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[Sénat conservateur.]

de déposer et d'emprisonner des souverains amis, et d'usurper l'obéissance des nations indépen

dantes.

C'est pourquoi, lorsqu'il fut proposé à Sa Majesté d'entrer en négociation pour une paix générale, de concert avec les alliés de Sa Majesté, et de traiter, ou sur la base d'uti possidetis, qui déjà été lé sujet de tant de discussions, ou sur toute autre base compatible avec la justice, l'honneur et l'égalité, Sa Majesté se détermina à répondre à cette sincérité et cette modération apparentes avec une sincérité et une modération réelles de la part de Sa Majesté.

Le roi déclara qu'il était disposé à entrer dans une négociation de cette nature, de concert avec ses alliés, et s'engagea de leur communiquer surle-champ les propositions qui avaient été faites à Sa Majesté. Mais comme Sa Majesté n'était point liée avec l'Espagne par un traité d'alliance en forme, Sa Majesté jugea nécessaire de déclarer que les engagements qu'elle avait contractés à la face de l'univers avec cette nation, étaient considérés par Sa Majesté comme aussi sacrés et aussi obligatoires pour elle que les traités les plus solennels, et d'exprimer la juste persuasion de Sa Majesté, que le gouvernement d'Espagne, agissant au nom de Sa Majesté Catolique Ferdinand VII, était considéré comme partie dans la négociation.

Dans la réponse faite par la France à cette proposition de Sa Majesté, elle écarte l'artifice mal ourdi auquel elle avait eu recours pour remplir l'objet du moment, et montre même, dans les ménagements ordinaires, l'arrogance et l'injustice de ce gouvernement. La nation espagnole tout entière y est désignée sous la dénomination dégradante d'insurgés espagnols, et la demande d'admettre le gouvernement d'Espagne comme partie dans une négociation, rejetée comme inadmissible et insultante.

Avec autant d'étonnement que de douleur, Sa Majesté a reçu de l'empereur de Russie une réponse semblable en substance, quoique moins inconvenante dans le ton et la manière. L'empereur de Russie flétrit du nom d'insurrection les glorieux efforts du peuple espagnol en faveur de son souverain légitime et de l'indépendance de sa patrie, donnant ainsi la sanction de l'autorité de Sa Majesté Impériale à une usurpation qui n'a pas d'exemple dans l'histoire du monde.

Le roi n'eût pas hésité à saisir l'occasion de
consentir à une négociation qui eût pu offrir l'es-
poir ou la perspective d'une paix compatible
avec la justice et l'honneur.

Sa Majesté regrette profondément qu'elle se
soit terminée d'une manière qui doit aggraver et
prolonger les calamités de l'Europe. Mais ni
'honneur de Sa Majesté, ni la générosité de la
nation britannique, ne permettaient à Sa Majesté
de consentir à entrer en négociation, en aban-
donnant un peuple brave et fidèle, qui combat
pour la conservation de tout ce qui est cher à
l'homme, et dont Sa Majesté s'est solennellement
engagée à seconder les efforts dans une cause
dont la justice est si évidemment manifeste.

V.

Démarches du ministère hollandais auprès du
gouvernement anglais, en février 1810.
No 1.

LE ROI A SES MINISTRES.

Messieurs,
Depuis six semaines que je suis auprès de l'EM-

PEREUR mon frère, je me suis constamment oc-
cupé des affaires du royaume. Si j'ai pu effacer
quelques impressions défavorables, ou du moins
les modifier, je dois avouer que je n'ai pas réussi
à concilier dans son esprit l'existence et l'indé-
pendance du royaume avec la réussite et le suc-
cès du système continental, et en particulier de
la France contre l'Angleterre. Je me suis assuré
que la France est fermement décidée à réunir la
Hollande, malgré toutes les considérations, et
qu'elle est convaincue que son indépendance ne
peut plus se prolonger sì la guerre maritime con-
tinue. Dans cette cruelle certitude, il ne nous
reste plus qu'un espoir, c'est celui que la paix
maritime se négocié cela seul peut détourner
le péril imminent qui nous menace; et sans la
réussite de ces négociations, il est certain que
c'en est fait de l'indépendance de la Hollande,
qu'aucun sacrifice ne pourra prévenir. Ainsi l'in-
tention claire et formelle de la France est de tout
sacrifier pour acquérir la Hollande, et augmenter
par là, quelque chose qu'il doive lui en coûter,
les moyens à opposer à l'Angleterre. Sans doute
l'Angleterre aurait tout à craindre d'une pareille
augmentation de côtes et de marine pour la
France. Il est donc possible que leur intérêt
porte les Anglais à éviter un coup qui peut leur
être aussi funeste.

