas où il n'y a qu'une seule saisie, dans celui où il y en a deux, mais où le second saisissant ne demande pas lui-même la subrogation, si un créancier inscrit ne pouvait pas se faire subroger dans la poursuite, la negligence du poursuivant, la collusion ou la fraude dont il se rendrait coupable équivaudraient à la radiation de la saisie, puisqu'il n'y aurait aucun moyen de la conduire à sa fin. (Voy. cinquième considérant de l'arrêt de la cour d'Aix.)

Nous pourrions répondre à plusieurs objec

tions que l'on puiserait au Nouveau Réper- | toire, vo Saisie immobilière. Persil les a détruites, et il est inutile de s'y arrêter.

Il nous suffira de faire remarquer que, sous la loi du 11 brumaire an VII, qui ne renfermait aucune disposition sur la question qui nous occupe, la cour de cassation, par arrêts des 15 et 19 germinal an x1, et du 10 pluviòse an XII, a décidé qu'il suffisait d'être créancier direct du saisi pour obtenir la subrogation. A plus forte raison peut-on dire aujourd'hui que si les créanciers avaient ce droit, sous l'empire de cette loi, qui ne contient aucune disposition sur la subrogation, on ne peut le contester aujourd'hui qu'il existe des dispositions formelles sur la subrogation. (V. le neuvième considérant de l'arrêt d'Aix.)

Au surplus, nous croyons que toute difficulté doit cesser par le motif suivant, qui, en effet, nous semble décisif :

C'est que, pour décider que le législateur, par les art. 721 et 722, n'a entendu accorder l'avantage de la subrogation qu'à un créancier saisissant, il faut nécessairement admettre que le créancier non saisissant puisse lui-même faire une saisie, lorsque le premier ou le second saisissant ne poursuit pas ou se rend coupable de collusion, de fraude ou de négligence; autrement, il serait libre à un saisissant unique d'arrêter les poursuites des créanciers, en arrêtant les siennes; il serait également libre à un second saisissant, qui aurait obtenu la subrogation contre le premier, d'agir de la même manière.

Or, les créanciers seront-ils réduits à le laisser faire ou à laisser substituer le premier saisissant qui se serait déjà rendu suspect? Non sans doute, il y aurait en cela une extrême injustice.

Dira-t-on que le créancier le plus diligent doit saisir?

Mais il en est empêché par le principe que saisie sur saisie ne vaut; principe qui se trouve évidemment consacré par l'art. 679, puisqu'il ordonne au conservateur de refuser d'inscrire une seconde saisie: on doit donc décider, dans le cas de l'art. 722, que l'intention du législateur a été d'accorder aux créanciers inscrits, lorsqu'il n'y a point de seconde ou subséquente saisie, le droit de se faire subroger dans les poursuites.

2434. La demande en subrogation est-elle autorisée dans l'espèce de l'art. 721, comme nous venons de dire qu'elle l'était dans l'espèce de l'art. 722?

Parmi les auteurs que nous avons cités à l'appui de la solution que nous venons de donner sur la précédente question, plusieurs pensent qu'on ne doit pas l'étendre à l'espèce prévue par l'art. 721. Ainsi, Demiau, p. 433, dit que le droit de subrogation n'est pas, dans

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l'hypothèse de l'art. 722, exclusivement propre à une seule partie, comme dans celle de l'article 721, où il n'appartient qu'à un second saisissant. Persil, après avoir discuté la même question, conclut que les créanciers ont droit à la subrogation, mais lorsqu'il n'y a point de seconde ou précédente saisie. Ces auteurs n'ont sans doute adopté cette distinction que par suite des mots second saisissant, qui se trouvent dans l'art. 721, et que le législateur n'a pas répétés dans l'article 722. Mais pour peu qu'on réfléchisse sur les raisons ci-devant exposées, on reconnaîtra que la plupart d'entre elles, et surtout les dernières, s'appliquent aux deux hypothèses. Si l'on admet que l'art. 722 autorise la subrogation en faveur d'un créancier, dans tous les cas de collusion, fraude ou négligence, les mêmes motifs de justice, les mêmes raisons de droit exigent qu'on l'autorise dans le cas de suspension des poursuites, qui est celui de l'art. 721.

Il reste donc à répondre à l'argument tiré de ce que ce dernier article désigne nommément le second saisissant. Or, il nous paraît certain que cet article ne le désigne qu'afin de lui accorder la préférence; ce qui est juste, puisque, s'étant mis en devoir de poursuivre, il a nécessairement acquis un titre de plus que les autres créanciers à devenir poursuivant.

Mais s'il ne demandait pas à jouir de cette prérogative, s'il n'usait pas de cette faculté de se faire subroger, qui ne lui est donnée, selon nous, que pour faire une chose utile à la masse des créanciers, nous estimons qu'il serait injuste de refuser au plus diligent d'entre eux de faire cette demande à sa place.

Aux arrêts d'Aix et de la cour de cassation, contraires à celui d'Orléans, tous cités sur la question précédente, nous ajoutons, en faveur de la solution de celle-ci, les arrêts de Rouen, du 16 germinal an XI (Sirey, t. 3, p. 224), celui de Riom, du 2 mars 1816, rapporté par Huet, p. 252, un arrêt de Rennes, du 24 avril 1817, qui a formellement résolu la question, et l'art. 119 du tarif qui rappelle les art. 721 et 722 du Code, sans les distinguer d'où suit évidemment que la demande en subrogation est autorisée dans l'espèce de l'art. 721, comme dans celle de l'art. 722. (Dalloz, t. 24, p. 351 et suiv.)

L'arrêt de Rennes que nous venons de citer n'est point motivé, attendu que la cour déclare adopter les motifs des premiers juges. Comme ils présentent de fortes raisons à l'appui de notre opinion, nous les transcrirons ici :

« 1o Dans l'ancienne pratique, les exposants >> pouvaient demander la subrogation, et de>> puis la notification prescrite par l'art. 696, » les créanciers auxquels on l'a faite sont par»ties dans l'instance de saisie, et doivent être >> assimilés aux créanciers opposants.

» 2o Depuis cette notification, la saisie ne

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