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PAR LA DIVINE PROVIDENCE PAPE, IXme DU NOM,

DANS LE CONSISTOIRE SECRT DU 3 JUILLET 1848, ANNONÇANT LE CONCORDAT CONCLU AVEC L'EMPEREUR DE RUSSIE.

VÉNÉRABLES FRÈRES,

Vous savez bien, Vénérables Frères, que, dans Notre ardente sollicitude pour tout le troupeau du Seigneur à Nous divinement confié, dès les premiers momens de Notre Pontificat suprême, suivant les traces illustres de Notre Prédécesseur de récente mémoire, Grégoire XVI, Nous avons, avec l'application la plus soutenue, tourné tous Nos soins, toutes Nos pensées à régler les choses de Notre trèssainte Religion dans les immenses domaines du Sérénissime et trèspuissant Prince, illustre Empereur de toutes les Russies et Roi de Pologne. Vous savez encore que dès-lors Nous munîmes de Nos pleins pouvoirs Notre Vénérable Frère Louis Lambruschini, Evêque de Porto, Sainte-Ruffine et Civita-Vecchia, Cardinal de la Sainte Eglise Romaine, homme distingué par sa piété singulière, sa prudence, sa doctrine et son habileté à traiter les affaires ecclésiastiques, et que Nous lui donnâmes pour Aide, dans une affaire de si grande importance, Notre Fils bien-aimé Jean Corboli-Bussi, Prélat de Notre maison, afin qu'avec le Noble Comte de Bloudoff, Envoyé extraordi

nairement vers Nous et muni de pleins pouvoirs pour le Sérénissime Prince, et aussi avec le Noble Comte de Boutenieff, Envoyé Extraordinaire et Ministre Plénipotentiaire du même Prince auprès de Nous et de ce Siége Apostolique, il entreprît sur des points divers et d'un intérêt majeur pour l'Eglise dans cet immense Empire, un traité qui Nous permit d'amener en ces contrées la Religion catholique à une condition meilleure' et de pourvoir plus facilement au salut de ces brebis bien-aimées. Or, en ce jour, Nous Vous annonçons quels fruits ont produits, par le secours de Dieu, Nos sollicitudes et Nos soins dans cette grande affaire de l'Eglise catholique. Et d'abord, Nous Vous faisons part, Vénérables Frères, de ce qui est pour Notre cœur une souveraine consolation : dans ce Consistoire même, Nous pouvons rendre la joie, au sein de cet empire, à plusieurs Eglises du Rite latin misérablement affligées par un long veuvage et les confier à de dignes Pasteurs. Bientôt Nous pourrons également, soit dans cet Empire, soit dans le Royaume de Pologne, pourvoir des Eglises depuis longtems vacantes et leur donner des Pontifes qui s'efforcent de conduire dans la voie du salut le troupeau remis à leur garde. Il a été réglé que dans la ville de Kherson un nouveau Siége épiscopal sera érigé, avec son College de Chanoines et son Séminaire, suivant la loi du Concile de Trente, et avec un suffragant dans la ville de Saratow: les six autres Diocèses du Rite latin déjà existants dans l'Empire seront circonscrits par de nouvelles limites, comme Vous le feront connaître les Lettres Apostoliques que, selon l'usage, Nous avons ordonné de publier sur ce sujet. Quant aux Diocèses du Royaume de Pologne, aucun changement n'aura lieu dans leur circonscription, qui doit être maintenue, aux termes des Lettres Apostoliques du 30 juin 1818, de Notre prédécesseur Pie VII, d'heureuse mémoire. Nous avons mis tous Nos soins à assurer aux Evêques la pleine et entière administration des choses ecclésiastiques dans leurs diocèses respectifs, afin que suivant le devoir de leur charge pastorale, ils aient la puissance de protéger la Foi, d'exciter le zèle pour la Discipline ecclésiastique, de former les fidèles à la religion. et à la piété, de régler leurs mœurs, et de remplir à l'égard des jeunes gens, surtout de ceux qui sont appelés à devenir le partage du Seigneur, les prescriptions si sages, si pleines de prévoyance du

Concile de Trente, les portant ainsi à toutes les vertus, les instruisant dans tout ce qui est bon, les élevant dans les saines doctrines, imprimant à l'Académie ecclésiastique une sage direction et exerçant sur elle une surveillance vigilante. Comme dans cet Empire se trouvent des Catholiques de rites divers, ceux d'entre eux qui n'ont point d'Evêques de leur propre rite sont par là même, personne ne l'ignore, sous la juridiction de l'Evêque latin, et doivent recevoir de lui ou des prêtres approuvés par lui les sacremens divins et les autres secours spirituels. Cependant le nombre des Arméniens catholiques dépourvus d'Evêques de ce rite étant fort grand dans le diocèse de Caménetz et dans le nouveau diocèse de Kherson, Nous avons voulu pourvoir d'une manière plus particulière à leurs besoins spirituels. C'est pourquoi il a été établi que jusqu'à ce qu'ils aient un Evêque propre, non-seulement on observera à leur égard ce que prescrit le Ch. IX du IV Concile de Latran, mais encore que les Evêques de Caménetz et de Kherson devront recevoir dans leurs séminaires et y faire instruire soigneusement par un prêtre catholique arménien un nombre déterminé par eux de clercs arméniens.

Nous négligeons de rappeler plus en détail ce que Vous pourrez voir pleinement dans les divers articles de la Convention que Nous croyons devoir faire publier avec cette Allocution. Nous avions déclaré approuver ces articles avant que le très-puissant prince Empereur de toutes les Russies et Roi de Pologne eût fait connaître qu'il les acceptait, alors que rendu plus certain de la bonne et bienveillante volonté de ce Sérénissime Prince, nous ne pouvions pas douter que lui-même ne les revêtît de sa sanction, ainsi que cela a eu lieu à notre grande joie.