Je vous laisse le soin de développer cette idée avec toute l'énergie qui sera nécessaire pour faire bien sentir au gouvernement anglais l'importance de la démarche qui lui reste à faire. Faites bien valoir auprès de lui tous les arguments et toutes les considérations qui se présenteront à votre esprit. Faites la démarche dont il s'agit de vousmêmes, sans que j'y sois nullement mentionné. Mais il n'y a pas de temps à perdre; envoyez de suite quelqu'un d'un commerce sûr et discret en Angleterre, et envoyez-le-moi de suite dès qu'il sera de retour. Faites-moi savoir l'époque à laquelle il pourra l'être; car nous n'avons pas de temps à perdre: il ne nous reste plus que peu de jours. Deux corps de la Grande-Armée marchent sur le royaume; le maréchal Oudinot vient de partir pour en prendre le commandement. Faites-moi savoir ce que vous aurez fait en conséquence de cette lettre, et quel jour je pourrai avoir la réponse d'Angleterre.

No 2.

Instructions données par le ministère hollandais à M. Labouchère.

L'objet de la commission dont, à la demande des soussignés, M. Pierre-César Labouchère s'est charge, est de faire connaître au gouvernement d'Angleterre qu'en conséquence des renseignements parvenus au ministère hollandais, et qui ont toute l'apparence d'authenticité, le destin de la Hollande, c'est-à-dire le maintien ou la perte de son existence politique, dépend des dispositions qui pourraient avoir lieu de la part du gouvernement anglais pour parvenir à une prompte paix avec la France, ou du moins pour faire un changement réel dans les mesures adoptées par le susdit gouvernement, par rapport au commerce et à la navigation des neutres.

Ledit sieur Labouchère doit par conséquent se rendre, avec toute la promptitude possible, à Londres, où, de la manière et par les voies qu'il trouvera le plus convenables, il cherchera à porter le susdit état de choses à la connaissance du ministère anglais et de toute autre personne qui pourrait servir au but proposé; et il lui sera permis, en cas de besoin, de faire savoir qu'il rem

plit cette mission avec le consentement du gouvernement hollandais, qui, à cause de l'authenticité des susdits renseignements, portant que, sans le susdit changement dans le système de l'Angleterre, la perte de l'indépendance de la Hollande est absolument inévitable, avait cru pouvoir fermer les yeux sur toutes les considérations et difficultés, pour tenter tout ce qui pourrait servir à maintenir l'existence politique du pays.

Il cherchera ensuite à faire envisager au gouvernement anglais combien il serait avantageux à l'Angleterre que la Hollande ne tombât point sous la domination souveraine de l'empire français, et qu'elle restât toujours une puissance indépendante. Il emploiera, pour prouver cette asserlion, tous les arguments que la cause elle-même pourra lui fournir et qui lui sont connus.

S'il trouve au gouvernement anglais cette conviction, ou s'il parvient à la faire naître, il tâchera de l'engager à contribuer au maintien de l'existence politique de ce pays, et en se prêtant promptement à des négociations tendant à parvenir à une paix générale, ou du moins, dans le cas où de pareilles négociations ne pourraient être promptement entamées et déterminées, en donnant des assurances satisfaisantes de ses intentions de faire quelque changement dans le système adopté par les décrets du conseil d'Angleterre du mois de novembre 1807, et dans les mesures qui en ont été les conséquences.

Il doit surtout appuyer sur ce dernier objet, afin, dira-t-il, de s'opposer à l'empressement de la France d'occuper la Hollande. Il ajoutera que, dans le cas où un relâchement ou un changement du susdit système serait adopté, on pourrait se flatter qu'outre la non-occupation de la Hollande, la guerre, tant qu'elle doit encore durer, prendrait enfin de nouveau la tournure et la marche moins désastreuse qu'elle avait il y a trois ans, et qu'il en résulterait un peu plus de probabilité d'un rapprochement, en ce qu'alors on ne verrait plus aucun motif pour l'EMPEREUR DES FRANÇAIS de laisser subsister les décrets de Berlin et de Milan, que SA MAJESTÉ IMPERIALE n'a pris qu'en conséquence des ordres du conseil anglais de novembre 1807.

