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nous, vivent de nos idées, s'inspirent de notre enthousiasme, et nous, frivoles et ingrats, nous passons avec indifférence devant nos monuments, nos statues, nos tableaux, et c'est avec une froideur dédaigneuse que nous écoutons nos chefs-d'œuvre de musique, quand on veut bien les exhumer comme des raretés. Tout cela ne vaut pas l'Italie, l'Allemagne, l'Espagne, s'écrient les prétendus connaisseurs, en oubliant tout sentiment de patriotisme et d'équité. Il semble en vérité que ce soit chose convenue, qu'en France l'art est nul, ou presque nul; que nos artistes, à moins d'être de plats imitateurs des écoles étrangères, n'ont aucun mérite; que nous n'avions pas d'artistes avant qu'il n'en vînt d'Italie, pour transformer nos maçons en architectes, et nos dominotiers ou tailleurs d'histoire, en peintres et en sculpteurs; que l'école française, enfin, pauvre fille de l'Italie, est venue en sous-ordre, et que jamais elle ne pourra s'affranchir du joug de sa mère et de son institutrice. Tels sont les préjugés sous l'empire desquels ont été écrites, par de sévères académiciens, nos annales artistiques; on ne peut les lire sans éprouver un sentiment pénible, et sans rougir de honte pour ceux qui les ont écrites. Mais si, de la lecture de ces froides annales, on passe à l'étude des monuments et des hommes, alors on se trouve à l'aise, alors on entrevoit la vérité, et l'on acquiert la conviction que, de tout temps, la France a eu une école à elle; que cette école fut toujours prospère et brillante, que depuis le dixseptième siècle elle a constamment donné l'impulsion aux autres écoles, et que si quelquefois elle a été s'ins pirer au dehors, elle n'a fait en cela que reprendre son bien là où elle le trouvait.

Mais déjà une réaction s'opère; grâce aux travaux d'une foule infatigable d'archéologues et de savants, on sait maintenant que ce sont des Français qui ont élevé le dôme de Milan, qui ont sculpté les admirables statues de Solesmes, les tombeaux d'Anne de

Bretagne, de Louis XII et de François Ier; qui ont bâti le château de Gaillon et tant d'autres encore; on sait que c'est un Français qui a créé l'école de musique religieuse de Rome; que c'est aussi un Français qui a été faire admirer à l'Italie étonnée l'éclat harmonieux des verrières françaises; que la France avait de grands et d'admirables artistes avant nos guerres en Italie, et que, par conséquent, les maîtres, en petit nombre, amenés alors de ce pays par nos rois, n'ont point eu à les former, comme on l'a dit si longtemps. Il est bien vrai que la France a fait des emprunts à l'Italie, mais ce fut un tort; elle était assez riche des trésors de son propre fonds pour n'avoir rien à envier aux productions de l'étranger. Le seizième siècle, dédaignant et notre vieille littérature, si originale, et notre vieux système artistique, qui avait déjà produit tant de chefs-d'œuvre, se mit à copier l'Espagne et l'Italie. Il fallut Pascal, Bossuet, Corneille, Racine et Boileau, pour recréer notre littérature et nous affranchir de l'imitation étrangère; mais le Poussin et le Puget échouèrent dans leurs tentatives pour rétablir notre école artistique: ils allèrent mourir hors de France, en nous laissant des chefs-d'œuvre qui devaient placer l'école de leur indifférente patrie à la tête des écoles de l'Europe.

Pendant qu'au dix-huitième siècle notre littérature et nos idées conquéraient l'Europe, encore tremblante au souvenir de Louis XIV, toutes les académies des beaux-arts qui s'établissaient en Prusse, en Saxe, en Autriche, en Russie, étaient fondées par des Français; tous les souverains étrangers appelaient auprès d'eux nos artistes, nos architectes. nos sculpteurs et nos peintres ; et ces missionnaires de l'art français, s'il nous est permis d'employer cette expression, couvraient la terre étran gère de leurs chefs-d'œuvre. Quand notre David eut donné à l'école française une nouvelle impulsion, toutes les écoles européennes, la suivant aussitôt, se modifièrent à son exemple. Nul peuple, aujourd'hui, ne possède