Voilà, Vénérables Frères, ce que Nous avons commencé et ce que Nous avons fait jusqu'à présent pour régler les affaires de l'Église catholique dans l'Empire de Russie. Beaucoup d'autres choses, et de la plus grande importance, restent encore, que, dans le traité, les Plénipotentiaires n'ont pu mener à fin, et qui, cependant, excitent Nos plus vives sollicitudes et Nous remplissent d'angoisse, car elles touchent au plus haut degré à la liberté de l'Église, à ses droits, à ses fondemens et au salut des Fidèles de ces contrées. Nous voulons parler, Vénérables Frères, de la véritable et entière liberté à assurer

aux Fidèles de pouvoir, dans les choses relatives à la religion, communiquer sans aucun obstacle avec ce Siége Apostolique, centre de l'unité et de la vérité catholique, père et maître de tous les Fidèles; sur ce point, quelle n'est pas Notre douleur! Chacun peut aisément le comprendre en se rappelant les réclamations multipliées que ce Siége Apostolique n'a cessé de faire entendre dans la diversité des tems, pour obtenir cette libre communication des Fidèles, non-seulement en Russie, mais encore en d'autres contrées où, en certaines affaires de religion, elle est empêchée au grand détriment des âmes. Nous voulons parler des biens à restituer au clergé; Nous voulons parler de la personne laïque, choisie par le Gouvernement, à faire éloigner des Consistoires des Evêques, afin que dans ces assemblées les Evêques aient toute leur liberté; Nous voulons parler de la loi d'après laquelle, dans cet empire, les mariages mixtes ne sont reconnus valides qu'après avoir été bénis par le prêtre catholique grécorusse; Nous voulons parler de la liberté que les catholiques devraient avoir de faire examiner et juger leurs causes matrimoniales, en matière de mariages mixtes, par un tribunal ecclésiastique catholique; Nous voulons parler de diverses lois, en vigueur dans ce pays, qui fixent l'âge requis pour la profession religieuse, qui détruisent entièrement les écoles dans les familles d'Ordres religieux, qui écartent absolument les Supérieurs provinciaux, qui défendent et interdisent la conversion à la Religion catholique. Une immense sollicitude nous presse encore pour tous ces Fils bien-aimés de l'illustre nation ruthénienne, qui, oh! douleur ! par la malheureuse et à jamais déplorable défection de quelques Evêques, sont misérablement dispersés dans ces vastes régions, dans l'état le plus lamentable, et exposés pour leur salut aux plus grands périls; car ils n'ont pas d'Evêques pour les gouverner, pour les conduire aux paturâges salutaires et dans les voies de la justice, pour les fortifier par les secours spirituels, pour les défendre des piéges trompeurs que leur tendent des ennemis pleins d'astuce. Toutes ces douleurs ont tellement pénétré au fond de Notre âme que, par la grâce de Dieu, Nous n'omettrons rien de ce que peuvent le zèle et la sollicitude pour arriver enfin à régler ces affaires si graves de la Sainte Église. Nous ne perdons pas l'espérance, Le Noble Comte de Bloudoff, quittant cette ville pour retour

ner à Pétersbourg, Nous a promis, avec les expressions les plus propres à persuader, de porter à S. M. Impériale et Royale Nos désirs et Nos demandes, d'avoir soin de les appuyer au moins en très-grande partie, et de déclarer de vive voix tout ce que, dans l'éloignement, il lui eût été difficile d'expliquer.

Nous avons appris naguère, et Notre âme en a été remplie de joie, que le Sérénissime Prince donnait son consentement à ce que le nouvel Evêque de Kherson eût un second suffragant, et de plus à ce que, dorénavant, les causes matrimoniales et les autres causes ecclésiastiques, soit dans l'Empire de Russie, soit dans le Royaume de Pologne, après la première sentence rendue par l'Ordinaire propre, seront portées, en second degré de juridiction, ou, selon l'usage, au tribunal du Métropolitain, ou si le Métropolitain a jugé en première instance, à l'Evêque le plus voisin, muni à cet effet par ce · Siége Apostolique de pouvoirs spéciaux dont la durée se prolongera autant qu'il sera nécessaire; et enfin à ce que, pour les appels en dernier ressort, toutes ces causes soient portées, à Rome au tribunal même du Siége Apostolique. Notre joie n'a pas été moins vive d'apprendre, par les dernières nouvelles reçues de cette Cour impériale et royale, que le même Prince Sérénissime s'occupe sérieusement des autres affaires que Nous avons rappelées, et que Nous pouvons nourrir l'espérance de les voir résolues d'une manière heureuse. Nous avons donc en ce moment une plus grande confiance de voir ce Sérénissime et très-puissant Prince, dans son équité, sa justice, sa prudence et la grandeur de son âme élevée, se rendre à Nos. désirs et à Nos demandes si justes, et de pouvoir bientôt Vous annoncer que tout ce qui concerne l'Eglise catholique dans ces contrées est terminé comme Nous le souhaitons avec tant d'ardeur.

La condition déplorable des Ruthéniens est surtout ce qui déchire Notre cœur et le tourmente; c'est pourquoi Nous protestons de nouveau que, selon le devoir de Notre Ministère apostolique, Nous ne cesserons jamais de faire tous nos efforts pour parvenir à leur procurer de la manière la plus opportune les secours nécessaires à leurs besoins spirituels. Les Prêtres latins, Nous en avons la confiance, et cette confiance Nous soutient, emploieront tous leurs soins et toutes les ressources de leur sagesse pour donner les secours spirituels à çes

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