Si cependant le gouvernement anglais, après avoir prêté l'oreille à ces insinuations, fait des difficultés pour s'expliquer là-dessus définitivement, avant d'être informé positivement des intentions du gouvernement français à cet égard, il doit demander que le gouvernement anglais déclare s'il veut faire dépendre sa résolution d'arriver à des négociations de paix, ou du moins à un changement dans les susdits ordres de novembre 1807, des insinuations susdites et encore particulièrement de l'évacuation de la Hollande par les troupes françaises, et du rétablissement de tout sur le pied où se trouvaient les choses avant la dernière invasion des Anglais en Zélande, en ajoutant telles autres conditions sur lesquel les le susdit gouvernement pourrait croire devoir insister avant de prêter la main aux mesures proposées, afin qu'on ait ainsi des données sûres avant de lui faire connaître les intentions du gouvernement français.

Quelle que soit la réponse du gouvernement anglais à ces représentations, pourvu qu'elle n'exclue pas tout espoir de parvenir au but qu'on se propose, et que les circonstances le lui permettent, il prolongera provisoirement son séjour à Londres, et, en attendant, il enverra aux soussignés, aussi promptement qu'il est possible, et

par la voie la plus sûre, un récit détaillé de toutes ses démarches, des réponses qu'on lui aura faites, et de tout ce qui concerne sa mission.

Cependant, si, après avoir reçu une réponse aux ouvertures par lui faites, il trouvait nécessaire, pour le succès de la cause, de la porter luimême à la connaissance de Sa Majesté le roi de Hollande, il sera libre de le faire; mais dans ce cas-là, quoique Sa Majesté puisse encore se trouver à Paris, il fera son voyage par la Hollande, et en aucune manière il ne se rendra de l'Angleterre directement en France.

Au reste, on lui recommande particulièrement le secret le plus rigoureux sur toute cette affaire, ainsi que la plus grande prudence et discrétion dans l'exécution de la commission à lui confiée. Amsterdam, le 1er février 1810.

Signé VAN DER HEIM, J.-H. MOLLERUS.

N° 3.

Traduction d'une note de communication verbale du marquis de Wellesley à M. Labouchère, le 12 février 1810.

La malheureuse situation de la Hollande a fait naître depuis longtemps dans ce pays-ci des sentiments d'intérêt et de compassion, et ces sentiment s'accroissent naturellement à chaque surcroit des maux auxquels la Hollande est en proie; mais la Hollande ne peut s'attendre que ce pays-ci fasse le sacrifice de ses propres intérêts et de son honneur.

La nature de la communication qui a été reçue de la part de M. Labouchère, permet à peine que l'on fasse la moindre observation touchant une paix générale; elle ne fournit pas même un motif à répéter les sentiments que le gouvernement anglais a si souvent déclarés sur cette matière. On peut néanmoins remarquer que le gouvernement français n'a pas manifesté le moindre symptôme d'une disposition à faire la paix, ou à se départir en aucune manière des prétentions qui jusqu'ici ont rendu inutile la bonne volonté du gouvernement anglais pour terminer la guerre.

La même observation peut s'appliquer à la conduite du gouvernement français dans la guerre qu'il fait au commerce; guerre dans laquelle il a été l'agresseur, et qu'il poursuit avec un acharnement qui ne se dément pas un instant. C'est à tort que, dans la note remise par M. Labouchère, il est dit que les ordres du conseil d'Angleterre ont donné lieu aux décrets français contre la navigation du commerce des neutres : les ordres du conseil n'ont point été le motif, mais la conséquence des décrets français. Les décrets français sont encore en vigueur, nulle mesure n'a été prise pour leur rappel. Il n'est point raisonnable de s'attendre que nous nous relâchions en aucune manière des mesures de défense personnelle que commande notre sûreté, et qui puissent nous mettre à l'abri des attaques de l'ennemi, parce que lui-même souffre par suite des mesures qu'il a prises, et cependant ne témoigne aucune disposition à s'en relâcher.

(Sans signature.)
No 4.

Compte rendu par M. Labouchère.
Londres, le 12 février 1810.