un artiste célèbre qui n'ait pas été inspiré par les idées de ce grand peintre. Nous avons cru devoir, avant d'esquisser l'histoire des beaux-arts, protester, au nom du sentiment national, contre des préjugés injurieux pour la France. D'ailleurs, qu'on ne s'y trompe pas, l'art français et l'art italien n'ont pas la même mission, et par suite ils n'ont pas le même caractère. L'art italien est purement esthétique, et il a atteint la perfection du beau idéal; l'école française a moins recherché la perfection esthétique: elle s'est appliquée surtout à donner à l'art un caractère utile, elle l'a employé comme un moyen d'action, et, en le mettant au service de la politique, elle en a fait un moyen puissant de gouvernement et de civilisation.

Avant de commencer l'histoire des beaux-arts en France, nous devons, pour éviter toute confusion, déterminer le sens que nous attachons à cette expression. Suivant l'opinion la plus generale, toutes les productions poétiques du génie de l'homme, la poésie, la musique, la peinture, la sculpture et l'architecture, composent le domaine des beaux-arts; on y ajoute encore quelquefois des arts, libéraux plutôt par leurs rapports avec les beaux-arts que par leur nature même : telles sont la gravure, la mosaïque, la tapisserie historique, etc.; mais, à proprement parler, ce ne sont que des moyens de conservation, des procédés à la fois artistiques et mécaniques pour multiplier et propager les produits des beaux-arts, ou pour en augmenter la durée.

Les révolutions de l'histoire des beaux-arts en France sont tellement liées aux événements politiques, que cette histoire est peut-être plus facile à faire chez nous que partout ailleurs. Fixons-en d'abord le point de départ. Sans remonter à l'art grec et romain, qui cependant a exercé une puissante influence à toutes les époques, dans les provinces du Midi; sans même rechercher les origines de l'art chrétien, nous commencerons l'histoire des

beaux-arts, dans notre patrie, à l'époque de l'établissement des Francs sur le sol de la Gaule. Lorsque les Francs firent la conquête des Gaules, ils y trouvèrent, dans une incroyable confusion, tous les éléments de la société d'un côté, les Romains, avec leur littérature et leur art païens ; de l'autre, les évêques, avec la volonté de créer une société réellement chrétienne, avec un système artistique conçu sous l'influence de la religion du Christ, mais ayant besoin d'un peuple neuf, sans traditions à oublier, et qui, en embrassant le christianisme, pût en vouloir toutes les conséquences. Le baptême de Clovis fut réellement l'époque de l'établissement d'une société nouvelle; en effet, le peuple le plus puissant de la Gaule étant devenu chrétien et catholique, païens et ariens disparurent bientôt, et la civilisation franque parcourut sans interruption toutes les phases de son développement (voir l'article BARBARES).

Il semblerait que, le christianisme une fois établi dans les Gaules, l'art, comme la littérature, dut revêtir immédiatement la forme appropriée à sa nouvelle destination; mais la création d'un symbolisme nouveau est une œuvre longue, et pour laquelle il faut le travail de plusieurs siècles. En l'absence d'un art complétement nouveau, les populations gallo-franques du cinquième siècle continuèrent à se servir de l'art païen, mais en l'appropriant le mieux possible aux exigences du culte catholique. Déjà, à l'article AUSONE, nous avons signalé, dans la littérature de cette époque, le mélange bizarre des idées chrétiennes et des formes païennes; nous retrouvons dans l'art cette même confusion, et sans doute il ne faut y voir qu'un effet du désordre qui régnait dans les idées à cette époque de transition; de l'indécision d'une société quittant une forme pour en revêtir une autre, et cherchant dans l'organisation antique tout ce qui pouvait être sauvé de la ruine, tous les éléments qui pouvaient être encore développés, ou qui devaient servir à faire germer les principes nou

T. II. 19 Livraison. (DICT. ENCYCI.., ETC.).

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veaux que le christianisme a jetés dans le monde (voir TRADITION).

On ne peut le nier, l'art est l'expression la plus exacte des idées et des croyances d'une époque. En effet, ce n'est qu'une méthode pour rendre une idée évidente et la faire comprendre aux masses; ce n'est qu'un moyen d'enseignement qui par l'intermédiaire des sens l'adresse à l'imagination, à l'intelligence et au cœur; et, considéré de ce point de vue, l'art est une chose complexe, dont l'architecture est la partie principale, et les autres arts les éléments accessoires, mais essentiellement constitutifs et inséparables du tout. En par tant de cette idée, si nous divisons l'histoire des beaux-arts d'après les caractères généraux de l'histoire de la civilisation française, nous trouverons trois périodes nettement tranchées : dans la première, l'art est au service des idées religieuses; et cette époque, qui se subdivise elle-même en deux époques, celle de l'art roman et celle de l'art gothique, s'étend jusqu'au seizième siècle. Dans la seconde période, la période monarchique, l'art, de religieux qu'il était, devient en quelque sorte politique, et tend surtout à rehausser la gloire des rois. Cette pé riode s'arrête à la révolution française. Dès ce moment l'art seconde les nouvelles idées d'égalité, de dévouement et de patriotisme: c'est la période de l'art démocratique.

Art religieux.

Dans la première période de l'histoire des beaux-arts, il est incontestable que l'architecture a prévalu; plus qu'à aucune autre époque aussi, est-ce d'après les caractères des monuments d'architecture que l'on peut déterminer avec exactitude les divisions nécessaires à établir dans l'histoire de l'art en France jusqu'au seizième siècle. Il faut encore remarquer que, dans le Midi, le souvenir de Rome et le voisinage des Maures ont donné aux monuments des arts un caractère particulier qui ne leur est point commun avec les monuments

du Nord, où l'on remarque l'empreinte des influences germaniques. Nous reviendrons, au reste, sur le caractère des productions de l'art dans les diffé rentes régions de la France; il suffit ici d'indiquer cette grande séparation du Nord et du Midi, qui se remarque d'ailleurs dans la littérature, dans le droit, et qui s'explique si facilement par la différence des races et des sources de la civilisation.

Art roman. L'art roman est né de l'art romain dégéneré, et combiné avec les idées chrétiennes; il a présenté divers caractères, suivant qu'il a subi plus ou moins l'influence romaine, byzantine ou mauresque. Sa durée a été plus ou moins longue: elle a été moindre dans le Nord, plus considérable dans le Midi et dans les provinces du centre. Toutefois, le treizième siècle peut être regardé comme l'epoque où il fut généralement remplacé par l'art gothique.

Caractères de l'art roman. Du cinquième au dixième siècle, sauf le temps du règne de Charlemagne, l'architecture romane porte l'empreinte de la barbarie la plus complete: les monuments sont petits, bâtis en bois, ornés de sculptures et de peintures grossières. Il y a une évidente analogie entre la civilisation_naissante et cet art encore dans l'enfance; et rien n'est plus propre à convaincre de l'intime connexité qui existe entre les divers produits de l'intelligence, que la comparaison de ces monuments avec les lois des barbares, les formules de Marculfe, les légendes informes et la littérature grossière de ces siècles de barbarie. Les monuments d'architecture qui restent de cette époque sont fort rares; ceux du temps de Charlemagne sont les seuls que l'on rencontre encore assez fréquemment, et qui offrent quelque beauté. Cette courte période de l'histoire de l'art se distingue surtout par l'inspiration et les souvenirs de l'antiquité; et si l'on réfléchit que ce retour à l'antiquité se fait aussi remarquer dans la législation et dans l'administration de Charlemagne, dans les écrits et les mœurs des

hommes qui ont acquis alors quelque célébrité, on s'expliquera cet éclat éphémère des arts, de la littérature, en un mot, de la civilisation de l'empire carlovingien, et l'on comprendra aussi les causes de sa ruine. En effet, après un demi-siècle d'efforts, tout ce mouvement prématuré et malhabile s'arrêta devant le rétablissement des nationalités brisées par la conquête, et les arts retombèrent dans la barbarie.