Le sousigné ayant reçu de Leurs Excellences les ministres la mission de se rendre en Angleterre avec des instructions écrites sur la marche à tenir pour communiquer au gouvernement anglais la position de la Hollande, et de lui insinuer les moyens qui paraissaient les plus capables de

détourner le sort qui menaçait le pays, s'est desuite rendu à la Brielle. Arrivé le 2 février, il en est reparti le 3, a mis pied à terre à Yarmouth le 5 au soir, s'est desuite mis en route pour Londres et y est arrivé le 6 au soir. Dès le 7 au matin, il a fait demander audience à M. le marquis de Wellesley, ministre des affaires étrangères, qui la lui a accordée pour le même jour, à cinq heures et demie. Après avoir communiqué à Son Excellence la teneur de ses instructions et discuté à fond la question principale, il a quitté le ministre avec la promesse qu'il mettrait ses communications devant le conseil, et lui ferait connaître le résultat de ces communications.

N'ayant pas reçu d'intimation de Son Excellence jusqu'au 11, le soussigné adressa quelques lignes au ministre pour le solliciter de le mettre à même de donner quelques avis ou indices des idées et des dispositions du gouvernement anglais par une occasion sur son départ. En conséquence, il reçut, le 12 au matin, une invitation pour le même jour à neuf heures du soir, à laquelle il s'est rendu, et il y a reçu une communication non officielle ni signée, dont copie ci-jointe.

Dans cette nouvelle conférence, il a été question du degré de probabilité qu'il pouvait y avoir dans aucun cas, que ces premières démarches, quelle que fût la conduite du ministre britannique, amenassent des idées de rapprochement de la part de la France, et surtout de l'inconvenance qu'il y aurait pour l'Angleterre d'admettre en principe, qu'ayant une fois pris des mesures de représailles, comme le ministre les dénomme, celles-ci dussent de nécessité cesser avec les causes qui les avaient amenées.

Il a paru que le ministère anglais attache infiniment de poids et d'importance à ces mêmes ordres du conseil, qui forment l'objet immédiat de la démarche du gouvernement de Hollande, et que, soit que la France en convienne ou non, le ministère est convaincu qu'il n'y a pas de moyen plus efficace d'énerver les ressources de la France. En effet, ces mesures semblent former la base fondamentale du système sur lequel le ministère actuel fonde tous ses principes et toute sa conduite, et il semblerait que, tant que pourra durer la guerre, ce n'est que d'un changement de ministère que l'on pourrait attendre d'autres mcsures et d'autres vues.

Le ministre a ensuite considéré que tandis que, d'un côté, il était extrêmement incertain si aucune déclaration ou mème concession de sa part amènerait des changements utiles, de l'autre, il serait toujours impossible de compter sur leur stabilité, et que, dans tous les cas, toute marche qui lui paraîtrait incompatible avec son honneur et sa dignité, demeurait proscrite par le fait même, alors qu'elle semblerait se concilier avec ses intérêts.

Le soussigné a tâché de convaincre le ministre que, dans cette circonstance particulière, l'intérêt général bien entendu et la prospérité permanente de tout Etat commerçant, exigeaient impérieusement de ne pas regarder avec indifférence la crise dans laquelle se trouve la Hollande; de coopérer, au contraire, à détourner l'orage. II s'est même retranché à ne demander qu'une déclaration conditionnelle; mais le résultat qu'il transmet, est le seul auquel il ait pu parvenir. Son observation générale et les renseignements qu'il a pu recueillir, conduisent aux conditions suivantes :

Que la question principale de paix ou de guerre

n'occupe qu'imparfaitement l'esprit du public, que l'habitude le réconcilie avec la continuation de la guerre, et que les conséquences, loin de s'en faire ressentir maintenant, sont plutôt favorables à l'intérêt particulier;

Que le système des restrictions commerciales est inhérent au ministère actuel, et, par la même raison, est l'objet de la critique de l'opposition; qu'il est donc vraisemblable que, pour le moment on continuera d'agir, du plus au moins, d'après ces restrictions, tant vis-à-vis de l'Amérique que de toutes les autres puissances;

Que le ministère anglais considère une ferme adhésion à ce système comme le meilleur moyen d'affecter sérieusement les ressources de la France, et de combattre son système d'influence sur le continent, et que toutes tentatives de la part de nations ennemies pour le ramener à d'autres idées, ne produiront probablement qu'un effet contraire;