L'architecture, durant ce court intervalle, produisit plusieurs monuments remarquables, construits d'après les idées byzantines et avec des debris antiques. Charlemagne fit élever, par des architectes venus de Constantinople, les églises et les palais d'Aix-la-Chapelle, Cologne, Ingelheim (*) et Nimegue. Au portail de la basilique de Saint-Denis, on retrouve encore des constructions de ce temps; la crypte, entre autres, date du règne de cet empereur. On peut citer encore, comme bâties à cette époque, l'église de Sainte-Croix, à Saint-Lô (805), l'abbaye de Vezelai, les églises d'Orcival et d'Issoire Saint-Martin d'Angers. Sous les successeurs de Charlemagne, on éleva Notre Dame d'Orbieu, les églises de Vermanton, de Saint-Nectaire, de Nantua, les abbayes de Fontenelle, de Tournus, l'église de Sainte-Bénigne de Dijon; les châteaux de Verberie, où se tinrent plusieurs conciles; de Kierzy, où fut rendu le capitulaire de 877; de Mersen, où les trois fils de Louis le Débonnaire firent la paix; de Vendières, résidence royale; de Tribur, où fut détrôné Charles le Gros; de Péronne, où fut tué Charles le Simple; de Laon, le dernier asile des Carlovingiens; et de Teil, résidence des premiers Capétiens.

La peinture, employée encore comme au temps du paganisme à la décoration intérieure des édifices (**), pro

(*) Voyez la description de ce palais et de son église, note (**).

(") La description suivante, qu'Ermold le Noir, poëte contemporain de Louis le Debonnaire, fait du palais et de l'église

duisit aussi les admirables miniatures qui ornaient les manuscrits ; tels sont

d'Ingelheim, nous donne une idée exacte de ce qu'étaient la peinture et la sculpture à cette époque, qu'on se représente ordinairement comme si barbare.

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Là s'élève, sur cent colonnes, palais superbe: on y admire d'innombrables appartements, des toitures de formes variées, des milliers d'ouvertures, de réduits et de portes, ouvrage de mains d'hommes, maîtres habiles dans leur art. Le temple du Seigneur, construit du marbre le plus précieux, a de grandes portes d'airain et de

plus petites enrichies d'or; de magnifiques

peintures y retracent aux yeux les œuvres de la toute-puissance de Dieu et des actions mémorables des hommes (*). A la gauche, sont représentés d'abord l'homme et la femme nouvellement créés, quand ils habitent le paradis terrestre où Dieu les a placés. Plus loin, le perfide serpent séduit Eve, dont le cœur a jusqu'alors ignoré le mal; elle-même tente à son tour son mari, qui goûte le fruit défendu; et tous deux, à l'arrivée du Seigneur, cachent leur nudité sous la feuille du figuier. On voit ensuite nos premiers pères travailler péniblement la terre, en punition de leur péché; et le frère envieux frapper son frère, non du glaive, mais de sa main cruelle, et faire connaître au monde les premières funérailles. Une suite innombrable de tableaux retraçant, dans leur ordre, tous les faits de l'Ancien Testament, montre encore les eaux répandues sur toute la surface de l'univers, s'élevant sans cesse, et engloutissant enfin toute la race des hommes; l'arche, par un effet de la miséricorde divine, arrachant au trépas un petit nombre de créatures, et le corbeau et la colombe agissant diversement. On a peint aussi les actions d'Abraham et de ses enfants, l'histoire de Joseph et de ses frères, et la conduite de Pharaon; Moïse délivrant le peuple de Dieu du joug de l'Égypte; l'Égyptien périssant dans les flots qu'Israel traverse à pied sec; la Loi donnée par Dieu, écrite sur la double table; l'eau jaillissant du rocher; les cailles tombant du ciel pour servir de nourriture aux Hébreux, et la terre promise depuis si longtemps, recevant ce peuple

(*) Presque tous les tableaux qui suivent se trouvent reproduits en mosaique sur les parois de la cathédrale de Montréal, près Palerme, laquelle fut batie à la fin du douzième siècle par le roi de Sicile Guillaume II dit le Bon.

la Bible et le Psautier de Charles le Chauve, l'Évangéliaire de saint Saturnin, etc.

lorsqu'il a pour chef le brave Josué. Dans ces tableaux revit la troupe nombreuse des prophètes et des rois juifs, et brillent dans tout leur éclat leurs actions les plus célèbres, les exploits de David, les œuvres du puissant Salomon, et ce temple, ouvrage d'un travail vraiment divin. Le côté opposé représente tous les détails de la vie mortelle qu'a menée le Christ sur la terre, quand il y fut envoyé par son père. L'ange descendu des cieux s'approche de l'oreille de Marie, et la salue de ces paroles : « Voici la vierge de Dieu.» Le Christ, connu depuis longtemps aux saints prophètes, naît, et l'enfantDieu est enveloppé de langes. De simples bergers reçoivent les ordres pleins de bonté du maître du tonnerre; et les Mages méritent aussi de voir le Dieu du monde. Hérode furieux craint que le Christ ne le détròne, et fait massacrer les créatures innocentes que leur enfance seule condamne au trépas. Joseph fuit alors en Égypte, ramène ensuite le divin enfant qui grandit, se montre soumis à la loi, et veut être baptisé, lui qui est venu pour racheter de son sang tous les hommes dévoués depuis longtemps à la mort éternelle. Plus loin, après avoir, à la manière des mortels, supporté un long jeune, le Christ triomphe par son art de son fentateur, enseigne au monde les saintes et bienfaisantes doctrines de son père, rend aux infirmes la jouissance de leurs anciennes facultés, rappelle même à la vie les cadavres des morts, enlève au démon ses armes, et le chasse loin de la terre. Enfin on voit ce Dieu, livré par un perfide disciple, et tourmenté par un peuple cruel, vouloir mourir lui-même comme un vil mortel; puis, sortant du tombeau, apparaître au milieu de ses disciples, monter au ciel à la vue de tous, et gouverner le monde. Telles sont les peintures dont les mains exercées d'artistes habiles out orné toute l'enceinte du temple de Dieu. Le palais du monarque, enrichi de sculptures, ne brille pas d'un moindre éclat, et l'art y a retracé les plus célèbres faits des grands hommes. On y voit les combats divers livrés dans les temps de Ninus, une foule d'actes d'une cruauté révoltante, les conquêtes de Cyrus, ce roi exerçant ses fureurs contre un fleuve pour venger la mort de son coursier chéri, et la tête de cet infortuné triomphateur, qui venait d'envahir

La musique, cet art si éminemment civilisateur, recut de Charlemagne les plus grands encouragements; il la faisait enseigner dans les écoles qu'il fondait. Sous son règne, le plain-chant grégorien, déjà altéré, fut rétabli dans

les États d'une femme, ignominieusement plongée dans une outre remplie de sang. Plus loin, se présentent les crimes impies du détestable Phalaris, faisant périr avec un art atroce des malheureux qui font peine å regarder. Pérille, cet ouvrier fameux dans l'art de travailler l'airain et l'or, est auprès de lui le malheureux met sa trop cruelle gloire à fabriquer sur-le-champ pour Phaaris un taureau d'airain, dans lequel le monstre puisse enfermer le corps entier d'un homme, digne objet de pitié; mais le tyran précipite l'ouvrier lui-même dans les entrailles du taureau; et cet ouvrage de l'art donne ainsi la mort à celui qui l'a créé. D'un autre côté, Romulus et Rémus posent les fondements de Rome; et le premier immole son frère à son ambition impie. Annibal, quoique privé d'un de ses yeux, n'en poursuit pas moins le cours de ses funestes guerres. Alexandre soumet par la force des armes l'univers à son empire; et le peuple romain, d'abord si faible, croissant bientôt, étend son joug jusqu'aux pôles du monde. Dans une autre partie du palais, on admire les hauts faits de nos pères, et les œuvres éclatantes d'une piété fidèle dans des temps plus voisins de nous. On y voit Constantin, dépouillant tout amour pour Rome, bâtir luimême, et pour lui, Constantinople. On y a aussi représenté l'heureux Théodose, et sa vie illustrée par tant de belles actions. Là sont encore retracés le premier Charles que la guerre rendit maître des Frisons, et tout ce que son courage a fait de grand. Plus loin, tu brilles, Pepin, remettant les Aquitains sous les lois, et les réunissant à ton empire à la suite d'une heureuse guerre. Lå enfin, le sage empereur Charles déploie ses traits majestueux, et sa tête auguste ceinte du diadème. Les bandes saxonnes osent s'élever contre lui, et tenter le sort des combats; mais il les massacre, les dompte, et les force à courber la tête sous son joug. Ces faits mémorables et d'autres encore décorent ce palais, et charment les yeux de quiconque souhaite les contempler (*).»

(*) Ermoldus Nigellus, Faits et gestes de Louis le Pieux, p. 89 et suivantes de la traduction pabliée par M. Guizot.

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