Que cependant il ne faut pas en inférer une résolution fixe de repousser toute proposition de paix peut-être même qu'il s'imagine que c'est la voie d'amener le plus promptement la France à s'occuper sérieusement de quelques moyens d'opérer un rapprochement; peut-être encore que, si ceci avait lieu, il se montrerait facile sous bien des rapports; mais plutôt, que cela se fonde sur la conviction que, dans ce moment, le gouvernement français n'a aucunes vues sérieuses de paix qui puissent s'accorder avec les principes avoués du gouvernement anglais, et qu'il s'occupe uniquement à poursuivre ses dispositions quant à l'Espagne et au Portugal, lesquelles dispositions seront toujours l'obstacle le plus sérieux au succès de toutes les négociations qui pourraient s'entamer;

Que dans l'ensemble des considérations du jour, celles qui concernent la Hollande n'entrent que comme extrêmement secondaires, et que l'idée de l'impossibilité qu'aucune convention relative à ce pays pût jamais, sous l'influence de la France, présenter aucune chance de sûreté pour l'Angleterre, à moins d'être liée à une question générale, émousse tout l'intérêt que d'ailleurs ce pays par lui-même ne manquerait pas d'inspirer, au point même de ne pas donner accès aux motifs extrêmement importants qui devraient déterminer à considérer cette question séparément, et sous un point de vue immédiat.

Le soussigné n'apercevant dans cet état de choses nulle chance de succès dans les démarches ultérieures que le gouvernement de Hollande pourrait être tenté d'essayer, à moins que ces démarches ne se trouvent spécialement appuyées par la France, et qu'ainsi, quant à ce pays, son sort se trouve entièrement lié à la question de la paix générale, il croit, conformément à la teneur de ses instructions, ne pas devoir prolonger inutilement son séjour dans ce pays.

En conséquence, il se propose de se remettre en mer sous peu de jours; et dès son arrivée, il aura l'honneur de se présenter chez Leurs Excellences les ministres, afin de leur rendre verbalement un compte ultérieur et détaillé de tout ce qui a rapport à la mission dont ils l'ont chargé, et qu'il a tâché de remplir avec tout le zèle et la sollicitude que l'importance du sujet ne pouvait manquer de lui inspirer. Il prie, en attendant, Leurs Excellences d'agréer l'assurance de son respect.

Signe LABOUCHÈRE.

Après la lecture du rapport du ministre et des

pièces dont il était accompagné, MM. les comtes Regnaud de Saint-Jean-d'Angély et Caffarelli ont présenté les projets de sénatus-consulte suivants :

Projet de senatus-consultes organique.

Art. 1er. La Hollande, les villes anséatiques, le Lauembourg, et les pays situés entre la mer du Nord, et un ligne tirée depuis le confluent de la Lippe dans le Rhi jusqu'à Halteren de Halteren à l'Ems, au-dessus de Telget; de l'Ems au confluent de la Verra dans le Weser, et de Holzenau, sur le Weser, à l'Elbe, au-dessus du confluent de la Heckenitz, feront partie intégrante de l'empire français,

Art. 2. Lesdits pays formeront dix départements,

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Bouches-de-l'Elbe.

Issel-Supérieur. Bouches-du-Weser.

Art. 6. Il y aura pour les départements du Zuiderzee, des Bouches-de-la-Meuse, de l'Issel-Supérieur, des Bouches-de-l'Issel, de la Frise et de l'Ems-Occidental, une cour impériale dont le chef-lieu sera La Haye.

Art. 7. Il y aura pour les départements de l'EmsOriental, de l'Ems-Supérieur, des Bouches-du-Weser e: des Bouches-de-l'Elbe, une cour impériale dont le cheflieu sera Hambourg.

Art. 8. Il sera établi une sénatorerie dans les départements formant le ressort de la cour impériale de La Haye, et une autre dans les départements formant le ressort de la cour impériale de Hambourg.

Art. 9. Les villes d'Amsterdam, Rotterdam, Hambourg, Brème et Lubeck sont comprises dans les bonnes villes dont les maires sont présents au serment de l'empereur à son avénement.

Art. 10. La jonction de la mer Baltique aura lieu par un canal, qui, partant de celui de Hambourg à Lubeck, communiquera de l'Elbe au Weser, du Weser à l'Ems, et de l'Ems au Rhin.

Art. 11. Le présent sénatus-consulte organique sera transmis par un message à S. M. l'EMPEREUR ET ROI.

Projet de sénatus-consulte organique. Art. 1er. L'apanage du roi Louis, en sa qualité de prince français, est fixé à un revenu annuel de deux millions, et constitué de la manière suivante, savoir: 1o La forêt de Montmorency, les bois de Chantilly,

T. XI.

d'Ermenonville, de l'Isle-Adam, de Coye, de Pont-Armé et du Lys, jusqu'à la concurrence d'un revenu annuel de 500,000 francs;

20 Des domaines existants dans le département des Bouches-du-Rhin, jusqu'à concurrence d'un revenu net annnel de 500,000 francs;

3o Une somme annuelle d'un million sur les fonds généraux du trésor public.

Art. 2. Après le décès du prince apanagiste, et attendu la disposition faite par SA MAJESTE IMPERIALE ET ROYALE du grand-duché de Berg en faveur de l'aîné du fils du prince apanagiste, l'apanage, à l'exception de la partie consistant en un revenu annuel d'un million sur le trésor public, laquelle sera et demeurera éteinte, passera au second fils dudit prince, et sera transmissible la descendance, masculine, naturelle et légitime, jusqu'à extinction de ladite descendance, conformément à ce qui est établi par la section II du titre IV de l'acte des constitutions, du 19 janvier 1810.

Art. 3. L'apanage, constitué par le présent sénatu 3consulte, sera assujetti à toutes les charges et conditions établies par l'acte des constitutions ci-dessus cité.

Art. 4. Le présent sénatus-consulte sera transmis, par un message à SA MAJESTÉ IMPÉRIALE ET ROYALE.

Projet de sénatus-consulte organique.

Art. 1er. Le Valais est réuni au territoire de l'empire français.

Art. 2. I formera un département sous le nom de département du Simplon.

Art. 3. Le département du Simplon aura un député au Corps législatif.

Ce député sera nommé en 1811. Il sera renouvelé dans l'année de la 40 série, à laquelle le département du Simplon appartiendra.

Art. 4. Le départemept du Simplon sera du ressort, de la cour impériale de Lyon.

Art. 5. Le présent sénatus-consulte organique sera transmis par un message à SA MAJESTÉ IMPERIALE ET ROYALE.

Ces différents projets de sénatus-consultes sont renvoyés à des commissions spéciales.

M. le conseiller d'Etat comte Caffarelli, présente l'exposé de motifs suivant : MONSEIGNEUR,

SÉNATEURS,

Nous sommes chargés par SA MAJESTÉ de vous présenter un proiet de sénatus-consulte, dans lequel vous vous plairez à reconnaître le caractère d'utilité publique, de force et de prévoyance que portent avec elles les vastes conceptions de SA MAJESTÉ.

L'empire jouit d'une paix profonde; les peuples qui l'entourent, intimement convaincus que la garantie la plus sûre de leur repos se trouvera constamment dans leur alliance avec le peuple français, resserrent tous les jours les liens qui les unissent à lui, et semblent ne faire qu'une même et grande famille par leurs sentiments envers l'auguste chef de la France.

Et si les fureurs de la guerre désolent encore les extrémités de l'Europe, si une portion égarée d'une nation voisine, agitée par les factions, méconnaît encore ses véritables intérêts, vous savez, Messieurs, qu'il faut en chercher la cause dans les perfides machinations de ce gouvernement ennemi de l'Europe, qui, repoussé et menacé de toutes parts, n'a plus qu'un coin de terre où il lui soit permis de souffler le feu de la discorde et des dissensions civiles.

L'Angleterre bloque les ports de l'Europe; elle promène sur les mers ses navires, frappés partout de réprobation; elle cherche des débouchés pour les produits de ses manufactures, entassés dans les magasins de ses habitants consternés. Son système criminel est reconnu; ses trames sont déjouées; les nations savent apprécier en

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fin, et son alliance fatale et ses services désastreux.

Au milieu du calme que SA MAJESTÉ a rétabli dans l'empire et dans l'Europe, elle s'occupe de l'amélioration de sa marine, et son génie lui suggère les moyens efficaces de pouvoir opposer à ses ennemis, sur les mers, des armées nombreuses, animées, comme ses vieilles et formidables phalanges, du désir de conquérir enfin la paix universelle. Les volontés de SA MAJESTÉ seront toujours celles du destin; car la puissance et le génie ne veulent jamais en vain.

Déjà, Messieurs, à la voix de SA MAJESTÉ, des établissements maritimes sont créés : les côtes, dont l'étendue s'est augmentée, sont partout défendues par le courage et fortifiées par l'art : les arsenaux sont approvisionnés de matières nécessaires des vaisseaux s'élèvent dans nos ports, et nos flottes pourront un jour se mesurer avec les flottes ennemies et régner sur les mers.

Mais pour armer ces vaisseaux, pour les conduire, SA MAJESTÉ a senti le besoin qu'elle avait de marins. Ceux qui sont maintenant sur les escadres ne suffiraient pas à la grandeur de ses projets il faut des moyens nouveaux pour des vues nouvelles.

Le commerce et la pêche, qui fournissaient autrefois des marins pour l'État, sont aujourd'hui trop peu considérables, et une nouvelle institution doit s'élever incessamment pour subvenir aux besoins de la patrie.

A la voix de SA MAJESTÉ il va sortir des départements maritimes une foule de jeunes gens qui, étant à la fois, marins et soldats, se montreront les dignes émules de ceux qui ont élevé si haut la gloire des armes de l'empire.

Nous allons développer devant vous, Messieurs, les bases de cette institution, dont SA MAJESTÉ attend les résultats les plus avantageux.

L'EMPEREUR a reconnu que le mode de conscription pouvait seul procurer à la marine les ressources en hommes dont elle a besoin; mais il a senti que ce mode ne pouvait s'étendre à la généralité du territoire, car les affections des hommes sont en général le fruit des habitudes. Ainsi, le citoyen des villes de l'intérieur ne voit jamais la mer ni les marins; étranger à l'élément, à ce genre de vie, il ne s'en fait qu'une idée monstrueuse; il préfère le service de terre pour lequel les innombrables victoires de nos armées ont déjà excité son premier enthousiasme.

L'habitant des côtes, au contraire, entend, dès ses premiers ans, parler de marine; autour de lui, tout lui en présente l'image; encore enfant, il joue avec cet élément sur lequel il bravera un jour les orages et les combats. Né sur les côtes voisines de celles de son ennemi, il sent la nécessité de les défendre, parce qu'il a à protéger sa famille, sa propriété. Il a plus que tout autre le sentiment de la résistance aux agressions; il est à la fois homme et citoyen.

C'est donc dans les départements maritimes que doit être fait le recrutement de la marine; c'est sur la ligne des côtes que doit être fait le choix des hommes destinés à servir sur mer.

Mais le métier de la mer est sujet à tant de vicissitudes, de dangers, qu'il faut le commencer dès l'âge le plus tendre, où les organes sont dociles, le corps flexible, et où les habitudes se contractent sans peine. Il faut que le marin s'accoutume de bonne heure au péril, et apprenne à le braver en se jouant.

Les jeunes marins seront donc choisis dans l'âge de 13 à 16 ans plus jeunes, l'Etat jouirait

trop tard de leurs services; plus âgés, la constitution physique de l'homme ne saurait se plier que très-difficilement à tous les travaux imposés aux marins.

Ici, nous devons vous faire connaître une des belles pensées de l'EMPEREUR, celle d'initier dès à présent ces jeunes conscrits à la carrière qu'ils sont destinés à parcourir.

SA MAJESTÉ a créé des équipages de vaisseau et des équipages de flottille. Les premiers, composés de marins exercés, monteront les vaisseaux; pour les autres, l'EMPEREUR arme dans ses ports, des divisions de petits bâtiments commandés par des officiers instruits, et sur lesquels on exercera aux manœuvres, au timonage, au maniement des armes, les jeunes marins que le sénatus-consulte que nous vous présentons appelle à l'honneur de servir la patrie.

Sans doute, Messieurs, l'expérience qu'ils acquerront dans la navigation des côtes et sur les rades ne sera pas aussi grande que celle que donneraient des expéditions lointaines; mais ils se familiariseront par là avec leur état, ils en verront et vaincront les difficultés; ils y prendront goût, par cela même qu'il leur présentera des obstacles qu'on leur fera surmonter, et ils seront dans peu d'années à même de servir d'une manière utile sur les vaisseaux de SA MAJESTÉ.

En même temps que SA MAJESTÉ projetait les moyens de se donner des marins, elle avait arrêté les mesures propres à former les officiers qui doivent les commander. Tout se lie dans ses conceptions leur ensemble porte toujours l'empreinte du génie qui préside à la prospérité de l'empire.

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